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Histoire des familles Bezard Lemaignen et Aubert

4 décembre 2018

Saga Bezard-Lemaignen 1/4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Histoire des Familles

 

Aubert et Lemaignen

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

L'abondance des anciens titres de propriété, contrats de mariage, inventaires, partages, relevés de comptes, carnets de notes, lettres, et d'innombrables autres documents de toute nature, remontant pour certains au XVIe siècle, qui existaient dans les greniers et armoires de la propriété de PERIGNY, m'ont incité, dès mon mariage, à essayer de retrouver l'histoire et la généalogie de la famille LEMAIGNEN et de celle de la famille MESCHIN.

Ces documents se présentaient dans le plus grand désordre, les uns dans des cartons, d'autres dans des armoires, et beaucoup en vrac, dans des sacs de toile ou des morceaux de draps noués aux quatre coins.

Leur dépouillement et leur classement m'ont occupé pendant de nombreuses soirées, durant plusieurs années.

Après avoir classé tous les documents concernant telle ou telle branche de la famille, j'en retrouvais de nouveaux mélangés à ceux d'une autre branche.

Bien mieux, une vingtaine d'années après le début de mon travail de recherche et de classement, je trouvais fortuitement dans un coin de grenier, un carton avec la mention "Sans intérêt". Or, il contenait plus de deux cents anciens titres et pièces de procédure concernant la fermette des Saulettes, commune de Danzé, qui appartenait à la famille BRETON et qui fut vendue vers 1830 par Léon LEMAIGNEN.

L'analyse de ces anciens titres m'a permis de découvrir et de reconstituer d'une façon très précise, non seulement la généalogie, mais la passionnante histoire de cette famille BRETON, depuis le début du XVIIe siècle, dont une descendante épousa François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, et qui était totalement inconnue de Fernand LEMAIGNEN.

Pour écrire l'histoire des familles LEMAIGNEN et MESCHIN, j'ai eu la chance de pouvoir bénéficier des souvenirs de Fernand LEMAIGNEN et surtout de ceux de ma belle mère, que j'ai abondamment mise à contribution, notamment en ce qui concerne la famille MESCHIN.

En outre, l'étude généalogique établie par Monsieur Louis LEMAIGNEN m'a été d'un grand secours pour préciser mes propres recherches qui ne concernent que la branche des LEMAIGNEN de PERIGNY, et ne remontent pas au-delà du XVIIIe siècle.

Je n'ai pas eu la même chance en ce qui concerne les familles de mes ancêtres paternels et maternels, AUBERT et MORIN, mes parents ayant détruit à peu près tous les rares documents qu'ils pouvaient posséder.

Le long travail de dépouillement et de lecture, pas toujours facile, de ces titres de propriété, pièces de procédure, mémoire et autres pièces, m'a permis de retracer l'histoire des ancêtres de mes enfants.

Je souhaite qu'ils puissent la parcourir et prendre ainsi connaissance de la vie et des activités de leurs nombreux anciens grands-parents et aussi, dans la mesure du possible, du caractère, des sentiments et du cadre de vie de ceux dont ils sont issus.

Ils y découvriront sans doute, comme je l'ai fait moi-même, le sentiment qu'ils se rattachent à une longue ascendance familiale qui ne peut pas ne pas les avoir marqués.

J'ai d'ailleurs établi au début de cet ouvrage, un tableau généalogique d'ensemble, mais ne comportant, à chaque génération, que le père et la mère, à l'exclusion des collatéraux ; ils y trouveront les noms des 195 ascendants que j'ai pu relever, dont ils ont hérité directement des gènes physiques ou spirituels. Ils pourraient réciter la litanie de leurs prénoms pour se rattacher à leur mémoire.

S'ils en ont le loisir et la curiosité, ils pourront se reporter aux documents que j'ai analysés, pour rédiger cette histoire de leur famille. Leur classement correspond à chacun des chapitres. Ils y trouveront des pièces intéressantes ou curieuses, tels que de très beaux anciens parchemins, des partages, des inventaires très détaillés, comme on savait en faire autrefois, énumérant notamment le mobilier qui garnissait les habitations de ces ancêtres, des contrats de mariage signés en présence de toute la parenté, des mémoires, notes et comptes, des lettres dont certaines du XVIIIe siècle, et de nombreux autres documents dont la lecture est passionnante.

J'ai classé le fruit de mes recherches en plusieurs grands chapitres correspondant à chaque famille et à chaque branche de ces familles.

J'en donne ci-après le schéma qui permettra d'avoir une vue d'ensemble des familles qui font l'objet de cet ouvrage et qui en constitue le plan. L'étude de chaque famille est précédée du tableau généalogique le concernant.

 

 

 

 

 

 

 

Jacques AUBERT

PLAN DE L'OUVRAGE

 

 

I - FAMILLES MORIN et AUBERT

a) Famille MORIN - TAVERNIER, ascendants maternels de Jacques AUBERT

(page 6 à 13).

b) Famille AUBERT, ascendants paternels de Jacques AUBERT

(page 14 à 30).

 

II - FAMILLES AUCHER et PORCHER

dont une descendante, Emilie Marguerite PORCHER a épousé le 03 Février 1812, Pierre Samuel BEZARD. De ce mariage est issue Emilie Marie Brigitte BEZARD qui a épousé le 29 Juillet 1833, Léon LEMAIGNEN

(page 31à 54).

 

III - FAMILLE BEZARD et Léon LEMAIGNEN

(page 55 à 104).

 

IV - FAMILLES DEMEZIL - TIRONNEAU - VERITE et COUSIN

dont une des descendantes, Louise DEMEZIL a épousé le 23 Septembre 1862 Ernest LEMAIGNEN, fils de Léon LEMAIGNEN

(page 105 à 116).

 

V - FAMILLES LANCELOT - BRILLARD - DENYAU - FOUQUET - PITARD -

MELOT - PEZIERE - DERAS - VALERY - BRETON et FERRON

dont une descendante, Madeleine Eugénie FERRON a épousé le 06 Février 1807 François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, père de Léon LEMAIGNEN

(page 117 à 217).

 

VI - FAMILLE LEMAIGNEN

(Pierre LEMAIGNEN et ses descendants, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, Léon LEMAIGNEN, Ernest LEMAIGNEN, Fernand LEMAIGNEN).

(Madame LEMAIGNEN née MESCHIN et Mademoiselle Marie-Thérèse LEMAIGNEN)

(page 218 à 281).

 

VII - FAMILLES CHIVERT - MESCHIN et MEUNIER

(page 282 à 327)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Histoire des Familles

 

Morin et Aubert

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille

 

Morin-Tavernier

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

FAMILLE MORIN

 

 

La famille MORIN était originaire de Chabris dans l'Indre. C'était une famille de petits cultivateurs et de vignerons qui, au début du XIXe siècle, s'établit à Vineuil, près de Blois, dont est issu Henri MORIN, père de Madame Rachel Marie Georgette MORIN qui épousa Edmond Eugène Camille AUBERT.

 

I - Claude MORIN et Solange FOURNEAU

Le premier document que nous possédons sur cette famille est le contrat de mariage reçu par Maître JOSIAS, notaire à Villefranche sur Cher (Loir et Cher) le 12 Novembre 1835, de Claude MORIN, vigneron, demeurant à Varennes (Indres) près de Chabris, alors âgé de 29 ans, fils du défunt François MORIN et de Marguerite ROBIN, vigneronne, demeurant à Varennes, avec Solange FOURNEAU, domestique chez Monsieur AUGER, demeurant à Romorantin, alors âgée de 21 ans, fille de Pierre FOURNEAU, vigneron, et de défunte Solange LAMBERT, demeurant à la Chapelle-Montmartin (Loir et Cher).

Claude MORIN apporte ses droits mobiliers non liquidés dans la succession de son père, une créance de 105 Frs sur sa mère et un coffre.

Solange FOURNEAU apporte ses droits dans la succession de sa mère, résultant de l'inventaire établi en 1821, et un coffre.

Les futurs époux n'avaient donc aucune fortune, ce qui est confirmé par l'article 9 du contrat de mariage ainsi rédigé :

"Aussitôt après la célébration du mariage, les futurs époux demeureront chez la veuve MORIN à laquelle ils louent les prix de leurs travaux et soins, et ils s'obligent de lui obéir et de la servir fidèlement et d'avoir pour elle les soins et égards que les enfants doivent à une mère."

"De son côté, la veuve MORIN, pour les récompenser, s'oblige de loger, nourrir, chauffer, éclairer et blanchir les futurs époux, de leur fournir le linge et vêtements selon leur faculté et état, de les leur raccommoder, de payer le médecin qui les traitera en cas de maladie, le tout tant envers eux qu'envers les enfants qui pourront naître dudit futur mariage, pendant la durée du présent bail."

"Et en outre, de leur donner chaque année dudit bail 15 ares 19 centiares de gros grains et autant de menu. Le tout sera choisi par le futur époux sur les héritages de ladite veuve MORIN à l'époque de la moisson".

"Il est expliqué que si la veuve MORIN fume les terres, que ledit futur époux choisira, ce dernier sera tenu de laisser chez sa dite mère, les pailles et chaumes de la récolte qu'il aura. En cas contraire, il en fera comme du grain qui lui est ci-dessus donné".

"La durée du présent bail est fixée à un an".

Ce contrat de mariage est signé en présence de :

- Etienne MORIN, frère du futur époux, et de sa mère.

- Louis SOIDE, son oncle.

- du père de la future épouse, demeurant au Grand Village, Commune de la Chapelle- Montmartin.

- Anne FOURNEAU, sa soeur.

- Pierre FOURNEAU, son frère.

- Anna FOURNEAU, sa tante.

- et Jacques ROUPILLARD, son cousin.

Seul le futur époux a signé, aucun des autres ne sachant le faire.

De ce mariage naissent deux enfants :

1°) à Chabris en 1836, Claude Désiré MORIN.

2°) également à Chabris, le 03 Mai 1845, Henri MORIN.

 

Le 26 Février 1837, il est procédé devant Me JOSIAS, notaire à Villefranche sur Cher, au partage des immeubles dépendant de la succession de Solange LAMBERT, décédée vers 1820/1821, épouse de Pierre FOURNEAU, entre ses enfants, savoir :

- Solange FOURNEAU, épouse de Claude MORIN, cultivateur, qui demeurait toujours à Varennes chez Madame Veuve MORIN.

- Anne FOURNEAU, autrefois domestique et alors sans profession, célibataire, chez son père au Grand Village, Commune de la Chapelle-Montmartin.

- Pierre FOURNEAU fils, vigneron, demeurant à Grand Village.

Le deuxième lot, échu à Madame MORIN-FOURNEAU comprend :

- La moitié de 1 hectare 36 ares 75 centiares de pré au Prés Masson, commune de Chabris.

- 15 ares 18 centiares de terre au même lieu.

- 45 ares 58 centiares de terres aux Marais de la Grue de Chabris.

- 60 ares 78 centiares de terre au Chêne Habert, même commune.

- 15 ares 19 centiares de terre aux Vignes de Jéaux, même commune.

- 4 planches de vignes au Chaillou, commune de la Chapelle-Montmartin.

- 6 planches de vignes dans le Grand Clos, même commune.

- 3 planches de vignes au même lieu.

 

Madame Marguerite ROBIN, veuve de François MORIN, décède à Beauregard, commune de Chabris, le 08 Janvier 1852, laissant ses quatres enfants :

Claude MORIN, alors gardien à Beauregard, commune de Chabris, Madeleine MORIN, Etienne MORIN et Catherine MORIN.

On ne sait rien de la descendance de ces enfants MORIN, sauf de Claude qui n'était plus cultivateur et qui était devenu garde au château de Beauregard, commune de Chabris où sont nés ses enfants, Claude Désiré MORIN et Henri MORIN. Il vint habiter ensuite avec sa femme Solange FOURNEAU, à Vineuil, près de Blois où il décéda le 6 Mai 1883.

Il résulte de l'inventaire dressé après son décès par Maître DELAGRANGE, notaire à Blois, le 02 Novembre 1883, qu'il possédait un petit mobilier et que les immeubles propres aux deux époux ou dépendant de leur communauté, avaient été vendus pendant leur mariage (3 ou 4 hectares de terres et vignes sur les communes de Varennes et de Parpeçay et une maison à Varennes).

Madame veuve MORIN-FOURNEAU est elle-même décédée à Vineuil, chez son fils Claude Désiré MORIN, le 02 Septembre 1890.

Il résulte de l'inventaire dressé par Me DELAGRANGE, le 17 Février 1891 que sa succession ne comprenait, outre le mobilier existant au décès de son mari, que divers soldes de prix de vente des immeubles vendus par les époux MORIN-FOURNEAU, et quelques obligations de chemins de fer français.

Les époux MORIN-FOURNEAU sont enterrés au cimetière de Vineuil (concession du 04 Mars 1907).

 

 

II - Claude Désiré MORIN-BARDET

 

Le fils ainé des époux MORIN-FOURNEAU, Claude Désiré, né à Chabris en 1836 épousa Georgette BARDET (décédée à Blois le 22 Février 1907) fille d'Adolphe BARDET, pharmacien à Valençay où il est décédé le 29 Juillet 1876.

Il était négociant et demeurait à la Vallée, commune de Vineuil où il décéda le 16 Mai 1898.

Il eut deux enfants :

1°) Marthe MORIN, née à Blois en 1872, qui épousa Eugène FORGET et demeura à Paris. Trois enfant sont nés de ce mariage

- Suzanne FORGET, à Blois en 1897, décédée célibataire.

- André FORGET, à Paris en 1903, décédé célibataire.

- Christian FORGET, à Paris en 1909, marié et décédé, sans enfant.

2°) Albert MORIN, né à Vineuil en 1880, décédé à Paris en 1935, époux de Maria BRISSET, dont il eut un fils, Georges MORIN.

Aucune relation familiale n'a jamais été entretenue entre ce dernier et son grand oncle Henri MORIN.

 

 

III - Henri MORIN-TAVERNIER

 

Le deuxième fils des époux MORIN-FOURNEAU, Henri MORIN est né à Chabris, le 03 Mai 1845.

Très jeune il quitta Chabris, où il était un simple pâtre. Très intelligent et travailleur, il reçu un rudiment d'instruction grâce au dévouement de l'instituteur de son village. Il vint exercer la profession d'épicier à l'épicerie-chocolaterie POULAIN à Blois, 27 rue Denis Papin.

Alors qu'il était encore employé de commerce dans cette épicerie, il épousa à 37 ans Caroline Emilie (dite Céline) TAVERNIER, à Avaray (contrat de mariage Me LEROY, notaire à MER, du 1er Octobre 1882).

Il avait alors acquis une certaine fortune, puisqu'il apportait en mariage, outre divers meubles et une somme de 3.000 Frs, 64 obligations de 500 Frs des chemins de fer français et autres obligations. Ses parents lui constituaient une dot de 1.000 Frs.

La future épouse apportait une dot de 30.000 Frs.

Peu après son mariage, Henri MORIN exploite pour son compte personnel, avec sa femme, l'épicerie-chocolaterie, 27 rue Denis Papin à Blois.

Son commerce devient vite très prospère et entre 1890 et 1900, il crée une entreprise d'importation de sucre. En 1900, il est qualifié "courtier de commerce". Il associe à cette affaire son frère, Claude Désiré et son neveu Albert MORIN. Mais, il dut bientôt s'en séparer en raison de l'incompétence de ce dernier.

En 1894, date de l'installation du téléphone à Blois, il est un des 25 premiers abonnés "MORIN FRERES épiciers en gros, 27 rue Denis Papin" (La Nouvelle République du 18 Août 1976).

Il se constitua un important portefeuille de valeurs de bourse (principalement en fonds Russes !) et acquit une maison à Blois, rue Denis Papin (qu'il revendit dans des conditions désastreuses peu après la guerre de 1914-1918 pour sa valeur d'avant la guerre) et le 12 Novembre 1891, la maison nouvellement construite, 9 rue des Lices à Blois où il vint habiter après avoir vendu son fonds de commerce d'épicerie.

En 1930, lors de son décès, son portefeuille représentait encore une valeur de 764 352 Frs.

Il cessa son commerce d'importation de sucre vers 1910 et vécut alors confortablement de ses rentes à une époque où les revenus des valeurs de bourse permettaient une vie aisée.

Une des occupations consistait à découper avec de grands ciseaux les coupons de ses valeurs et à enliasser dans son coffre les billets de banque qu'il retirait de la Banque de France dont il était un client assidu. Il passait ses hivers à partir de 1910 ou 1912, sur la Côte d'Azur à Menton où il louait une villa. Il y reçut sa fille et ses petits enfants pendant l'hiver 1917 et son gendre vint l'y rejoindre au cours d'une permission. Il cessa d'y aller vers 1926 ou 1927, en raison de son âge.

Il s'était formé lui-même, n'ayant reçu qu'une instruction primaire élémentaire. Il avait acquis par son travail une certaine culture développée par son sens des affaires.

Il avait crée une association de JARDINS OUVRIERS qui avait pour but de mettre à la disposition des ouvriers de Blois des jardins potagers situés près de la rue qui porte aujourd'hui le nom de RUE HENRI MORIN.

Il avait une très belle écriture.

C'était un homme très digne, austère, de grande taille. Il saluait d'un large coup de chapeau à la façon des mousquetaires gascons, les personnes qu'il rencontrait. Il était d'une grande piété et d'une religion quelque peu janséniste. Il lisait LA CROIX et quelques journaux de bourse. Sa famille tremblait un peu devant lui et, en tout cas, n'osait jamais contester ses opinions.

Il était assez bricoleur et s'occupait lui-même de son jardin ; pendant un certain temps il éleva des abeilles. Il était d'un ordre méticuleux et quelque peu avare.

Il était servi par une domestique, Marie AZOUARD, qu'il eut à son service jusqu'à son décès.

Dans les dernières années de sa vie, il eut une névrite faciale qui le faisait énormément souffrir.

Il décéda dans sa maison, 9 rue des Lices à Blois, le 23 Mars 1930 à 85 ans, d'une congestion pulmonaire consécutive à une chute qu'il fit dans l'escalier où il se brisa le col du fémur. Il est enterré au cimetière de Blois, dans un caveau qu'il avait fait édifier de son vivant (concession du 17 Juillet 1923).

Il a laissé le souvenir d'un grand vieillard austère, probe, distingué et intransigeant, une peu d'un PATER-FAMILIAS égaré au XXe siècle.

Sa femme continua à habiter quelque temps rue des Lices. Mais en raison de son état maladif et de ses infirmités, elle prit pension à la Communauté des Soeurs de l'Espérance, rue Bernier à Blois, proche de sa maison. Elle était devenue impotente, ne se levait plus de son lit et s'éteignit le 13 Avril 1939 à 86 ans.

C'était une femme de petite taille, peu cultivée, d'un caractère terne et aigri, n'ayant jamais eu aucune occupation domestique ou autre depuis qu'elle avait cessé de seconder son mari dans son commerce.

Après son décès, sa fille unique, Rachel Marie Georgette MORIN, née à Blois le 07 Juin 1887 qui avait épousé Edmond Eugène Camille AUBERT (contrat de mariage du 21 Juin 1910) revendit tout le mobilier garnissant la maison de la rue des Lices (P.V Me THELOT, commissaire-priseur à Blois des 13, 14 et 15 Février 1938) à l'exception de quelques rares meubles transportés à Vendôme. Au cours du déménagement de cette maison, Madame AUBERT-MORIN se débarrassa de tous les papiers, registres, livres de comptes et autres documents ayant appartenu à ses parents, ce qui explique qu'il soit très difficile d'écrire leur vie.

La maison ainsi vidée, fut louée à Mr Germain MADELIN, Conservateur des Eaux et Forêts (bail du 23 Avril 1938) qui l'acheta en Novembre 1962.

FAMILLE TAVERNIER

 

 

Caroline Emelie TAVERNIER, épouse d'Henri MORIN était née à Avaray le 08 Octobre 1853 du mariage de François TAVERNIER et de Marie Marguerite THEVOT.

Le seul document qui nous soit parvenu sur cette famille est un inventaire des 25 et 26 Janvier 1900 après le décès de Monsieur et Madame TAVERNIER-THEVOT. La généalogie de cette famille a pu être complétée à l'aide de renseignements oraux fournis par Madame AUBERT-MORIN, puis à l'aide de documents émanant de Ferdinand CHARON, son cousin.

Voir la longue étude sur la famille TAVERNIER communiquée par Ferdinand CHARON (dossier MORIN-TAVERNIER).

 

A - Famille THEVOT

Marie Marguerite THEVOT est née en 1833 sans doute à Avaray (Loir et Cher) du mariage de François THEVOT et Marguerite ROUSSEAU, née à Avaray vers 1792, décédée à Avaray en 1885.

Elle avait un frère, Adrien THEVOT époux ... ? qui eut lui même deux enfants :

 

- Joseph THEVOT, né à Avaray vers 1880, cultivateur, ayant eu lui-même un enfant.

- Eugène THEVOT, né à Avaray vers 1875, décédé célibataire.

 

C'était une famille de cultivateur.

 

B - Famille TAVERNIER

François TAVERNIER est né à Avaray le 29 Décembre 1823. Il était vigneron. Il est décédé à Avaray le 31 Juillet 1899.

Il était le fils de Jean TAVERNIER, né le 09 Frimaire an IV, vigneron au Tertre d'Avaray, décédé à Avaray le 02 Octobre 1865, et de Anne GIRARD, née à Avaray le 25 Floréal an IV, décédée le 31 Octobre 1872. Le contrat de mariage des époux TAVERNIER-GIRARD a été reçu le 24 Juillet 1817 par Me Michel ROGER, notaire à Avaray.

Jean TAVERNIER était le fils de Jean TAVERNIER, vigneron au Tertre d'Avaray, né le 19 Décembre 1751, décédé le 28 Fructidor an VIII et de Catherine GIVAIS.

Le père de ce Jean TAVERNIER-GIRARD était Denis TAVERNIER, vigneron, né vers 1720 et de Marie SAGET.

Du mariage des époux TAVERNIER-THEVOT célébré à Avaray le 13 Mai 1848 est née une seule fille : Caroline Emelie TAVERNIER.

Les époux TAVERNIER-THEVOT, de leur vivant propriétaires à Avaray, y sont décédés : la femme le 13 Septembre 1895 et le mari le 31 Juillet 1899.

Il résulte de l'inventaire dressé après leurs décès, les 25 et 26 Janvier 1900:

- que Madame TAVERNIER-THEVOT possédait en propre, de nombreuses petites parcelles de terre à Avaray et à Lestiou et une maison à Avaray.

Parmi ces immeubles, 19 ares 15 centiares de terre et pré au Bois d'Ingrand, commune d'Avaray, lui avaient été constitués en dot, et une autre parcelle lui provenait d'une donation-partage consentie par sa mère, alors veuve, le 29 Août 1861.

- que Monsieur TAVERNIER-THEVOT possédait en propre de très nombreuses parcelles de terre sur les communes d'Avaray et de Lestiou et une maison à Avaray.

Parmi ces parcelles, l'une avait été acquise à titre de licitation dans la succession de Marie Anne GIRARD, sa tante, veuve de Jean Pierre LHOMME, le 18 Décembre 1858 et une autre, d'un partage anticipé par ses père et mère, Jean TAVERNIER et Anne GIRARD, du 23 Avril 1865.

- qu'il dépendait de la communauté, outre le mobilier meublant, diverses créances hypothécaires (27.000 Frs) et plusieurs parcelles de terre sur la commune d'Avaray.

Tous ces immeubles était soit exploités par les époux TAVERNIER-THEVOT, soit loués. Ils ont tous été vendus, après leur décès, par Monsieur et Madame MORIN-TAVERNIER, de 1899 à 1920.

 

C - Descendants des époux TAVERNIER-ROUCHEUX

François TAVERNIER-THEVOT avait un frère :

Jean TAVERNIER, né à Avaray le 02 Mars 1819, charron puis maréchal ferrant à Avaray, décédé à Avaray le 06 Février 1901, qui avait épousé (contrat de mariage Me ROSSIGNOL, notaire à Avaray du 24 Octobre 1840) Julienne ROUCHEUX née au Tertre d'Avaray, le 1er Avril 1818, couturière, décédée à Avaray le 21 Décembre 1899.

Les époux TAVERNIER-ROUCHEUX eurent cinq enfants :

1°) Philéas TAVERNIER, né à Avaray le 09 Mai 1842, maréchal ferrant qui épousa en 1875 Marthe MAROTTE, décédé le 29 Décembre 1907 à Avaray, laissant une fille Camille TAVERNIER née le 12 Octobre 1875, décédée célibataire le 26 Mai 1890.

2°) Antonie Adélaïde TAVERNIER, née à Avaray le 10 Novembre 1843, décédée le 18 Novembre 1913, épouse de Monsieur Ferdinand CHARON, instituteur, né à la Madeleine Villefrouin, le 10 Avril 1841, décédé à Courbouzon le 22 Juin 1898.

3°) Flamine TAVERNIER, née à Avaray le 15 Janvier 1850, décédée à Paris le 03 Janvier 1933, qui épousa le 22 Novembre 1871 Henri BLANCHARD, Clerc de Notaire à Paris, décédé le 16 Septembre 1925.

4°) Eugène TAVERNIER, né à Avaray le 11 Février 1857, décédé à Avaray le 26 Novembre 1928, charron forgeron à Vineuil, qui épousa le 31 Août 1881 Blanche DUBREUIL, décédée à Vineuil en 1907.

5°) Jules TAVERNIER, né à Avaray le 02 Avril 1860, expatrié en Argentine, décédé sans doute célibataire, après 1901.

 

Les époux CHARON-TAVERNIER eurent trois enfants :

1°) Ferdinand CHARON (1867-1889) célibataire.

2°) Joseph CHARON, né le 09 Mars 1876, décédé le 15 Juillet 1962, notaire à Lamotte Beuvron jusqu'en 1938, époux de Marie JAUNEAU (08 Septembre 1874 - 31 Décembre 1962).

3°) André CHARON décédé en bas âge.

 

Joseph CHARON, notaire à Lamotte Beuvron, fut délégué de la Cour d'Appel d'Orléans à l'Assemblée Nationale des Notaires de France de 1933 à 1936. Il eut pour successeur dans cette fonction, son cousin par alliance, Maître Edmond AUBERT, notaire à Vendôme.

Il eut lui-même un fils :

Ferdinand CHARON, Docteur en Droit, Clerc de Notaire, puis Directeur de Banque.

Ferdinand CHARON fut Commissaire de District des Scouts de France. Il demeurait en 1985 à Meung sur Loire (45130) 1, rue Jehan de Meung. Décédé le 21 Novembre 1993.

Il avait épousé en premières noces, le 27 Octobre 1945, Madeleine DEBRONNE (15 Janvier 1915 - 23 Septembre 1952) dont il eut quatre enfants :

1°) Marie Anne CHARON, née le 07 Juin 1947, épouse de Hubert DUJARDIN.

Les époux DUJARDIN-CHARON eurent cinq enfants :

Bertrand, Florence, François, Benoît et Anne-Véronique.

2°) François CHARON, né le 01 Novembre 1948, époux de Martine GUITTON, qui eurent trois enfants :

Axelle, Igor et Clovis.

3°) Jean-Paul CHARON, né le 28 Juin 1950, époux de Sophie PINON, ayant deux enfants :

Matthieu et Victor.

4°) Odile CHARON, née et décédée le 23 Septembre 1952 en même temps que sa mère.

Ferdinand CHARON épousa en secondes noces, le 28 Août 1954, Yvonne TOURNADE, née le 15 Octobre 1923 dont il eut trois enfants :

1°) Bruno CHARON, né le 19 Décembre 1955.

2°) Alain CHARON, né le 07 Janvier 1957.

3°) Laurent CHARON, né le 14 Janvier 1958.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille Aubert

 

 

Aubert- Peltier

et

Aubert-Hilbert

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Maître Edmond Eugène Camille AUBERT, notaire à Vendôme, époux de Madame Rachel Marie Georgette MORIN, était le fils de Me Eugène Louis François AUBERT, notaire à Herbault et de Aimée Marie Françoise PELTIER, sa première épouse.

 

I - Maître Eugène AUBERT

Familles Aubert et Peltier

 

Maître Eugène Louis François AUBERT est né à Doucelles (Sarthe) le 12 Mars 1859 du mariage de Louis Julien AUBERT, charron et de Julie Françoise LAURENT, demeurant à Doucelles, où ils sont décédés : le mari, le 18 Juillet 1861 et la femme le 27 Avril 1878.

Nous n'avons aucun document sur les époux AUBERT-LAURENT ni sur leurs ancêtres. Les familles AUBERT et LAURENT étaient certainement établies à Doucelles (entre Beaumont sur Sarthe et Mamers) depuis le début du XIXe siècle au moins.

Madame AUBERT-LAURENT avait une soeur, Aimée Victoire LAURENT, née en 1824, décédée à Doucelles le 16 Décembre 1902 qui épousa Pierre Julien MERCIER, maréchal ferrant à Doucelles.

Ils eurent deux enfants :

1°) Constant MERCIER.

2°) Armand Victor Lucien MERCIER, officier de gendarmerie à Saint Germain en Laye, puis à Besançon, décédé après 1912, époux de Berthe PONCIN. De ce mariage naquirent deux enfants, dont une fille qui épousa M.......... GARNEAU et fut sage-femme à Orléans.

Les rapports entre Eugène AUBERT et la famille MERCIER semblent avoir été toujours assez tendus.

En effet, en 1876, Madame veuve AUBERT-LAURENT qui s'était établie épicière-mercière à Doucelles, après la mort de son mari, avait confié à Monsieur et Madame MERCIER-LAURENT, sa soeur et son beau frère, une somme de 700 Frs destinée au notaire de Segrée (Sarthe). Mais, ils gardèrent cette somme et Eugène AUBERT dut la leur faire reconnaître par une reconnaissance de dette qu'ils signèrent le 15 Mai 1878, c'est à dire, peu après le décès de Madame AUBERT-LAURENT.

Leur fils, Armand MERCIER époux PONCIN, emprunta à son oncle Eugène AUBERT, diverses sommes à plusieurs reprises, notamment en 1912 et il ne semble pas que ces prêts aient jamais été remboursés, ce qui entraîna la rupture de toute relation avec Edmond AUBERT, après la mort de son père.

De la succession des époux AUBERT-LAURENT dépendait une maison à Doucelles, où Madame veuve AUBERT exerçait son commerce d'épicerie-mercerie. Cette maison fut vendue par Eugène AUBERT, le 03 Septembre 1905, moyennant 3.000 Frs. Le 10 Février 1906, une cousine d'Eugène AUBERT, Marie GAUTIER, lui demande de lui faire cadeau de la devanture de cette maison que son père vient d'acheter. Elle veut se servir de cette devanture comme châssis pour ses fleurs et ses melons. On se demande pourquoi elle avait besoin de l'autorisation d'Eugène AUBERT, puisque c'est son père qui avait acheté la maison.

Eugène AUBERT avait perdu son père à l'âge de 2 ans et sa mère à l'âge de 19 ans. Il eu pour tuteur son oncle Pierre MERCIER.

Aussitôt après ses études primaires, il fut clerc de notaire à Evaillé (Sarthe) puis au Lude chez Me CAHOREAU.

Il fait son service militaire au 124e de ligne, comme engagé conditionnel d'un an, en qualité de sergent et reçoit le 08 Novembre 1879 un certificat d'instruction militaire avec le note "très bien".

Dans ce certificat, il est ainsi décrit : "cheveux et sourcils châtain clair, yeux bleus, front haut, nez bien fait, bouche petite, menton rond, visage plein, taille 1 mètre 67".

Le 21 juillet 1886 il est convoqué devant une commission de réforme, on ignore pour quelle raison.

Le 28 Juin 1880, il épouse à Evaillé Aimée Marie Françoise PELTIER, née à Ecorpain le 23 Février 1859 du mariage de François Désiré PELTIER et Madeleine Aimée RENVOISE, demeurant à Ecorpain.

Le contrat de mariage est reçu par Me LELIEVRE, notaire à Evaillé le 11 Juin 1880, en présence de Pierre MERCIER, propriétaire à Doucelles, oncle du futur époux, alors âgé de 43 ans et de François PELTIER, boulanger à Saint-Antoine de Rochefort (Sarthe) oncle de la future épouse.

Le futur époux apportait ses droits mobiliers et immobiliers dans la succession de Louis BOURILLON son grand oncle, décédé à Piacé (Sarthe) en Janvier 1880 et la maison de Doucelles dépendant des successions de ses parents.

La futur épouse apportait ses droits indivis dans la succession de son père, Monsieur François Désiré PELTIER, décédé à Ecorpain le 09 Juin 1868, époux de Madame Madeleine Aimée RENVOISE, dont elle était héritière pour moitié et la somme de 5.000 Frs lui revenant dans les prix de vente par elle et son frère de divers immeubles dépendant de la succession de son père, vendus le 19 Mai 1880.

 

Famille Peltier

 

Monsieur François Désiré PELTIER et Madame Madeleine Aimée RENVOISE s'étaient mariés le 24 Septembre 1853. On ignore leur profession, sans doute étaient ils cultivateurs. Ils demeuraient à la Ferme des Boues, commune d'Ecorpain, du moins du vivant du mari.

Il dépendait de leur communauté : une maison à Evaillé où était exploité l'Hôtel de la Croix Blanche, une partie de la ferme des Boues et de celle de la Cibotière et une maison à Evaillé.

La ferme "des Boues d'en haut" commune d'Ecorpain et d'Evaillé (34 hectares 62 ares 10 centiares y compris les acquisitions de communauté) était propre à Monsieur PELTIER-RENVOISE en vertu d'un partage de la succession de ses parents reçu par Me GENDROT à Evaillé, le 1er Février 1845 et la ferme de la Cibotière, sur les mêmes communes (18 hectares 44 ares 80 centiares y compris les acquisitions de communauté) était propre à Madame PELTIER-RENVOISE en vertu du partage de la succession de ses parents, reçu par ledit Me GENDROT, le 14 Janvier 1856.

François Désiré PELTIER était le fils de Julien PELTIER, cultivateur, décédé à Evaillé le 18 Novembre 1844 et de Françoise MARCHAND décédée à Evaillé le 11 Novembre 1833.

Il avait 6 frères et soeurs :

1°) Jean PELTIER, cultivateur au Gué Joubert, commune d'Evaillé.

2°) Pierre PELTIER, menuisier à Evaillé.

3°) Monique PELTIER, épouse de Justin VILLOTEAU, cultivateur à Bouloire.

4°) Anne PELTIER, épouse de Jean FOUGERAY, cultivateur à Ecorpain.

5°) Julien PELTIER, cultivateur à Evaillé.

6°) Françoise PELTIER, épouse de Louis GUILLOCHON, demeurant à la Pelterie, commune de Saint-Osmane (Sarthe).

Madeleine Aimée RENVOISE née en 1832, sans doute à Evaillé, était la fille de François RENVOISE qui demeurait à Evaillé et de Madeleine PELTIER (elle-même soeur de Julien PELTIER-MARCHAND susnommé et de Louis René Jean PELTIER décédé à Evaillé avant 1865, époux de Julienne FONTAINE décédée à Evaillé le 29 Décembre 1865).

Elle avait un frère, Auguste RENVOISE qui vivait en 1885 (ses descendants vivaient encore à Evaillé en 1948) et peut être un autre frère ou soeur.

Elle est décédée à Herbault chez sa fille, Madame Eugénie AUBERT le 23 Décembre 1884. Sa succession comprenait les prorata de fermages des fermes des Boues et de la Cibotière, la ferme de la Cibotière, la moitié indivise avec ses enfants des terres de communauté annexées aux deux fermes, la moitié indivise de l'Hôtel de la Croix Blanche à Evaillé et de l'autre maison à Evaillé.

Elle laissait deux enfants :

1°) Sa fille, épouse de Me Eugène AUBERT.

2°) Auguste François PELTIER, boulanger d'abord à Saint-Antoine de Rochefort (Sarthe) puis à la Ferté Bernard, décédé vers 1906, qui épousa à la Ferté Bernard (contrat de mariage du 29 Avril 1870) Valérie Almire Alexandrine BELLANGER dont il eut un fils Henri Valérie PELTIER, Officier de Saint-Cyr, promotion d'In Salah, décédé Capitaine d'Infanterie à Filain (Aisne) le 14 Juin 1917, célibataire, Chevalier de la Légion d'Honneur. C'était un bon vivant, très lié avec son cousin Edmond AUBERT avec qui il fit ses études à Paris où il logeait chez sa mère devenue veuve. Edmond AUBERT racontait que lorsqu'il rentrait, souvent tard, au domicile de sa mère, celle-ci le lui reprochait et il répondait : 'Il n'est pas tard, il n'est que la demie".

 

Madame veuve PELTIER-BELLANGER décéda dans son appartement à Paris dans le 16e arrondissement vers 1925, laissant pour légataire sa nièce, l'une des trois filles de sa soeur Armandine. Edmond AUBERT fut très déçu de ne pas en hériter, car il avait toujours entretenu d'excellentes relations avec elle et elle possédait une honnête fortune.

Elle ne laisse à son neveu Edmond qu'un grand portrait de son cousin en uniforme d'Officier, ses décorations et ses armes.

Avec son indemnité de mère d'Officier mort à la guerre, elle fit ériger à son fils un somptueux monument au cimetière de la Ferté Bernard, sur lequel sont gravées les inscriptions ci-après :

 

"Capitaine et Adjudant Major PELTIER mort devant FILAIN 1879-1917, décédé le 14 Juin 1917 "Proposition pour la Légion d'Honneur : a commandé avec entrain la 1ère Compagnie engagée au combat de Vauclère, et, blessé deux fois, n'a quitté son poste qu'à la deuxième blessure.

147e Régiment d'Infanterie - 07 Septembre 1914, Général REMOND"

"Citation à l'Ordre de l'armé : étant au 120e bataillon de chasseurs, s'est emparé d'une position formidablement organisée et, malgré des pertes considérables s'y est maintenu pendant 8 jours, supportant un bombardement d'une intensité exceptionnelle en repoussant toutes les attaques de l'ennemi. Le Général commandant le VIIe armée de MAUDHUY"

"Au Capitaine PELTIER qui a pris part aux attaques de SCHRATZMAENNELE - LINCEKOPT Juillet 1915".

"Citation à l'ordre de l'armé : est cité à l'ordre de l'armée le Capitaine PELTIER Henri du 120e bataillon de chasseurs ; chargé de l'attaque d'une tranchée allemande, s'en est emparée par surprise ; y a fait une centaine de prisonniers et en a ensuite assurée l'occupation ; a maintenu sa compagnie sur le terrain conquis sous un feu de flanc de mitrailleuses et s'y est retranché".

Septembre 1915 - Général de MAUDHUY.

Citation à l'ordre de la division.

"PELTIER Henri Auguste, Capitaine Adjudant Major au 359e régiment d'Infanterie. Officier très brave et très courageux. S'est dépensé sans compter durant la période du 14 au 30 Juin 1916 et notamment les 16, 17 et 29 Juin pour maintenir la liaison entre les unités engagées et guider les colonnes se déplaçant sous les plus violents bombardements.

18 Juillet 1916 - Général GARBIT"

"Inscription au tableau spécial de la Légion d'Honneur : le Ministre de la guerre, article unique : est inscrit au tableau spécial de la Légion d'Honneur à compter du 25 Décembre 1916, le militaire dont le nom suit: pour Chevalier Henri Auguste Valéry PELTIER, Capitaine d'active au 359e R.I. Officier actif et très brave , a toujours conduit sa compagnie au feu avec un entrain et un sang froid irréprochable.

Déjà été cité -

Extrait du J.O. du 01.01.1917 - Généraux MERIE et LYAUTEY".

"Citation à l'ordre de l'armée : est cité à l'ordre de l'armée PELTIER Auguste Henri Valéry, matricule 584, Capitaine du 359e R.I. Officier d'élite, brave et dévoué. Après avoir donné toute la valeur de son héroïsme, est tombé glorieusement pour la France le 14 Juin 1917 à FILAIN.

Paris le 07 Juin 1920 - Ordre CD 8006, signé LEFOL-CAVEZ".

ACHAT DE L'ETUDE D'HERBAULT

DECES DE MADAME AUBERT-PELTIER

 

Après son mariage, Eugène AUBERT continua à habiter au Lude où il était clerc de notaire chez Me CAHOREAU. C'est au Lude que naquit son fils Edmond Eugène Camille le 22 Septembre 1881.

Le 25 Avril 1884, Me RICHEBOURG, successeur de Me GENDROT, notaire à Evaillé, devenu négociateur en cession d'offices ministériels, lui proposa l'Etude de Me DUC, notaire à Herbault qui doit acheter l'Etude de son beau frère, notaire à Mer, qui est plus importante. Le prix demandé est de 80.000 Frs pour un produit annuel de 12.000 Frs.

Le 09 Mai 1884, Me GENDROT le remercie de l'avoir informé qu'il allait acheter l'Etude d'Herbault et l'en félicite.

Aussitôt, Eugène AUBERT demande à Me GOHIER, notaire de la famille PELTIER à la Ferté Bernard de lui procurer un prêt hypothécaire de 40.000 Frs garanti sur les immeubles de sa femme, indivis avec son beau frère. Ce prêt est réalisé par plusieurs obligations signées en Juillet 1884, alors qu'Eugène AUBERT résidait déjà à Herbault. Me GOHIER lui adresse les fonds le 31 Juillet.

Le 30 Juillet 1884, son ancien patron du Lude, Me CAHOREAU lui envoie 3.000 Frs, remboursement d'une créance au profit de Madame PELTIER, sa belle mère. Il est heureux d'apprendre que l'état des produits de l'Etude d'Herbault dépasse les prévisions. Au Lude, les affaires sont très calmes et Me CAHOREAU regrette d'avoir embauché un premier clerc pour le remplacer. La mère et la soeur de Me CAHOREAU se rappellent à son bon souvenir et envoient un gros baiser au petit Edmond.

Le 30 juin 1884 est signé l'acte de cession de l'Office d'Herbault, moyennant le prix de 78.000 Frs payable à concurrence de 40.000 Frs dans les 8 jours de la prestation de serment et les 38.000 Frs de surplus en 10 ans avec intérêts à 5 %. Mais, la chancellerie fait réduire le prix de 3.000 Frs et Eugène AUBERT prête serment le 05 Novembre 1884.

Madame PELTIER-RENVOISE, sa belle mère, décède peu après à Herbault le 23 Décembre 1884.

Le 18 Décembre 1889, par acte de Me SALMON, notaire à Evaillé, Madame AUBERT-PELTIER vend à titre de licitation à Auguste PELTIER son frère, ses droits étant de moitié dans les immeubles indivis entre eux (fermes des Boues, de la Cibotière et maisons à Evaillé) et Eugène AUBERT rembourse aussitôt les prêts hypothécaires qui lui avaient été faits pour acheter son Etude.

Madame AUBERT-PELTIER décède à Herbault le 30 Janvier 1901, laissant pour seul héritier son fils Edmond, alors étudiant en droit à Paris. Elle avait 42 ans.

La communauté AUBERT-PELTIER comprenait alors :

La valeur de l'Etude (75.000 Frs) argent comptant et créances (15.000 Frs) et le mobilier. Mais il était encore dû 28.000 Frs à Monsieur DUC sur le prix de l'Etude et divers prêts pour 26.800 Frs.

L'actif de communauté était pratiquement absorbé par les reprises de Madame AUBERT et par le passif.

Aussi, Edmond AUBERT renonça t'il à cette communauté, du chef de sa mère par acte au greffe du 06 Avril 1901. De son côté, Me Eugène AUBERT renonça par acte de Me HALE, notaire à Landes le Gaulois du 22 Juillet 1901 au bénéfice de toute donation consentie par sa femme et à son droit d'usufruit.

Edmond AUBERT, alors mineur, avait été émancipé le 23 Mars 1901 et avait pour curateur ad hoc, son oncle Auguste François PELTIER, boulanger à la Ferté Bernard.

Puis par acte de Me HALE du 07 Novembre 1902, il est procédé à la liquidation des reprises de la succession de Madame AUBERT-PELTIER. L'actif de la communauté (dont l'Etude d'Herbault) revient entièrement à Monsieur Eugène AUBERT qui se trouve débiteur envers son fils, du montant net des reprises liquidées à 32.720 Frs qui lui seront payées le 14 Avril 1910 en vue d'acquisition de l'Etude de Vendôme.

DEUXIEME MARIAGE avec Madame Marguerite HILBET

 

FAMILLE HILBERT

 

Décès de Madame AUBERT-HILBERT

 

 

Le 08 Novembre 1902, Eugène AUBERT écrit à un de ses amis, Monsieur Albert LEROUX :

"Mon cher Albert - Je suis confus de toute la peine que tu donnes pour moi. Je ne sais vraiment comment vous remercier tous deux, Madame LEROUX et toi, de toute votre dévouement et toute la sympathie que vous me témoignez.

Notre amitié, déjà vieille de 22 ans..... nous étions jeunes et insouciants alors, loin de se relâcher avec le temps, c'est au contraire fortifiée....

Les renseignements que tu me communiques me suffisent amplement......

Voici de mon côté les renseignements que tu pourras communiquer à Mademoiselle H......".

"Quand je suis arrivé ici à la fin de 1884, je me suis créé avec mon Etude mon installation et le roulement de fonds nécessaire pour marcher, une dette totale de plus de 100.000 Frs et j'avais pour y faire face le grand désire d'arriver et de me faire une place au soleil, et c'est tout !

Inutile de te dire que je n'ai pas toujours dormi tranquille et que j'ai longtemps tiré le diable par la queue.

Enfin, à force de travail et d'économies j'ai fini par prendre le dessus et aujourd'hui, Dieu merci ! ma situation, toute modeste qu'elle est, est aussi claire et satisfaisante que possible.

Je possède aujourd'hui :

1°) Mon Etude d'un produit annuel moyen depuis 10 ans de 16.000 Frs d'une valeur d'environ 100.000 Frs.

2°) Mobilier, argenterie, cautionnement, créances et argent comptant pour 18.000 Frs.

3°) Maison à Doucelles 2.500 Frs.

4°) Assurance sur la vie 10.000 Frs.

"Je dois le solde du prix de mon Etude 28.000 Frs et les droits d'Edmond dans la succession de sa mère fixés dans un acte de liquidation par Me HALE, notaire à Landes le 07 courant, à 32.000 Frs (c'était la veille de cette lettre).......

Si après cela, le projet que tu as formé à quelques chances de réussir, je te prierai de vouloir bien proposer à Mademoiselle H..... un rendez-vous où elle voudra, à Paris par exemple, pour que vous puissiez Madame LEROUX et toi vous présenter l'un à l'autre, recueillir et nous communiquer nos impressions réciproques.

Je ne sais si je me trompe mais il me semble que nous pourrons nous comprendre.

Tu trouveras sous ce pli, ma tête et celle d'Edmond fabriquées dans nos ateliers d'Herbault ; un artiste aurait certainement fait disparaître quelques rides ; mais c'eut été mentir - A quoi bon - A la grâce de Dieu !

Edmond est affecté au 113e de ligne en garnison à Blois. Il partira vendredi prochain. Il ne restera là que jusqu'au 1er Décembre, époque à laquelle le peloton des dispensés sera formé et envoyé à Orléans...

P.S......... Quel est l'âge exact de Mademoiselle H..... ? Est-elle musicienne?"

 

Ces renseignements ont dû convenir à Mademoiselle H.... car le 10 Février 1903 était célébré à Sierck (Lorraine) le mariage de "le notaire Eugène Louis François AUBERT..... de confession catholique..... demeurant à Herbault (France) avec Marguerite Adrienne HILBERT, sans état connu, de confession catholique, née à Cocheren, arrondissement de Forbach, le 1er Mars 1865, demeurant à Sierck, fille de l'instituteur en retraite Michel Jean-Baptiste HILBERT, demeurant à Sierck et de son épouse Marie née NEIS, décédée. Ont été appelés comme témoins, le bijoutier Albert LEROUX, légitimé par Monsieur Michel HILBERT âgé de 45 ans, demeurant au Mans (France) et le négociant Théodore Julien HILBERT, âgé de 26 ans, demeurant à Sierck" (acte de mariage en allemand avec traduction en français).

Nous apprenons ainsi qu'Albert LEROUX était un enfant légitimé de Michel HILBERT (pourquoi ne portait-il pas le nom de son père ?) et qu'il était bijoutier au Mans. Eugène AUBERT et son fils Edmond son toujours restés en relations amicales avec lui et son fils également bijoutier au Mans.

Le contrat de mariage avait été reçu par Me DUC, notaire à Mer, prédécesseur à Herbault de Me Eugène AUBERT, le 20 Janvier 1903. Mademoiselle HILBERT demeurait chez son père à Sierck, 11 Grande Rue. Sa mère était décédée à Sierck le 18 Octobre 1898. Elle apportait en mariage du mobilier et diverses créances (dont une de 20.000 Frs contre son frère Théodore HILBERT) pour un montant de 50.000 Frs.

Le 24 Octobre 1904, naissait à Herbault leur fils, Roger Marie Michel AUBERT.

Michel Jean-Baptiste HILBERT décédait à Sierck le 30 Août 1908, laissant sept enfants :

1°) Marguerite Adrienne, épouse d'Eugène AUBERT.

2°) Marie Honorine, épouse d'Eugène ROSER, représentant de commerce, demeurant à Montigny les Metz, tous deux décédés avant 1948, laissant neuf enfants (voir tableau généalogique).

3°) Marie Catherine, épouse de Bernard BOUR, négociant, demeurant à Thionville, rue du Luxembourg, ayant eu un fils Henri, né à Thionville le 05 Juillet 1900, époux de Marie-Louise ROSERT, décédés, sans enfant.

4°) Louis Michel, employé, demeurant à Paris, rue des 3 Bornes, n°45, époux de Marie CHARBONNAUD, décédés sans enfant avant 1948.

5°) Appoline Marguerite, négociante, demeurant à Sierck, 11 Grande Rue, épouse de Félix DESNOYERS, décédée à Versailles en 1946 sans enfant.

6°) Jean Joseph, négociant, demeurant à Metzerviesse, ayant eu deux enfants: Paul HILBERT et une fille qui épousa Guillaume RISSE et qui eurent eux-mêmes des enfants.

7°) Julien Théodore, négociant en tissus, 11 Grande Rue à Sierck, né en 1878, décédé à Sierck le 06 Juin 1947, époux d'Henriette Marguerite MUNIER, ayant eu quatre enfants, prédécédés célibataires

Les 1er et 20 Décembre 1908, Me Eugène AUBERT établit le partage sous seing privé des valeurs mobiliers dépendant des successions de Monsieur et Madame HILBERT-NEIS. Madame AUBERT recevait pour sa part 512,83 Frs et elle devait encaisser ensuite celle de 2.290,35 Frs pour sa part dans le prix de vente des immeubles.

Madame AUBERT-HILBERT décéda brusquement (d'une crise cardiaque ?) dans sa salle de bain à Herbault, le 26 Février 1913 à l'âge de 47 ans.

Le 22 Juillet 1913; Me DELAGRANGE, notaire à Blois dresse l'inventaire après son décès, en présence de Félix DESNOYERS, rentier à Versailles, oncle et subrogé tuteur du mineur Roger AUBERT. La description très détaillée du mobilier comprend notamment de nombreux bijoux de Madame AUBERT, une voiture automobile Clément Bayard 10 CV qui ne sera vendue par Me Edmond AUBERT qu'en 1927, 1500 bouteilles de vin blanc et rouge bouchées et plusieurs litres d'eau de vie et liqueur.

Me Eugène AUBERT avait alors fini de payer les 28.000 Frs restant dus sur le prix de son Etude.

Il dépendait de la communauté : diverses valeurs de bourse, notamment en emprunts Russe, Chinois, Autrichien, Suédois et Egyptien, s'élevant à 27.862 Frs.

Il était dû à la communauté divers prêts par Monsieur Armand MERCIER, chef d'escadron de gendarmerie à Besançon, neveux de Me Eugène AUBERT et des créances sur clients pour frais d'actes pour un montant de 17.571 Frs.

Madame AUBERT-HILBERT a laissé le souvenir d'une femme très distinguée, excellente cuisinière et très estimée par son beau-fils, Me Edmond AUBERT.

TROISIEME MARIAGE avec Madame MARIAU

 

Maître Eugène AUBERT, malgré le chagrin qu'il éprouva de la mort brutale de sa deuxième épouse, ne tarda pas à se remarier.

Il épousa en Avril 1914 à Orléans, Marie Louise Adolphine MARIAU, veuve de Monsieur Anatole Jules CHABIN.

Le contrat de mariage était reçu par Me DELAGRANGE, notaire à Blois, le 10 Avril 1914.

Madame AUBERT-MARIAU possédait une maison à Rochefort qui fut vendue au cours du mariage pour rembourser un prêt hypothécaire à elle, fait avant son remariage, pour le même montant que le prix de vente.

Nous ne savons rien de plus sur cette troisième épouse de Me Eugène AUBERT, car son fils la lui-même peu connu, ayant été mobilisé peu après ce mariage.

 

 

DECES DE MAITRE EUGENE AUBERT

 

Maître Eugène AUBERT décéda à Vendôme, chez son fils (dans la chambre donnant sur le jardin où il couchait avec sa troisième épouse et son petit fils, Jacques AUBERT alors âgé de 7 ans et qui assistait ainsi à la mort de son grand-père le 20 Octobre 1918 du congestion cérébrale, en quelques instants, à l'âge de 59 ans. Il est enterré au cimetière d'Herbault.

Par son testament olographe du 10 Août 1914, déposé au rang des minutes de Me LESTANG, notaire à Blois, le 02 Novembre 1918, il léguait à sa troisième épouse une rente viagère de 3.000 Frs et désignait Edmond AUBERT comme tuteur de son deuxième fils Roger.

Des difficultés s'élevèrent aussitôt entre Edmond AUBERT et la troisième épouse qui renonça par acte du Greffe du 10 Novembre 1920 à la communauté ayant existé entre elle et Me Eugène AUBERT, à son legs de 3.000 Frs et à tous droits d'usufruit. Conformément à l'article 917 du Code Civil , ce legs de rente viagère fut transformé en l'abandon de la quotité disponible étant d'un quart qui fut liquidée à 17.578 Frs. Cette somme fut payée à la troisième épouse en divers versements dont le dernier du 28 Octobre 1920 (le premier le 16 Novembre 1919).

Toutes relations furent dès lors rompues avec Madame CHABIN.

La déclaration de succession de Me Eugène AUBERT fut déposée le 1er Juin 1920. Sa succession comprenait outre l'Etude d'Herbault et le mobilier à peu près identique à celui prisé après le décès de Madame AUBERT-HILBERT, diverses valeurs de bourse et créances et soldes de comptes dus par les clients de l'Etude.

Un partage sous signatures privées intervint le 07 Mai 1927 entre Edmond et Roger AUBERT, aux termes duquel Roger AUBERT reçut une petite partie du mobilier, une partie du prix de cession de l'Etude (60.000 Frs), diverses valeurs de bourse pour 30.992 Frs. Me Edmond AUBERT recevait le surplus du mobilier, 20.000 Frs sur le prix de cession de l'Etude, et 7.353 Frs en valeurs de bourse (l'automobile Clément Bayard avait été vendue en 1927).

Les bijoux de Madame AUBERT-HILBERT avait été vendus au profit de Roger chez Fontana, bijoutier, rue Royale à Paris en Mars 1920.

L'Etude d'Herbault fut vendue à Me THIBAULT en Novembre 1920 moyennant le prix de 80.000 Frs. Elle avait été gérée par le principal Clerc, M.NOULIN. Me THIBAULT solda son prix d'acquisition le 05 Avril 1924.

 

 

LA VIE A HERBAULT DE Me EUGENE AUBERT

 

Maître Eugène AUBERT était un homme d'assez belle prestance, de taille moyenne, les cheveux en brosse, portant barbe et lorgnons. Il était très bon et très gai. Le décès de ses deux premières épouse l'avait profondément affecté. Il était très aimé de sa clientèle. Il avait parfaitement géré son Etude pendant 34 ans, grâce à son travail et à sa probité. Son Etude était installée dans une annexe au rez-de-chaussée de la maison qu'il occupait sur la place du marché, dont le propriétaire était Monsieur GIRAUD, au même endroit que l'Etude actuelle de Me THIBAULT.

Il avait décoré d'une fresque représentant l'étang de Pécheux à Herbault, la salle de bain. Il y avait installé un atelier de photographie dont il faisait son passe temps.

Il fit plusieurs tableaux à l'huile et aimait bricoler. Nous possédons encore plusieurs de ses outils et un de ses tableaux.

Il aimait la chasse et les promenades à pieds.

Ce fut aussi un passionné de l'automobile.

Le 30 Octobre 1900, il écrivait à un garagiste d'Orléans :

"Je m'intéresse énormément à la question automobile et un jour viendra, je l'espère du moins, où je m'offrirai la fantaisie d'une voiturette. Actuellement les prix sont encore trop élevés pour ma bourse. Quand les fabricants auront compris, et cela arrivera, soyez en convaincu, qu'il est possible d'établir des voiturettes aussi légères que le sont les quadricycles et à des prix sensiblement peu supérieurs, ils verront leurs commandes augmenter dans des proportions absolument fantastiques : l'avenir de l'industrie automobile est là.

La plupart des personnes qui se livrent volontiers à ce nouveau sport, et je suis du nombre, ont en horreur les tricycles et les quadricycles qui, en présentant tous les petits ennuis de l'automobile en général, manquent totalement de confortable.

Il ne faudrait guère plus de matière pour établir une voiturette qu'un quadricycle, la disposition seule des organes serait à changer, et cependant quelle différence au point de vue du confortable et de l'élégance.

Voulez-vous que je vous dise quel serait mon idéal : voiturette de 150 kilos au maximum, moteur de 3 chevaux, places à l'avant, deux vitesses, l'une très petite permettant de monter les côtes les plus dures et de résister au vent les plus forts ; l'autre de vingt kilomètres à l'heure au maximum ; changement de vitesse par cône à friction ; transmission par arbre rigide ou à la cardan, ressorts à l'avant et à l'arrière ; la carrosserie réduite à la plus simple expression.

Je suis un fanatique de l'automobile ....".

Il acheta peu après un quadricycle qu'il bricolait lui-même, puis vers 1910, une Clément Bayard, Torpédo 10 CV.

La peinture, la photographie, la chasse et l'auto ne suffisaient pas à l'occuper. Il lisait également beaucoup et rédigea avec son ami ALEXANDRE, juge de paix à Herbault, une histoire d'Herbault qu'il illustra de nombreux dessins à la plume et à la gouache et qu'il fit relier.

Le dimanche, il se promenait avec sa famille et ses amis dans le parc du château d'Herbault et allait se délasser à l'étang de Pécheux.

Il avait autour de lui toute une petite société locale : Madame CUZIN, receveuse des postes et ses filles, le Docteur HAHUSSEAU, père du Chanoine, Monsieur ALEXANDRE et plusieurs autres.

Il entrenait des relations suivies avec Albert LEROUX, bijoutier au Mans, son ami de jeunesse et Me DUC, notaire à Mer, son prédécesseur et son fils qui était attaché de direction aux automobiles Renault.

Il aimait les bons repas et sa cave était bien garnie.

Il ne se ménagea pas pour élever ses deux fils, malgré les conditions difficiles que lui ont imposé ses deux veuvages, et décéda trop jeune pour jouir d'une retraite que son long exercice notarial lui aurait mérité.

ROGER AUBERT

 

Roger Marie Michel AUBERT est né à Herbault le 25 Octobre 1904 du deuxième mariage de Me Eugène AUBERT avec Madame Marguerite Adrienne HILBERT.

Il perdit sa mère à l'âge de 9 ans.

Il fit ses études au collège de Pontlevoy puis à l'école Notre Dame des Aydes à Blois.

Après le décès de son père, il eut pour tuteur son frère Me Edmond AUBERT et vint habiter chez lui à Vendôme, tout en poursuivant ses études à l'école Notre Dame des Aydes, où il ne fut pas un brillant élève. Son frère le mit en pension pendant quelques mois chez le curé des Muches l'Evêque, l'Abbé FOURNIER, mais sans plus de succès.

En Septembre 1920, il entra à l'école d'agriculture de Clion (Indre) où ses études ne furent pas plus brillantes.

En Octobre 1922, il entra à l'école d'agriculture de Maison Carrée (Algérie).

Nous possédons la correspondance qu'il échangea avec son frère de 1920 à 1929.

Il y raconte notamment sa vie en Algérie et donne des détails pittoresques sur le pays et rend compte régulièrement des dépenses qu'il a faites. Il prétend qu'il obtient de bonnes notes à l'école, mais il a souvent des "zéros" de conduite.

Le 07 Mai 1923, il écrit :

"J'ai eu des nouvelles de maman (madame veuve AUBERT née MARIAU) elle est actuellement à Berny aider un peu madame CHABIN (sans doute la femme de son fils de son premier mariage) qui attend un troisième héritier.

Ma tante Catherine (Catherine HILBERT épouse BOUR) m'a également écrit. Henri (son fils) l'aide au magasin. Elle a insisté pour que j'aille passer quelques temps à Thionville pendant les vacances. Chez l'oncle Théodore (HILBERT) une petite cousine germaine va faire sa première communion. Peux-tu m'envoyer un mandat télégraphique ?".

Il passe ses vacances scolaires à Vendôme et durant l'été 1924, il vient au bord de la mer à St-Cast, avec son frère, sa belle-soeur et leurs enfants.

En Novembre 1924, il entre à l'école d'agriculture de Nogent sur Marne.

Le 22 Novembre 1924, il écrit qu'il a reçu des nouvelles de son oncle Félix (HILBERT) et qu'il a été voir la "tante PELTIER" qui habite à Paris. Il a été à la Croix de Berny dîner avec Marcel CHABIN. Il habite alors dans une pension à Nogent sur Marne et semble plus se distraire à Paris que travailler à l'école d'agriculture. Durant l'hiver 1924/1925, il se rend fréquemment chez son oncle Théodore HILBERT à Versailles et chez la "tante PELTIER" qui habite près du métro Exelmans. Son travail à l'Institut Agronomique est très médiocre. Chacune de ses lettres (2 ou 3 par mois) contient une demande pressante d'argent.

Durant l'été 1925, il s'engage dans une tournée de théâtre en province, puis il part faire les vendanges en Algérie et au retour, va voir sa famille à Thionville.

En Novembre 1925, il fait son service militaire en Algérie. Au départ pour Marseille il a rencontré à la gare de Blois, le 10 Novembre, Monsieur et Madame MORIN qui partaient passer l'hiver sur la côte d'azur. Il est incorporé dans une compagnie de remonte à Constantine.

En Juin 1926, il est nommé Brigadier. Il fait part du mariage de son cousin Henri BOUR le 04 Mai 1926. Il continue à réclamer de l'argent à chacune de ses lettres et vient en permission à Vendôme en Août.

Il termine son service militaire en Mai 1927 et rentre à l'Institut Agronomique de Nogent, où il avait échoué à l'examen avant de partir au service. Il échoue à nouveau en Octobre 1927.

En Janvier 1928, il demande à son frère Edmond d'intervenir auprès de son ami DUC pour le faire rentrer aux Usines Renault, mais Monsieur DUC a quitté Renault depuis 5 ans.

Il fait de la figuration au théâtre et au cinéma.

Il désire acheter une moto et demande à son cousin DESNOYERS de Versailles, d'avaliser des traites. Celui-ci refuse et écrit à Me Edmond AUBERT le 25 Janvier 1928 qu'il a eu un long entretien avec Roger sur le choix d'une profession, mais qu'il ne semble nullement disposé à travailler sérieusement.

En Septembre 1928, il vend la moto qu'il avait achetée. Il fait toujours des rôles de figurant au Théâtre Marigny et se promène à travers la France. En Décembre, il projette de créer une agence de théâtre et demande toujours de l'argent, notamment pour acheter un cabriolet Citroën qu'il revend peu après. Il va s'intéresser à une invention "formidable" destinée à sonoriser les films, c'est la fortune assurée !

En Avril 1929, il est toujours à Paris et va encore changer de voiture.

Nous n'avons plus de lettres de Roger AUBERT depuis cette date.

En Août 1929, il passe quelques jours à Vendôme avant de partir au Gabon où il projette d'aller chasser l'éléphant et de vendre de la glace aux indigènes ! C'est le succès assuré !

En fait, il s'emploie comme il peut et exerce divers métiers de débardeur et autres. Il reconnaît qu'il a alors "mangé de la vache enragée". Puis, comme il est débrouillard et adroit, il répare des autos et camions et crée un garage auquel il adjoint en Avril 1930, une entreprise de transport. Le Gabon est alors un pays vierge, où tout peut être entrepris.

En Mai 1935, il demande à son frère de lui faire parvenir 10.500 Frs en vue de l'achat d'un camion Renault.

Le 26 Janvier 1939, il demande à son frère de remettre à un capitaine qu'il a connu à Libreville et qui est alors à Tours, la somme de 8.000 Frs en remboursement d'un prêt.

L'entreprise de transport de Roger AUBERT se développe dès lors très rapidement. Avec l'activité militaire au Gabon, cette entreprise connaît une grande extension et Roger AUBERT monopolise pratiquement tout ce qui est transport terrestre ou fluvial au Gabon.

Il s'était marié au Gabon, mais son épouse décéda peu après.

Après avoir vendu son affaire de transport au Gabon à la C.F.A.O, il rentre en France en 1948. Peu de temps après, il prête ses fonds à un M. DUMAS qu’il avait connu au Gabon et qui était minotier à Cosne. Mais celui-ci tenait une double comptabilité et fut emprisonné. Son épouse fut condamnée pour assassinat pour avoir tiré avec un fusil sur l’acheteur du moulin, qu’elle attendait cachée dans la cave. Roger AUBERT se retrouve ainsi complètement démuni de ressources.

Son neveu, Jacques AUBERT, lui rend alors compte de la gestion des valeurs de bourse qui lui provenaient de la succession de son père et qui subsistaient après les nombreuses sommes que lui avait remises son frère.

Roger AUBERT habitait alors à Paris, 2 Boulevard Pershing.

Le 02 Juin 1960, il épousa Jeanne COLOMBO, à Perroy (Nièvre) avec laquelle il vit toujours (1987).

Depuis cette date, il perdit tout contact avec sa nièce et son neveu qui cependant l'invitaient régulièrement aux baptêmes et mariages de leurs enfants. Il vint à Vendôme pour la dernière fois à l'occasion de la première communion de son petit neveu Jean AUBERT.

C'est un garçon sympathique, très sensible, qui avait entretenu des relations affectueuses avec son frère, ainsi que ses lettres en témoignent.

Beau garçon, après une jeunesse passablement dissipée et orageuse, il avait fini, grâce à son travail, à se créer une situation que ses revers de fortune ne lui permirent pas de maintenir pour ses vieux jours qu'il passa très attaché à sa seconde épouse.

Le 05 Décembre 1897, il vint déjeuner avec sa femme chez son neveu Jean AUBERT, à Paris, avec Monique et Jean PAPIN, Cécile et Jacques AUBERT, Pierre et Marie AUBERT. Il raconta sa vie au Gabon.

Peu après son arrivée au Gabon, il renfloua un brise glace norvégien échoué dans l'estuaire de Libreville pour en faire un remorqueur pour les billes d'Okoumé Son garage brûle dans un incendie et il le reconstruit. Il exploite une carrière de pierres pour aménager l'aérodrome de Libreville.

En 1940, à l'arrivée du Général LECLERC au Gabon il prend parti pour De GAULLE contre le gouverneur général MASSON resté fidèle au gouvernement de Vichy et sert de chauffeur taxi à LECLERC.

Il est ensuite nommé chef d'escale de l'aérodrome de Libreville par les anglais. Il faut condamné à la détention à perpétuité par la Cour de Riom pour avoir pris parti pour de GAULLE.

A son retour en France, il travaille de 1955 à 1970 à la Société de Jouets Freel pour concevoir et réparer des jouets mécaniques.

Il est décédé à Paris (XIV) le 08 Mars 1988.

EDMOND AUBERT

 

Edmond Eugène Camille AUBERT est né au Lude le 22 Septembre 1881 du mariage d'Eugène Louis François AUBERT et Aimée Marie Françoise PELTIER.

En 1884, son père fut nommé notaire à Herbault où il passa sa jeunesse et son adolescence. Nous possédons plusieurs photographies faites par Me Eugène AUBERT où nous le voyons en compagnie des demoiselles CUZIN à l'Etang de Pécheux (Histoire d'Herbault) ou en uniforme à l'Ecole Notre Dame des Aydes à Blois où il fut pensionnaire dès l'âge de 8 ans et où il fit toutes ses études.

Il perdit sa mère le 30 Janvier 1901.

Après son bachot qu'il passa le 18 Juillet 1901, il fit son droit à Paris. Il était logé chez sa tante PELTIER et était très lié avec son cousin Henri PELTIER qui préparait alors l'Ecole de Saint-Cyr.

En 1906, il était en quatrième année de droit et demeurait alors 22, rue de Tocqueville (voir sa photo sur sa carte d'étudiant de l'année scolaire 1906-1907).

Après sa licence, il obtint le diplôme de Docteur en Droit, après avoir soutenu sa thèse sur "Les Fruits Civils" le 14 Janvier 1908.

Avant d'entreprendre ses études de droit, il avait fait son service militaire comme "dispensé", puisqu'étant étudiant il avait le droit de ne faire qu'un an de service au lieu de trois.

Il fut incorporé au 113e régiment d'Infanterie à Blois le 14 Novembre 1902 jusqu'au 19 Septembre 1903. Il faut nommé sergent-major le 22 Septembre 1914.

D'après son livret militaire, il avait les cheveux et sourcils noirs, les yeux gris-bleu, le front ordinaire, le nez moyen, la bouche moyenne, le menton rond, le visage ovale. Il mesurait un mètre soixante six, savait lire et écrire, mais ne savait pas nager.

En même temps que ses études de droit, il fit son stage de clerc de notaire à l'Etude de Me PRUDHOMME à Paris où il se fit plusieurs amis, notamment Me MANCELLIER, depuis notaire à Orléans. Puis, il continua en qualité de 1er clerc chez Me FAROUX, notaire à Paris du 05 Novembre 1908 au 05 Novembre 1909 puis de clerc hors rang dans la même Etude, jusqu'au 14 Février 1910.

C'était alors un jeune homme élégant et distingué, ainsi qu'il apparaît sur une photo de cette époque. Il a d'ailleurs toujours été très soigneux de sa tenue vestimentaire et ne manquait pas de distinction.

Ayant passé sa thèse de Doctorat en droit et obtenu son diplôme de Notaire, il épousa à l'Eglise Saint-Nicolas de Blois, le 28 Juin 1910, Rachel Marie Georgette MORIN, fille unique d'Henri MORIN et de Céline TAVERNIER.

Il résulte de son contrat de mariage reçu par Me DELAGRANGE, notaire à Blois, le 21 Juin 1910, au domicile de Monsieur et Madame MORIN et en présence de son père, de Madame Adrienne HILBERT, sa deuxième épouse et de son jeune frère Roger AUBERT, qu'il avait acquis les 12 Mars et 31 Mai 1910 l'Etude de Me ROLLAND, notaire à Vendôme, moyennant le prix de 100.000 Frs payé à concurrence de 55.000 Frs comptant, le jour de sa prestation de serment (18 Juin 1910) le surplus devant être payé en 5 ans avec intérêts de 4 %.

Il possédait le mobilier de la chambre à coucher qui garnissait son appartement de la rue de Tocqueville, une obligation de 400 Frs de la ville de Paris et une maison à Vendôme, 2 rue au Blé, qu'il avait acquise suivant acte de Me ROLLAND du 14 Avril 1910, moyennant le prix de 28.000 Frs payé comptant, et dont il fit apport à sa communauté.

Mademoiselle Rachel MORIN apportait en mariage : diverses valeurs de bourse pour un montant de 8.493 Frs et ses parents lui constituaient une dot de 120.000 Frs, outre son trousseau évalué à 5.000 Frs.

En réalité, l'Office de Notaire et la maison de Vendôme avaient été payés par Monsieur et Madame MORIN-TAVERNIER ses beaux-parents, en partie à l'aide de la dot faite à leur fille.

Me Edmond AUBERT fit aussitôt de nombreux travaux dans la maison de la rue au Blé, sur les conseils de son beau-père et aménagea les bureaux de l'Etude dans leur état actuel (1977) à l'emplacement d'une remise à voitures.

Le 08 Septembre 1911 naissait son fils, Jacques Marie Edmond AUBERT.

Les premières années du mariage AUBERT-MORIN se présentaient donc sous d'excellents auspices : une bonne Etude (alors la meilleurs de Vendôme), une maison agréable et une premier enfant.

Malheureusement, la guerre de 1914 vint perturber le bonheur du jeune ménage.

En effet, Edmond AUBERT est mobilisé le 03 Août 1914 au 113e régiment d'Infanterie à Blois.

Il confie la gérance de son Etude à Monsieur Gustave DESPRES, son clerc, qui la gérera jusqu'à sa démobilisation en 1918.

Au début de l'hiver 1914-1915, sa femme et son fils viennent habiter chez Monsieur et Madame MORIN à Blois, où il vient les rejoindre chaque soir. Monsieur et Madame MORIN étaient partis passer l'hiver à Menton, comme ils le faisaient depuis quelques années.

Le 03 Février 1915, il quitte Blois avec son régiment pour monter au front.

Quelques jours après ce départ, naît à Blois, 9 rue des Lices, dans la maison de Monsieur et Madame MORIN, le 15 Février 1915, sa fille, Monique Aimée Solange AUBERT.

Il est nommé sous-lieutenant le 03 Juin 1915 et est grièvement blessé à la colonne vertébrale le 15 Juillet 1915 au "Chemin des Dames".

"Plaies de la région dorso-lombaire avec présence de projectiles sous-cutanés de la région lombaire par éclats d'obus. Plaies multiples par éclats d'obus à la face, à l'épaule et au bras droit. Plaie du pied gauche par éclats d'obus extraits à Bourges"

lit-on sur un certificat de visite établi à l'hôpital militaire de Bellac le 19 Juillet 1915. Certains de ces éclats d'obus ne seront extraits que vers 1925 !

Après sa convalescence, il repart au front le 28 Janvier 1916 avec le 313e régiment d'Infanterie. Au début de l'année 1917, il bénéficie d'une permission qu'il vient passer à Menthon, auprès de ses beaux-parents où sa femme et ses enfants étaient venus passer l'hiver. Mais il remonte bientôt en ligne et il est blessé à nouveau près de Verdun "au sud de la Ville au Bois" entre Craonne et Berry en Bac, lors de l'attaque de Champagne, le 16 Avril 1917, par éclat d'obus au genou droit. Il est soigné à Tours, à l'hôpital Saint-Gatien, qu'il quitte le 20 Juillet 1917. D'après un témoignage d'un soldat de sa section, Monsieur ELLIAUME qui demeurait depuis 11, impasse Jean Jaurès à Vendôme, recueilli le 16 Décembre 1978, alors qu'il était âgé de 90 ans, blessé en même temps que lui, il fut atteint par des éclats d'un obus de 105 après avoir franchi le parapet de sa tranchée avec sa section (26e compagnie, Capital SOUTIF). Il fallait progresser par bonds de 100 mètres en 4 minutes en collant à un tir d'artillerie qui se déplaçait à cette cadence.

Il avait été nommé Lieutenant le 03 Juin 1917 et décoré de la Croix de Guerre le 28 Avril 1917 à l'Ordre de la Neuvième Division, avec la citation "Officier remarquable, d'une bravoure et d'un sang froid rares. Le 16 Avril 1917 a brillamment entraîné sa section à l'assaut de la première ligne ennemie ; blessé au moment où sous le feu violent de mitrailleuses il entraînait ses hommes à l'assaut d'un fortin puissamment organisé - Déjà blessé".

Le 15 Août 1917, il est "détaché à la Mission Militaire française rattachée aux armées britanniques" à Montreuil sur Mer. Il est affecté à l'Etat Major des armées franco-britaniques où la vie de bureau auprès des officiers anglais, dont il apprécie la distinction, lui fait oublier l'enfer de Verdun. Il sera décoré de la "Military-Cross".

Il bénéficie d'une permission en Octobre 1918 et reçoit à Vendôme, son père qui y décède le 20 Octobre. Il semble qu'il ait fait alors prolonger sa permission et qu'il ne soit pas retourné au quartier général des armées britaniques à Montreuil sur Marne. Son ordre de démobilisation est daté du 20 Février 1919.

Il va alors reprendre la direction de son Etude et s'occuper en même temps de la gestion et de la vente de l'Eutde de son père à Herbault, ainsi que de l'éduction de son frère Roger, dont il est nommé tuteur.

Par décret du 05 Novembre 1928, il est nommé Chevalier de la Légion d'Honneur.

De 1919 à 1939, la vie des époux AUBERT-MORIN se déroule paisiblement à Vendôme, partagée entre l'activité professionnelle et l'éducation des deux enfants. Presque chaque été, ils passent leurs vacances au bord de la mer en Bretagne et surtout à la Baule. En 1936, ils font avec leurs enfants un voyage en Italie du Nord et à Venise, qu'ils prolongent par un séjour à la Baule. Ils avaient plusieurs amis intimes à Vendôme, notamment Monsieur Jean ROLLAND, fils du prédécesseur de l'Etude, le ménage HAMAR et le ménage LEMAIGNEN. Ils allaient fréquemment à Blois chez Monsieur et Madame MORIN, père et mère de Madame AUBERT.

Edmond AUBERT, conserva jusque vers 1927 la vieille auto Clément Bayard de son père. Puis, il acheta une 6 CV Renault et vers 1936, une autre voiture Renault "Primastella 16 CV".

Nommé Président de la Chambre des Notaires de Loir et Cher en 1933, Edmond AUBERT participa ensuite activement à la mise en place du régime de la "garantie collective" des notaires dans le ressort de la Cour d'Appel d'Orléans et fut nommé membre délégué de cette Cour à "l'Association Nationale des Notaires de France", (qui devait devenir le Conseil Supérieur du Notariat) de 1936 à 1939. Il fit alors de nombreux voyages à Paris, auprès de cet organisme. Il était souvent accompagné de sa femme et y rencontrait son fils, alors étudiant à la Cité Universitaire, puis clerc stagiaire à l'Etude de Me BAUDIN, notaire à Vanves.

Le 24 Juin 1933, il acheta une maison à Vendôme, 20 rue des Quatre Huyes, qui appartenait à un de ses clients, moyennant le prix de 106.000 Frs, qui sera attribuée à Madame PAPIN, sa fille, en vertu du partage de sa succession, reçu par Me TRICAUD, notaire à Vendôme, le 29 Septembre 1945.

Le 08 Août 1939, il acheta par acte de Me GENTY, notaire à Villiers sur Loir, un verger, route de Blois à Vendôme, qui sera attribué à son fils en vertu du même partage.

En 1939 ont lieu les fiançailles de sa fille Monique avec le Docteur Jean PAPIN, alors sous-lieutenant au service de santé au Mans, né à Morlaix le 22 Octobre 1912, du mariage de Monsieur Michel Marie Ernest PAPIN, Pharmacien à Lanmeur (Finistère) avec Madame Marie LEBRETON. Le mariage devait être célébré à Vendôme le 02 Septembre 1939 et le Docteur PAPIN devait s'installer médecin à Mamers. Malheureusement la guerre de 1939-1945 vint retarder ce mariage qui ne fut célébré que le 04 Mars 1941 après le retour de captivité de Jean PAPIN.

Le 15 Juin 1940, à la suite de l'avance des armées allemandes et à la veille du bombardement de Vendôme, Monsieur et Madame AUBERT et leur fille prennent le chemin de l'exode qui les conduit à Bellac où Edmond AUBERT avait été hospitalisé à la suite de sa blessure de 1915.

Ils ne rentrent à Vendôme qu'environ un mois après, trouvant leur maison très endommagée par les bombardements et en partie pillée. Les locaux de l'Etude et les archives étaient heureusement intactes. Ils sont sans nouvelles de leur fils et de leur futur gendre, alors prisonniers. Jacques AUBERT mobilisé le 28 Août 1939, avait quitté ses parents le 02 Mai 1940 pour rejoindre le 66e régiment d'Infanterie auquel il venait d'être affecté à Châteauroux, comme aspirant. Son père le conduisit à la gare de Blois et c'est la dernière fois qu'ils se virent.

Les fatigues de l'exode, les suites de ses blessures de la guerre 1914-1918 et les perturbations de la guerre de 1939-1940 (la maison de la rue au Blé avait été partiellement occupée par des réfugiés de Paris au début de la guerre, puis par un officier allemand), les soucis de la captivité de son fils dont il fut plusieurs mois sans nouvelles, affaiblirent la santé d'Edmond AUBERT, qui décéda brusquement d'une congestion cérébrale le 25 Mai 1941, à peine 3 mois après le mariage de sa fille.

La gérance de l'Etude fut confiée à Me TRICAUD, notaire à Vendôme, qui la conserva jusqu'au retour de captivité de Jacques AUBERT, le 15 Juin 1945 et sa prestation de serment (22 Février 1946) après qu'il eut passé son examen de notaire à Orléans.

Il résulte de sa déclaration de succession, que la communauté AUBERT-MORIN possédait, outre la maison de Vendôme, 2 rue au Blé, celle de Vendôme, 20 rue des Quatre Huyes louée à différents locataires, le verger de la route de Blois, différents soldes de comptes et prorata, un portefeuille de valeur de bourse s'élevant à 485.191 Frs.

Madame AUBERT-MORIN possédait la maison 9, rue des Lices à Blois, héritée de ses parents et louée à Monsieur MADELIN, conservateur des eaux et forêts, qui l'achètera en 1962, différentes valeurs de bourse provenant de la succession des ses parents, s'élevant à 194.424 Frs.

Après le décès de son mari, Madame AUBERT continua à habiter à Vendôme, 2 rue au Blé, avec son fils et sa belle-fille jusqu'en 1956, date à partir de laquelle elle alla habiter chez sa fille à Mamers où elle décéda le 09 Août 1968 d'un congestion pulmonaire à la suite d'une fracture du bassin consécutive à une chute.

Par acte de Me CHEVALLIER, notaire à Mamers du 28 Mai 1956, elle avait donné à son fils, la maison 2, rue au Blé à Vendôme et à sa fille, la maison 9, rue des Lices à Blois.

Sa succession comprenait un petit portefeuille de valeurs de bourse s'élevant à 44.274 Frs qui fut partagé entre ses deux enfants.

Elle est enterré avec son mari au cimetière de Vendôme, dans une concession perpétuelle (n°22, lettre M, 4e section) qu'elle avait acquise le 05 Novembre 1941 et sur laquelle elle fit édifier la tombe de son mari.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Histoire des Familles

 

Aucher et Porcher

Bezard

Demezil

Breton et Ferron

Lemaignen

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Familles Aucher et Porcher

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une abondance de documents permet de reconstituer la généalogie et la fortune des familles AUCHER et PORCHER depuis la première moitié du XVIIIe siècle, grâce aux titres de propriété, contrats de mariage, inventaires et partages retrouvés à peu prés au complet.

Les alliances entre ces deux familles à la fin du XVIIIe siècle puis au début du XIXe siècle, de même que leurs alliances avec la famille LEMAIGNEN révèlent l'existence d'une société bourgeoise assez fermée, implantée d'abord en Sologne puis à Blois et dans la région de Vendôme.

Ce sont originairement des familles de marchands dont les enfants deviennent parfois notaires ou fonctionnaires, ou vivent, au XIXe siècle, des revenus de leur fortune immobilière.

Ces familles, après s'être ramifiées, puis alliées à la Famille LEMAIGNEN, ne semblent avoir laissé aucun descendant du nom de AUCHER ou PORCHER à la fin du XIXe siècle.

 

I - FAMILLE AUCHER

 

Cette famille était originaire de Montrichard ou des environs. Nous en trouvons la première trace dans une vente du 13 Avril 1670 par la famille JOBINET à François REGNARD ou RENARD, aide échanson de la maison du Roy d'une maison à Fauvras (Favras) paroisse de Feings (les titres antérieurs de cette maison en la personne de la famille JOBINET remontent au 28 Novembre 1623).

Ce François RENARD eut trois enfants dont :

 

a) François RENARD, écuyer, conseiller du Roi, prévôts de Montrichard, propriétaire de la Closerie de Favras décédé avant 1728.

 

Il épousa en premières noces ............. dont il eut deux enfants :

1°) Marie RENARD, épouse de Jean BLOTTIN, décédée avant 1759, qui eut elle-même une fille : Marie Anne BLOTTIN, épouse de François René (ou René Pierre) BOISTARD, conseiller du Roi, Lieutenant en l'élection de Loches.

2°) François RENARD, bourgeois à Feings, époux de Anne ROTTE.

 

Et, en secondes noces : Jeanne CERE, décédée en 1758, dont il eut quatre enfants :

1°) Jeanne Victoire RENARD, veuve en 1762 de Jacques LEFEVRE (avait en 1762 une fille mineure également prénommée Jeanne Victoire).

2°) Hélène RENARD, décédée célibataire avant 1758.

3°) François (ou Jean) Louis (ou Solain) RENARD, disparu depuis 1742.

4°) Madeleine RENARD, veuve en 1773 d'Innocent (ou Vincent) COLAS.

 

b) Catherine Marguerite RENARD, décédée avant 1759, épouse de Jean-Baptiste AUCHER, procureur du Duché Pairie de St-Aignan en Berry.

 

(Il existait aussi une Françoise RENARD, demeurant à CHEMILLE en Touraine, décédée avant 1780, célibataire, qui était peut être la fille d'un troisième enfant du premier François RENARD).

 

Jean-Baptiste AUCHER et Catherine Marguerite RENARD eurent quatre enfants :

1°) Jeanne Victoire AUCHER, épouse d'Antoine TRINQUART, orfèvre à Blois (un TRINQUART était orfèvre à Blois, 9 rue du Pont en 1822).

2°) Marie AUCHER, épouse de François Marin CHALMET, orfèvre à Blois.

3°) Jean-Baptiste MAMER-AUCHER, mineur en 1759.

4°) François AUCHER, marchand cirier chandelier au Bourg Neuf à Blois, décédé avant 1786 qui épousa Catherine Marguerite LEMAIGNEN.

 

François AUCHER époux de Catherine Marguerite LEMAIGNEN rachète, de 1757 à 1773 les parts et portions appartenant à ses cohéritiers (François RENARD-ROTTE, Jeanne Victoire AUCHER, Jean-Baptiste MAMER-AUCHER, Françoise RENARD, Marie AUCHER, Marie Anne BLOTTIN, veuve LEFEVRE née CERE, Jeanne Victoire LEFEVRE, Hélène RENARD et Madeleine RENARD épouse COLAS) dans la Closerie de Favras acquise par le premier François RENARD en 1670. Ces rachats n'ont pas été sans difficultés ainsi qu'il résulte des nombreux actes et procès réunis sous la chemise "Closerie de Favras".

Les 11 Mars 1775 et 26 Décembre 1777, il achète encore diverses parcelles de friches et bois pour agrandir cette Closerie.

François AUCHER et Catherine Marguerite LEMAIGNEN eurent trois enfants :

1°) Victoire AUCHER qui épouse Jean Pierre Paul Daniel LANGE et dont la descendance est inconnue.

2°) Marguerite Marie AUCHER, née le 31 Octobre 1765, décédée à Blois le 30 Avril 1853 qui épousa en Février 1786 Jean-Louis PORCHER (voir famille PORCHER ci-après).

3°) François Georges AUCHER, négociant à Blois.

François AUCHER est décédé avant 1786 et sa femme Catherine Marguerite LEMAIGNEN après 1787.

 

François Georges AUCHER eut un fils : Louis Coradin AUCHER, né à Blois en 1798, décédé à la Sistière près de Cour-Cheverny le 22 Janvier 1867, époux de Marie Anne Nelly LEMAIGNEN, née à Blois en 1803, fille des époux LEMAIGNEN-DESMARAIS-DUFAY et soeur d'André LEMAIGNEN-BARAULT dont son issus les LEMAIGNEN de VEILLENES.

Louis Coradin AUCHER et Marie Anne Nelly LEMAIGNEN eurent quatre enfants :

1°) Edouard AUCHER, né le 05 Mai 1822, décédé le 14 Septembre 1828.

2°) Edmond AUCHER, né le 04 Février 1825, décédé le 18 Septembre 1837.

3°) Louis Maxime AUCHER, né le 30 Mai 1830, décédé sans enfant à la Sistière commune de Cour-Cheverny le 17 Décembre 1891, époux de Marie Claire GRAVIER, ayant demeuré 16, rue d'Aumale à Paris.

4°) Louis James AUCHER, né le 24 Septembre 1840, conseiller de préfecture au Mans, époux de Edma Marie Pauline PERRET, décédé sans enfant à Paris le 29 Janvier 1901.

 

Il était propriétaire de la ferme de la Carmenterie à Villeromain. Sa veuve décédée à Paris, 7 avenue Friedland le 12 Juillet 1925, laissant pour héritière sa nièce, Emma Marie BACHELIER, épouse de Gaston Ferdinand POUPINEL, docteur en médecine, 97 rue de Trocy à Paris. (Voir dans "titres de propriété de Périgny" : acquisition POUPINEL de 1928).

La famille AUCHER était donc originairement une famille de fonctionnaires royaux dont la seule propriété immobilière que nous lui connaissions est le Closerie de Favras à Feings (près du château du Marquis de Favras).

Les enfants AUCHER deviennent dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle marchands à Blois (orfèvres ou épicier) et l'un d'eux (François AUCHER) s'allie avec la famille LEMAIGNEN. Une fille de François AUCHER (Marguerite Marie) épouse Jean-Louis PORCHER et apporte ainsi la Closerie de Favras à la famille PORCHER.

Cette famille s'éteindra à la fin du XIXe siècle avec les enfants de Louis Coradin HAUCHER (lui-même petit-fils de François AUCHER-LEMAIGNEN) qui avait épousé une fille d'une autre branche de la famille LEMAIGNEN.

Il ne reste de la famille AUCHER-LEMAIGNEN qu'un imposant et fastueux monument funéraire, composé d'une chapelle centrale et de deux chapelles latérales dans l'allée principale du cimetière de Blois.

II - FAMILLE PORCHER

Le premier document qui nous soit parvenu concernant la famille PORCHER est le contrat de mariage reçu par Me THIBAULT, notaire à St-Dyé sur Loire, le 27 Décembre 1756, de Louis PORCHER, marchand épicier à Romorantin, fils mineur du défunt Etienne PORCHER, en son vivant boulanger pâtissier à Romorantin et de Françoise ROBILLARD, avec Marguerite CHAPEAU, mineure, fille de Sacré CHAPEAU, décédé, en son vivant marchand et de Geneviève POTHIN demeurant à St-Dyé sur Loire.

Ce contrat de mariage est reçu en présence de :

- François PORCHER, frère du marié.

- Barthélémy Sacré CHAPEAU, frère de la mariée.

- Pierre LEROY, marchand à Mer, à cause de Louise GERVAIS, décédée, sa première épouse, cousine germaine de la mère de mariée du côté paternel.

- Marie ROUILLON, veuve de Guillaume THIBAULT, cousin germain de la mariée du côté maternel.

- Joseph THIBAULT, notaire royal à St-Dyé sur Loire et Marie Catherine POTHIN, son épouse, cousine germaine de la mariée du côté maternel.

- Antoine POTHIN, marchand à St-Dyé sur Loire, cousin au même degré.

- Louise THIBAULT, veuve de Thomas POTHIN, lequel est cousin au même degré.

- Louise et Catherine POTHIN, leurs filles.

- Marie Madeleine THIBAULT et Jean Baptiste THIBAULT, frère et soeur du notaire, cousins du troisième au quatrième degré.

- Madeleine BISIEUX, épouse PORCHER.

- Jean Baptiste Armand PORCHER et Marie Madeleine PORCHER, leurs enfants.

- Marie Madeleine THIBAULT, veuve de Jacques BISIEUX et Dié BISIEUX, son fils.

De ce mariage naissent :

1°) A Romorantin, le 12 Mai 1758, Jean-Louis PORCHER.

2°) Françoise Marguerite PORCHER, qui épousera Michel Joseph MARTIN, corroyeur à Orléans, sans descendance connue.

 

Le 17 Mars 1760, les époux PORCHER-CHAPEAU achètent de Pierre BARRON, maître patissier traiteur à Romorantin et de Catherine Cécile LOMBARD, son épouse, une maison prés de la Porte de Blois à Romorantin qui restera longtemps la propriété de la famille PORCHER-AUCHER.

Cette maison appartenait à la famille LOMBARD et Denis CHESNAY depuis plus d'un siècle (premier titre du 23 Juillet 1647). Il existe un volumineux dossier des titres de propriété, ininterrompu depuis cette date. Elle avait été presque entièrement reconstruite en 1675 (voir titre du 12 Mars 1675) aux termes duquel Denis CHESNAY, fils du précédent, s'engage à reconstruire cette maison avant le 24 Juin 1675 et a en laisser la jouissance à la venderesse et à sa fille leur vie durant, avec tous les détails du "rebatissement et réparations" de cette maison.

Un long procès se déroule de Janvier 1702 à Avril 1707 au sujet d'une cours commune de cette maison et d'immondices obstruant un ruisseau la longeant.

Une rente viagère avait été constituée sur cette maison au profit d'une demoiselle Marie Marguerite GRANDJEAN qui voulait, en abondonnant à Pierre BARRON, alors propriétaire, une somme de 600 livres à charge d'une rente de 30 livres par an, se procurer "une vie plus commode et gratieuse". Mademoiselle GRANDJEAN est décédée le 24 Juin 1789 et le dernier terme de la rente fut payée par Louis PORCHER et ses héritiers le 13 Juillet 1789.

Françoise ROBILLARD, veuve d'Etienne PORCHER, mère de Louis PORCHER, décède le 26 Juin 1772 et le 13 Août 1772 intervient un partage de sa succession et de celle de son mari entre :

 

- Etienne PORCHER, marchand tanneur.

- François PORCHER, marchand boulanger pâtissier.

- Louis PORCHER, marchant épicier.

- Françoise PORCHER, épouse de François VILPOUX (ou VILLEPOU), marchand boulanger.

Leur quatre enfants, demeurant tous à Romorantin.

Aux termes de ce partage, le lot n°3 est échu à Louis PORCHER ; il comprenait :

- Une locature appelée "le Grand Village" à Selles St Denis.

- Le pré des Quintaines, le long de la Saudre à Romorantin.

- Le pré "Cadou et Sabort" aux Crotets à Romorantin.

- Une maison à Romorantin, rue Ravelin.

- Une petite maison, rue de Limousin à Romorantin.

- Une autre maison, même rue.

- Une pièce de terre aux Crotets à Romorantin.

- Trois journaux de mauvaise vigne au Clos des Verdons à Lanthenay.

- Un petit pré de taillis appelé la Malcottière paroisse de l'Hôpital.

- Plusieurs rentes foncières.

Les trois autres lots, de même valeur, avaient une composition semblable (métairies, maisons, terres et prés et rentes).

Les époux PORCHER-ROBILLARD étaient propriétaires de quatre métairies, d'une dizaine de maisons, terres, prés, bois et rentes foncières.

 

Le 21 Février 1786, Me LEMAIGNEN, notaire à Blois reçoit le contrat de mariage de Jean-Louis PORCHER, fils majeur de Louis PORCHER, marchand épicier à Romorantin et de Marguerite CHAPEAU, avec Marguerite Marie AUCHER, fille mineure du défunt François AUCHER et Catherine Marguerite LEMAIGNEN, marchande épicière à Blois, paroisse St Honoré. (Ce sont sans doute leurs portraits en pastel qui se trouvent dans la chambre à côté de la salle de bain à Périgny).

 

Etaient présents à la signature de ce contrat, du côté du marié :

- Louis PORCHER et Marguerite CHAPEAU.

- François VILLEPOU, veuf de Françoise PORCHER.

- Michel Joseph MARTIN, marchand tanneur à Romorantin, veuf de Marguerite Françoise PORCHER.

- Barthélémy Sacré CHAPEAU, oncle maternel du marié.

- Françoise Marguerite et Madeleine Jeanne VILLEPOU, ses cousines germaines.

- Françoise, Thérèse, Marguerite, Marie-Louise et Sacré Barthélémy-Gabriel CHAPEAU, ses cousins et cousines germaines.

- Louis François GIDOUIN, bourgeois à Blois et Marie Thérèse Gabrielle CASSIN, son épouse.

- Louis Joseph GIDOUIN, marchand à Blois et Suzanne Madeleine DEMARDIERE, son épouse, amis.

 

Et du côté de la mariée :

- Marguerite DELAUNAY, veuve de Benoist Nicolas LEMAIGNEN, son aïeule maternelle.

- François, Georges et Victoire AUCHER, ses frères et soeur.

- Antoine TRINQUART, marchand orfèvre à Blois, son oncle paternel à cause de Jeanne Victoire AUCHER, son épouse.

- François Marie CHALMET, marchand orfèvre à Blois, son oncle paternel à cause de Marie AUCHER, son épouse.

- Benoist Pierre LEMAIGNEN, marchand épicier à Blois, son oncle maternel et Marianne BRUERE, son épouse.

- Jean Jacques Clément LEMAIGNEN, son oncle paternel et Françoise Geneviève AMAURY, son épouse.

- Pierre BRUERE, marchand quincaillier à Blois, son oncle paternel à cause de Marie Louise Marguerite LEMAIGNEN, son épouse.

- André Pierre LEMAIGNEN, son oncle paternel et Marie GAILLARD son épouse.

- Jacques LEMAIGNEN, notaire à Blois, son oncle paternel et Jeanne MORIET, son épouse.

- Michel Roger, marchand commissionnaire à St-Dyé sur Loire, son cousin germain à cause de Marie Victoire LEMAIGNEN, son épouse.

- Marianne LEMAIGNEN, sa cousine germaine.

Aux termes de ce contrat de mariage, la mère de la mariée lui constitue en dot une maison à Blois, rue des 3 Clés, qu'elle avait acquise durant son veuvage, le 12 Septembre 1780 et diverses rentes.

Les parents du futur époux lui constituaient en dot la maison qu'ils occupaient à Romorantin près de la Porte de Blois et 4000 livres de marchandises d'épicerie.

La future épouse possédait du chef de son père décédé, François AUCHER, notamment la Closerie de Favras, commune de Feings, acquise par lui à titre de licitation (voir famille AUCHER).

 

Du mariage du Jean-Louis PORCHER et Marguerite Marie AUCHER naissent deux enfants :

1°) Jean-Louis PORCHER, né à Romorantin le 02 Septembre 1787.

2°) Emelie Marguerite PORCHER, à née à Romorantin le 09 Janvier 1793.

 

Jean-Louis PORCHER décède à l'âge de 53 ans, le 1er Septembre 1811 à Romorantin en sa maison, rue des Malards. Sa veuve décédera à Blois, 52 rue du Bourg Neuf, le 30 Avril 1853 à 88 ans.

Emelie Marguerite PORCHER, cinq mois après la mort de son père épouse Pierre Samuel BEZARD, majeur, marchand de draps à Blois, fils de Pierre BEZARD et de Françoise Louise Brigitte LEGRAND.

Il en résulte du contrat de mariage reçu par Me POISSON, notaire à Romorantin, le 03 Février 1812 :

Que les parents du marié constituent en dot à leur fils : une maison où ils habitent à Blois, Porte Chartraine et 5.000 Frs de marchandises.

Que la mère de la mariée lui constitue en dot : la petite et la grande Closerie de Favras, commune de Feings (cette dernière à elle propre) estimées respectivement 3.000 et 8.000 Frs, deux chaudières et serpentins pour distillation d'eau de vie estimés 1.000 Frs, 2.000 Frs de créances sur des tiers, 3.000 Frs en objets mobiliers et 8.000 Frs en eau de vie à raison de 120 Frs la pièce à prendre dans la Closerie de Favras.

Ce contrat de mariage est signé en présence de :

- Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND.

- Louis PORCHER et Marguerite CHAPEAU, aïeux de la mariée.

- Jean-Louis PORCHER, son frère.

- Victoire AUCHER, épouse de Jean Pierre Paul Daniel LANGE, sa tante maternelle.

- Pierre LANGE, son cousin germain.

- Charles COTTEREAU, ami.

 

 

 

Le 27 Février 1812, donc au cours du même mois que le mariage de sa fille, Madame Marguerite Marie AUCHER, veuve de Jean-Louis PORCHER, procède à l'inventaire et au partage de ses biens, entre elle et Jean-Louis PORCHER son fils, travaillant alors chez LEMAIGNEN, notaire à Blois et Madame BEZARD-PORCHER, sa fille, alors mineure, héritiers chacun pour 1/2 de leur père.

Il est procédé à l'inventaire du mobilier de la maison de Romorantin, d'une Closerie à Favelle commune de Montault et de la Closerie de Favras.

Il s'y trouvait notamment :

- 99 draps, 24 douzaines de serviettes, 60 nappes.

- à la Closerie de Favras : 2 chaudières, 75 pièces d'eau de vie, 100 pièces de bon vin, 40 pièces de vin soutiré et 60 pièces de vin piqué.

 

Les immeubles partagés comprenaient :

- La Métairie de Favelle, commune de Montault,

estimée avec la cheptel 21.000 Frs

- La Métairie du Roti, commune de Montault,

estimée avec le cheptel 8.000 Frs

- Deux près de la Deviserie, commune de Romorantin 2.000 Frs

- La locature de la Deviserie 4.000 Frs

- 1 hectare 26 ares 50 centiares (ou 25 journeaux)

de vigne à Lanthenay 1.500 Frs

- La maison occupée par la veuve PORCHER,

rue des Malards à Romorantin 6.000 Frs

- Deux maison, porte de Blois à Romorantin 4.000 Frs

- La Métairie de la Bouillerie, commune de Poulaine 12.000 Frs

- La Petite Closerie de Favras 3.000 Frs

- Un jardin, fg de Blois à Romorantin 200 Frs

Ce partage confirme l'attribution à Madame BEZARD des deux Closerie de Favras, données en dot par sa mère.

 

Le 08 Août 1812, il est procédé au partage de la communauté d'entre Marguerite CHAPEAU demeurant à Romorantin et son mari Louis PORCHER décédé à Romorantin le 20 Juillet 1812. Ce partage a lieu entre :

- Madame veuve PORCHER, née CHAPEAU.

- Françoise Marguerite PORCHER, épouse de Michel Joseph MARTIN, corroyeur à Orléans, héritière pour 1/2.

- Jean-Louis PORCHER, majeur, demeurant à Romorantin.

- Madame BEZARD.

Ces deux derniers héritiers pour l'autre moitié de Louis PORCHER, leur aïeul, par représentation de Jean-Louis PORCHER-AUCHER leur père, décédé le 1er Septembre 1811.

L'actif immobilier de la communauté PORCHER-AUCHER comprenait :

- Une métairie à la Poulinerie, commune de Pruniers.

- Une métairie à Chinon, commune de Villerviers.

- Une métairie aux Blanchardières, commune de Marcilly.

- Diverses pièces de vigne à Romorantin.

- Une maison, rue de Paradis à Romorantin.

- Une maison au Cadi à Romorantin.

- Une maison, rue des Limozins à Romorantin.

- Une maison, faubourg de Blois à Romorantin.

 

 

L'actif immobilier de la succession de Louis PORCHER-CHAPEAU comprenait :

- Une pièce de terre à l'hôpital, commune de Romorantin.

- Une locature au Grand Village, commune de Selles St Denis.

- Trois journaux de prés aux Crotets, commune de Romorantin.

- Deux maisons, rue des Limozins à Romorantin.

Madame BEZARD reçoit la Métairie de la Poulinière qu'elle vendit le 02 Août 1820 à Charles Valéry BATAILLER, notaire à Romorantin, les deux maisons de la rue des Limozins, le pré des Crotets, des pièces de terre et la maison faubourg de Blois qu'elle vendit le 22 Mai 1839.

 

Jean-Louis PORCHER-LINGER

 

Jean-Louis PORCHER, devenu notaire impérial à Blois, demeurant rue Porte Chartraine n°96, épouse à Blois le 29 Janvier 1813 Aurore Marie Catherine LINGER, née à Passy le 12 Fructidor an II du mariage de Samuel LINGER et de Christine Marguerite WILLAUME avec lesquels elle demeurait à Blois, rue d'Angleterre n°18.

Le contrat de mariage est reçu par Me Jean PARDESSUS, notaire à Blois le 28 Janvier 1813.

 

Le futur époux possédait, outre ses droits dans la succession de son père et dans celle de son grand père :

- Une somme de 11.000 Frs en meubles et argent comptant.

- Une métairie à la Bouillie, commune de Poulaine (Indre).

- Des terres (même commune).

- Une maison à Romorantin, porte de Blois.

 

La future épouse apportait sa garde robe, divers objets mobiliers et ses parents lui constituaient en dot la somme de 10.000 Frs, une Closerie à la Césardière, commune de Vineuil et une autre somme de 15.000 Frs.

 

Etaient présents au contrat de mariage ou au mariage :

- Madame veuve PORCHER-AUCHER, mère du marié.

- Madame BEZARD, sa soeur.

- François Georges AUCHER, son oncle.

- Jean Pierre Paul LANGU, son oncle, époux de Victoire AUCHER.

- Jacques LEMAIGNEN, ancien notaire à Blois, son grand oncle et Jeanne MORIET, son épouse.

- Jacques BRUERE, aîné, secrétaire de la mairie de Blois, son cousin.

 

Le 1er Avril 1818 intervient un partage entre :

- Marguerite Marie AUCHER, veuve de Jean-Louis PORCHER.

- Jean-Louis PORCHER, majeur, travaillant chez Me LEMAIGNEN, notaire à Blois (pourquoi n'est-il plus notaire ? Pourquoi LEMAIGNEN qui n'était plus notaire en 1813 le redevenait-il ? Avait-il cédé son Etude à Jean-Louis PORCHER et celui-ci la lui avait-il rétrocédée ? Pour quelles raisons ? Peut-être déjà des difficultés financières).

- Madame BEZARD.

Ces deux derniers, héritiers de Jean-Louis PORCHER-AUCHER, leur père.

 

On retrouve la Closerie de Favras, les deux chaudières (1.000 Frs), 75 pièces d'eau de vie (9.000 Frs), le tout attribué à Madame BEZARD, 100 pièces de bon vin (2.000 Frs), 40 pièces de vin soutiré (800 Frs) et 60 pièces de vin piqué (800 Frs). Les immeubles étaient les mêmes que ceux compris au partage du 27 Février 1812.

Madame veuve PORCHER-AUCHER vendit la maison de la rue des Malards le 07 Mars 1838 pour aller habiter à Blois, 52 rue du Bourg Neuf où elle décéda le 30 Avril 1853 à 88 ans. (Voir dossier succession de Madame DUTHEIL, créance contre HUAU, débiteur du prix de cette maison qu'il eut bien du mal à payer).

Nous possédons plusieurs lettres de Madame veuve PORCHER-AUCHER et de nombreux comptes qu'elle tenait scrupuleusement de la gestion de ses immeubles et de ses créances hypothécaires. Son écriture est serrée, pesante et autoritaire. Elle semble avoir eu un caractère dominateur notamment vis-à-vis de son fils Jean-Louis PORCHER, sans doute en raison de ses déboires financiers. Il ne faisait d'ailleurs rien sans la consulter. On a l'impression que cette "Mater Familias" qui n'en finissait pas de mourir, était la gardienne des traditions des familles PORCHER et AUCHER et tenait tous les siens en tutelle.

Après son décès, il fut procédé le 21 Janvier 1854 entre ses enfants (Jean-Louis PORCHER habitait alors à Paris, 4 rue de Moscou) au partage. Il est attribué à Madame BEZARD une maison a Blois, 24 rue Chemonton, acquise par sa mère le 05 Septembre 1846 et une Closerie à Beauregard, lieu-dit les Grouets, commune de Blois (76 ares avec la maison de maîtres) acquise également par sa mère. Ces deux immeubles furent vendus par adjudication le 10 Juillet 1853 (voir affiche de vente).

Jean-Louis PORCHER reçoit aux termes de ce partage : une créance de 2.000 Frs et une soulte de 6.000 Frs contre sa soeur.

Le même jour (21 Janvier 1854), il est procédé entre les deux enfants au partage de 141.680 Frs de créances hypothécaires appartenant à leur mère.

 

 

Décès de Madame PORCHER-LINGER

 

De son mariage avec Aurore Marie Catherine LINGER, Jean-Louis PORCHER eut deux enfants :

1°) Louis Samuel, né à Blois le 23 Septembre 1814, décédé à Blois, Grande Rue à 17 jours le 09 Octobre 1814.

2°) Laure Marie, née à Blois le 1er Décembre 1816.

 

Madame PORCHER-LINGER décède à Etampes, le 16 Juillet 1832. Le 22 Juillet 1833, son mari lui achète une concession dans le cimetière d'Etampes par acte de Me HAUTEFEUILLE, notaire à Etampes. Nous ignorons pourquoi elle est décédée à Etampes. Les époux PORCHER-LINGER habitaient Blois.

Madame PORCHER-LINGER avait fait le 1er Septembre 1815 un testament, déposé aux minutes de Me PARRAIN, notaire à Blois, le 29 Juillet 1832, léguant à son mari tous ses bien meubles et l'usufruit de ses immeubles.

Jean-Louis PORCHER fait réunir le 24 Décembre 1835 le conseil de famille de sa fille Laure. Les membres de ce conseil sont :

- Madame veuve PORCHER-AUCHER, demeurant alors à Blois, rue Porte Côté.

- Pierre Samuel BEZARD.

- Me Léon LEMAIGNEN, avocat à Blois, son cousin germain, fils de Madame BEZARD-PORCHER.

- Mathieu Etienne Sébastien CHABANNE, propriétaire, demeurant à Paris, 323 rue Saint-Honoré, grand oncle de la mineure à cause de Dame WILLAUME, son épouse.

- Me Auguste PARRAIN, notaire à Blois, ami.

- Louis Auguste MONTS, propriétaire à Blois, ami.

 

Le subrogé tuteur est Pierre PEAN, ancien secrétaire de Jean-Louis PORCHER.

 

En vertu des décisions de ce conseil de famille, une transaction est signée devant Me PARRAIN, notaire à Blois, le 02 Janvier 1836, réglant la succession de Madame PORCHER-LINGER. Cette transaction est homologuée par le Tribunal Civil de 1ère Instance de Blois le 07 Janvier 1836 après consultation conformément à la loi de 3 Jurisconsultes. (Les choses allaient vite à cette époques). Il en résulte que Jean-Louis PORCHER avait fait des dépenses considérables sur les biens de sa femme (transformation entière de la maison, rue d'Angleterre à Blois et création d'un jardin d'agrément à la Maison des Grouets). Aux termes de cette transaction, Jean-Louis PORCHER renonce à son usufruit et au paiement des impenses qu'il a engagées. Sa fille renonce à exercer les reprises auxquelles la succession de sa mère a droit.

Elle reçoit la pleine propriété de la fortune mobilière et immobilière de sa mère et elle renonce à la communauté de chef de sa mère.

Le 11 Novembre 1840, Jean-Louis PORCHER rend à sa fille son compte de tutelle devant Me DELAPLAME, notaire à Paris (il habite alors à Paris, rue Royale Saint-Honoré n°20). Il en résulte que Laure PORCHER avait recueilli dans la succession de sa grand-mère, LINGER-WILLAUME, décédée le 23 Juin 1833 (son mari était décédé le 06 Septembre 1827) diverses créances hypothécaires notamment contre Jean Baptiste ROGER et Marie Françoise Louise Adélaïde BELLENOM, son épouse, demeurant à Saint-Dyé, Dominique Henri Marcou ROGER et Marie Clotilde BERGERON, son épouse, demeurant à Saint-Dyé, TRINQUART-BERNIER, libraire à Paris, de l'argent comptant, du mobilier, une maison à Blois, 18 rue d'Angleterre et une Closerie dite Le Coquet aux Grouets, commune de Blois.

 

 

L'AFFAIRE RIFFAULT

 

Jean-Louis PORCHER avait acheté le 10 Juin 1819 de Monsieur EGRET-LEMAITRE une maison à Blois, 17 Quai du Département et il la fait ravaler (demande à la mairie du 02 Janvier 1821).

Il achète également, à une date indéterminée, une maison à Blois, rue des Juifs.

Le 31 Octobre 1828, il vend à Jeanne MORIET, veuve de Jacques LEMAIGNEN, notaire à Blois chez qui il avait été clerc, l'usufruit sa vie durant de la maison, 17 Quai du Département, moyennant 10.000 Frs déjà payés en différents versements. Le 31 Octobre 1822, il avait déjà constitué une rente viagère de 600 Frs par an au profit de Madame veuve LEMAIGNEN. N'était-ce pas pour lui rembourser des sommes qu'il lui devait ? Ce qui expliquerait qu'il aurait dû rétrocéder son Etude de notaire à Me LEMAIGNEN.

Le 24 Janvier 1836, il vend par adjudication cette maison à Louis Coradin AUCHER-LEMAIGNEN, marchand à Blois, Faubourg de Foix et à Léon LEMAIGNEN-BEZARD, son neveu, moyennant 14.400 Frs et la charge de continuer la rente au profit de Madame LEMAIGNEN-MORIET. Par la même adjudication, il vend une pièce de terre à Sambin et la maison à Blois, rue des Juifs à un sieur MILLOCHIN. Enfin, toujours en vertu du même procès-verbal d'adjudication, il vend à Monsieur Eugène PEAN-COUPE, la maison Quai du Département, à l'angle de la rue des Jacobins, alors nouvellement construite.

A la même époque, il vend également les biens qui lui avaient été donnés par Madame PORCHER-AUCHER sa mère, notamment la Métairie des Blanchardières.

Ces ventes sont motivées par un revers de fortune de Jean-Louis PORCHER survenu en 1835, dont nous avons l'explication dans une lettre qu'il écrivait le 26 Mai 1835 à son beau-frère, Pierre Samuel BEZARD et à Léon LEMAIGNEN, son neveu.

"Je n'ai pu jusqu'à présent vous écrire ; j'éprouve un battement de coeur qui ne me permet toujours pas de pouvoir écrire, la main me tremble et j'ai peine à tracer les lignes, mais je ne puis résister au besoin que j'ai de m'épandre auprès de vous et de vous remercier de la part que vous avez bien voulu prendre à mes peines... Je connais votre bon coeur, votre amitié pour moi ; vous m'en avez donné une grande preuve en m'encourageant à supporter avec résignation le malheur certain dont j'étais menacé.... C'est bien malgré moi que je vous ai causé du déplaisir ; je vous jure que j'étais loin de me douter d'un tel événement ; mes affaires étaient au-delà de mes espérances ; non seulement je réparais mes pertes mais j'allais amasser quelque fortune, lorsque Monsieur RIFFAULT, par sa trop coupable négligence est venu détruire mon bonheur et celui de ma fille et me faire compromettre les intérêts de ceux qui m'avaient honoré de leur confiance. Heureusement, je n'ai rien à me reprocher. Mes créanciers auront une portion de la fortune de ma fille. Certainement, quand Madame PORCHER me l'a donnée, elle était loin de se douter qu'elle pourrait avoir avec un pareil usage.... Je puis certifier que Blois est perdu pour moi, me voilà exilé... Le malheur ne cessera donc jamais de me poursuivre.... Je voudrais avoir des nouvelles d'Emilie (sa nièce) ; l'époque où elle va avoir le bonheur d'être mère doit approcher....".

Il semble bien résulter de cette lettre qu'il avait déjà eu des revers de fortune (sans doute alors qu'il était notaire) mais il s'en relevait.

 

Les lettres et documents divers concernant l'affaire RIFFAULT, bien que soigneusement classés et numérotés par sa fille Laure, ont été par la suite dispersés au milieu d'autres documents. Il a été très difficile de les regrouper, ce qui permet de reconstituer cette affaire qui a troublé l'existence de Jean-Louis PORCHER pendant plus de trente ans et lui a fait subir un revers de fortune considérable, au point qu'il fit lui-même au moins deux récits de son différent avec François Paul RIFFAULT.

Il explique que François Paul RIFFAULT et lui-même étaient du même âge. Ils firent l'un et l'autre leurs études au collège de Blois. François RIFFAULT devint notaire à Blois, succédant à son oncle et Jean-Louis PORCHER succéda à Jacques LEMAIGNEN, son grand oncle. Il s'était crée entre eux une grande intimité. Mais à la révolution de 1830,

"François RIFFAULT avait manifesté trop chaudement son opinion, et, par là, indisposé le parti contraire dans lequel se trouvait beaucoup de gens qui lui avaient confié des fonds et finirent pas ne vouloir plus avoir de relations avec lui et lui demandèrent leur argent. Dans le commencement, ces demandes de remboursement n'avaient pas d'autres motifs que la politique, mais elles se succédèrent si rapidement et en une telle quantité que François RIFFAULT finit pas ne plus pouvoir faire des rentrées suffisantes pour faire face aux paiements. D'un autre côté, il n'entendait rien aux affaires et était on ne peut plus négligent et d'une excessive légèreté. Il y avait dans ses affaires le désordre le plus blâmable.

Tous les notaires, d'ailleurs, se mêlaient alors de placements de fonds, ce que le gouvernement a sagement défendu". NIHIL NOVI SUB SOLE !

 

L'Etude de François RIFFAULT était plus importante que celle de Jean-Louis PORCHER, mais elle périclita rapidement et François RIFFAULT, dès 1831, demanda à son ami et ancien confrère de l'aider. Jean-Louis PORCHER, dans sa grande générosité endossa plusieurs créances de son ami et lui prêta de l'argent.

François RIFFAULT signa ainsi environ 45 billets à ordre au profit de Jean-Louis PORCHER, retrouvés au dossier, pour un montant de plus de 200.000 Frs, ce qui était une somme considérable, entre 1834 et 1835.

Jean-Louis PORCHER commença à s'inquiéter et fit déposer aux minutes de Me PARRAIN, notaire à Blois, le 05 Février 1836 deux déclarations écrites et signées par François Paul RIFFAULT, l'un le 08 Mai 1835, l'autre le 30 Janvier 1836 (daté de Gand en Belgique).

 

Dans la première déclaration, il écrit :

"Je soussigné déclare qu'ayant toujours administré mes affaires sans ordre, n'ayant tenu aucune écriture .... J'étais lin de me douter de ma position que je trouve incroyable et que je ne puis encore m'avouer moi-même. Lorsque mon crédit s'est affaibli, j'ai prié instamment mon ami Monsieur PORCHER-LINGER de venir à mon secours, ce qu'il fit de la manière la plus obligeante... Sa dette est donc pour moi et ma famille une affaire d'honneur... J'aime à croire que Madame RIFFAULT, mon épouse lui tiendra la parole qu'elle lui a donnée en ma présence... Persuadé maintenant que ma position est désespérée, je supplie ma femme et mes enfants de tenir envers Monsieur PORCHER la promesse qui lui a été faite, mais que ma femme n'a jamais voulu signer, affirmant que sa parole valait un écrit .... etc....".

 

Dans la seconde déclaration, il expose les modalités des prêts qu'il demanda à son ami.

Dans une autre note, Jean-Louis PORCHER expose que son ami avait une très bonne Etude, bien supérieure à la sienne, qu'il fit un mariage avantageux. Il inspirait confiance, non seulement par sa grande fortune mais encore par son caractère d'honnête homme. Il était d'une société agréable et généralement aimé".

Malheureusement, sa conduite conjugale n'était pas irréprochable.

Jean-Louis PORCHER prétend que son ami lui aurait confié :

"Je n'ai pas été longtemps dans mon mariage sans m'apercevoir que j'avais une femme du caractère le plus acariâtre ; ma maison était devenue un enfer ; à table, elle servait ses enfants, mes clercs et elle, et après avoir écrémé les mets, elle me laissait moi-même me contenter de ce qui restait ....Elle exigeait que je lui remisse le revenu de tous ses biens prétendant qu'ils étaient à elle ... Ces procédés m'ont fait m'éloigner de ma maison et prendre des habitudes ailleurs".

On conçoit que dans ces conditions, Madame RIFFAULT n'ait jamais voulu ratifier les engagements de son mari envers Jean-Louis PORCHER.

Le plus surprenant est que François RIFFAULT, qui a contraint par sa faute Jean-Louis PORCHER à vendre tous ses biens pour payer ses dettes se pose en victime. Il écrit à Pierre Samuel BEZARD, le 1er Juin 1835, de Brest

"La faillite inattendue de Monsieur PORCHER-LINGER, votre beau-frère, m'expose à perdre une créance de 2.000 Frs que j'ai à exercer sur lui"

et il menace de porter plainte au Procureur !

Me PARRAIN, successeur de Jean-Louis PORCHER essaye en vain d'obtenir le cautionnement de Madame RIFFAULT et il apprend que son mari songe à quitter la France, ce qui explique ses voyages à Brest puis à Gand. Jean-Louis PORCHER est allé lui-même à Gand lui faire signer la déclaration ci-dessus du 30 Janvier 1836. Peu après il part définitivement en Amérique où il décédera, laissant sa femme se débrouiller de ses affaires.

Il résulte d'un ouvrage intitulé "TONNELLE et CLOCHEVILLE" écrit par le Chanoine BOSSEBOEUF de Tours (archives départementales de Tours cote G g 379) que François Paul RIFFAULT et Marie Anne Angélique POULVE, son épouse, eurent une fille, Pauline Angélique Amélie, née à Blois le 12 Octobre 1810 qui épousa à Blois le 07 Février 1831 Louis TONNELLE, Docteur en Médecine à Tours. De ce mariage naquit un fils, Louis Nicolas Alfred né à Tours le 05 Décembre 1831.

Ne pouvant rien obtenir de Madame RIFFAULT-POULVE, Jean-Louis PORCHER essaya de s'adresser à Madame TONNELLE, sa fille, mais en vain.

Il semble que ce pauvre Jean-Louis PORCHER ait pris son parti pendant plusieurs années de son infortune.

Il se fait cependant délivrer en 1850 diverses attestations du Juge de Paix de Blois et d'un certain D. LEMAIGNEN, Juge de Paix suppléant et ancien maire de Blois certifiant :

"qu'il s'est toujours conduit de manière à mériter l'estime et la considération de ses concitoyens. Que si des revers de fortune causés par des pertes énormes, résultat de placements imprudemment faits, l'ont forcé à un arrangement avec ses créanciers, ce malheur n'a fait que faire ressortir davantage son honneur, sa probité et sa délicatesse qui sont demeurés sans tâche. Monsieur PORCHER a emporté le regret de tous".

Il résulte d'ailleurs, d'une lettre de Me PARRAIN du 23 Février 1843 écrite à Monsieur De La NOUE, ancien Président à la Cour Royale d'Orléans, ami de Jean-Louis PORCHER, que celui-ci a remboursé ses créanciers à 60, 70 ou 100 %.

Le 21 Février 1860, donc bien longtemps après ces événements, sa fille, Laure lui écrit qu'elle a appris par Madame AUCHER, sa cousine, que Madame TONNELLE, fille de François Paul RIFFAULT aurait l'intention de payer ses dettes. Madame TONNELLE venait de perdre son mari

"Je ne sais même pas trop si ce n'est pas fou qu'il est mort. Il avait une fortune considérable. Puis après ce premier malheur, elle est frappée dans son fils, son unique enfant. Le malheureux jeune homme est emporté par une fièvre typhoïde à 20 et quelques années, au moment où il allait contracter un beau mariage. Sa pauvre mère a donc l'intention, dit-on, d'entrer dans le convent où est déjà sa soeur et leur mère.... Il me semble que par Ernest (LEMAIGNEN) qui pourrait écrire à son cousin DEMEZIL (de Tours), on pourrait savoir quelque chose à ce sujet .....

Aussitôt, Jean-Louis PORCHER reprend espoir et alerte son cousin et ami, D; LEMAIGNEN, juge de paix à Blois. Celui-ci pense qu'il faut prendre Madame RIFFAULT par les sentiments religieux.

Le 28 Mars 1860, Laure écrit à son père qu'elle a lu dans le journal que

"M. TONNELLE, directeur de l'école de médecine de Tours venait de mourir : apparemment il n'était donc pas encore mort lorsque Madame AUCHER m'en a parlé".

Elle ajoute qu'il n'était pas question que Madame RIFFAULT partage les intentions de sa fille de payer ses dettes. Elle est beaucoup trop avare pour cela et ses intérêts pécuniaires prennent le pas sur ses sentiments religieux. On peut compter sur elle "pour réparer tous les maux qu'elle nous a fait".

Ernest LEMAIGNEN écrit le 16 Mai 1862 à Jean-Louis PORCHER qu'il vient d'apprendre que :

"Madame TONNELLE venait de mourir le 13 de ce mois à la Galanterie, commune de St-Cyr sur Loire près de Tours. Il ne reste plus que Madame RIFFAULT et Mademoiselle Janny, sa soeur, toutes deux chez Madame DE LIGNAC, rue de l'Archevêché...".

Le 24 Juin 1862, le journal "La France Centrale" de Tours rapporte que :

"le conseil municipal de Tours a été saisi du testament par lequel Madame TONNELLE a légué à la ville de Tours la nue-propriété (l'usufruit étant réservé à sa mère) de trois fermes, un marché de terres dans le Loir et Cher et la terre des Fontaines en pleine propriété, le tout à charge de fonder une maison de convalescence pour les malades de l'hôpital de Tours et un centre d'apprentissage pour les jeunes".

Si l'on conçoit que les tourangeaux aient donné en reconnaissance de ce legs le nom "Tonnellé" à l'un de leur boulevard, on comprend aussi l'indignation de ce pauvre Jean-Louis PORCHER qui apprend ainsi que toute la fortune TONNELLE lui échappe. Aussi, multiplie-t-il les démarches qu'il avait pratiquement abandonnées depuis 1836.

Il fait intervenir Monsieur HUAU, de Romorantin, son ami et Monsieur BATAILLER, auprès de Madame RIFFAULT. Mais, Madame RIFFAULT ne veut rien entendre ; elle prétend qu'elle s'est dépouillée de tous ses biens au profit de la communauté religieuse où elle vit.

Il lui écrit lui-même une longue lettre le 24 Septembre 1862, relatant tous les faits ci-dessus.

"Plus d'un quart de siècle s'est écoulé depuis les événements terribles qui sont venus nous frapper l'un et l'autre durant ce laps de temps. Plus de d'une fois j'ai été sur le point de rompre le silence ; mais un sentiment que vous apprécierez sans doute ma continuellement fait différé jusqu'à présent.

J'avais pensé, Madame, que d'un moment à l'autre vous prendriez l'initiative à mon égard ; ayant été déçu dans cette espérance, arrivés l'un et l'autre aux limites de notre carrière, j'ai dû mettre un terme à la patience et vous adresser enfin une déclaration de Monsieur votre mari dont je ne doute pas que vous n'ayez jamais eu connaissance.... Je regrette, Madame, de me trouver forcé de vous remettre sous les yeux des événements dont le souvenir doit vous être aussi pénible qu'il l'est à moi-même de vous les relater. La déclaration que vous trouverez ci-jointe est l'historique des faits qui se sont passés entre nous, de vos promesses et de vos engagements envers moi. Je me contenterai de rappeler la visite que nous fimes ensemble à Tours à Monsieur et Madame TONNELLE ; là, en leur présence, et après que vos enfants eurent joints avec instance, leurs prières aux vôtres, pour me décider à ne pas abandonner Monsieur RIFFAULT et de tâcher de la sauver, vous avez, approuvée par eux, renouvelé encore la promesse que vous m'aviez faite plusieurs fois, que je ne perdrai jamais rien avec votre mari, me répétant même que votre parole valait un écrit.... Ce malheur a été le prélude et la conséquence d'un autre non moins cruel : par suite, ma fille a fait un mauvais mariage ; avant trois ans il lui fallait quitter son mari, et revenir demeurer avec son père, sa fortune encore considérablement amoindrie par cette fatale union, et son existence toute brisée....

Les sentiments religieux qui vous animent mettant connus, me font espérer que vous ferez droit à ma juste réclamation et que la pieuse et excellente Demoiselle Janny, votre fille ne sera pas sans vous y engager.... Je suis donc convaincu, Madame, que vous ne voudrez pas quitter cette terre avec le regret de n'avoir pas rendu justice à un viel ami qui était venu avec tant d'empressement que de dévouement à votre secours dans des circonstances si difficiles....".

N'ayant pas reçu de réponse, Jean-Louis PORCHER s'adresse à nouveau à ses amis HUAU et BATAILLER qui vont voir Madame RIFFAULT dans la communauté où elle s'est retirée avec sa fille. Ils n'obtiennent qu'un refus poli. Ils conseillent alors à Jean-Louis PORCHER d'en parler à la Supérieure de la communauté, car Janny (soeur Louise) fera certainement un testament en faveur de cette communauté après le décès de sa mère.

Il ne perd cependant pas courage et, après quelques échanges de lettres avec ses amis et conseillers HUAU et BATAILLER, il fait écrire à Madame RIFFAULT par BATAILLER, le 22 Juin 1865 une longue lettre de six pages reprenant toute la genèse de l'affaire et exposant tous les arguments possibles pour la fléchir.

BATAILLER lui écrit le 06 Août 1865 que :

"notre vieille dévote a, comme je le craignais, gardé le silence.... Je crois mon pauvre ami que tout ce que tu tenterais maintenant serait peine perdue et que ce qu'il y a de mieux à faire c'est de ne plus te tourmenter de cette affaire....".

Jean-Louis PORCHER n'en fait rien et le 15 Août 1865, il écrit une dernière lettre assez vive à Madame RIFFAULT :

"Vous avez gardé le silence sur la lettre que j'ai eu l'honneur de vous écrire le 22 Juin dernier.... Votre conscience Madame me semble rassurée par le souvenir de vos largesses, envers cette communauté, mais permettez moi de vous dire que cette pensée est erronée lorsqu'un préjudice causé à quelqu'un est irréparable. Les sacrifices de cette nature peuvent être agréable à Dieu ; mais lorsqu'on a la possibilité de réparer (et qu'on ne le fait pas...) alors selon moi le bienfait ne peut avoir de valeur auprès de Dieu et il devient une faute de plus".

Jean-Louis PORCHER devait décéder cinq ans après cette dernière lettre sans avoir jamais pu obtenir réparation du dommage que lui avait causé son ancien ami François Paul RIFFAULT.

Il serait intéressant de rechercher le lien de parenté qui existait sans doute entre ce dernier et Eugène RIFFAULT, qui fut Maire de Blois et qui était lui-même apparenté à Charles ROGER-BEZARD (voir l'étude ci-après sur ce dernier).

 

 

L'AFFAIRE FAIZANT

 

Jean-Louis PORCHER n'a pas seulement été tourmenté pendant presque toute sa vie par l'affaire RIFFAULT ; il eut aussi de graves préoccupations pécuniaires avec un autre notre, Me FAIZANT successeur de Me DE SAINT LOUP à Martizay (Indre) ; mais il put non sans difficulté, récupérer ses fonds en 1868 ; il en attendait le paiement depuis 1846.

La créance de Me FAIZANT étant due conjointement à Jean-Louis PORCHER et à Ernest LEMAIGNEN, il en résulte un long échange de lettres entre eux qui contiennent des détails très intéressants sur la vie d'Ernest LEMAIGNEN. Aussi, cette affaire FAIZANT sera t-elle exposée plus loin dans l'étude de la vie d'Ernest LEMAIGNEN et le dossier relatif à cette affaire est classé à "Ernest LEMAIGNEN". On y trouvera aussi des lettres de Jean-Louis PORCHER à Ernest LEMAIGNEN retraçant les événements de la révolution de 1848.

 

 

LES BLANCHARDIERES

 

Malgré ses revers de fortunes, Jean-Louis PORCHER devait cependant avoir quelque aisance, car en 1849 il achète la Métairie des Blanchardières, commune de Marcilly en Gault, prés de Neung sur Beuvron.

Par lettre du 17 Décembre 1849, il conseille à sa mère d'acheter cette métairie, pour elle seule, et non en indivision avec son cousin AUCHER. Madame veuve PORCHER-AUCHER avait une créance hypothécaire sur cette propriété contre un certain LERASLE (qui devait sans doute l'avoir achetée lorsque Jean-Louis PORCHER avait dû la vendre en 1836) et son fils lui conseille de ne pas l'acheter trop chère. Il l'invite à demander conseil à "notre bon parent LEMAIGNEN-DOULCERON" (qui est-ce ?).

En définitive, c'est lui qui achète les Blanchardières le 22 Décembre 1849 à la barre du tribunal de Romorantin. Son parent et ami, André LEMAIGNEN-PEAN le lui annonce par lettre du 23 Décembre 1849. Il est précisé dans cette lettre qu'il s'agit des Petites et Grandes Blanchardières.

Il revendra cette propriété d'une contenance de 142 hectares 88 ares 95 centiares le 03 Juin 1860 (voir titre nouvel du 18 Juillet 1889) et le prix n'en sera payé que beaucoup plus tard à Madame DUTHEIL, sa fille.

Cette propriété des Blanchardières est la même que celle qui lui avait été attribuée par le partage du 08 Août 1812 et qu'il avait dû vendre pour régler l'affaire RIFFAULT.

Il s'occupe aussitôt de louer, réparer et mettre en valeur cette propriété avec les conseils de Me Adrien TAILLARDA, notaire à St-Dyé (dont la femme était la soeur de Madame Cécile Edmond PERRIER, propriétaire de Dotton à Périgny) ainsi qu'il écrit à sa mère le 17 Janvier 1850.

Il songe à s'y installer et à la meubler pour y recevoir Pierre Samuel BEZARD et sa femme, ainsi que sa mère.

On a l'impression que l'achat de cette propriété et son aménagement constituent enfin pour lui un dérivatif à ses ennuis et une raison de vivre.

Fin Février ou début Mars 1851, il écrit une longue lettre à mère pour la dissuader de venir le voir aux Blanchardières, car la maison est encore inhabitable, et le voyage épouvantable la fatiguera. Cependant, si elle y tient, il se conformera à ses désirs en bon fils respectueux, reconnaissant et soumis.

Mais, comme ses moyens financiers ne lui permettent pas d'effectuer les travaux de réparations et de se procurer l'ameublement nécessaire, il semble que se soit sa mère qu'il les ait payés. Comme c'était une femme d'affaire, elle demanda à son fils de lui vendre par acte sous seings privé les Petites et Grandes Blanchardières (lettre du 14 Février 1850). Une lettre du 13 Avril 1851 confirme d'ailleurs que sa mère lui avait donné du mobilier, outre deux pièces de vin.

Il poursuit les travaux de réparations et compte qu'ils seront terminés à la St Jean 1851 (lettre du 13 Avril 1851 et du 09 Juin 1851).

Il semble qu'il ait dès lors habité régulièrement sa propriété des Blanchardières, car sa fille Laure, entre 1852 et 1860 lui écrit plusieurs lettres dont lesquelles elle lui demande à diverses reprises quand il viendra la voir à Paris.

Nous ignorons pourquoi il revendit cette propriété dix ans après l'avoir acquise.

 

 

LEGS POUR MADAME DEZAIRS-LEMAIGNEN

A JEAN LOUIS PORCHER

 

Madame Françoise LEMAIGNEN, rentière, veuve de Monsieur Jean François Philippe DEZAIRS, demeurant à Paris, 32 rue de Penthièvre, est décédée à son domicile le 02 Août 1857.

Par son testament olographe à Paris, en date du 20 Septembre 1847, déposé au rang des minutes de Me PIAT, notaire à Paris, elle avait institué Jean-Louis PORCHER son exécuteur testamentaire et lui avait légué la somme de 1.000 Frs et elle avait institué légataires universelles :

1°) Madame Adélaïde Augustine LEMAIGNEN, propriétaire, veuve de Monsieur Alexandre Victor MEUNIER, en son vivant, Maître de la Poste aux Chevaux à Beaumont sur Oise, demeurant à Beaumont sur Oise (Seine et Oise).

2°) Mademoiselle Victoire Aimée LEMAIGNEN, célibataire, majeure (le 1er Septembre 1857), professeur de piano, demeurant à Paris, Place Bréda n°10, et depuis (23 Mars 1862) épouse de Monsieur Gaston Esprit EUZET, demeurant à Nîmes (Gard).

Soeurs germaines entre elles.

Ses petites nièces.

Elle avait un neveu : Auguste LEMAIGNEN, époux de Madame Augustine JAILLOUX, laquelle est décédée, veuve, avant le 02 Août 1857 et après le 20 Septembre 1847.

Il a été impossible de trouver à quelle branche de la famille LEMAIGNEN se raccordait cette Françoise LEMAIGNEN, épouse DEZAIRS.

 

 

DECES DE JEAN LOUIS PORCHER

 

Nous ne savons rien des dernières années de Jean-Louis PORCHER. Il demeurait, après avoir vendu les Blanchardières avec sa fille Laure, à Paris, 4 rue de Moscou, au 4ème étage, puis vers 1863, rue d'Amsterdam, n°37.

Le 15 Septembre 1870, il habitait à Vendôme, 53 Faubourg Chartrain, dans une maison qui avait été louée temporairement à Ernest LEMAIGNEN afin que sa femme puisse accoucher à Vendôme (Fernand LEMAIGNEN y est né le 29 Août 1870). Pourquoi Ernest LEMAIGNEN avait-il alors loué cette maison ? Pourquoi Jean-Louis PORCHER était-il venu y habiter ? Ce jour là, il écrivait la dernière lettre que nous possédons de lui, à "Monsieur le Chanoine et très honorable parent". Il s'agit du Chanoine VENOT de Blois qui avait été curé à Périgny (voir lettre de Pierre Samuel BEZARD, du 29 Avril 1852). Son écriture était tremblotante.

Ce Chanoine lui avait remis une somme de 250 Frs à remettre aux légataires de Madame DEZAIRS-LEMAIGNEN et lui avait demandé si cette somme leur avait bien été remise. Jean-Louis PORCHER le lui confirme et lui envoie la décharge signée des légataires et en profite pour lui demander un service :

 

"Voici maintenant le service que je voudrais que vous me rendissiez. Elevé dans ma jeunesse dans les sentiments religieux que j'ai bientôt, comme tant d'autres, négligés, de sérieux chagrins m'y ont ramenés ; mais mon grand âge ne m'ayant point enlevé ma santé qui est assez bonne pour mes 84 ans que je commence, je désirerais employer le peu de temps qui me reste maintenant, à payer au moins un peu tous mes pêchés par un sérieux repentir. Excepté ma négligence en religion, ils sont à mes yeux peu nombreux, car j'ai toujours été une probité parfaite. J'ai été bien trompé et dupé par de soi disants amis. Je vous quitte car je vois que mon griffonnage est illisible, mais mes mains sont un tremblement continuel. Je désirerais que vous me fassiez connaître une pension ecclésiastique, si c'était en votre pouvoir de m'y recommander. Il y en a une ici à Vendôme, appelée Le Saint Coeur, située rue Faubourg Chartrain Loir et Cher qui me conviendrait bien ; mais je ne connais personne ici et je n'y suis que pour peu de temps. Si vous me faites l'honneur de me répondre, veuillez m'adresser votre lettre à : Monsieur PORCHER, Maison de Monsieur LEMAIGNEN-DEMEZIL, faubourg Chartrain, n°53, Vendôme Loir et Cher".

 

Cette lettre est bien émouvante et semble résumer toute sa vie.

Le 25 Avril 1864, il avait rédigé son testament déposé au rang des minutes de

Monsieur CORRARD, notaire à Boulogne, près de Paris, le 27 Juin 18 :

"Je donne et lègue mon âme à Dieu et le prie de l'avoir en sa sainte garde, et de me pardonner tous mes pêchés. Je donne et lègue à Mlle Louise PETIT, dite Zéphirine, de la Chapelle Vendômoise, ma cuisinière, tous les meubles ci-après désignés, .....".

(Suit l'énumération de 16 articles mobiliers ou de garde robe).

 

Il décède à Vendôme, 53 Faubourg Chartrain, le 05 Janvier 1871, à quatre heures du matin, peu après l'entrée des allemands à Vendôme, à l'âge de 83 ans.

Il est enterré au cimetière de Vendôme (concession du 23 Octobre 1884). Le service religieux fut célébré à la Madeleine le 06 Janvier par le curé MONSABRE.

 

Sa succession comprend :

- Mobilier non légué 2.136 Frs

- Deniers comptants 380 Frs

- 1.300 Frs de rente sur l'Etat 3% 22.100 Frs

- Arrérages de ces titres 650 Frs

- Créance hypothécaire sur Me CHEVET,

Notaire à Martizay (Indre) 7.559 Frs

- Arrérages de rente viagère à Compagnie d'Assurance

Nationale 260 Frs

----------------

TOTAL 33.085 Frs

 

"Pas d'immeubles" stipule la déclaration de succession.

 

Les droits de succession s'élevant à 457.21 Frs sont payés le 03 Juillet 1871 par sa fille Laure, seule héritière ainsi que le constate un acte de notoriété dressé par Me PLANCHAT, notaire à Paris le 27 Juin 1871. Pourquoi le testament avait-il été déposé le même jour chez un notaire de Boulogne ?

Comme on le voit, Jean-Louis PORCHER ne laissait pas une fortune bien considérable. Il avait vendu les Blanchardières le 03 Juin 1860, moyennant le prix de 40.000 Frs dont 10.000 Frs payable le 1er Novembre 1870 (dix ans après !) avec intérêts à 5 % et 30.000 Frs convertis en une rente viagère de 3.000 Frs par an à son profit, et, après son décès, au profit de sa fille Laure, réduite alors à 1.800 Frs par an. Cette rente viagère fut régulièrement payée jusqu'au décès de Laure DUTHEIL.

Il ne reste donc de la belle fortune immobilière amassée par la Famille PORCHER depuis le début du XVIIIe siècle qu'une rente viagère qui va s'éteindre avec le décès de Laure (Madame Pierre Samuel BEZARD-PORCHER, soeur de Jean-Louis PORCHER, et son fils Léon avaient déjà vendu la moitié de cette fortune qui leur revenait).

 

MADAME CAVILLIER-DUTHEIL

NEE MARIE LAURE PORCHER

 

Marie Laure PORCHER était née à Blois le 1er Décembre 1816 du mariage de Jean-Louis PORCHER et de Aurore Marie Catherine LINGER. On sait qu'elle avait eu un frère, Louis Samuel né à Blois le 23 Septembre 1814, décédé le 09 Octobre 1814, à l'âge de 16 jours. Elle avait perdu sa mère le 16 Juillet 1832. Son père, contraint par ses revers de fortune, consécutifs à l'affaire RIFFAULT, avait fait procéder à la liquidation de ses droits dans la succession de sa mère en 1836 et lui avait rendu compte de sa tutelle en 1840.

Elle épouse à la mairie du 1er arrondissement de Paris, le 30 novembre 1840, Adolphe Eugène CAVILLIER, référendaire au Sceau de France, demeurant à Paris, 40 rue Saint Lazare.

Le contrat de mariage est reçu par Me GUENIN, notaire à Paris le 26 Novembre 1840. Le régime adopté est celui de la communauté d'acquêts. Laure PORCHER apporte en mariage sa garde robe et diverses créances hypothécaires pour un montant de 120.000 Frs.

Le mariage avait été conclu par l'intermédiaire du curé de Gournay, l'Abbé MELICIEUX, ami de Madame BLAINVILLE (dont nous parlerons plus loin), grand tante de Laure.

 

Le 02 Octobre 1840, l'Abbé MELICIEUX écrivait à Jean-Louis PORCHER :

"La confiance avec laquelle vous avez daigné m'entretenir au sujet de l'avenir de votre charmante Laure, m'impose le devoir de vous présenter un ami du respectable Monsieur Le Chevalier de Monsieur, dont la belle position, les excellents principes, la famille honorable et l'état de fortune me paraissent réunir les conditions qui doivent assurer votre bonheur et celui de votre excellente Demoiselle. Je vous ai dit que je regardais comme un devoir essentiel pour le prêtre, de se prêter volontiers à former un rapprochement entre des familles chrétiennes, que tout l'avenir de la religion est là. Que notre société française, surtout réclame en ce moment le concours du Clergé pour conserver la tradition des bons principes au milieu des dévergondages et des mauvaises passions. Je viens vous dire que la Divine Providence m'a servi admirablement dans la recherche que je m'étais imposé depuis notre entretien. Plusieurs ecclésiastiques de Saint-Roch ...... vous diront que Monsieur CAVILLIER, référendaire au Sceau de France a déjà refusé un parti très brillant ..... Votre bonne parente, Madame BLAINVILLE a eu l'extrême bonté de me communiquer la lettre qu'elle vous écrit pour vous annoncer la visite de Monsieur CAVILLIER. Je serais heureux si je suis l'instrument de Dieu pour unir deux familles si respectables".

 

Le 14 Octobre 1840, il écrit qu'il accepte d'aller bénir cette union et écrit à nouveau dans le même sens le 24 Novembre.

Mais le bonheur du ménage CAVILLIER ne va pas durer longtemps. Monsieur CAVILLIER se lance aussitôt dans une affaire financière qui va le ruiner.

 

Il résulte d'un acte du 08 Août 1841 intervenu entre lui et :

1°) Monsieur Dominique LAMBERT, demeurant à Sauwartan près de Dour (Belgique) près Mons.

2°) Monsieur Jean Jacques PASTURIN, avocat, ancien avoué, demeurant à Evry sur Seine

que Monsieur LAMBERT avait acquis le Charbonnage de Sauwartan dit la Grue Bouillon du Bois de Saint Ghislain et employé une somme considérable au développement des travaux qu'il a fait exécuter.

Après avoir consacré à cette acquisition et à ces travaux les fonds dont il pouvait disposer et ceux dont Messieurs PASTURIN et CAVILLIER lui avaient fait l'avance, Monsieur LAMBERT a constitué une société par action au capital de 2.500.000 Frs. Nous avons d'ailleurs au dossier, 4 actions de cette société.

Ces actions n'ayant pas été placées, les associés ont convenu par cet acte du 08 Août 1841, de remettre à Monsieur CAVILLIER 350 actions de 1.000 Frs en garantie de sa créance, étant de 127.000 Frs.

Pour avancer à cette société les capitaux qu'il lui avait fournis, Monsieur CAVILLIER avait réalisé la totalité des 21 créances hypothécaires apportées par sa femme en mariage, s'élevant à 120.000 Frs.

La société dut continuer à péricliter et le 14 Novembre 1843, Madame CAVILLIER formule une demande de séparation de biens contre son mari.

Le 20 Décembre 1843, le Tribunal de 1ère Instance de la Seine prononce la séparation de biens au profit de Madame CAVILLIER contre son mari, défaillant. Le 16 Février 1844, il est procédé à la liquidation de ses reprises par acte de Me HUET, notaire à Paris en présence de Me MOUILLEFARINE, avoué de Madame CAVILLIER. Il est dit dans cet acte que Madame CAVILLIER poursuivra le recouvrement de ses reprises ainsi qu'elle avisera et contre qui de droit ! Elle n'a donc pas beaucoup d'illusions à se faire pour récupérer ses 120.000 Frs.

Dès le 24 Décembre 1843, Madame CAVILLIER qui se montre déjà une femme d'affaires rédige elle-même la convention suivante qu'elle fait signer à son mari :

"Monsieur Adolphe Eugène CAVILLIER s'étant livré à des entreprises trop considérables qui ont causé sa ruine et l'ont par conséquent mis dans l'impossibilité de remplir ses engagement aux nombres desquels se trouve une dette sacrée à laquelle il ne peut faire honneur, (peut-être s'agissait-il d'une autre dette que celle résultant de l'affaire des charbonnages de Sauwartan). Ces parents et ses amis se sont engagés à venir à son secours et à payer à l'époque et aux conditions qui suivent les sommes pour lesquelles ils auront souscrit .... (suivent les conditions). Je soussigné, Laure Marie PORCHER, épouse de Monsieur CAVILLIER, abandonne pour les causes ci-dessus la somme que je pourrais retirer sur la vente de la nue propriété d'une maison située à Paris, rue Christine, sur laquelle frappe mon hypothèque légale, me réservant néanmoins la jouissance usufructuaire de cette somme jusqu'au décès de Madame veuve PORCHER-AUCHER, ma grand-mère".

Elle désirait en effet conserver des revenus sur le prix de vente de la maison de son mari, jusqu'au jour où elle touchera l'héritage de sa grand-mère.

Le 02 Mars 1844, le curé MELICIEUX écrit à Jean-Louis PORCHER :

"Apprenant que les affaires de Monsieur CAVILLIER ne se terminent pas et vous force de demeurer à Paris, je nourris l'espoir de vous voir avec votre excellente Laure, habiter notre petite ville".

Mais, Laure PORCHER reste habiter chez son père, 4 rue de Moscou à Paris et Monsieur CAVILLIER "ancien référendaire au Seau de France" va habiter à Vienne (Autriche) où il est professeur de langue française et où il décède le 08 Juillet 1859.

Laure PORCHER et son père n'ont vraiment pas de change : Jean-Louis PORCHER a perdu 200.000 Frs en 1834 à cause de son ami RIFFAULT, et sa fille, 9 ans après se fait escroquer toute sa fortune (120.000 Frs) par son mari, si chaudement recommandé par le curé MELICIEUX !

A titre de comparaison, rappelons qu'une propriété de 128 hectares en Sologne, comme les Blanchardières valait à cette époque 40.000 Frs.

 

 

LEGS BLAINVILLE

 

Par son testament olographe en date du 1er Juin 1847 à Ferrières près de Gournay en Bray (Seine inférieure) et dont nous avons l'original (ou le double ?), Madame Denis Sophie LINGER veuve de Monsieur Nicolas François BLAINVILLE a fait de très nombreux legs particuliers, notamment de tous les articles, un par un, composant son mobilier jusqu'à et y compris des fagots de bois et des copeaux, et a légué à Laure PORCHER, sa cousine, la somme de 10.500 Frs et une autre somme de 5.500 Frs et à Monsieur Jean-Louis PORCHER "mon cousin" son épingle en diamant et sa canne à pommeau d'or.

Madame BLAINVILLE est décédée le 05 Juillet 1863, ainsi qu'il résulte d'une annotation à la date du 30 Octobre 1863 dans le carnet que Jean-Louis PORCHER tenait au jour le jour des lettres qu'il envoyait.

Madame BLAINVILLE avait indiqué dans son testament qu'elle avait un frère : Alexandre Jacques LINGER, dont l'absence avait été prononcée par le Tribunal de 1ère Instance de la Seine le 06 Mars 1838.

On a vu dans la correspondance de l'Abbé MELICIEUX à propos du mariage de Laure qu'il indique que Laure est la petite nièce de Madame BLAINVILLE. Or, Madame BLAINVILLE, dans son testament, l'appelle sa cousine. S'il en est bien ainsi, elle serait une fille d'un frère de Madame PORCHER-LINGER, issue avec elle du mariage de Pierre Samuel LINGER, décédé le 06 Septembre 1827 et de Christiane Marguerite WILLAUME, son épouse, décédée le 23 Juin 1833.

 

 

LEGS AROUX

 

Un certain Monsieur Eugène AROUX, dont nous ignorons l'adresse, décédé à Paris le 17 Octobre 1859, avait légué à :

"Laure CAVILLIER-DUTHEIL, née PORCHER (c'est la première fois qu'on lui voit le surnom de DUTHEIL), demeurant à Paris, 4 rue de Moscou, et ce, en reconnaissance d'une amitié de 12 ans, dont le dévouement désintéressé ne s'est pas démenti, et s'est bravement désigné aux attaques de la calomnie, la totalité de mes biens, meubles, livres et manuscrits, y compris ceux de chacun de mes travaux sur DANTE et la propriété de mes traductions en vers du "Paradis Perdu" de MILTON, et des "Amours des Anges" de Thomas MOORE. Je désire qu'elle puisse traiter avec un homme de lettres et un éditeur pour la publication de ma traduction en vers de l'Arioste .....".

"J'institue pour mon exécuteur testamentaire, Monsieur PORCHER, ancien notaire, demeurant aux Blanchardières près de Romorantin et à Paris, 4 rue de Moscou, que je prie d'accepter ma bibliothèque avec les livres qu'elle contient".

 

La fin du testament n'est pas sans faveur :

"Persuadé que Dieu n'a pas besoin du Sceau Sacerdotale pour reconnaître ceux qui sont à lui, et que la fois chrétienne que j'ai toujours professée dans l'âme, suffit pour être sauvé, c'est à dire pour se réunir à lui, je désire être inhumé sans aucune cérémonie religieuse, avec la plus grande simplicité ; un service de 6ème classe suffira ; et voici l'épitaphe qui devra être gravée sur la pierre unie destinée à recevoir mes restes :

Ici repose Eugène AROUX, né à Rouen le 21 Octobre 1793, décédé à Paris le...., ancien magistrat, ancien député et Chevalier de la Légion d'Honneur, traducteur de l'Arioste, de MILTON et de DANTE. Avocat, il lutta pour le droit contre les fraudes au pouvoir. Magistrat, il descendit de son siège plutôt que de faillir à ses convictions. Député, il formula, proposa et contribua à faire adopter la loi sur les chemins vicinaux. Homme de lettre, le premier il signala, en la spécifiant l'essence sectaire dans la "Divine Comédie" dont il donna la clé. Restituant à l'Alighieri son caractère de pasteur Albigeois, il exposa comment l'oeuvre du poète florentin se rattache tout à la fois à l'édifice littéraire des troubadours dont elle est le splendide couronnement, aux doctrines secrètes de l'ordre du Temple et aux rites mystérieux de la Massenie. Mais il cria dans le désert. Resquiescat in Pacé".

 

Jean-Louis PORCHER a dû faire édifier le tombeau et graver cette longue inscription, car il a noté de sa main qu'elle représentait 721 mots et nous avons la carte (à défaut de la facture) de Raymond DARNIS, sculpteur-marbrier, 21 boulevard de Clichy à Montmartre.

Il paya les frais d'enterrement (434,20 Frs) et acheta une concession perpétuelle au cimetière nord de Paris, le 28 Octobre 1859, renouvelée le 14 Octobre 1869. Le monument existe-t-il toujours ?

Laure PORCHER eut ensuite de nombreux démêlés avec les héritiers de Monsieur AROUX qui, semble-t-il, renoncèrent tous à sa succession, sauf sa veuve que Laure qualifie de "Messaline effrontée" et de "Quelle coquine et indigne rouée", dans de nombreuses lettres qu'elle écrivit à son père du 10 Décembre 1859 au 18 Juin 1860 au sujet de cette concession. Elle y expose qu'elle a bien du mal à obtenir de Me PLANCHAT, notaire à Paris, qu'il s'intéresse au règlement de cette succession. Le dossier passe de mains en mains à différents clercs de l'Etude et l'affaire traîne en longueur. C'est tout ce que l'on sait.

 

 

LA CREANCE HUAU

 

Madame veuve PORCHER-AUCHER avait vendu le 07 Mars 1838 aux époux COURANT-DEBULLOY, une maison à Romorantin, rue des Mallards, moyennant le prix de 3.000 Frs. Les acquéreurs revendirent cette maison aux époux LEMAITRE-DEBOINCE. Il restait alors dû à Madame veuve PORCHER, la somme de 2.000 Frs. Les époux LEMAITRE-DEBOINCE et Jean-Louis PORCHER, héritier de sa mère, convinrent de transformer cette somme de 2.000 Frs en une rente viagère de 100 Frs à compter du 1er Janvier 1855 et de 140 Frs à compter du 1er Janvier 1859, sur sa tête et sur celle de sa fille (acte de Me THEVARD, notaire à Romorantin du 23 Décembre 1854).

Suivant acte de Me ROUSSEAU, notaire à Romorantin du 28 Janvier 1856, les époux LEMAITRE revendirent cette maison à Monsieur Louis Jean François HUAU, ancien notaire à Romorantin.

Le 14 Juin 1878, Monsieur Louis Victor HUAU, fils, et Madame Marie Aurélie ROUSSEAU, son épouse, demeurant à Orléans, revendirent cette maison, et par acte de Me ROUSSEAU, notaire à Romorantin du 14 Octobre 1878, Madame DUTHEIL accepte que l'hypothèque garantissant la rente due par Monsieur HUAU soit transférée sur une maison lui appartenant située à Orléans, 9 rue du Grenier à Sel.

Cette rente viagère fut régulièrement payée à Madame DUTHEIL jusqu'à son décès. On a vu, à propos de l'affaire RIFFAULT que Monsieur HUAU avait toute la confiance de Jean-Louis PORCHER.

 

 

DECES DE MADAME DUTHEIL

 

Madame DUTHEIL (on ne sait quand et pourquoi Laure PORCHER se fit appeler CAVILLIER-DUTHEIL puis sur la fin de sa vie, simplement Madame DUTHEIL et même DU THEIL) entretint toujours d'excellentes relations avec Ernest LEMAIGNEN et Fernant LEMAIGNEN, ses couins. Elle leur écrivait de longues lettres, pleines de saveur et qui nous sont très précieuses pour retracer l'histoire de sa famille. Elle tenait ce goût épistolaire de son père. Elle habitait toujours dans l'appartement de son père, 37 rue d'Amsterdam à Paris.

Le 23 Avril 1892, par exemple, elle écrivait à Ernest LEMAIGNEN (voir dossier concernant ce dernier) pour lui faire savoir qu'elle avait vu Monsieur FOUCAULT (voir famille DEMEZIL) le samedi précédent qui était "son jour". Elle nous a dit que la ménage FOUCAULT ne va pas très bien ; "Madame Albert va bientôt leur donner un troisième petit-fils" : c'est André FOUCAULT qui naîtra le 20 Octobre 1892. Elle nous apprend aussi que Madame AUCHER (laquelle, Louis ou James ?) entretient d'excellentes relations avec la famille DEMEZIL. Quand à elle, Laure, elle va être obligée de se faire opérer de la cataracte, ce qui ne l'empêche pas "de faire un petit Whist intime une fois par semaine".

 

 

Le 16 Décembre 1902, le curé de la paroisse St Louis d'Antin à Paris écrivait à Madame Ernest LEMAIGNEN :

"Malgré la réception que m'ont faite les bonnes de votre chère Madame, je me tiens à votre disposition pour faire une nouvelle démarche lorsque vous la trouverez opportune".

 

Madame DUTHEIL avait auprès d'elle une gouvernante, Mademoiselle Henriette ICKKELLE-JANSEN.

Une certaine Dame GRIMM, dont le mari était tapissier, 37 rue d'Amsterdam (témoin à la notoriété après son décès), écrit le 16 Novembre 1903 à Madame Ernest LEMAIGNEN, qu'elle trouve que Madame DUTHEIL s'affaisse beaucoup ; elle parle toujours sans savoir ce qu'elle dit.

"Pour la nourriture, elle ne manque de rien, surtout la boisson, le vin de Bordeaux et le Madère et toutes sortes de liqueurs. Le boucher vient tous les jours". "Une partie de la famille d'Henriette est partie au mois de Septembre ; reste encore une soeur et la nièce ; Henriette est tombée malade ; elle buvait trop de vin ; la nièce fait la grande demoiselle, toujours beaucoup de toilette".

En somme, Mademoiselle Henriette JANSEN et sa famille vivaient la belle vie auprès de Madame DUTHEIL !

Le 16 Août 1904, la même Madame GRIMM écrivait à Madame LEMAIGNEN :

"Madame DUTHEIL devenait de plus en plus malade ; elle ne quitte plus son lit ; elle ne prend pas grand chose en fait de nourriture ; elle ne parle plus comme à son habitude. Je la trouve bien faible et beaucoup de fièvre ; elle ne pas au cabinet ; elle a toujours envie de vomir. J'ai dit à Henriette qu'il fallait aller chercher le médecin ; alors la nièce m'a dit que tous les médecins étaient à la campagne. J'ai parlé pour faire venir Monsieur le curé ; Henriette ne m'a pas répondu. Mais je vais m'en occuper car cela ne peut pas faire de mal à Madame DUTHEIL, au contraire, ça peut lui faire plaisir. Si ça devient grave je vous enverrai un dépêche de suite sans tarder".

Le 17 Août, Mademoiselle W. ENGELS (sans doute la nièce), écrivit à Madame LEMAIGNEN :

"Madame DUTHEIL est malade très gravement. Nous lui avons fait donner les sacrements hier soir ; il vous reste peut être encore un peu de temps pour la voir ....".

Le 18 Août, Madame GRIMM écrit que Madame DUTHEIL est de plus en plus mal :

"Je suis allée chercher Monsieur le curé de St Louis d'Antin et Madame DUTHEIL a reçu les sacrements mardi soir et ça lui a fait plaisir ; elle a très bien répondu à Monsieur le curé ; il a fallu que je mette bien avec Henriette car elle voulait attendre ; la nièce a fini par dire comme moi. La famille d'Henriette est toujours avec elle. Madame DUTHEIL est très oppressée, elle a grand peine à respirer....".

Madame DUTHEIL décéda le 19 Août 1904. Le service religieux fut célébré à la paroisse St Louis d'Antin le dimanche 21 Août 1904 à 11h45 (5ème classe).

Mais peu de temps après l'enterrement, Fernand LEMAIGNEN, son légataire universel, constata qu'aux termes de dispositions de dernières volontés, Madame DUTHEIL voulait être enterrée au cimetière de Vendôme avec son père. Il acheta une concession perpétuelle dans le cimetière de Vendôme le 18 Février 1905 (n°41 de la lettre F, section 1), y fit inhumer les restes de Jean-Louis PORCHER et ceux de sa fille le 23 Février et fit célébrer, conformément aux volontés de Madame DUTHEIL, un office religieux à la paroisse de la Madeleine de Vendôme.

 

Le premier testament de Madame DUTHEIL est daté du 23 Mars 1871 à Vendôme, c'est à dire peu après le décès de son père elle devait encore habiter 53 Faubourg Chartrain. Elle instituait légataire universelle Madame LEMAIGNEN-BEZARD, sa cousine germaine.

Par un deuxième testament, en date du 04 Octobre 1874 à Périgny, elle stipule que si Madame LEMAIGNEN-BEZARD est décédée avant elle, elle entend que ce legs universel profite à ses héritiers.

Par un troisième testament en date du 1er Janvier 1901, elle légua à "Henriette ICKKELLE JANSEN, qui est depuis plusieurs années chez moi ..... pour ses bons soins, la somme de 40.000 Frs" ainsi que sa garde robe, du linge de maison, l'argenterie et divers meubles.

Ces testaments ont été déposés en l'Etude de Me DELAFON, notaire à Paris les 20 et 24 Août 1904.

Le 19 Octobre 1904, il fut procédé à l'inventaire à la requête de Fernand LEMAIGNEN et le même jour, il fut délivré à Mademoiselle JANSEN ses legs particuliers.

Fernand LEMAIGNEN, dès le décès de Madame DUTHEIL avait renvoyé Mlle JANSEN qui se considérait comme maîtresse de la maison et qui avait, dit-on, déjà dilapidé une partie sinon la totalité de l'argent comptant et prie divers objets mobiliers (voir aussi "Vie de Fernand LEMAIGNEN". "Activités diverses jusqu'en 1914").

Ainsi s'éteint la famille PORCHER qui ne laisse plus aucun descendant et dont la fortune s'éteignit également avec la rente viagère servie par Monsieur HUAU a Madame DUTHEIL.

Il ne reste à Périgny que quelques meubles de bois noir incrusté de cuivre, un piano, un très beau nécessaire de dame et un magnifique petit étui en palissandre contenant des couverts et timbales en or ou vermeil pour pique-nique, le tout datant du Deuxième Empire (volés le 24-04-1982) et attestant le goût raffiné de Madame DUTHEIL qui était une femme assez mondaine quoique peu jolie.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille Bezard

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La famille BEZARD est dominée par la forte personnalité de Pierre BEZARD-LEGRAND qui a conservé et classé une telle abondance de titres, lettres, mémoires, comptes, dessins et documents de toute nature, tant sur lui-même que sur sa famille, qu'il est possible d'en retracer l'histoire sinon au jour le jour, du moins presque mois par mois, avec une rigoureuse exactitude.

Ces documents ont malheureusement été complètement déclassés et bouleversés par ses héritiers et il a fallu procéder à un patient travail de reclassement pour faire revivre ce grand ancêtre de la famille.

Ces archives permettent de retracer l'histoire de la famille BEZARD depuis la fin du XVIIe siècle. C'est une famille de commerçants qui a toujours vécu à Blois puis à Périgny.

Le seul fils survivant de Pierre BEZARD-LEGRAND s'est marié avec une fille PORCHER. De ce mariage est issue une fille unique Emélie Marie Brigitte BEZARD qui a épouse Léon LEMAIGNEN, fils de François LEMAIGNEN-VILLOCEAU et de Madeleine FERRON, d'où descendent les LEMAIGNEN de Périgny.

 

 

I - LES ANCETRES DE BEZARD-LEGRAND

Le grand-père de Pierre BEZARD-LEGRAND était Claude de BEZARD, né en 1692, marchant cirier-chandelier à Blois, décédé entre 1756 et 1760.

Il possédait notamment une maison Grande Rue à Blois, pour laquelle il présentait le 02 Février 1742 une requête "aux Présidents Trésoriers Généraux de France au Bureau des Finances de la Généralité d'Orléans" pour l'autoriser à y mettre des contrevents. Il avait acquis cette maison de Jacques LAIGLE le 20 Janvier 1728. Il possédait également de nombreuses rentes et créances et objets mobiliers détaillés dans un partage après son décès du 10 Mai 1765.

Ce Claude BEZARD était issu du mariage de Claude BEZARD (décédé avant 1697) avec Anne ROYER qui épousa en secondes noces Jean LAMBERT (décédé avant 1714) dont elle eut un fils Jean LAMBERT né en 1697. Après le décès de son deuxième mari, elle épousa en troisièmes noces Jacques RICHARD.

Claude BEZARD et son demi frère Jean LAMBERT avaient obtenu de sa Majesté des lettres de bénéfices d'âge le 16 Novembre 1713 et il leur fut nommé des curateurs le 26 Mai 1714 "pour jour des biens à eux échus" dépendant de la succession de leurs pères Claude BEZARD et Jean LAMBERT (la majorité était alors à 25 ans).

Claude BEZARD (grand-père de Pierre BEZARD-LEGRAND) avait épousé Marie COMPAGNON (décédée après 1765).

Elle était issue du mariage de Michel COMPAGNON, marchand toillier-linger et de Gastienne FAUTRIER, décédée à Blois le 21 Juin 1733.

Elle avait un frère et deux soeurs :

1°) Michel COMPAGNON, bourgeois à Blois.

2°) Gastienne COMPAGNON, épouse de Pierre LAURENT, marchand à Blois.

3°) Catherine COMPAGNON, (décédée avant 1734) , épouse de René MOLINEAU , maître apothicaire à Blois, paroisse Saint-Honoré, qui eut un fils René MOLINEAU qui avait plus de 25 ans le 06 Avril 1745.

Les époux COMPAGNON-FAUTRIER jouissaient d'une certaine aisance puisqu'aux termes d'un partage du 18 Juillet 1733, ils possédaient une maison à Blois, rue Beauvoire, paroisse Saint-Honoré, diverses créances et une Closerie de 34 boisselées de vignes avec plusieurs bâtiments à Saint-Gervais. Cette Closerie est échue à Marie COMPAGNON, épouse de Claude BEZARD qui la vendit ensuite à Saturnin DAVIE et Marguerite VENET, son épouse, le 05 Mars 1756 moyennant 2200 livres payables à terme.

 

Du mariage de Claude BEZARD et de Marie COMPAGNON sont issus trois enfants :

1°) Claude BEZARD, marchand à Blois, décédé avant 1765, époux de Catherine BELIN qui est décédée après 1765. Ils eurent trois enfants, mineurs en 1765, dont la descendance est inconnue si ce n'est peut-être une fille, Louise Catherine, qui fut marraine de Pierre BEZARD-LEGRAND, un fils, Barthélémy BEZARD, né en 1755 ainsi qu'il en résulte d'un "certificat de toisement" du 23 Mars 1775 alors qu'il avait 20 ans et un autre fils, Simon Pierre BEZARD, marchand à Blois, curateur de BEZARD-LEGRAND durant sa minorité, qui était peut-être le même que celui appelé BEARD-BOYESE qui fut maire de Blois pendant la Révolution et que BEZARD-LEGRAND appelle son cousin (lettre du 07 mars 1809).

2°) X .... BEZARD (décédée avant 1765) qui de son mariage avec un sieur LEGROUX eut une fille, Marie LEGROUX qui épousa avant 1765, Jacques (dit aussi Pierre) AMAURY, marchand tonnelier à Blois, paroisse Saint-Honoré et dont la descendance est inconnue. (Une Françoise Geneviève AMAURY (1737-1806), fille de Pierre AMAURY, notaire royal à Blois, avait épousé en 1765 Jean-Jacques Clément LEMAIGNEN, huissier royal à Blois (1742-1882). (Voir généalogie AUCHER).

3°) Pierre BEZARD, né en 1726, marchand de toiles à Blois (comme son grand-père, Michel COMPAGNON), décédé à Saint-Gervais le 20 Mars 1777. Il épousa (contrat de mariage du 08 Février 1752), Marie Anne CREUZOT, née en 1727, décédée à Blois le 07 Octobre 1767, inhumée au cimetière de Chambourdin à Blois le 08 Octobre 1767. Pierre BEZARD fut reçu dans le corps et communauté des Marchands Merciers de Blois le 20 Décembre 1745. Marie Anne CREUZOT était la fille de Pierre CREUZOT, marchand épicier à Beaugency. Elle avait une soeur et un frère :

- Sa soeur épousa Claude LIGER, marchand à Beaugency dont elle eut une fille : Madeleine (descendance inconnue).

- Son frère Pierre, fut marchand également à Beaugency (descendance inconnue). Il fut parrain de Pierre BEZARD-LEGRAND.

On sait peu de choses des époux BEZARD-CREUZOT. Il résulte de leur contrat de mariage du 08 Février 1752 que Pierre BEZARD apporta en mariage 3000 livres en marchandises de la boutique de son père (quelle boutique ? Le père était marchand cirier-chandelier et le fils, marchand de toiles) et 2000 livres pour prix d'une maison et appartement sise à Blois, Grande Rue, près de la porte Chartraine, paroisse Saint-Honoré que son père lui donne (il en avait lui-même hérité de son père, Claude BEZARD). Quant à la jeune fille, elle recevait 4000 livres de dot de ses parents.

Le contrat de mariage avait été précédé d'un projet des clauses principales à y insérer, rédigé le 12 Janvier 1752, qu'il est intéressant de consulter. C'est un résumé de la coutume d'Orléans et il démontre l'intérêt alors attaché par les parents des jeunes époux aux clauses financières du mariage. Ce projet est signé (signatures autographes) par au moins 35 parents et amis.

 

Les époux BEZARD-CREUZOT eurent quatre enfants :

1°) Marie Anne BEZARD, épouse de Jean Joseph AMIOT, marchand à Blois, paroisse Saint-Martin.

2°) Pierre BEZARD, marchand à Blois, paroisse Saint-Honoré, époux de Françoise Louise Brigitte LEGRAND. Lors de sa minorité, il avait pour curateur Simon Pierre BEZARD, marchand à Blois qui était peut-être un fils de Claude BEZARD-BELIN.

3°) Anne (dite aussi Hippolitte) BEZARD (mineure en 1777), épouse de Jean LEROUX, commissaire en vins à Blois, paroisse Saint-Solemmes (elle avait pour curateur, étant mineurs, Jacques AMAURY-LEGROUX, son cousin).

4°) Madeleine Ursule BEZARD (mineure en 1777). Elle avait pour curateur Claude LIGER, marchand à Beaugency, son oncle par alliance. Elle deviendra Soeur Madeleine de Gonzagues à la Visitation à Blois.

 

Ces quatre enfants partagèrent le 09 Août 1777, après le décès de leur père et mère, leur fortune qui s'élevait à 75.432 livres, après inventaire, vente des meubles et expertise des immeubles par le contrôleur des bâtiments du Roy à Blois et un architecte de Blois.

Aux termes de ce partage, Marie Anne BEZARD-AMIOT reçoit une maison à Blois "n°61 dans le fond du Cul de Sac du Cygne", donnant rue Porte Chartraine et joignant une maison attribuée à Pierre BEZARD et d'un autre côté LEMAIGNEN, notaire. Elle vendit ensuite cette maison à son frère Pierre BEZARD-LEGRAND le 15 Mai 1792.

Pierre BEZARD-LEGRAND reçut les marchandises de son père pour 31.832 livres, divers objets mobiliers, rachetés pour 1.784 livres et une maison à Blois, Porte Chartraine, estimée 4.080 livres, à charge d'une soulte de 18.838 livres payée de 1777 à 1787 ainsi qu'il résulte de billets à ordre annexés à ce partage (avec mention des intérêts calculés par BEZARD-LEGRAND).

Madame BEZARD reçut des créances et une Closerie à Villejoint.

On peut donc dire que Pierre BEZARD-LEGRAND était issu d'une vieille famille de commerçants blésois, assez fortunée. Cependant, après le partage de cette fortune avec ses soeurs, Pierre BEZARD-LEGRAND ne possédait, six mois avant son mariage, que le fonds de boutique de son père et la maison rue Porte Chartraine où il était exploité et encore à charge d'une soulte envers ses soeurs de 8.010 livres.

 

 

II - LA FAMILLE LEGRAND

 

Pierre BEZARD épousa le 24 Février 1778 à l'église Saint-Pierre le Puellier de Tours (contrat de mariage du 23 Février 1778), Françoise Louise Brigitte LEGRAND, fille unique de (Pierre) Louis LEGRAND, maître limonadier à Tours et de Françoise CANU sa première épouse, décédée en Juin 1765.

Louis LEGRAND était le fils de Louis LEGRAND, boucher à Doué-en-Touraine et de Simone MARAIZE, tous deux décédés avant 1752.

Il fut buffetier au bailliage de Paris avant de devenir Maître Limonadier à Tours.

Il épousa en premières noces (contrat de mariage devant Me GARIERAND, notaire au Châtelet de Paris du 25 Janvier 1752), Françoise CANU, née à Saint-Jean-du-Thenney, diocèse de Lisieux, le 16 Mai 1731 du mariage d'Adrien CANU ayant demeuré à Cour-Tonnel, diocèse de Lisieux, avec Catherine DESMOUSSEAUX, tous deux décédés avant le mariage de leur fille.

Elle avait un frère, Jean Baptiste Adrien CANU, prêtre habitué en l'église paroissiale de Saint Eustache à Paris, demeurant rue Montmartre de ladite paroisse, lors du mariage de sa soeur, puis prêtre à Gasny au Vexin Normand près de Vernon, évêché de Rouen. Il est décédé en 1781, sans doute au début d'Août. En effet, comme on le verra plus loin, BEZARD-LEGRAND échangera plusieurs lettres avec un procureur pour la levée des scellés dès le 14 Août, et le 15 Février 1781, l'Abbé CANU écrivait encore une lettre très vivante à BEZARD-LEGRAND après le décès de son beau-père (voir ci-après).

Elle avait aussi un autre frère, Pierre, dont on ne sait rien, sinon qu'il hérita de son frère.

Françoise CANU, lors de son mariage, avait pour tuteur Jean Jacques CARREY VILLIERS, marchand épicier à Paris, sur Saint-Honoré, paroisse Saint-Germain l'Auxerrois.

Les familles LEGRAND-CANU ne semblent pas avoir été présentes au mariage de Louis LEGRAND et de Françoise CANU, puisque les seules personnes qui assistaient au contrat de mariage étaient :

- Le frère de la mariée, l'Abbé CANU.

- Son tuteur, chez qui elle demeurait et sa femme.

- Deux marchands bourgeois de Paris, amis des futurs époux.

Cette absence de parents s'explique peut-être aussi du fait que le futur époux était originaire de Touraine et la future épouse de Normandie. Qu'étaient-ils venus faire à Paris l'un et l'autre ?

Ni l'un ni l'autre ne possédaient d'ailleurs de fortune. Aux termes de leur contrat de mariage (parfaitement lisible et qui contient des clauses de constitution de douaire, préciput, donation contractuelle, droit de retour, etc ... stipulés en termes à peu près identiques à ceux actuels). Louis LEGRAND apportait en mariage 6.000 livres en deniers comptant et objets mobiliers.

Quant à Françoise CANU, elle ne possédait rien ; mais son frère l'Abbé CANU lui remettait 466 livres 13 sols 4 deniers représentant sa "légitime" (sa réserve) dans les successions de leur père et mère et il lui faisait une dot de 553 livres 10 sols 8 deniers. Enfin, il lui promettait 1.995 livres à prendre sur sa succession future (qui furent effectivement payés à BEZARD-LEGRAND le 16 Octobre 1781 par Pierre CANU, frère et héritier du défunt, ainsi qu'il résulte d'une mention manuscrite de BEZARD-LEGRAND portée en marge de ce contrat).

Les époux LEGRAND-CANU semblent avoir quitté Paris peu de temps après leur mariage, puisque c'est à Tours que naît leur fille unique, Françoise Louise Brigitte le 10 Novembre 1756.

Le 03 Septembre 1764, ils louent pour 9 ans une maison à Tours, Grande Rue, vis-à-vis de la grande boucherie, paroisse de Saint-Pierre Lepuellier, aujourd'hui entre le rue du Poirier et la rue du Grand Marché. Cette grande boucherie, située juste en face de sa maison, de l'autre côté de la rue, était composée de 41 étaux de bouchers à l'intérieur et 3 à l'extérieur (note sur "La Grande Boucherie" de H. AUVRAY en 1945 aux archives départementales de Tours - coté 6 F1 429). Les bouchers qui la fréquentaient, devaient être de bons clients pour le café de Pierre LEGRAND.

Françoise CANU décède sans doute à Tours en Juin 1765. Le 18 Juin 1765, Pierre Louis LEGRAND fait dresser l'inventaire après le décès de sa femme et en qualité de curateur de sa fille mineure. On lira avec intérêt cet inventaire avec le détail des objets mobiliers, vêtements, mobilier de café, livres de compte, etc ...

Louis LEGRAND se remarie avec Françoise DUPOIRIER avant Janvier 1773, puisque le 23 Janvier 1773, Jean Antoine RIGOT, marchand bourgeois à Paris, l'un des témoins à son mariage, écrivait à Monsieur LEGRAND-DUPOIRIER, Grande Rue à Tours.

"Je vois par votre lettre du 22 Janvier que vous et votre chère famille jouissés d'une parfaite santé dont je vous souhaite la continuation. La mienne est assez bonne, Dieu mercy, celle de ma femme est toujours par des rhumes successifs et délicatesse de poitrine. Le reste de ma famille se porte bien, ma cadette étant prête d'accoucher (...). Je n'ai depuis plus de cinq semaines aucune nouvelle du curé ; par ses dernières lettres il se portait bien. Mes respects à Madame, des amitiés à la chère poulette et me croyés bien sincèrement Monsieur, votre très humble et obéissant serviteur".

Louis LEGRAND marie à Tours sa fille, Françoise Louise Brigitte à Pierre BEZARD en Février 1778 (voir plus loin dans la biographie de Pierre BEZARD-LEGRAND le contrat de mariage du 23 Février 1778 en présence seulement, du côté de la jeune fille, de son père et de Françoise DUPOIRIER, sa belle-mère).

Louis LEGRAND décède à Tours le 1er Janvier 1781, ayant déjà cessé son commerce de limonadier. Sa veuve fit apposer les scellés le jour même du décès et il es procédé à l'inventaire le 08 Janvier 1781 dans une petite maison de campagne, paroisse de Joué, à la requête tant de la veuve que des époux BEZARD-LEGRAND.

Mais des difficultés surgissent aussitôt entre eux, la veuve ayant recelé une cassette ; une transaction partage fut conclue dès le 13 Janvier 1781 (BEZARD-LEGRAND menait rondement les affaires). L'actif à partager comprenait notamment : un jardin à la Riche acquis par les époux LEGRAND-DUPOIRIER le 10 Mars 1778, le prix de vente d'une maison propre à la veuve vendue le 09 Mars 1776. Louis LEGRAND possédait en propre une maison Grande Rue à Tours, paroisse Saint-Pierre LEPUELLIER qui est attribuée avec une somme de 5.105 livres à Madame BEZARD-LEGRAND qui la vendit le 11 Août 1813. Cette maison avait été acquise à titre de licitation par Louis LEGRAND, le 12 Juillet 1765 (voir anciens titres de propriété). Louis LEGRAND l'avait prise en location un an avant le 03 Septembre 1764. Elle avait été entièrement reconstruite en 1761.

Toutes relations cessèrent dès lors entre Madame BEZARD-LEGRAND et sa belle-mère. Le 20 Janvier 1782, un dénommé HARDY LECOMPTE écrivait cependant encore à BEZARD-LEGRAND à propos des manoeuvres malveillantes de la veuve LEGRAND relatives à une créance contre un sieur DUPONT. (De HARDY LECOMPTE en profite pour envoyer une salade à Madame BEZARD, s'étant aperçu qu'elle les aimait bien).

L'Abbé CANU décéda, ainsi qu'on l'a vu, au début du mois d'Août 1781. Ayant appris le décès de son beau-frère, il écrivit à BEZARD-LEGRAND le 15 Février 1781 la lettre suivante, qui mérite d'être intégralement reproduite (voir photocopie).

Ainsi que l'Abbé CANU le lui avait demandé, BEZARD-LEGRAND fit établir le 26 Janvier 1781 (il l'avait donc fait avant même d'avoir reçu la lettre de l'Abbé CANU du 15 Février 1781) une procuration notariée par sa femme, habile à se porter seule héritière de Messire Jean Baptiste Adrien CANU, prêtre curé de la paroisse de Saint-Martin de Gasny au Vexin Normand, doyenné de Beaudremont, élection d'Andelys, subdélégation de Vernon sur Seine, archevêché de Rouen, son oncle, pour s'opposer aux scellés qui pourraient être apposés après le décès dudit sieur CANU, et au cas où ils seraient apposés, en demander la levée.

Après le décès de l'Abbé CANU, BEZARD-LEGRAND échangea plusieurs lettres en Août et Septembre 1781 avec un procureur de la Roche Guyon, avec son cousin LIGER, demeurant à Paris, pour faire "insinuer" son contrat de mariage à cause de la dot qu'avait faite l'Abbé CANU à sa femme, et pour avoir paiement de cette dot, ainsi que la somme de 1.995 livres promises par l'Abbé CANU à sa belle-mère, Françoise CANU en vertu de son contrat de mariage sus-énoncé du 25 Janvier 1752.

BEZARD-LEGRAND retrouve le frère de l'Abbé CANU qui fut sergent au régiment blésois et est retraité à Nîmes "en Languedoc" où il est employé dans les "fermes" (lettre du 07 Septembre 1781). Il ne cesse d'importuner et de relancer le frère de l'Abbé CANU, ainsi qu'il résulte d'une lettre du 23 Septembre 1781, d'une dame HEBERT-CLERVILLE, amie de l'Abbé CANU qui lui reproche de s'agiter bien inutilement. Il encaisse d'ailleurs ce qui est dû à sa femme le 16 Octobre 1781. (Voir le dossier de correspondance à ce sujet).

 

III - BEZARD-LEGRAND

A - De 1754 à 1789

 

"L'an mil sept cent cinquante quatre, le dimanche vingtième jour d'Octobre, a été baptisé par moy vicaire soussigné, un garçon nommé Pierre, né d'hier au soir, du légitime mariage de Pierre BEZARD, marchand de toiles et de Marie Anne CREUZOT, de cette paroisse. Le parrain, Pierre CREUZOT, garçon, oncle de l'enfant, de la paroisse de Saint-Firmin de Beaugency. La marraine, Louise Catherine BEZARD, cousine germaine de l'enfant, fille de Claude BEZARD, marchand cirier en cette paroisse".

CAILLARD Vicaire.

 

On ne sait rien de ce que fut la jeunesse de Pierre BEZARD. Il fit certainement des études scolaires, car il possède une certaine culture (bien que son orthographe soit des plus sujettes à caution). Il travailla vraisemblablement au cours de son adolescence chez son père, marchand de toiles. Très jeune, il aimait déjà beaucoup écrire et manifestait une curiosité d'esprit remarquable, puisqu'il écrit en Août 1771, à l'âge de 17 ans seulement, un "Manuel de l'Artifice en quatre parties, nouvelle édition revue et corrigée fait à Blois par moy, Pierre BEZARD, marchand à Blois, ce vingt deux Août 1771".

Ce manuel de deux cents pages est illustré de croquis typiquement de la main de BEZARD-LEGRAND et orné de fioritures et arabesques que l'on retrouve sur la plupart de ses écrits. La précision de la technique des feux d'artifices est remarquable, surtout de la part d'une garçon de cet âge. Peut-être toutefois n'a-t-il fait que recopier et compléter un ouvrage rédigé par son père, car la figure de la page 129 est signée "BEZARD-CREUSOT à Blois 1771".

Le père de BEZARD-LEGRAND décède à Saint-Gervais près de Blois le 20 Mars 1777. Sa mère était décédée le 07 Octobre 1767.

Brusquement orphelin à 23 ans, Pierre BEZARD se consacre aussitôt au commerce de marchand de toile que lui laisse son père et le 10 Septembre 1777, il paie "la somme de 93 livres 15 sols faisant les trois quarts de la fixation de la Maîtrise de Mercier Drapier en la ville de Blois, payables au profit du roi, conformément à l'article VIII de l'édit du mois d'Avril dernier, pour jouir de tous les privilèges attribués à ladite Maîtrise par ledit Edit". Le 13 Septembre 1777, il prêta serment d'exercer sa profession avec probité et conformément aux ordonnances du Roi. Sur le parchemin de cette prestation, il ne manque pas déjà d'annoter le montant de la dépense occasionnée par cette Maîtrise. Le 25 Février 1788 il reçoit, conjointement avec Pierre LAURAND (de la famille LAURAND du Coudray à Périgny) une commission pour l'exercice de la profession de marchand drapier à Blois.

On a vu qu'un mois avant, le 09 Août 1777, il avait procédé au partage de la succession de ses parents par lequel il lui avait été attribué les marchandises de son père (autrement dit son fonds de commerce de drapier mercier) et la maison Porte Chartraine à Blois où il était exploité, mais à charge de payer à ses soeurs une soulte de 8.010 livres qu'il payera de 1777 à 1787.

Il s'occupe déjà activement de son commerce ainsi que l'atteste une lettre d'un dénommé RENARD, marchand à Rouen, du 18 Janvier 1778 au sujet de lettres de changes émises à son profit. (Rouen était alors un centre actif de marché des draps et étoffes).

Il ne lui restait plus qu'à se marier, ce qu'il fait en Février 1778. Son contrat de mariage avec Françoise Louise Brigitte LEGRAND, âgée de 21 ans (celle qui était appelée familièrement "la Poulette" 5 ans plus tôt par l'ami RIGOT) est reçu par DREUSE et PETIT, conseillers du Roy, notaires à Tours "créés à l'instar de ceux des Châtelets de Paris et d'Orléans", en présence de Simon Pierre BEZARD, son curateur, Claude LIGER, son oncle, marchand à Beaugency, Marie Anne BEZARD, épouse de Jean Joseph AMIOT, marchand, sa soeur, Anne et Madeleine Ursule BEZARD ses soeurs, Madeleine LIGER, sa cousine germaine et du côté de la future épouse, Louis LEGRAND, son père et Françoise DUPOIRIER sa seconde épouse, demeurant tous deux à Tours, paroisse Saint-Pierre le Puellier.

Pierre BEZARD fait apport de 18.838 livres tant en immeubles que meubles et marchandises provenant de la succession de ses parents conformément au partage du 09 Août 1777.

La future épouse apportait 10.000 livres en argent comptant données par son père, 800 livres de trousseau dont 300 livres lui étaient données par l'Abbé CANU son oncle.

Au début de Janvier 1781, il mène tambour battant le règlement de la succession de Louis LEGRAND, son beau-père, décédé le 1er Janvier 1781, ainsi qu'on l'a relaté plus haut.

Le 04 Octobre 1781, son cousin LIGER lui écrit à propos d'un effet de commerce, l'invite à venir le voir à Limours, à trois lieues d'Arpajon et adresse l'hommage de son respect à sa femme.

Il le prie enfin de faire ses compliments à "Mademoiselle LECOMTE". On ignore qui était cette demoiselle LECOMTE dont le nom reviendra souvent dans la correspondance jusqu'en 1818. C'était certainement une intime de la maison de BEZARD-LEGRAND.

En Août et Septembre de la même année 1781, il se préoccupe comme on l'a vu, de récupérer la dot faite à sa femme par l'Abbé CANU qui venait de décéder.

Le 31 Janvier 1783, il établit une convention avec ses soeurs qui lui donnent tous pouvoirs pour régler aux créanciers de leur père une somme de 144 livres, en vertu d'un exploit du 17 Juillet 1778 à la requête du sieur FONTENEAU-PEAN.

Le 22 Novembre 1784, il emprunte une somme de 2.400 livres, qu'il remboursera le 30 Août 1793. Il semblait donc un peu gêné à cette époque, d'autant plus qu'il devait toujours une partie de la soulte due à ses soeurs.

Cependant, le 06 Novembre 1785, il achète une maison aux Basses Granges à Blois.

Le 21 Octobre 1786, Me THESSIER, procureur à Paris lui écrit au sujet d'une réclamation sur une créance contestée par son débiteur.

Le 05 Novembre 1787, sa soeur, Madeleine Ursule, novice sous le nom de Madeleine de Gonzague, chez les religieuses de la Visitation Sainte Marie de Blois, "célèbre ses voeux et fait la sainte profession au rang des soeurs du choeur" et reçoit le voile des mains de Messire Louis Guillaume MARTELLIERE, bénéficier de l'Eglise Cathédrale de Blois et confesseur de cette communauté.

Le 20 Octobre 1787, elle avait d'ailleurs fait son testament au profit de ses frères et soeurs, dont les dispositions seront confirmées par un partage sous seing privé du 22 Octobre 1787 écrit et rédigé par Pierre BEZARD-LEGRAND. Aux termes de ce partage intervenu entre elle et ses frères et soeurs, il est stipulé que Madeleine Ursule BEZARD étant sur le point d'entrer en religion, elle abandonne tous ses biens à ses frères et soeurs. Ces biens comprennent : la Closerie de Villejoint, paroisse Saint-Honoré à Blois, ses meubles, estimés 2.400 livres et diverses créances, soit un montant total de 6.286 livres 13 sols 4 deniers. Ces biens lui provenaient du partage de la succession de ses parents du 09 Août 1777.

Le premier lot "tiré au sort" comprenant le Closerie de Villejoint est échu à Pierre BEZARD à charge d'une soulte de 752 livres 4 sols 5 deniers payés comptant. Le partage fut ratifié le 05 Novembre 1787 par Pierre BEZARD, Jean AMIOT et Jean LEROUX. On se demande pourquoi. Il est vraisemblable que Pierre BEZARD avait préparé ce partage à l'avance.

Ainsi, à la veille de la Révolution, Pierre BEZARD qui avait commencé à exercer assez modestement la profession de marchand drapier-mercier de son père, avait bien consolidé sa situation et s'était montré adroit des règlements patrimoniaux de sa famille. Il fait déjà preuve d'un remarquable dynamisme et d'un sens aigu des affaires qui ira en s'affirmant.

En 1785, il agit en qualité de syndic de la communauté des marchands merciers de la ville de Blois contre un sieur ESNAULT, colporteur à Vendôme qui voulait exercer son commerce de mercier à l'Auberge d'Angleterre de Blois sans avoir payé les droits de maîtrise (voir documents du 07 Avril 1783 et du 21 Avril 1785 dans le dossier "Discours et notes de BEZARD-LEGRAND"). Il avait donc su déjà à cette époque acquérir la confiance de ses collègues merciers de Blois.

Dans plusieurs documents ou dans certaines lettres, il est appelé "BEZARD LE GRAND" et qui ne semble pas lui déplaire et confirme l'ascendant qu'il a pris sur son entourage.

 

Dans un de ces mémoires, il précise :

"J'ai tenu longtemps des négociations importantes sur toutes les places du royaume".

 

Nous n'avons aucun document sur sa vie conjugale et familiale pendant cette période au cours de laquelle sont nés ses trois enfants :

1°) Marie Brigitte, née à Blois le 07 Septembre 1781.

2°) Pierre Samuel, né en 1783.

3°) Joseph dit "Beaujour", né à Blois le 15 Octobre 1785.

 

(Cependant dans une note reproduite plus loin, BEZARD-LEGRAND prétend en 1793 être père de 4 enfants. On ne trouve aucune trace de l'existence de ce quatrième enfant. Peut-être est-il mort en bas âge).

 

B - La période Révolutionnaire

 

Pierre BEZARD-LEGRAND avait acquis, à la veille de la Révolution, une notoriété et une aisance financière qui ne manque pas de créer des jalousies dès l'année 1790. En ces temps troublés, il risquait de paraître "suspect".

C'est ainsi qu'un procès d'usure, le qualifiant d'accapareur, fut intenté contre lui.

Le 1er Février 1790, il adresse une plainte au Lieutenant du bailliage présidial de Blois, exposant que le 17 Janvier 1790 :

"sur les trois heures de l'après-midi, ayant été de se transporter vers l'église des Jacobins de cette ville où se tenait l'Assemblée du District de la porte Bastille pour parler à un des membres avec qui il avait une affaire pressée, il eut le désagrément d'être approché par un sieur BERRUER, perruquier, l'un desdits membres qui, en l'abordant le saisi au collet de son habit et lui dit de sortir, qu'il n'avait pas besoin d'être parmi eux".

Au cours de l'agitation qui s'en suivit, certains membres de l'Assemblée déclarèrent :

"que l'on ne devait pas souffrir un homme de son espèce, que le sieur BEZARD était un accapareur d'argent, qu'il avait pris 40 livres d'escompte sur un billet de cent livres et pour deux mois".

Il s'en suivait un procès où furent cités par BEZARD-LEGRAND 58 témoins à décharge, et le 12 Juillet 1790, le bailliage criminel de Blois, le décharge de l'accusation d'usure, l'autorise à poursuivre ses dénonciateurs et à faire publier cette sentence par voie d'affiche dont plusieurs exemplaires sont conservés au dossier.

BEZARD-LEGRAND l'a échappé belle. Il continue à exploiter son commerce. Il avait demandé à un cousin du nom de GUERINET de travailler avec lui, mais celui-ci lui écrit les 15 Septembre 1791 et 29 Octobre 1791 qu'il renonce à être employé dans son commerce, car ce n'est pas sa vocation ; il préfère l'étude des lois. Il lui envoie une lettre très affectueuse qu'il est intéressant de lire, où il complimente sa petite cousine (Marie Brigitte BEZARD) de ses progrès en géographie.

Ses affaires continuent à prospérer et 09 Novembre 1790 il achète une maison à Blois, Porte Chartraine, puis le 15 Mai 1792, une maison au Cul de Sac du Cygne qui appartenait à Madame AMIOT-BEZARD en vertu du partage du 09 Août 1777. Le 15 Avril 1793, il achète une autre maison à Blois, rue Chemonton. Enfin, le 20 Janvier 1795 (25 Frimaire an III), il achète la Métairie du Bourg à Périgny, des héritiers du sieur DE BAUDRY de la Blandinière (42 hectares) moyennant 85.386 livres. Plus tard, le 21 Prairial an XIII, il achètera la ferme de l'Aumône à Villeromain.

Il est permis de se demander si l'accusation d'usure n'était pas fondée, car on se demande comment son commerce de marchand drapier-mercier lui a permis en si peu de temps d'acquérir une telle fortune !

La sentence du 12 Juillet 1790 ne l'a d'ailleurs pas complètement blanchi, et ses concitoyens ne le considèrent pas comme une bon patriote. Il en est très inquiet, et on le comprend facilement et tant donné l'état d'esprit de l'époque.

Il est notamment accusé de faire "de la banque" et réunit des pièces justificatives en Septembre 1793 "dans le cas où je serais inculpé et interpellé" pour se justifier "sur la banque, aristocratie et échange d'argent". Il fait établir un acte de notoriété par notaire, certifié par 187 témoins ! et 128 personnes ont, dit-il, déposé en sa faveur contre les accusations calomnieuses portées contre lui.

D'ailleurs, dit-il toujours, le procureur n'a pas voulu sévir contre lui, ce qui est une preuve de plus de sa probité.

"Le reproche sur la vente d'argent est facile à détruire ; le peuple est juste lorsqu'il est éclairé. Le 10 Juin 1790, j'ai fait un voyage à Paris pour acheter de la marchandise à la foire St-Denis ; j'y ai porté l'argent que j'avais reçu à ma boutique que j'ai échangé contre des assignats ; j'ai acheté des marchandises que j'ai vendu à mes concitoyens, donc aucun reproche à me faire. Depuis 1790 à ce jour, je travaille sans relâche et je peux dire avec vérité que personne ne peut affirmer la preuve que j'ai vendu et échangé du numéraire. De plus j'applaudis de tout mon coeur au sage décret du maximum qui sauve la vie et le.... aux marchands ; la perte est conséquente il est vrai ; mais le bien général vaut mieux que le bien particulier".

"Vous m'accuserez d'aristocratie. Je ne suis ni noble, ni riche, mais noble de coeur. Le temps et l'expérience m'ont appris à les connaître ; ils méprisaient la classe mercantile et autre qui vallais mieux ; aussi pouvaige prendre leur partie, leur mille impérieux et insollan outrages ... Ne sommes nous pas tous égaux en droit. Le reproche que l'on peut me faire, c'est d'avoir monté parfois à la tribune, m'aitre trompé, mais sans l'intention de prêcher une doctrine contraire à l'ordre du jour ; j'ai débitté des discours qu'on plu et d'autres déplu ; si j'ai erré, c'est défaut de connaissance ; je conviens de mes tors. Le peuple est bon et souverain ; il reconnaîtra toujours en moy un père de famille bon et reconnaissant a c'est concitoyen".

"Citoyen souverain, n'aige pas été le premier à faire le don patriotique. N'aige pas été le premier, aux Jésuittes, à monter à la tribune en parlant aux jeunes jance : voilà le moment, camarades, où tous français républiquin doit servir sa patrie ; c'est en présence de la municipalité où j'ai dit le premier que me donnera la collade fraternelle, je luy donne mon abit, veste, culote, giberne garnis, sabre et fusi le champ. De plus, n'aije pas fait à différentes fois le change des cartes étrangères sur 37 villes à 70 lieux à la ronde contre des assignats et des gros lots, le tout gratisse, en présence d'un administrateur du département, le tout à mes frais ...."

"Citoyens j'ai besoin de vos suffrages ; je suis père de 4 enfants .... et commerce ! à l'emprunt forcé c'est là où l'on vera le bon citoyen".

 

Ce long plaidoyer, qui prend des allures d'une confession publique, méritait d'être reproduit en entier. Il semble d'ailleurs qu'il porte ses fruits, car BEZARD-LEGRAND ne fut pas autrement inquiété pendant la Révolution. La "Société des amis de la Constitution", établie à Blois et affiliée à cette séante aux Jacobins à Paris, lui délivre d'ailleurs un diplôme le 30 Mars 1792, le reconnaissant comme l'un de ses membres.

Le 13 Janvier 1793, il paie son abonnement de 6 livres à la "Société des amis de la liberté et de l'égalité" pour l'année 1793. Il a cependant certainement spéculé sur les assignats, car on trouve dans ses papiers un tableau de la contre valeur en assignat du Marc d'Or et d'Argent fin pour chacun des mois de l'an III.

BEZARD-LEGRAND a toujours fait preuve d'opportunisme et a su se plier à chaque régime. Lors du transfert de la famille Royale aux Tuileries en Octobre 1789, il avait rédigé des vers patriotiques destinés "au plus tendre des Roys"....

"Ton throne est dans nos coeurs".... "Les cris d'allégresse que lance avec délice à peuple ivre de toy". "Paris sauve à la fois et l'Etat et son Roy", etc.....

 

Ces vers sont suivis d'un autre poème à la gloire de NECKER :

"Ministre honoré, ô vertueux NECKER" et d'un éloge de LAFAYETTE "sous des pas, tous le monde est soldat, nous brûlons de te suivre au milieu des combats ; c'est le serment qu'à Blois tout citoyen te prête ; son chef est un héros, c'est toi LAFAYETTE".

 

Le 22 Septembre 1792, BEZARD-LEGRAND fait parti des 396 blésois qui adressent au législateur et au Roi une pétition de protestation contre les événements de la journée du 20 Juin 1792 (prise des Tuileries), (bulletin société archéologique de Vendôme 1994 page 109).

On verra qu'il fut plus tard un ardent Bonapartiste et que dès le retour de Louis XVIII, il ne manquera pas de faire l'éloge de "notre bon Roi".

 

 

LES DISCOURS DE BEZARD-LEGRAND

A LA SOCIETE DES AMIS DE LA CONSTITUTION

 

Pour se concilier les bonnes grâces de ses concitoyens toujours enclins à lui reprocher sa fortune (plutôt sans doute que par conviction) BEZARD-LEGRAND fit plusieurs discours à la Société des Amis de la Constitution, et plusieurs pétitions aux autorités.

Le 27 Juillet 1791, il demande la création d'un corps de courtiers ou agents de change pour négocier les assignats. En marge, il écrit : "A Plodit et sur le bureau".

Le 22 Octobre 1791, il demande la création d'une caisse patriotique municipale pour cautionner ("cossionner") les petits assignats de 1 livre ; 30 deniers et 3 livres. Il avait déjà demandé le 14 Juin 1791 la création de "billets patriotiques" garantis par la municipalité, en raison du peu de confiance des assignats.

"Le 18 Avril 1794 l'an II de la liberté française. Vivre libre ou mourir", il demande à Messieurs de département du Loir et Cher la création d'un tribunal de commerce à Blois, en avançant d'ailleurs des arguments parfaitement valables.

Le 08 Décembre 1792, il revient encore à son idée de création de billets patriotiques et demande à la Convention Nationale de prendre un décret en ce sens.

Le 05 Décembre 1792, il a "débitté" (et il a été "aplodit") un discours à l'Assemblée des Amis de la Constitution pour incriminer un certain PIERLOT, membre de cette Société, ancien peintre du cydevant évêque THEMINE, qui ne payait pas ses dettes.

Le 15 Avril 1792, il a fait un long discours aux "citoyens habittans des campagnes" pour leur reprocher d'accaparer le blé et le vin au détriment des habitants des villes et d'être la cause du renchérissement de ces denrées bien que ce soit sans profit pour les cultivateurs.

Il serait fastidieux de citer tous les discours de BEZARD-LEGRAND ; il s'intéresse à tous les sujets ; la discipline militaire, le recrutement des officiers, la charité qui doit régner entre les membres de l'Assemblée, la cherté de la vie, l'indulgence entre citoyens, etc....

 

Mais il en est quelques un de lire notamment :

 

a) Un long discours sur l'utilité des femmes pour stimuler les ardeurs civiques et guerrières des hommes, avec de nombreux exemples historiques et qui se termine ainsi : "Or donc, je demande s'il ne serait pas utile de relever l'Hôtel et le Trône de Vénus parmi nous, s'il convient que la législation s'en occupe, si le moment est venu, ou s'il faudrait le préparer. Toutes questions que je soumets à la supériorité de vos lumières avec toute la franchise d'un citoyen qui aime sincèrement les hommes vertueux et qui ne hait pas les vierges".

b) Un mémoire sur la distinction entre les vrais assignats et les faux.

c) Une proposition "de faire décréter que les prêtres patriotes seront à l'avenir, distingués dans leur habit par les trois couleurs de l'uniforme national. D'après la bigarrure monacale, il n'est personne qui ne sache que la Sainteté du Ministre ne réside pas essentiellement dans la couleur d'une souquenille. Le noir a toujours été le caractère des oiseaux de mauvaise augure ; il faut donc abandonner cette couleur aux prêtres réfractaires et même les y condamner". "Ainsi je vote que la soutane des prêtres patriotes soit le drap bleu roi ; les petits parements et les boutons écarlates, avec une ceinture de laine blanche. Les candidats ainsi habillés, seront jolis comme des anges ; le peuple, les femmes surtout, se laisseront prendre et subjuguer par les sens. Jugez Messieurs, des conversions".

d) Et enfin un long mémoire du 08 Janvier 1792 à Messieurs les amis de la constitution pour se justifier, comme on l'a déjà vu, de l'accusation portée contre lui de spéculer sur la vente des assignats contre de l'or. Ce mémoire constitue un remarquable cours d'économie sur les assignats et le papier monnaie tant en France que dans les pays européens, sur la prospérité de l'Angleterre et sur le prêt à intérêt.

 

Tous ces mémoires et discours sont écrit dans le style caractéristique de l'époque révolutionnaire, avec une généreuse emphase et dénotent surtout la préoccupation constante de BEZARD-LEGRAND de se concilier les bonnes grâces de ses amis de la Société de la Constitution avec lesquels il n'est pas toujours très à l'aise.

Il semble bien qu'il soit parvenu à obtenir la bienveillance des conventionnels, puisque le 02 Prairial An II (21 Mai 1794) il est convoqué avec deux autres concitoyens à la Convention Nationale "pour lui offrir les prémices de leurs travaux". Une note ajoutée sur cette convocation indique :

"Ce jourd'hui, 07 Messidor An II de la République française une et indivisible avons écris sur le présent registre le nommé HEMERY le capucin par ordre du Comité de surveillance accusé d'avoir tenu des propos inciviques et l'avons laissé à la charge et garde du commissaire Thomas BOITTE (?) concierge de ladite maison qui a signé avec nous".

On ignore qui était ce capucin et pourquoi cette mention a été reproduite sur la lettre de convocation de BEZARD-LEGRAND à la Convention Nationale.

On peut cependant se demander s'il n'a pas été menacé d'arrestation car le 02 Ventose An IV (21 Février 1795) il est prié de se rendre le lendemain à la séance de l'administration centrale du département entre 9 heures et 10 heures du matin. BEZARD-LEGRAND s'étant inquiété de l'objet de cette convocation il lui répondu le 03 Ventose par une lettre signée de 7 administrateurs :

"L'objet pour lequel, citoyen, nous vous avons prié de passer à notre séance de ce matin est pressant. Nous vous prions de vous y rendre avec le porteur".

 

 

C - Achat de la propriété de Périgny et opérations commerciales pendant la Révolution

 

Achat de Périgny

Bien qu'il ait essayé de démontrer à ses amis du club des amis de la constitution qu'il n'avait jamais spéculé sur la monnaie qu'il ait fait, dans un de ses discours, l'apologie des assignats, Pierre BEZARD-LEGRAND jugea prudent, dans cette période d'instabilité monétaire de convertir ses assignats en biens fonciers.

Le 30 Nivose An III (19 Janvier 1795) il achète aux héritiers de Claude Joseph François DE BAUDRY, sieur de la Blandinière, décédé à Blois au mois d'octobre 1791, une métairie au bourg de Périgny contenant 68 arpents, 9 boisselées de terres labourables, un arpent de 13 boisselées d'herbage, 4 boisselées de pré, 3 boisselées de pré de Malignes, soit ensemble 71 arpents 3 boisselées (42 hectares) moyennant le prix 85.386 livres.

Les bâtiments comprenaient : maison de maîtres, jardin, charmille, bâtiment de fermier composé entre autre d'une chambre basse à cheminée servant de fournil, écurie, étable à vache, bergerie, grenier sur le tout, cave, poulailler, grange à blé et à avoine, basse cour et jardin potager derrière le bâtiment.

Le 27 Avril 1796, BEZARD-LEGRAND complète cette acquisition en achetant à Isaac Mathieu BALDUC, demeurant à Paris et à Jean Charles Philibert LEGENDRE, demeurant également à Paris (acquéreurs des biens nationaux du Château de Périgny qui appartenait à Hercule Charlemagne TAILLEVIS de PERIGNY) 7 quartiers de pré à la rue Creuse, Commune de Périgny, un bois de 20 boisselées à la Croix de Chaillou et 3 arpents et demi de bois à Liverieux.

Le 12 Frimaire An VI (03 Décembre 1797), il achetait 5 boisselées 2/3 moins 1/5 de boisselées de terre en une pièce aux Cartes, commune de Périgny, le joignant.

Le 21 Prairial An XIII, il achetait de l'Aumone à Périgny qui appartenait précédemment aux héritiers du sieur DE BAUDRY, moyennant 1.800 Frs de rentes viagères. La venderesse, Mademoiselle Thérèse RAMBOURG décéda en Janvier 1810. BEZARD-LEGRAND n'acquitta donc les 1.800 Frs de rentes viagères annuelles que pendant 5 ans ; (le titre d'achat de l'Aumone se trouvait dans les titres de propriété de Périgny).

Il la revendit le 01 Janvier 1817, moyennant 24.000 Frs, voir lettre du 03 Octobre 1813, par laquelle DELAGRANGE, notaire à Blois lui propose un acquéreur au prix de 22.200 Frs. BEZARD-LEGRAND exige 26.000 Frs et 400 Frs de pot de vin. Mais par lettre du 26 Septembre 1816, il traite la vente de l'Aumone avec le Comte de la SORNIS, demeurant à Freschine qui lui offre 25.600 Frs et qu'il lui vend finalement pour 24.000 Frs payés comptant.

Enfin, le 09 Avril 1809, il achetait un hectare 37 de terre sur Villeromain et 46 ares 53 de terre au même lieu.

La ferme du bourg à Périgny était louée lors de son acquisition par BEZARD-LEGRAND à Pierre JOURDAN et Marie CORNET son épouse.

Le 29 Ventose An VII (08 Mars 1800), BEZARD-LEGRAND leur louait à nouveau "la basse cour du logis de Périgny", à charge notamment d'entretenir les Charmilles et de planter des arbres fruitiers, moyennant 5 muids de blé, 50 bottes de paille, 6 couples de chapons et 60 Frs de ferme.

En 1808, il fait établir un arpentage et un relevé de cadastre de ses terres de Périgny, Villeromain, Coulommiers, Crucheray et Villemardy (la ferme de Périgny étant alors appelée "les Portes Vertes").

Il possédait alors 33 septrées sur Périgny, 1 septrée 11 boisselées sur Villemardy, 35 septrées sur Villeromain, 1 septrée sur Coulommiers, soit 77 septrées ou 175 hectares (y compris la ferme de l'Aumone). Il fait établir également un plan cadastral qui existe toujours (encadré de deux bâtons dorés).

On verra plus loin les travaux et aménagements que fit BEZARD-LEGRAND à la propriété de Périgny.

 

Opérations commerciales pendant la Révolution

On a vu plus haut que Pierre BEZARD-LEGRAND, avait déclaré, au début de la période révolutionnaire qu'il avait "tenu longtemps des négociations sur toutes les places du royaume". Il était en contact notamment avec des négociants en draps de Rouen. D'après une tradition de la famille il allait assez fréquemment dans certaines villes de France, notamment à Rouen pour y traiter des achats de marchandises ; il fait ces voyages, les routes n'étant pas sûres, armé de pistolets en compagnie d'un certain LAURANT, ancêtre des LAURANT du Coudray de Périgny, et avec un certain LEMAIRE, ancêtre des LEMAIRE de Vendôme qui habitait rue Guesnault et dont la famille était au XIXe siècle et au début du XXe siècle gros propriétaire foncier à St-Anne, Villerable, Danzé et Azé. (Elle possède encore la ferme de Villessus à Villerable, celle de la Couenneterie à Danzé et des bois à Danzé et Azé).

Le 02 Juillet 1793, un certain DERIBERES des Gardes à Argentons lui envoie des "Droguets de Limoges" rayé bleu, petite lais, deux pièces grande lais, trois pièces petite lais fond bleu avec du rouge à côté et une pièce rayée teinte rouge.

Les guerres révolutionnaires sont une bonne occasion pour BEZARD-LEGRAND de développer son activité commerciale en fournissant des draps aux armées.

Le 16 Juin 1793, il écrit au citoyen Ministre de la Guerre :

"qu'il sera dans le cas de rendre service à la République en fournissant divers objets nécessaires à l'habillement des braves défenseurs de la patrie, savoir toiles de chemise, drap bleu et les doublures ; en lui accordant confiance, il saura se désintéresser en fournissant de bonnes marchandises dont il a acquis la connaissance à force de travail. Il prie le citoyen Ministre de la Guerre de lui fournir les moyens de pouvoir donner des preuves de ses sentiments civiques et il attend la réponse du Ministre à Blois où il fait sa résidence ordinaire, jouissant de la confiance de ses concitoyens'.

L'administration de l'habillement, équipement et campement des troupes accuse réception de cette lettre le 30 Août 1793 et le 21 Septembre 1793, l'adjoint du Ministre de la Guerre invita BEZARD-LEGRAND "à faire passer des échantillons de toiles avec une note indicative de leurs prix et quantités, afin de pouvoir juger si votre offre convient aux intérêts de la République".

Le 25 Septembre 1793, BEZARD-LEGRAND, en réponse à cette lettre fit passer aux administrateurs de l'habillement des échantillons de toiles pour draps et chemises ajoutant : "c'est avec peine que je vous annonce que le prix courant de cette espèce de marchandise est exorbitant" et il site les prix. "Je pourrai livrer ces marchandises au comptant sans cependant vouloir m'y engager formellement attendu que cette espèce de marchandise augmente de jour en jour... Compter sur mon zèle à bien servir la République".

On ignore si BEZARD-LEGRAND a pu conclure ce marché, cependant un peu plus tard, le citoyen Ministre de la Guerre a accepté son offre civique et désintéressée, car le 12 Germinal An II (03 Avril 1794) l'adjoint au Ministre de la Guerre (division des hôpitaux militaires, service du matériel) lui écrivait qu'il avait renvoyé aux administrations des hôpitaux militaires sa requête sollicitant le paiement d'une somme de 2.205 Frs, montant d'une fourniture de toile livrée pour le service de l'hôpital militaire de Blois. Il résulte d'une note portée par BEZARD-LEGRAND sur une autre demande concernant le même objet "qu'il a été payé dans les 24 heures".

 

Si ces marchés de la République lui procurent des bénéfices substantiels, celle-ci en profite pour le mettre à contribution. C'est ainsi que le 08 Nivose An III, les maires et officiers municipaux de la commune de Blois l'informe que :

"la Convention Nationale vient de supprimer le maximum du prix de toutes les denrées ; la liberté du commerce est établie ; le conseil général, sans cesse occupé à procurer à ses administrés des subsistances, a arrêté d'inviter tous les bons citoyens de vouloir bien prêter à la commune des fonds pour les acquérir, et il te met du nombre et il compte sur ton patriotisme pour lui prêter ce que tes facultés te permettront. La souscription est ouverte à la Commune".

Cette lettre est signée de 8 administrateurs et de BEZARD-BOYSSE, Maire.

Ce BEZARD était un cousin, ainsi qu'il est confirmé par une lettre de BEZARD-LEGRAND du 07 Mars 1809.

 

BEZARD-LEGRAND a d'ailleurs été obligé de souscrire à plusieurs emprunts forcés en l'An III et en l'An IV.

Le 18 Mésidor An III, il prêtait 2.000 livres à la ville de Blois pour l'achat de grains. Par circulaire du 1er Frimaire An XIII, le préfet CORBIGNY demande aux souscripteurs de cet emprunt de renoncer à leur créance "afin d'éteindre les dettes de la ville de Blois", attendu que "l'ordre et la régularité règnent maintenant" dans sa comptabilité.

BEZARD-LEGRAND est ensuite imposé à la réquisition du fer. Puis il est obligé de souscrire 1.000 Frs puis 1.200 Frs d'emprunt forcé en l'An III et il indique "que ses facultés sont épuisées".

En échange de ces emprunts, il lui est délivré un "extrait d'inscription au Grand Livre de la dette publique" de 50 Frs de rente le 21 Frimaire An III.

Le 03 Août 1820, le receveur général des finances, à Blois, l'informe que le remboursement de cet extrait d'inscription est périmé, BEZARD-LEGRAND n'ayant pas accompli les formalités de consolidation prescrites par la loi du 24 Frimaire An VI.

Enfin, en l'An IV, il souscrit 2.000 Frs à l'emprunt forcé de l'An IV. Seul les deux premiers coupons de 200 Frs chacun furent remboursés.

On peut s'étonner qu'un an après le dernier emprunt forcé qui "épuise ses facultés" il est pu acheter le domaine de Périgny moyennant 85.000 livres.

 

 

D - L'activité de BEZARD-LEGRAND sous le Directoire, le Consulat et l'Empire

 

La période révolutionnaire passée, BEZARD-LEGRAND n'a plus besoin de donner des gages patriotiques et peut se consacrer paisiblement à sa vie professionnelle et familiale que l'on peut reconstituer grâce à une nombreuse correspondance et d'abondant documents. Il exerce toujours son commerce de marchand drapier, rue Porte Chartraine à Blois où il habite, mais il se rend fréquemment à Périgny et s'occupe activement de la gestion de sa propriété.

Il résulte une liasse de lettres écrites en 1806, qu'il est en relation avec un négociant de Marseille qui lui propose de l'huile d'olive et du savon ; avec un commerçant de Hambourg qui lui propose 600 pièces de Nanquin et de l'eau de vie avec transport par bateau à Nantes (BEZARD-LEGRAND commande 100 pièces de Nanquin) et qui lui envoie des prospectus de la "Grande Coterie" à Hambourg ; avec un commerçant de Nyon en Suisse ; avec un autre de Sokerin (ou Lokerin) en Allemagne qui lui propose de la toile payable sur Anvers, Bruxelles ou Gand, et encore avec un commerçant de Francfort.

Il jouit d'une grande considération parmi ses concitoyens et entretient des relations avec les personnalités politiques, notamment sous l'Empire avec le préfet CORBIGNY. En raison de sa situation sociale, il est souvent consulté et sollicité par des quémandeurs. Il répond d'ailleurs toujours généreusement à toutes les demandes qui lui sont présentées et semble jouir d'une grande estime.

Le 4ème jour complémentaire de l'An VI, un certain GODEFROY intervient auprès de lui en faveur d'une dame DUGUEPE, ou plutôt de LUCKER qui se trouve dans une situation financière difficile. BEZARD-LEGRAND, saisit de cette demande, la transmet au citoyen "BARASSE", Directeur au Palais de Directoire National à Paris, ce qui semble indiqué qu'il avait quelques relations avec le gouvernement.

Le 09 Prairial An VI, il écrit au Ministre des Finances à Paris pour protester au nom des négociants et marchands de Blois contre les "vues ambitieuses du Canton de Vendôme" dont les habitants demandent que :

"le grand courrier de la malle-poste soit dirigé par Vendôme, ce qui n'offre rien d'avantageux, car ce canton n'est qu'entre deux montagnes, point de commerce, et la route peu habitée ; Vendôme n'a pour tout avantage sur Blois que deux députés et nous un".

"Le chef lieu du département du Loir et Cher est une ville de commerce en vin et eau de vie considérable par la production qu'offre ses ressources économiques, et par la Loire, belle et grande route bien habitée".

 

Le 03 Germinal An VI, il reçoit une lettre d'un dénommé CADIOU, marchand de tabac à Paris, 289 rue St-Martin, qui a des revers de fortune ; il achète le tabac, dit-il au même prix qu'il le revend ; il lui rappelle que BEZARD-LEGRAND "a cru devoir lui tenir compte du refus qu'il a fait de se joindre aux fripons qui le poursuivaient et dont les spéculations honteuses n'excitèrent en lui que l'indignation". BEZARD-LEGRAND lui répond qu'il y a encore "des hommes probes et même désintéressés qui savent reconnaître l'homme de bien" et qu'il saura se sacrifier pour rendre service. C'est pourquoi il lui envoie un billet de 2.000 Frs payable dans un an au denier de 6 %.

Le 22 Ventose An VIII, il écrit au citoyen consul "CAMBACERAISSE" deuxième consul de la République française, (si BEZARD-LEGRAND a des relations avec tous les grands personnages du régime, il fait preuve d'une ignorance totale de l'orthographe de leur nom patronymique) dans les termes suivants qui caractérisent bien son style et son dévouement :

"L'humanité m'oblige de m'intéresser aux infortunés. Je vous sollicite une place pour un père de famille âgé de 30 ans, assez bel homme, qui était Lieutenant dans les légions de Belgique où il s'est bien comporté ; il s'est retiré de ce corps pour se marier à Blois et a été nommé chef instructeur ; il connaît très bien les chevaux. Il se trouve obligé d'avoir recours à une place pour vivre soit dans le civil ou le militaire ; il se recommande à un homme humain et bienfaisant ; je ne puis donc mieux m'adresser. Puis-je espérer réponse. Il n'est pas de ma famille ; il n'est pas mon parent ni mon ami ; il est malheureux et je m'y intéresse ! C'est de vous, citoyen consul où il peut trouver son existence plus douce. Sa famille est recommandable. Je suis avec respect votre obéissant et citoyen. BEZARD-LEGRAND".

 

Le 04 Thermidor An XIII, il reçoit une lettre d'un autre solliciteur ; il s'agit de Me PASQUIER, notaire à Vendôme, qui n'ayant pas assez d'ouvrage dans sa profession a accepter la commission de Voyer de l'arrondissement de Vendôme pour subvenir aux besoins de sa femme et de ses cinq enfants. Il sollicite platement l'intervention généreuse de BEZARD-LEGRAND auprès du préfet CORBIGNY pour être payé de ses fonctions de Voyer. Il demande en outre une place de percepteur communal pour son beau-frère, invalide de guerre. Enfin il propose à BEZARD-LEGRAND d'établir le relevé cadastral de ses propriétés de Périgny (ce qui fut d'ailleurs fait, ainsi qu'il résulte des titres de propriétés de Périgny).

 

Le 07 Avril 1809, il recommande au préfet CORBIGNY un candidat à la Légion d'Honneur.

 

Le 21 Octobre 1813, un certain LAUTEREST, négociant à Mayence, sans doute en relations d'affaires avec BEZARD-LEGRAND lui demande de soulager le sort d'un certain WILFINGER, officier autrichien, prisonnier de guerre à Blois. BEZARD-LEGRAND indique au bas de cette lettre qu'il l'a contacté et lui a fait remettre un mandat.

Le 08 Octobre 1814, il informe une dame qu'il est passé au Ministère de la Guerre pour qu'elle puisse toucher la pension de la Légion d'Honneur de son mari.

 

Le 16 Juin 1816, il écrit au Bureau de Bienfaisance de Blois pour lui rappeler qui lui est dû 373 Frs pour fourniture de marchandises, mais "voulant donner au Bureau une preuve du désire qu'il a de concourir au soulagement de l'humanité souffrante", il lui offre une somme de 140 livres en marchandises au prix de facture à prendre dans ses magasins.

 

Si BEZARD-LEGRAND fait preuve d'une grande générosité envers toutes les personnes qui le sollicitent, il en est cependant qui essuient des rebuffades violentes, surtout s'il s'agit de questions d'intérêts. Le 13 Mai 1808, un certain CHAPPOLIN lui écrit au sujet d'une dette qu'il conteste. BEZARD-LEGRAND lui répond le 14 Mai 1808 :

"Il faut être ridicule pour faire reproche à un homme qui mit sa confiance en vous et qui vous envoie des billets échus. Ecrivez à Messieurs MALLET ce qu'il vous plaira. Je suis indépendant d'eux et encore moins de vous. Si vous êtes gras, je ne suis pas maigre".

Comme on a pas manqué de la remarquer, si BEZARD-LEGRAND sait se montrer généreux, il n'en est pas moins d'un tempérament vif et autoritaire. Au cours de sa vie, il a eu plusieurs procès, après le fameux procès d'usure de 1790. Chaque fois il se défend avec acharnement. Il n'hésite pas, par exemple, à formuler une inscription en faux contre le fermier des barrières de Blois qui a fait dresser procès verbal le 15 Brumaire An X contre son domestique qui conduisait une charrette chargée de poinçons de vin ; il venait de la grande route de Blois à Vendôme pour se diriger au magasin que posséder BEZARD-LEGRAND aux Basses Granges ; pour éviter le contrôle de la barrière et pour ne pas payer le "droit de passe", il prit un détour ; BEZARD-LEGRAND fait citer de nombreux témoins pour justifier le bon droit de son domestique et dresse un croquis des lieux. On ignore le résultat de ce procès.

 

 

E - L'activité à Périgny

 

BEZARD-LEGRAND déploya une grande activité à l'aménagement et à la mise en valeur de sa propriété de Périgny qu'il avait acquise le 19 Janvier 1795. Il s'y rendait très fréquemment et y habitait presque constamment, du moins l'été, après avoir laissé l'exploitation de son commerce à son fils Samuel.

Il s'intéressa à la vie de la commune et de la paroisse. Le 13 Nivose An IX (05 Janvier 1801), il est nommé membre du Conseil Municipal de Villeromain (Périgny n'étant pas alors une commune) par arrêté de CORBIGNY, Préfet de Loir et Cher, en conformité de l'article 20 de la loi du 28 Pluviose An VIII.

En l'An XII, il fait convoquer le "Conseil Général" de la commune de Villeromain pour augmenter le traitement du curé et acheter des objets nécessaires au culte (cire, pain, vin, blanchissage et salaire d'un sonneur obligé de nettoyer l'église et d'accompagner le desservant dans l'exercice extérieur de sa fonction). Il fait prendre ces dépenses en charge par le budget communal, attendu le modique produit des offrandes volontaires, le produit nul de la l'occasion des bancs et le faible produit des quêtes qui n'est que de 40 Frs par an.

Il organise avec le desservant de Périgny, l'Abbé DEVARENNE, la cérémonie du baptême de la nouvelle cloche de l'église de Périgny qui a lieu le 22 Vendémiaire An XII (16 Octobre 1803). Il invite le préfet CORBIGNY, le sous-préfet LEFEBVRE, une Madame BEAUVALET, le receveur général et un Monsieur BEAUVOIR, négociant à Vendôme à venir déjeuner chez lui après la cérémonie, à sa ferme. Il dessine à cette occasion le petit tableau qui se trouve dans le bureau de Périgny.

Le 07 Janvier 1808, il informe le maire de Périgny que le préfet vient d'écrire au Ministre des Cultes pour conserver la paroisse de Périgny et le 19 Janvier 1808; il rédige la note suivante :

"Périgny conservé et protégé par Monsieur CORBIGNY.

Evêque et grand vicaire ayant demandé au Ministre des Cultes la suppression de cette paroisse, étant trop près de Villeromain.

C'est au crédit du parrain de la cloche que les paroissiens doivent la conservation de la paroisse, ayant été recommandé par un des amis de Monsieur le préfet. J'ai vu la lettre de Mgr l'Evêque à Monsieur le préfet. Il me suffit, Monsieur, que vous vous y intéressiez pour que vous conserviez ladite paroisse" lui a répondu le préfet.

Les temps ont décidément bien changé depuis l'époque des discours, "au Club des Amis de la Constitution" sur l'uniforme tricolore des prêtres !

 

En même temps qu'il s'occupe des intérêts des habitants de Périgny, BEZARD-LEGRAND s'intéresse à l'aménagement de sa propriété et sa mise en valeur.

Lors de l'acquisition, la ferme "de la Basse Cour du Logis de Périgny", était loué à Pierre JOURDAN et Madeleine CORNET, sa femme. Le 29 Ventose An VII, il renouvelle ce bail à charge notamment par le fermier d'entretenir les Charmilles et de planter des arbres fruitiers.

Le 14 Août 1811, il écrit à ses fermiers pour les informer de son arrivée prochaine pour arrêter leur compte et renouveler leur bail avec leur fils et l'invite ensuite à lui montrer toutes les pièces terre louées. Il en résulte du compte détaillé de Pierre JOURDAN que ce dernier lui doit 801 Frs et lui donne congé.

Le 18 Décembre 1813, il loue cette ferme à Nicolas GOUFFAULT.

 

Tous les comptes de réparation aux toitures, travaux divers à la ferme, réclamations de fermage, coupe de bois de charpente, vente de peupliers et d'ormeaux, travaux d'aménagement du parc et du jardin sont méticuleusement classés par BEZARD-LEGRAND et prouvent le soin qu'il apportait à la gestion de cette ferme.

Il avait tenu deux registres de comptes reliés d'un vieux parchemin, l'un concernant la gestion de sa ferme à Périgny, l'autre concernant la maison de maître et le parc. Ce dernier contient des annotations savoureuses sur ses activités, ses rares maladies, la température, etc... Il est intitulé textuellement : "De Pance fait et ogmantation à Périgny depuis le 29 May 1807 à moi BEZARD-LEGRAND Ngt à Blois".

La liasse volumineuse de ces comptes, notes, croquis, etc.... mérite d'être étudiée attentivement ; elle permet de reconstituer certains aménagements apportés au parc de Périgny pour lui donner son aspect actuel : creusement du vivier au bas de l'allée de platanes, et du vivier au bas du pré ; aménagement de fossés et projet d'une île au centre dans le parc (dont on retrouve encore les traces aujourd'hui), déplacement des piliers d'entrée de la propriété reconstruits à leur emplacement actuel sur le chemin allant du bourg au potager du Père GABLIER, plantations d'arbres fruitiers, création de la grande allée, etc...

En Brumaire An XII, notamment un certain LECOMTE (sans doute père de Mademoiselle LECOMTE dont il sera souvent fait mention dans la correspondance ultérieure), indique qu'il a fait 163 trous pour planter des arbres, "y compris la grande allée".

BEZARD-LEGRAND s'occupe aussi du curage de la Houzée de Villeromain à Bezard, on relève le plan avec l'indication des propriétaires riverains et la part contributive de chacun. C'est un travail considérable et qu'il est intéressant de consulter.

Après avoir été en excellent rapport avec le Chevalier Préfet Corbigny, pendant l'Empire, BEZARD-LEGRAND se fait le champion de la cause royale dès le retour du Roi. Le dépouillement de la correspondance et des documents divers laissés par BEZARD-LEGRAND permet de suivre les événements historiques dont il a été témoin. Par exemple, en Mai 1814, il reçoit une lettre d'un correspondant de Tarare, au sujet de l'envoi de marchandises :

"Le retard du courrier et l'absence de notre maison que nous avons été obligés de quitter par suite de l'envahissement de notre pays par l'ennemi, nous a empêché de répondre", etc...

En effet, le 03 Décembre 1814, le garde champêtre de Périgny fait parvenir à BEZARD-LEGRAND trois lettres de trois propriétaires de Périgny désignés à la décoration du Lys.

"Je vous y joins monsieur MERCIER, adjoint à Villeromain qui vous prie d'avoir la bonté de vous intéresser pour lui de la décoration de Me GUILLEREAU Meunier de Dauton".

Le 28 Décembre 1814, il reçoit une lettre de DORE, prêtre desservant de Périgny, le remerciant de lui avoir fait obtenir la décoration du Lys :

"Mais daigniez prier l'Orfèvre de reprendre la Croix que vous m'avez fait passer par le Me BIGUIER de la POTERNE, elle s'est trouvée si faible et si peu solide qu'elle s'est mise en trois sitôt qu'on a voulu y toucher, ce qui m'a fait peine, sachant que cela ne venait point de votre faute. L'ouvrier ne peut s'y refuser en voyant que le tout vient de la faiblesse de l'ouvrage et de la délicatesse de la façon ; en vous remerciant bien des fois" ..... Suive les voeux de nouvel an.

 

VILLEJOINT

Parallèlement à la mise en valeur de sa propriété de Périgny, BEZARD-LEGRAND attache un grand intérêt à l'exploitation de sa Closerie de Villejoint qu'il s'était fait attribuer dans le partage lors de l'entrée de sa soeur au couvent du 22 Octobre 1787. Cette Closerie, aujourd'hui englobée dans la zone industrielle de Blois, en bordure de l'autoroute, produisait du bon vin ainsi que l'attestent de nombreux "congés" ou "passavants" soigneusement conservés par BEZARD-LEGRAND pour transporter les poinçons de vin à Blois. C'est d'ailleurs au cours de ces transports de vin qu'il eut un procès relaté ci-dessus, sans domestique ayant voulu éviter de s'arrêter à la barrière de l'Octroi de Blois.

 

 

F - Beaujour (Joseph Bezard)

 

BEZARD-LEGRAND, au début de l'Empire, était arrivé à une situation financière confortable et était devenu un grand bourgeois de Blois. Ses affaires prospéraient ; tout semblait lui réussir et il jouissait de l'estime et de la considération de ses concitoyens.

Cependant le malheur va le frapper dans ses affections les plus chères. Il avait déjà perdu, semble-t-il en bas âge son quatrième enfant.

Le 26 Décembre 1799, décède sa fille Marie Brigitte épouse de Charles Michel ROGER, "après avoir été trois mois mère".

Son petit-fils qu'il va élever après le remariage de son gendre décédera lui-même le 05 Juillet 1818.

Mais ce qui l'affecte le plus, c'est la mort de son fils Joseph qu'il surnomme "BEAUJOUR", né à Blois le 15 Octobre 1785.

Il a été possible de regrouper tous les documents dispersés dans un ordre invraisemblable et que BEZARD-LEGRAND avait soigneusement classés sous une chemise portant la suscription :

"Recherche de mon fils. Lettre écrite depuis le 03 Décembre 1807 jusqu'au 30 Décembre pour la recherche de mon fils BEAUJOUR. Cinq mois sans lettre et sans avis. Ecrit au Major, Capitaine, au Président de Place, au Ministère et autres".

 

 

Joseph BEZARD était le second fils de BEZARD-LEGRAND ; il destinait son fils aîné, Pierre Samuel, à la continuation de son commerce, il voulut faire engager le seconde dans l'armé ; est ce par vocation, par patriotisme, ou parce qu'il n'envisageait aucune autre position sociale pour lui ? Il est impossible de le préciser.

 

Le 21 Brumaire An XIV (14 Novembre 1805) BEZARD-LEGRAND à Monsieur le Sénateur CORNET à Paris :

"Ayant eu l'honneur d'entretenir avec vous des relations d'affaires pendant plusieurs années, et me flattant d'avoir obtenu quelques titres à votre estime et à votre confiance, j'ose solliciter l'appui de votre protection pour le succès du parti que mon fils, âgé de 19 ans 1/2, est résolu de prendre dans la carrière des armes.

La garde d'honneur de sa Majesté l'Empereur où les Vélites sont les corps dans lesquels il ambitionne de faire preuve de son dévouement à la personne du souverain et à la défense de la Patrie.

Oserais-je vous prier, Monsieur le Sénateur, de ménager à mon fils, votre bienveillante protection pour faciliter son avancement lorsqu'il aurait été assez heureux pour utiliser l'occasion de montrer, par sa bonne conduite et ses faits d'armes qu'il est digne de servir sous les yeux de notre Auguste Souverain.

Je désire obtenir de votre complaisance un mot de réponse qui me fasse connaître ce qu'il est permis à un père résolu de faire tous les sacrifices pour son fils, d'espérer pour son avancement et son bonheur.

Je vous conserverai, Monsieur, ainsi que lui, la plus parfaite reconnaissance".

Le 13 Février 1806, le préfet de Loir et Cher informe Monsieur BEZARD (Barthélémy) fils (pourquoi est-il prénommé Barthélémy ? Sans doute par erreur, il ne peut s'agir du Barthélémy BEZARD à qui avait été délivré le certificat de toisement à l'âge de 20 ans, le 23 Mars 1775), que :

"Son excellence le Ministre de l'Intérieur l'a chargé de lui faire connaître au nom de sa Majesté l'Empereur, qu'elle a vu avec satisfaction le témoignage de dévouement que vous avez cherché à lui donner en vous faisant inscrire pour entrer dans la garde d'honneur qui devait accompagner sa Majesté quand elle était à la tête de ses armées. Des succès sans compte ont terminé la dernière campagne avant que sa Majesté eut pour ainsi dire le temps de lire les listes qui lui étaient envoyées de tous les départements de l'Empire, et la cessation des hostilités ne lui a pas permis d'accorder au dévouement de la jeunesse française la plus noble récompense qu'elle put recevoir, c'est à dire d'accepter ses offres de service.... Quoiqu'il en soit, ne doutez pas, Monsieur, que sa Majesté qui a vu votre nom sur cette liste honorable, ne conserve de la bienveillance pour vous et que ce ne soit un titre de plus pour obtenir les bienfaits auxquels vous croiriez avoir droit de prétendre".

 

Le 17 Février 1806, L. P. SEGUR, grand maître des cérémonies, conseiller d'Etat, grand cordon de la Légion d'Honneur et de l'Ordre du Portugal, confirme à BEZARD-LEGRAND les termes de la lettre ci-dessus.

Le Beaujour BEZARD doit donc attendre la reprise des hostilités pour pouvoir faire la preuve de ses faits d'armes sous les yeux de l'Empereur. Mais, il doit être d'un tempérament batailleur, car le commissaire de police de la ville de Blois écrit à son père le 19 Février 1806 :

"Dénoncer un fils à son père est pénible pour celui qui respecte les vertus familiales (l'indulgence). Mais cet avis sera fraternel, ne sera pas une plainte ; le père prévenu rappellera son fils à l'ordre et par des représentations paternels le fera aborder la raison.

"Voici les faits : Monsieur BEZARD Beaujour, votre fils, a eu une petite aventure avec Monsieur DUBUISSON ; la conciliation projetée par l'adjoint DUMAINE, me remplaçant au bal, a donné lieu à une entrevue extérieure (votre fils y est allé) avec douceur parce qu'il a regardé sa faute plutôt pour une erreur que pour un crime ; il devait être satisfait de cet acte d'indulgence : mais non ; par une suite d'étourderies, il vient de provoquer un cartel avec Monsieur DUBUISSON ; c'est moi qui m'y trouverai ; la loi me le prescrit, au regard de mes devoirs. Mais avant tout je renvoie cet enfant à la discipline paternel ; je pense que cette fougue mal entendue et impétueuse sera pour vous réprimée. Et il a ajouté que, si Monsieur DUBUISSON ne s'y rendait pas, il l'injurierait à chaque fois qu'il le rencontrerait. Vous voudrez mettre à ordre à cela ; vous m'éviterez la disgrâce d'employer les moyens que la loi me prescrit pour éviter la perturbation. Je vous salue avec estime".

BEZARD-LEGRAND annote cette lettre :

"Fait réponse : mon fils n'est pas un perturbateur, DUBUISSON est un polisson et vous, Monsieur, vous croyez avoir raison ; si mon fils a des tords il devait le souffleter".

 

Le 17 Mars 1806, Monsieur DE LA MORTE, ancien Capitaine, demeurant à Fontenailles par Beaugency, assure BEZARD-LEGRAND de son concours pour le projet de son fils...

Le 10 Avril 1806, BEZARD-LEGRAND écrit à Monsieur le Sénateur DUBOIS-DUBUY pour solliciter son intervention car son fils désire depuis deux ans rentrer dans l'armée et y faire son état ; il est très brave et donne beaucoup d'espérance.

Le 15 Avril 1806, il écrit à Monsieur DE LA MORTE ("Mon cher ancien camarade") pour que son fils soit mis au service du Prince Joseph, roi de Naples et de Sicile, et il renouvelle cette demande le 19 Avril 1806 au Sénateur DUBOIS-DUBUY, car il y a "quatre ans" que son fils désire servir dans la carrière militaire ; il écrit à nouveau dans ce sens à Monsieur DE LA MORTE le 22 Avril.

Le 21 Mai, il profite d'une correspondance avec le directeur du journal de l'instruction publique, pour solliciter son intervention en faveur de son fils.

Le 15 Mai, il remercie Madame DE LA MORTE de sa "royale réception" et rappelle que son fils "brûle du désir de servir sa Majesté".

Après plusieurs autres lettres du Capitaine DE LA MORTE, d'une dame DUCOR-DUROY à Fontenailles et de Monsieur AMAUX, direction du journal de l'instruction publique, le préfet de Loir et Cher informe enfin BEZARD-LEGRAND le 23 Mai 1806 que l'Empereur a ordonné l'admission de son fils dans les Vélites à pied et qu'il doit partir de suite à Paris.

A dater de son incorporation, il devra payer au gouvernement la pension exigée. Cependant, ce n'est que le 05 Juin 1806 que BEZARD-LEGRAND demande au préfet de recevoir son fils pour qu'il lui délivre sa feuille de route et le 07 Juin il lui envoie un panier d'écrevisses et lui annonce l'envoi de vin de Calabre, et du rhum de la Jamaïque ; il savait reconnaître les services rendus !

 

Beaujour BEZARD se met en route le 08 Juin et emporte :

- 9 chemises marquées J. B.,

- 12 mouchoirs blancs et couleur,

- 6 paires de bas de coton,

- 4 bonnets de coton,

- 2 paires de bas de soie de couleur,

- 6 cravates dont 2 noires,

- 2 serviettes ouvrées,

- 1 habit,

- 2 gilets (1 blanc et nankin),

- 4 culottes dont 1 longue.

 

BEZARD-LEGRAND accompagne son fils à Paris et il écrit le 11 Juin 1806 à sa femme :

"Ma bonne amie,

La course que je viens de faire avec notre fils m'a fatigué de toutes les manières. La nature ne peut se refuser des larmes à l'amour filial. Les chefs à qui j'ai causé y ont été sensibles quoique je ne souffrais plus dès Blois ; ils m'ont promis des égards et des considérations et même de l'avancement. Il est aujourd'hui affublé de son carquois guerrier ; il me manifeste des sentiments de la reconnaissance pour sa maman et moi. C'est son goût. De vive voix je t'en dirai davantage. C'est le meilleur état. A présent il faut de la conduite, de la bravoure et de l'économie.... J'ai causé avec lui en venant de chez notre cousin... Les sentiments amicaux qu'il m'a développé et ses bonnes dispositions me font bien augurer de lui. Je t'embrasse de tout mon coeur".

Les termes de cette lettre laissent cependant planer un doute sur le "goût" de Beaujour pour le service des armes. Son père ne l'a t-il pas poussé dans cette voix pour des raisons de "conduite" ?

Beaujour rajoute à cette lettre :

"Ma chère maman,

Ce matin j'ai été reçu à l'école militaire où j'ai endossé l'habit, ce qui m'a fait plaisir. Demain matin nous irons à Versailles dans notre corps. Etant pressé je ne puis écrire davantage. Reçois l'assurance de mon respect".

Le 11 Juin 1806, BEZARD-LEGRAND paie la pension de son fils aux chasseurs à pied à Versailles (200 Frs) et s'attarde à Paris ; il passe la soirée du Dimanche 22 Juin à Tivoli et va au théâtre ; il rentre à Blois et écrit le 27 Juin à Monsieur AMAUX, direction du journal de l'instruction publique pour le remercier de son intervention.

 

Le 26 Juin, Beaujour écrit sa première lettre à sa mère, d'une orthographe presque purement phonétique. Il se trouve avec des jeunes gens très bien élevés ; il n'y a jamais un mot plus que l'autre. Il est bien nourri. Il touche 4 Frs tous les décadi, mais le blanchissage lui coûte 15 à 16 Frs par semaine. Il se lève à 4 heures pour faire de l'exercice jusqu'à 8 heures. Puis il fait son lit et blanchit sa buffleterie et dîne après. Il passe la revue chaque jour avec culotte de nankin, gilet blanc, bas blanc et souliers à boucle. Après dîner (déjeuner) il a repos jusqu'à 4 heures 1/2 puis il fait à nouveau de l'exercice. Il a acheté deux paires de bas blancs, et une paire de guêtres, ce qui lui a coûté 30 Frs. Il a un grand mal de dents qui le fait beaucoup souffrir et, à cause de la fièvre, il ne peut écrire à son frère.

Le 02 Juillet, BEZARD-LEGRAND écrit au Lieutenant MORIOUX des Grenadiers à pieds de la Garde Impériale à Paris, pour le féliciter de sa décoration de la Légion d'Honneur qu'il vient de recevoir grâce à son intervention auprès de Préfet CORBIGNY "continuez de voler à la gloire. Votre zèle m'est connu, et l'Empereur saura vous distinguer et vous récompenser".

La mère de ce Lieutenant MORIOUX avait été la nourrice de sa fille, Marie Brigitte BEZARD, ainsi qu'il résulte d'une lettre de BEZARD-LEGRAND du 20 Janvier 1810.

Le Lieutenant MORIOUX répond à BEZARD-LEGRAND le 12 Juillet, le remerciant de son intervention auprès de Monsieur CORBIGNY et lui disant qu'il a été voir son fils à Versailles ; il s'est promené avec lui dans le parc, et l'a recommandé à des officiers qu'il connaît, notamment au Major BOYER qui veillera sur lui. Le Lieutenant MORIOUX ira à Blois pour la foire d'Août.

BEZARD-LEGRAND le remercie le 21 Juillet des nouvelles qui lui donne de son fils et du soin qu'il prend de lui et l'assure de toute son amitié.

Beaujour BEZARD écrit à nouveau à sa mère le 14 Juillet ; à cause de son mal de dents il a oublié de souhaiter la fête de son père. Il est allé à l'hôpital pendant 8 jours. Il est allé dîner chez le grand-père de son ami GIOT et a été voir à Versailles le banquier SOCHEAU chez qui son père avait déposé son habit et surtout l'ordonnance. Il parle de la visite que lui a rendu le Lieutenant MORIOUX et de son intervention auprès du Colonel Major. Cette lettre n'est pas écrite de la main de Beaujour, qui semble répugner à écrire ; mais il ajoute de sa main et avec toutes les fautes d'orthographe auxquelles il est accoutumé, ces amitiés à son frère, à Mademoiselle LECOMTE et à Monsieur et Madame LEMAIGNEN. Cette demoiselle LECOMTE était donc toujours une intime de la maison et nous la retrouverons encore beaucoup plus tard.

Le 21 Juillet BEZARD-LEGRAND écrit à son fils pour lui reprocher son silence et l'engager à suivre les bons conseils du Lieutenant MORIOUX qu'il présentera au Préfet et aux membres de la Légion d'Honneur lorsqu'il viendra à Blois à la foire d'Août. Son nom sera gravé sur les tables de marbre des membres de la Légion d'Honneur. Il engage Beaujour à apprendre les mathématiques et à bien faire l'exercice.

Beaujour répond à son père le 24 Juillet qu'il est affecté à la troisième compagnie et compagnon de lit de son ami GIOT. Il prend des leçons avec une maître d'armes de la Garde Impériale. Il lui faut 18 Frs pour acheter deux fleurets, un masque, un gant et une paire de sandales. Les leçons d'escrime qu'il avait déjà prises à Blois lui ont été profitables. Cette lettre n'est toujours pas écrite par Beaujour qui y ajoute de sa main, ses amitiés à son frère, à Monsieur et Madame LEMAIGNEN, à Monsieur et Madame GIOT. "GIOT et LEMAIGNEN se portent bien et te présentent ainsi qu'à ma chère maman leur civilité". Qui pouvait être ce LEMAIGNEN ? Le fils du notaire, peut-être ?

Un peu plus tard, BEZARD-LEGRAND a appris par Monsieur DE SEGUR qu'un corps était en formation à Mayence sous les ordres du Maréchal KELLERMANN et il écrit à Monsieur DE LA MORTE pour qu'il intervienne en faveur de la nomination de son fils dans le corps.

Le 24 Juillet 1806, il demande au Lieutenant MORIOUX s'il est possible d'intervenir auprès du Colonel Major pour faire nommer son fils au grade de Caporal. MORIOUX lui répond le 29 Juillet l'assurant de tout son zèle et lui conseille d'écrire au Colonel Major, ce qu'il fait le 03 Août 1806.

Le 18 Août, le Maire de Blois convoque Joseph BEZARD pour le tirage de la conscription. Son père répond que son fils est incorporé depuis le 10 Juin. Le 02 Septembre, Beaujour informe son père qu'il n'a pu faire réparer une montre qu'il lui avait donnée, n'ayant pas les fonds nécessaires. En se promenant dans le parc de Versailles avec ses amis GIOT et LEMAIGNEN il a rencontré des familles de Blois qui admiraient les Grandes Eaux. Une de ces familles les a invité à dîner et lui a remis un Louis. Il ajoute ses amitiés à son frère, son oncle, sa tante, son cousin LEROUX et mille choses honnêtes à Mademoiselle LECOMTE ainsi que sa soeur et "la bonne Nannette".

Le 26 Septembre, le Lieutenant MORIOUX remercie BEZARD-LEGRAND des services qu'il rend à sa famille et à lui-même, notamment auprès de Monsieur CORBIGNY. Il a vu Beaujour au cours d'une revue dans la plaine des Sablons et il vient d'apprendre que son régiment va se diriger vers Mayence et Francfort où la garde doit se réunir et où sera le quartier général de sa Majesté. "On parle de paix et de guerre ; rien de certain à ce sujet"?

En fait, c'est la guerre, et Beaujour est en route avec la grande armée pour l'Allemagne. Le 08 Octobre il est à BAMBERG, d'où il écrit à ses parents :

"Nous allons à la rencontre des Prussiens que nous espérons taper d'une bonne façon ; notre Empereur marche à notre tête. J'ai supporté la fatigue de la route le mieux du monde. GIOT est de garde chez l'Empereur avec toute sa compagnie ; il est aussi content que moi de marcher à l'ennemi ; la cavalerie de la garde ne nous ayant pas rejoint, je n'ai pas vu LEMAIGNEN ; j'ai vu le Général VERDIER, mais je puis l'aborder sur la route ; cette lettre ne pourra, je crois bien, avoir de réponse, car nous sommes toujours en route".

 

Le 30 Octobre, après 37 jours de marche forcée il est arrivé à Berlin d'où il écrit à ses parents :

"Nous sommes arrivés dans la capitale de la Prusse sans avoir tiré un seul coup de fusil ; il y a environ 17 jours que la Bataille d'Iéna s'est donnée ; cette journée nous a été favorable quoique n'ayant que des forces bien inférieures à l'ennemi tant en cavalerie, qu'artillerie et infanterie ; si notre Cavalerie fut arrivée 4 heures plus tôt, nous eussions pris à l'ennemi tout son grand corps d'armée ; cette bataille commença à 5 heures du matin et n'a fini qu'à 11 heures du soir nos gens ne font que les poursuivre et font beaucoup de prisonniers. L'Empereur nous fait marcher à grandes journées contre eux ; leur retraite ressemble plutôt à une déroute complète. Nous sommes arrivés de cette manière à Postdam, très belle ville à 8 lieues de Berlin, et résidence de plaisance du Roi de Prusse ; nous avons fait séjour dans cet endroit en sommes partis pour aller coucher à une lieue de Berlin, dans le village de Chartambourg, nous partimes de là le lendemain à 3 heures du soir.

L'Empereur a fait son entrée triomphale dans Berlin au milieu de sa garde ; le peuple lui a fait la réception la plus gracieuse ; tous les magistrats de la ville ont été au devant de lui pour lui offrir les clefs de la ville.

"..... Louis GIOT et LEMAIGNEN se portent bien et nous employons nos petits moments de loisir à nous promener ensemble. Je finis mon cher papa et chère maman et vous embrasse comme je vous aime et suis pour la vie votre affectionné et respectueux fils".

Bien entendu, cette lettre n'est toujours pas écrite pas Beaujour qui se contente de signer. Il est curieux de constater qu'il a à peu près la même signature que son père.

Outre son intérêt historique, cette lettre est très émouvante. C'est en effet une des dernières lettres que recevront ses parents. Il semble d'ailleurs qu'ils ne l'aient reçue que beaucoup plus tard comme on va le voir.

En effet, le 03 Janvier 1807, BEZARD-LEGRAND écrit aux administrateurs du bureau des revues, Hôtel Petit Saint-Joseph, rue Saint-Dominique à Paris, qu'il n'a pas de nouvelles de son fils depuis 3 mois. "Il plane des doutes sur la vie ou la mort de mon fils". Le même jour il écrit aux administrateurs des hospices militaires de Berlin en Prusse :

"Il est douloureux à un père de rechercher son fils ; la guerre l'a peut-être obligé de séjourner dans vos hôpitaux ; il a été recommandé par son altesse sérénissime le Prince archichancelier qui m'a promis sa protection".

Cependant, Beaujour était arrivé avec la Grande Armée à Varsovie d'où il avait écrit à ses parents le 23 Janvier 1807. Mais cette lettre ne leur est parvenue que beaucoup plus tard.

Il accuse réception d'une lettre de ses parents du 15 Novembre 1806. Il a été hospitalisé pendant 20 jours pendant lesquels le Lieutenant MORIOUX lui a rendu visite et lui a prêté un Louis. Il ne sait pas grand chose de la guerre sinon que les Russes ont été repoussés aux frontières de la Pologne. GIOT et LEMAIGNEN se portent très bien. Il demande l'adresse du frère de Mlle LECOMTE.

Cependant, l'administration ne perd pas ses droits et le Préfet de Loir et Cher réclame le 20 Février 1807 la paiement de la pension aux Vélites de la Garde (50 Frs) afin d'éviter des poursuites.

Le 15 Mars, le Lieutenant MORIOUX (devenu Capitaine au 10e d'Infanterie légère 1ère division, 4e Corps de la Grande Armée commandée par Monseigneur le Maréchal SOULT) écrit à BEZARD-LEGRAND de Liebstard (vieille Prusse).

Il a quitté son fils le 28 Janvier 1807, date à laquelle MORIOUX est parti de Varsovie. Beaujour était bien peiné de ne pouvoir participer à cette nouvelle campagne car il avait eu une engelure au pied et était entré à l'hôpital où il lui a prêté de l'argent.

 

Quant à MORIOUX, il a passé la Vistule en longeant la rivière de la Nareva et il entre dans les villes Prusses et après 8 jours de marche arrive en vue de l'Armée Russe le 04 Février au matin.

"Les deux armées se disposaient à une affaire générale ; l'ennemi se voyait dans une superbe position mais bientôt il fut forcé à une retraite qu'il fit parfaitement en règle le 05 - 06 et 07 Février. Nous les poursuivimes jour et nuit à grands coups de canon, leur faisant grand nombre de prisonniers et tué bien du monde. Enfin le 08 Février l'ennemi profitait de la fatigue de nos troupes, du peu de cavalerie que nous avions, et ayant reçu un renfort considérable en artillerie de position, voulut faire face. L'affaire devint cruelle ; je peux vous assurer que c'est la 43e bataille et la plus sanglante que j'aie vue ; nous ne devons la victoire qu'à l'intrépidité sans égale de notre armée. 43.000 français subirent les efforts multipliés de 85.000 Russes, qui, après 12 heures de combat sans avoir perdu ni gagné un pied de terrain se virent forcé à une retraite, nous laissant 5.000 blessés, au moins 8.000 morts, 22 pièces de canons et nombre de caissons. Ils doivent leur salut à l'extrême fatigue de nos troupes. On se tint la nuit sur le champ de bataille sans les poursuivre. Le lendemain on découvrit que l'ennemi s'était retiré avec confusion dans la ville de Konigsberg. On a pris position en attendant du renfort. Je fus nommé par sa Majesté Capitaine sur le champ de bataille ; j'aurai désiré rester à la garde, mais je fus envoyé au 10e régiment d'Infanterie légère. Nous sommes depuis cette époque en position ; seulement une rivière nous sépare de l'ennemi ; je ne peux vous dire ce qu'il en résultera ......".

(Bataille d'Eylau).

 

La lettre écrite de Varsovie le 23 Janvier par Beaujour à ses parents leu est parvenue au début de Mars et le 13 Mars, son père lui en accuse réception. Il désirerait avoir plus souvent des nouvelles de son fils, les batailles qui se donnent tous les jours lui causant de vives inquiétudes. Il l'entretient de ses démarches en vue de son avancement et l'embrasse de tout son coeur.

 

Le 24 Juillet, le Préfet réclame à nouveau le paiement de la somme de 100 Frs pour pension de son fils aux Vélites de la Garde lui indiquant que tout retard dans le règlement pourrait nuire à l'avancement de Beaujour et même à son exclusion de ce corps. BEZARD-LEGRAND s'acquitte de ces 100 Frs le 28 Juillet.

Le 18 Août 1807, BEZARD-LEGRAND reçoit la dernière lettre de son fils datée du 26 Juillet 1807 :

"Il est en toute impossibilité de vous marquer quelque nouvelle pour moi ; depuis ma chute de Tilsit je ne fais que traîner d'hopitalle en opital ; j'ai rencontrai Monsieur MOURIO, capitaine dans la 10ième légère que revenais de l'Hôpital pour une blessure de balle dans le côté, ce qui a été peu de chose, car il a été blessé à la foire du 14. Il m'a donc prêté 25 Francs ce qui m'a fait beaucoup de plaisire. Je vais partire sous peut Berlin où je pourai me remaitre car ma cuisse est très mauvaise. J'ai l'honneur de vous saluer".

A cette dernière lettre est épinglé un morceau de papier écrit par BEZARD-LEGRAND : "Ecrit de l'abondance du coeur 21 Octobre 1807 à mon Fils de la Grande Armée".

Il est étonnant qu'on n'ait reçu aucune nouvelle de Beaujour entre le mois de Janvier et le mois de Juillet. Pourquoi n'a-t-il pas écrit pendant près de 6 mois. Il ne devait pas être malade, ni blessé, puisqu'il est parvenu, avec grande armée à Tilsitt.

Peut-être a-t-il écrit d'autres lettres qui ne sont pas parvenues ?

Le 28 Octobre 1807, BEZARD-LEGRAND écrit au Capitaine MORIOUX, alors à Marienwerden en Prusse pour le remercier de l'intérêt qu'il porte à son fils.

Il ignore encore le décès de son fils, et le 03 Décembre 1807, il sollicite une audience de trois minutes à son Altesse Sérénissime le Prince archichancelier de l'Empire alors de passage à la Préfecture de Blois (CAMBACERES).

Il lui expose par écrit que son fils s'est battu sous les yeux de l'Empereur et Roi à Iéna, Eylan et Friedlande. Il sollicite une lieutenance conformément aux promesses que sa Majesté l'Empereur et Roi a faites à son fils le 17 Février 1806 par l'entremise de Monsieur DE SEGUR, grand maître des cérémonies. Mais il résulte d'une note manuscrite de BEZARD-LEGRAND qu'il a surtout exposé à l'Archichancelier son inquiétude sur le sort de son fils, presque certain qu'il est mort. CAMBACERES lui a promis de lui donner des nouvelles dans les 08 Jours. Il a rappelé à BEZARD-LEGRAND qu'il avait dîné avec lui chez Monsieur MULLER, régent de la Banque de France à Paris et chez le Directeur Général de la Banque de France, devenu depuis Sénateur. Il informe le même jour (03 Décembre) Monsieur DE BOYER Major des chasseurs à pied de la garde impériale à Paris, de son entretien d'un quart d'heure avec CAMBACERES. Le 08 Décembre il demande des nouvelles de son fils au Président du Conseil d'Administration militaire des chasseurs à pied de la garde impériale à Paris.

On comprend la douleur de ce pauvre père qui n'a pas reçu de nouvelles de son fils depuis le 18 Août, et encore est-ce une lettre datée du 26 Juillet, il y a donc près de six mois.

Le 15 Décembre 1807, BEZARD-LEGRAND reçoit une lettre du Capitaine MORIOUX datée de Stettin, en réponse à sa lettre du 28 Octobre, qu'il n'a reçue que le 05 Décembre. Il le remercie de la bienveillance dont il fait preuve envers ses père et mère et se préoccupe de l'avancement de Beaujour. Cependant, il fait remarquer à BEZARD-LEGRAND qu'il serait indigne de son honneur d'officier qu'il propose de l'argent à ses supérieurs pour obtenir l'avancement de son fils, comme BEZARD-LEGRAND le lui a demandé. Il s'y refuse.

Il est d'ailleurs très difficile d'obtenir cet avancement car le nombre de Vélites aux chasseurs de la garde est considérable et :

"Monsieur le Maréchal a tant de recommandations qu'il ne peut rendre justice à tout le monde. C'est un fils de général ou un parent qui a toujours l'avantage".

"Il faut s'insinuer près des chefs ; malheureusement on ne fait pas le choix des caractères, car celui de Monsieur votre fils est trop grand pour s'abaisser au vil métier de flatteur".

Le préfet de CORBIGNY étant à Paris le 28 Décembre, BEZARD-LEGRAND lui demande d'un profiter pour s'enquérir de nouvelles de son fils auprès des Ministères, et le lendemain il écrit au Ministre de la guerre :

"Un père de famille s'adresse à vous avec confiance. Depuis 5 mois je cherche mon fils qui se nomme Joseph BEZARD, chasseur Vélite à pied. Il a eu l'honneur de combattre, sous les yeux de sa Majesté l'Empereur le Rou à Iéna, Eylau et Friedland où il a fait preuve de courage. Depuis 5 mois personne ne peut me dire s'il est à l'hôpital ou mort. Quelle angoisse pour un père qui est en attente".

Il renouvelle sa demande à Monsieur le Préfet CORBIGNY le 14 Janvier 1808, "Rendez-service à un père et une mère éplorés et à une famille qui désire savoir ce qu'est devenu Joseph BEZARD, son fils, etc...".

Il écrit également à Monsieur DE LA MORTE, alors commandant de la Place de Berneau en, Prusse le 29 Décembre 1807 pour lui demander si son fils n'est pas dans un hôpital en Prusse.

Le 20 Janvier 1808, Monsieur DE LA MORTE, alors chef du 7e bataillon, commandant la Place de Neustadt-Oberswalde lui répond que son fils n'est pas à l'hôpital de Berneau car il vient de s'en informer. Il aura des nouvelles dans 15 jours. Et le 26 Janvier, il informe BEZARD-LEGRAND que son fils n'est pas dans les hôpitaux de la région. Ils ont tous été évacués sur la France à l'exception de celui d'Elbing (près de Königsberg). Mais, il a tout lieu de penser que son fils est rentré avec la garde de l'Empereur. Il continue néanmoins ses recherches :

Enfin après six mois de silence et d'angoisse, BEZARD-LEGRAND reçoit du sous-inspecteur aux revues une lettre du 02 Février 1808 lui annonçant:

"Qu'il a écrit au quartier Maître du Régiment ; il vient de me faire passer la pièce que vous trouverez ci-joint ; je regrette que son contenu ne soit pas plus satisfaisant et dans pareille circonstance, je partage bien sincèrement la douleur d'un père de famille qui est attaché à ses enfants".

A cette lettre est joint un certificat des membres du Conseil d'Administration de la Garde Impériale, constatant que Joseph BEZARD est mort à l'hôpital externe le 23 Septembre 1807 par suite de maladie.

Il résulte d'une note écrite par BEZARD-LEGRAND que son fils serait mort à Berlin. Il avait les jambes gelées. Cependant, sur un billet de faire part, BEZARD-LEGRAND indique que son fils est mort "à Könitz entre Königsbert et Berlin à 68 lieues de distance". Quelle fut la cause de la mort de Beaujour ? Nous ne le savons pas. Ce n'est certainement pas les jambes gelées, car nous étions alors en plein été ; d'ailleurs Beaujour a écrit lui-même le 26 Juillet qu'il avait fait une chute de Tilsitt et que depuis il se traînait d'hôpital en hôpital et que sa cuisse était "très mauvaise".

On conçoit la douleur de BEZARD-LEGRAND en apprenant si brutalement la mort de son fils, 8 ans après la mort de sa fille. Il fait imprimer 192 faire parts de décès, dont nous avons quelques exemplaires, dont un destiné à LEMAIGNEN, notaire, sans doute le père du camarade de son fils.

Sa soeur, religieuse à la Visitation de Blois, lui écrit dès qu'elle a appris le décès. Dans un style très "bonne soeur", elle s'inquiète de savoir si Beaujour a pu recevoir les sacrements avant de mourir. Elle demande au Seigneur de répandre sa bénédiction sur "deux chers enfants qui vous restent". On peut se demander si ce deuxième enfant est Charles ROGER, son petit-fils, dont elle parle dans sa lettre, ou si ce ne serait pas le 4ème enfant que BEZARD-LEGRAND prétendait avoir en 1793 ?

 

Ce pénible récit de la vie et de la mort de Beaujour BEZARD s'achève hélas sur une question d'argent !

Le préfet réclame à BEZARD-LEGRAND, après la mort de son fils le solde de sa pension aux Vélites.... BEZARD répond :

"Je désirerais bien devoir cette somme et avoir mon fils".

Il fait d'ailleurs ses comptes, comme à son habitude, et constate qu'il a versé en trop sur la pension, 23 livres 2 deniers et 8 sols !

 

 

Correspondance avec la famille MORIOUX après la mort de Beaujour

 

Le Capitaine MORIOUX avait un frère Pierre qui était Dragon au 10e régiment du 2e corps d'armée de la Gironde en Espagne. Ce Pierre MORIOUX écrivait à sa mère le 10 Mai 1808, après avoir appris la mort de son père et demande des nouvelles de son frère.

Le 10 Août 1808, le Capitaine MORIOUX écrit à BEZARD-LEGRAND pour lui dire qu'il a écrit deux fois à son fils. Il n'a pas reçu de réponse. Il attribue cela à son avancement. Il lui demande de prier le Préfet CORBIGNY de prendre en considération le sort de sa mère qui a perdu son mari, et dont les deux fils sont aux armées.

Le 20 Janvier 1810, BEZARD-LEGRAND informe le Dragon, Pierre MORIOUX, alors en Espagne, de la mort de son frère, le Capitaine MORIOUX à la suite de ses blessures en Allemagne. Il lui donne des conseils pour placer une somme de 2.400 Frs qui appartenait au Capitaine MORIOUX, en sorte que sa mère en touche les revenus :

"Comptez sur mon zèle à vous obliger ; votre frère à eu des égards pour mon fils et je lui en ai de la reconnaissance. Je vous embrasse. Je suis le père de la fille que votre mère à nourri. Le Ministre m'a envoyé la Croix de la Légion d'Honneur de votre frère ; je l'ai remise à votre mère".

Enfin, le 06 Avril 1810, BEZARD-LEGRAND écrit à Monsieur Le Baron de CORBIGNY.

"Monsieur le Chevalier, au sujet du deuxième fils de la veuve MORIOUX, toutes recherches faites par moi ont été superflues. Cette mère est infortunée et sans appui. Le frère a été tué sur le champ de bataille de Wagram, capitaine et décoré. Monsieur le Préfet n'ignore pas les bonnes volontés de ce capitaine. L'amour filial le rendait à la reconnaissance maternelle.... Rendez à cette veuve ce que la loi lui accorde sur les 27.000 Frs restés en dépôt".

 

Au dos du portrait de Beaujour, son père a écrit "Portrait d'un brave". Il est émouvant de pouvoir retrouver dans ce portrait les traits de ce jeune garçon que les lettres pieusement conservées par BEZARD-LEGRAND font revivre.

 

 

G - Charles Roger

 

On sait que BEZARD-LEGRAND avait une fille : Marie Brigitte BEZARD née à Blois le 07 Septembre 1781.

Elle avait épousé à Blois le 29 Septembre 1797, à 16 ans, Charles Michel ROGER, né à Saint-Dyé sur Loire le 03 Janvier 1777.

Il était le fils de Michel ROGER, né en 1752, décédé à Saint-Dyé en 1816 et de Marie Françoise Victoire LEMAIGNEN (1757-1824). Cette dernière était issue du deuxième mariage de André Michel LEMAIGNEN, né le 20 Novembre 1719, décédé le 30 Août 1770, avec Marie Anne Victoire POIRIER (André Michel LEMAIGNEN avait épousé en premières noces Rose TRESSEY).

 

Charles Michel ROGER était notaire à Avaray.

 

Du mariage de Charles Michel ROGER et de Marie Brigitte BEZARD était né un fils à Orléans le 17 Septembre 1799 : Charles ROGER. Sa mère décéda trois mois après sa naissance à Blois, le 26 Octobre 1799 et Charles Michel ROGER se remaria le 07 Juillet 1801 avec Sophie Adélaïde Françoise BRERONT, née le 11 Janvier 1781 (décédée à Avaray le 08 Septembre 1840), fille d'Etienne BRERONT, notaire, régisseur de terres du Marquisat d'Avaray, et de Florence Françoise SERREAU.

Sophie BRERONT avait eu pour parrain haut et très puissant Seigneur Claude Antoine de BEZIADE, Marquis d'Avaray, Brigadier des Armes du Roi, maître de la garde robe de Monsieur son frère, et pour marraine très haute et très puissante dame de Mailly, marquise d'Avaray, dame pour accompagner Madame la Comtesse d'Artois.

Dès son veuvage, Charles Michel ROGER confie son fils Charles, âgé de 3 mois à ses beaux-parents BEZARD-LEGRAND qui vont l'élever comme leur propre fils, d'autant plus que la seconde femme de Charles Michel ROGER ne semble s'y être jamais intéressée et n'avoir aucune affection pour lui ainsi qu'il résulte des lettres qu'on va parcourir. Il semble bien résulter de ces lettres que Charles Michel ROGER a toujours regretté cette séparation d'avec son fils à qui il témoigne une tendresse quelque peu excessive, mais sans doute dans le goût romantique du temps.

Le 22 Mars 1808, Charles Michel ROGER écrit à sa belle-mère, Madame BEZARD-LEGRAND qu'il a le plus grand désir d'aller la voir, d'autant plus qu'il sait que son beau-père est fatigué et que son petit Charles n'est pas très bien portant. Lui-même a la fièvre depuis 7 mois au point qu'il ne peut marcher. Il espère remercier ses beaux-parents du soin qu'ils ont pour son fils et jouir de ses caresses. Il l'engage à ne point s'échauffer en courant, à ne point se battre, en un mot d'être sage et tranquille. "Je vous demande en grâce de me tranquilliser sur le gros rhume de mon beau-père et je le prie de bien se ménager". Il souhaite enfin que ses beaux-parents vivent longtemps pour le bonheur de ceux qui leur sont attachés et envoie ses sincères amitiés à son beau frère (Pierre Samuel BEZARD) et à ses cousins et cousines LEMAIGNEN.

 

Le 30 Mai 1808, Charles Michel ROGER écrit à son fils :

"Mon bon ami, continue à bien travailler ; ton frère Eugène est toujours bien malade "

(Il s'agit du premier des 10 enfants nés de son mariage avec sa seconde épouse, né à Blois le 17 Juin 1804 qui sera notaire à Avaray et épousera à St-Dyé le 21 Décembre 1828, Victoire Luce PICOT et en secondes noces à Orléans le 30 Janvier 1836, Sophie SAUVAIN, il est prénommait en réalité Louis Eugène).

"J'assure de mon respectueux attachement mon cher papa et ma chère maman (ses beaux-parents). Je prie mon frère (son beau frère Pierre Samuel BEZARD) de croire aux sentiments d'amitiés qui m'animent pour lui, et lui demande le change. Mille choses agréables à Mademoiselle LECOMTE. Adieu mon petit ami, nous nous aimerons toujours. Ta maman et ton papa BRERONT t'embrassent.

 

Le 24 Juin 1808, il écrit à son fils :

"Mon bon ami, tu ne veux donc plus m'écrire, tu ne veux donc plus m'aimer. J'attends une réponse. Deviens-tu indifférent, m'aurais-tu oublié. J'ose pourtant encore espérer. Embrasse pour moi tes chers parents en les assurant d'un attachement vrai et respectueux. Je t'embrasse aussi du meilleur de mon coeur. Ton ami : Roger".

 

A la fin de l'année 1808, Charles ROGER devait se trouver chez son père à Avaray car il écrit à ses grands parents le 16 Décembre 1808 :

"Viendrez-vous bientôt nous voir pour que j'ai le plaisir de vous embrasser .... Je n'oublie pas ma mie Nannette".

Cette lettre témoigne des sentiments très affectueux de Charles ROGER pour ses grands parents. C'était, semble-t-il, un enfant sensible et précoce. En effet, en Juin 1806 à l'âge de 6 ans il récitait un compliment à son grand-père :

"Quand chacun animé par la reconnaissance s'empresse tour à tour à fêter votre nom, souffrez mon grand papa que mon zèle devance l'âge où l'on ne connaît ni rime ni raison. J'ai pour bouquet mon coeur ; que peut de plus l'enfance, le présent, quand on aime, est toujours de saison".

C'était sans doute la grand mère BEZARD qui avait écrit ce compliment pour la Saint-Pierre.

 

Le 28 Décembre 1808, Charles Michel ROGER souhaite à ses beaux-parents ses voeux et les prie de les transmettre à son petit Charles qu'il aime de tout son coeur. Il témoigne à Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND sa reconnaissance pour bien élever son fils. "Ma femme se joint à moi pour vous assurer de ses amitiés et de son respect". Il transmet également ses voeux à Mademoiselle LECOMTE et à la bonne Nannette "qu'elle m'aime autant que je l'aime ; nous nous aimerons longtemps".

Le 05 Janvier 1809, il demande à son beau-père de différer la paiement d'un billet qu'il a souscrit et dont il laisse sa femme et Monsieur BRERONT dans l'ignorance. BEZARD annote cette lettre : "08 Janvier : Répondu : ne pouvons rien faire".

Le 26 Juillet 1809, il écrit à sa belle-mère pour la remercier de tout ce qu'elle fait pour son fils qu'il vient de voir à Avaray et à Saint-Dyé. "Amitiés à mon beau-frère, à Mademoiselle LECOMTE et à Nannette".

Le 25 Octobre 1809, lettre datée d'Herbilly de Charles Michel ROGER à sa belle-mère lui annonçant le renvoi auprès d'elle de son fils, à son retour de vacances. Amitiés à son beau-frère et à Mademoiselle LECOMTE. Son fils lui a promis qu'il travaillerait avec courage pour mériter des prix.

Le 27 Décembre 1809, Charles ROGER écrit à sa belle-mère pour lui adresser ses voeux et lui témoigner à nouveau sa reconnaissance pour le soin qu'elle prend à son fils.

Le 14 Janvier 1810, il écrit à son fils pour le remercier de sa lettre de voeux du premier de l'an, l'appelant toujours "Mon cher ami". Il lui reproche que sa lettre ne soit pas assez affectueuse et le complimente sur ses progrès scolaires :

" Je n'ai pas goûté ta lettre autant que toutes celles que tu m'avais déjà écrites. J'y voyais alors une amitié sincère dirigée par l'âme et par le coeur. Aujourd'hui, je ne vois qu'un respect filial indiqué par le devoir au 1er jour de chaque année et moi j'aurais désiré une lettre de ton style où tu m'eus témoigné ton affection pour moi ; que tu m'eus instruit de tes progrès et du plaisir que tu aurais de me voir. Je pense journellement à toi. Je t'aime et je voudrais que tu en fis autant ; mais j'espère que tu m'aimeras toujours ... Ta maman t'embrasse mille fois. Eugène pense toujours à toi et comme il apprend à écrire, c'est toujours CHARLES qu'il trace en gros caractères. Ton papa BRERONT te fait mille amitiés. Adieu mon cher et bon ami. Amitié, travail, santé et joie. Ton père".

 

Il semble que les incitations au travail prodiguées par son père aient été écoutées, car Charles ROGER parait avoir été un bon élève, si l'on en juge par ses notes scolaires du premier et deuxième trimestre 1814. Il était alors en 4ème classe latine et se classait 1er, 2ème, 3ème ou 4ème sur 14 élèves. Avec les mentions très bien en thèmes et vers latin, français et grec (qu'il commence). Mais il est indiqué qu'il est d'un caractère étourdi et léger, qu'il s'applique assez bien, qu'il n'est pas assez appliqué en mathématiques, assez bon en dessin, assez docile, a une bonne mémoire et écrit très bien quand il veut.

Le 06 Avril 1814, son frère Eugène lui écrit pour le remercier de lui avoir envoyé de la musique et lui annonce qu'il commence la syntaxe latine ; il en est à "SCRIBO AD TE EPISTOLAM". C'est son père qui le 07 Avril lui transmet cette lettre de son frère de la veille ajoutant "Ton papa et ta maman BRERONT son très sensibles à l'amitié que tu leur témoigne... Je suis très pressé, nous avons eu à loger 210 cavaliers cette nuit ; il faut que je les fasse repartir". Il s'agissait sans doute de mouvements de troupe pour la campagne de France avant l'abdication de l'Empereur.

Le 30 Décembre 1814, Charles Michel ROGER envoie à ses beaux-parents une lettre de voeux assez plate et banale et transmet une lettre de bonne année d'Eugène à son frère. Monsieur le curé leur a permis de consacrer la classe du soir à écrire des lettres ; ils sont deux élèves dans la classe et 4 pour les thèmes.

Depuis cette dernière lettre, nous n'en avons aucune jusqu'au 28 Mai 1818 ; nous ignorons ainsi les dernières années d'adolescence de Charles ROGER. Nous apprenons seulement le 28 Mars 1818, par la lettre qu'il écrit à ses grands-parents qu'il est militaire à Dôle dans le Jura.

"Mon cher papa et ma chère maman,

Vous blâmez sans doute mon indigne paresse ; vous avez bien raison et il est difficile d'en avoir autant que moi ; j'en mets jusque dans mes choses qui ne peuvent que m'être agréables ; ma négligence envers vous en est une preuve bien convaincante ; mais néanmoins vous m'excuserez lorsque vous saurez de mon Maréchal des Logis chef vient d'être cassé et est dans une position où je dois me donner de le seconder, ce qui prouve la dépendance de notre état ; mais dans cette vie d'épreuve, il faut se faire un fonds de philosophie à l'abri du malheur ; je regarde toujours au dessous de moi, mes chers et bon parents, selon vos sages conseils qui sont gravés dans ma mémoire ; l'absence ne me les rappelle qu'avec peu de force ; il me semble quelque fois être à la maison écoutant vos airs et tâchant d'en profiter (ce que j'aurais toujours dû faire) je ne serais pas militaire maintenant".

Je ne sais à quoi attribuer le silence de mon père lui ayant écrit le 11 Janvier après sa réponse de nouvel an. Je n'ai pas encore reçu de ses nouvelles. Est-ce indifférence ou oubli ? C'est ce qui me désespère, n'ayant pas grand foi aux services que ma belle-mère peut me rendre auprès de lui. Je lui écrirai de nouveau le 02 ou 03 Avril prochain pour lui demander de l'argent, ma pension touchant à sa fin. J'aime à croire qu'il n'est pas fâché contre moi, ne lui en ayant pas donné le sujet : peut-être est-il malade ? Dans tous les cas je vous serais bien reconnaissant si vous aviez la bonté de m'en donner des nouvelles.

J'attends des nouvelles de mon oncle que j'assure de mon respect ainsi que ma tante ; j'embrasse Emilie qui doit être bien gentille et bien grandie.

Que mes tantes AMIOT et LEROUX ainsi que leur charmante famille trouvent ici l'assurance de mon respect. Je n'oublie point la bonne et complaisante Nannette. Adieu mon cher papa et ma chère maman, je vous embrasse avec respect et vous prie de me croire votre dévoué fils".

Il signe : ROGER-BEZARD, fourier.

 

On voit d'après cette lettre que les rapports de Charles ROGER avec sa belle-mère étaient loin d'être cordiaux. Il a pratiquement rompu tous contacts familiaux avec son père et s'intègre complètement avec la famille de sa mère au point qu'il prend le nom de ROGER-BEZARD. Sa lettre d'un style aisé, dénote une culture assez poussée. On se demande pourquoi il n'a pas suivi les sages conseils de ses grands-parents et pourquoi il a dû s'engager dans l'armée, à son grand regret.

 

BEZARD-LEGRAND a annoté cette lettre : Répondu le 02 Mai - Moral et tendresse et amitié. Envoyé 20 Francs par la poste. Nous avons d'ailleurs la copie de cette lettre du 02 Mai à "Mon fils et ami".

"..... Il faut savoir obéir à ses chefs, même les prévenir ; c'est le devoir d'un brave militaire. Le devoir avant tout. Si tu as des peines domestiques, c'est moi dans la vie la personne qui en est à la base. Encore une fois de la philosophie ; tu me diras que celui qui est dans l'opulence ne manque de rien, erreur. Ecris à ton père qui, je crois bien, aime les lettres respectueuses et reconnaissantes. Tu parviendras à obtenir ce que tu peux avoir besoin. Prends le par les sentiments d'amour falial. Représente lui ta bonne conduite et ta bonne tenue ; il est père et saura la porte du coeur et protection.

Assure de nos respects Monsieur le Marquis de LUCKER à qui je dois écrire sous 15 jours ; il faut de la patience et pour te consoler je lui envoie des pièces blanches par la poste. Tout est payé. Si mes facultés me permettaient de faire davantage, je le ferai, c'est de bon coeur.

Tu m'avais fait espérer que tu irais à Saumur ou à Arras.

Ecris donc à ton père qui est le notaire, le fermier général, l'homme de confiance d'un grand seigneur, le Duc d'Avaray, l'ami de notre bon Roi.

Soit bien avec tes chefs et tes camarades.

Je t'embrasse en bon grand-père".

 

BEZARD-LEGRAND avait incontestablement une affection profonde pour son petit fils, d'autant plus qu'il s'accuse d'être la cause de la rupture des relations avec son père après le remariage de ce dernier. Il le considérait comme son propre fils, et c'était réciproque.

Malheureusement, BEZARD-LEGRAND est une fois de plus cruellement éprouvé dans ces affections : Charles ROGER décède à Dôle le 05 Juillet 1818, fourrier du régiment des chasseurs du Var, âgé de 19 ans, ainsi que le constate la copie de son acte de décès délivrée à "M. BEZARD-le-GRAND, grand-père dudit défunt".

 

Un petit tableau ovale, peint en 1801, se trouvant à Périgny, représente Charles ROGER âgé d'environ 2 ans, mangeant une galette.

 

On a vu que Louis Eugène ROGER était devenu notaire à Avaray après son père.

 

De l'un de ses frères naîtra Jean Claude Eugène RIFFAULT qui fut maire de Blois.

Parmi les descendants des autres enfants de Charles Michel ROGER avec Sophie BRERONT figurent :

1°) Edouard ROGER, curé de Selommes vers 1885.

2°) Yves ROGER qui fut curé d'Herbault puis de Morée, décédé Aumônier des Petites Soeurs des Pauvres à Blois le 26 Janvier 1977 dans sa 78e année, enterré à Saint-Dyé où vivaient ses soeurs, Madame RIPERT, Madame QUESNEAU et Mademoiselle ROGER.

3°) Marie Elise ROGER épouse BEGENNE, qui eut une fille, Marie, qui épousa Philippe FOUCAULT, pharmacien à Blois (voir généalogie LEMAIGNEN et DEMEZIL).

4°) Camille ROGER, Capitaine d'artillerie à Vendôme qui eut un fils, Camille, Capitaine à Tours, qui épousa Jeanne Marie MACHART (décédée le 02 Mai 1915). Ils eurent 8 enfants dont Fernand LEMAIGNEN fut membre du Conseil de Famille. (Voir titre d'acquisition de la maison CROYERE, rue du Bourg Neuf à Vendôme du 07 Octobre 1933, à l'Etude. Vente par la famille ROGER-MACHART).

 

 

H - Lettres de Madame Bezard-Legrand à son mari

 

Françoise Louis Brigitte LEGRAND a écrit plusieurs lettres à son mari Pierre BEZARD, qu'il est amusant de parcourir.

La première qui nous ait été conservée est datée du 24 Juillet 1787 ; elle est adressée à son mari alors en voyage à Rouen :

"J'attendais aujourd'hui de tes chères nouvelles mon bon ami, et je m'en trouve privé. Tu as oublié ta promesse de m'écrire à Chartres. Tache de trouver un petit moment cher Mignon et ne tarde point à me donner cette douce satisfaction. Ménage ta santé ; pense que tu as une épouse et des enfants qui t'adorent. Tes jours me sont si précieux. Les caresses de nos tendres enfants sont si fréquentes et j'en jouis seule avec attendrissement. Viens donc le plus tôt possible partager avec moi le vrai bonheur, cela mettra le comble à ma félicité.

Adieu mon cher ami, je t'embrasse de tout mon coeur. Je suis pour la vie ta tendre et fidèle épouse".

BEZARD-LEGRAND.

 

Elle joint à sa lettres des échantillons de tissus qu'elle recommande à son mari de commander pour la foire prochaine, (ces échantillons sont encore collés à cette lettre). Elle transmet les respects de Mademoiselle LECOMTE.

 

Le 07 Mai 1808, elle écrit à son mari, de Périgny, pour lui demander du vinaigre, de la toile pour couvrir la rôtissoire, du ruban, un écheveau de fil. " Je t'embrasse de tout mon coeur et suis pour la vie ta tendre et fidèle épouse".

le 16 Décembre 1808, de Périgny :

"Je profite mon bon ami d'une occasion sure pour te donner des preuves de ma tendresse et te dire que tu es sans cesse présent à mon imagination. Ta santé et le plaisir de te voir font mon unique bonheur. Fais donc en sorte d'y contribuer par ta présence assidue à la maison afin de vivre en paix. Reviens de tes étourderies. Il est toujours temps de bien faire. Mille choses gracieuses à Monsieur et Madame LEMAIGNEN ; j'embrasse BEZARD (son fils) et Mademoiselle LECOMTE ; tu m'enverras un 1/2 pain et 2/3 de canevas grande lèze pour finir le garde manger".

Est-ce que BEZARD-LEGRAND serait un tantinet infidèle ?

 

Dans les même moments, elle souhaite, par une lettre non datée, le bonjour à son fils ainsi qu'à Mademoiselle LECOMTE :

"J'engage le premier à soigner le jardin et lui envoyer une douzaine des plus belles laitues et un demi pain.

La seconde à lui faire tenir par la plus prochaine occasion, une chemise, un mouchoir, une paire de poche ; pour son mari, deux chemises, deux mouchoirs.

Chacun des susdits dénommes embrasseront mon petit Charles. Mille choses gracieuses à Monsieur et Madame LEMAIGNEN. Je n'oublie point Nannette. Il faudra une pote de viande lorsque Monsieur BEZARD viendra. Rien autre chose. Jeanneton se porte bien".

Qui est Jeanneton ?

 

Elle écrit à son mari le 22 Mai 1814 de Périgny :

"J'ai reçu, mon ami, ta missive et toutes mes petites commissions. Demain on plantera les choux. Le maçon travaillera Jeudi à l'Aumône, je t'engage d'y passer en venant me chercher pour voir son ouvrage.

Tu t'es privé d'un petit levreau que j'aurais eu bien du plaisir à manger avec toi. Autrement il m'est indifférent ; une personne seule sait se passer".

 

De Périgny, du 12.... 1817, une autre lettre toujours aussi primesautière :

"Je suis arrivée, mon bon ami, en très bonne santé quoique la chaleur fut grande. La fille et la petite (?) de la maison étaient venu au devant de moi, ce qui fait que je me suis trouvée déchargée de mon petit panier. Cela m'a fait plaisir quoiqu'il ne fut pas lourd ; aussi leur ai-je fait part de mon morceau de galette. Je retourne le petit panier. Comme je suis convenu avec Nannette ; le pot que je devais envoyer n'a pas peu y entrer. Bonjour, mon tendre ami ; je t'embrasse de bien bon coeur ainsi que nos enfants et suis pour la vie ta fidèle épouse. BEZARD-LEGRAND. Si BEZARD (ton fils) veut t'accompagner, il me fera plaisir. N'oublie pas le pot de rillettes et le demi-pain. Je me suis procurer du lard".

 

De Blois, elle écrit à son mari à Périgny le 21 Mars 1818.

"Après la chute que j'ai faite, tu vois par la présente que ma main est à peu près guérie ; le reste n'est pas aussi bien ; mais j'espère qu'avec les bons soins de Nannette et grâce aux médicaments que je prends, ma guérison sera prompte. Et pense que mon bonheur et ma félicité résident en toi. Etc.....

Présente mes respects à Monsieur le Curé, tes enfants et ta bru te présentent les leurs. Place l'arbrisseau où tu voudras, ce n'est pas conséquent".

 

Le 03 Avril 1818, de Périgny :

"Vu qu'un laboureur va aller à Blois, j'envoie la présente à Villeromain pour que tu ne sois pas inquiet. Si contre mon attente tu ne pouvais venir lundi, écris-moi par le postillon. J'enverrai au devant de lui demain samedi pour qu'il me l'emporte par Vendôme. Bonjour mon cher époux, je t'embrasse avec tendresse et suis pour la vie avec sincérité ton épouse. Femme BEZARD-LEGRAND.

Fais accepter de ma part à Madame PORCHER, mon amie, tout ce que l'on peut de gratieux. J'embrasse nos enfants et Emilie. Je n'oublie point Nannette".

 

Le 15 Avril 1818, même lettre de même genre, sans motif, pour assurer son mari de sa tendresse : "N'oublie point Nannette. J'embrasse nos enfants. Il faut du sel et des oignons secs".

 

Le 17 Avril 1818, de Périgny, une lettre plus mélancolique :

"Je profite de l'occasion, mon bon ami, de Me BIGUIER pour te faire parvenir les sentiments tendres d'une épouse que ne cesse de penser à son époux. Soit de même, mon cher coeur que les ceuses qui nous unissent...... (illisible) par les longues années que nous avons déjà passé ensemble. Que Dieu bénisse celles qui nous restent encore à parcourir. Et tâchons par notre bonne conduite de le mériter. Je t'embrasse et suis pour la vie ton épouse. J'embrasse mes enfants.

 

Puis le 08 Mai, elle revient à des choses plus matérielles :

"Je profite, mon bon ami, de l'occasion et de l'obligence de notre voisin Vincent LECOMTE pour te rappeler qu'il faut pour finir la cheminée 200 briques et de la chaux, et pour moi une barde, du fromage, un quarteron de ......, de la salade, une tablette de chocolat, du pain, quelques biscuits et un éteignoir. On vous attendra à la route (de Blois à Vendôme) avec un âne. Je t'embrasse de tout mon coeur ainsi que nos enfants et suis pour la vie ta tendre et fidèle épouse. N'oublie point Nannette".

 

Une autre lettre du même style et du même contenu du 12 Mai (cette fois-ci il faut des asperges, des fleurs pour "nos Emilie" (sa belle fille et sa petite fille). Mille choses "gratieuses à Madame AUCHER".

 

Et encore une autre du 14 Mai (deux jours après) :

"Il m'est flatteur de pouvoir retracer à tes yeux les caractères d'un sincère attachement. Non, personne plus que mois n'a été et ne sera jamais ni plus tendre ni plus fidèle. J'ai de tout temps su partager tes peines et contribuer de tout mon coeur à les abréger. En ce, tu dois reconnaître l'épouse tendre et la bonne mère, celle qui est pour la vie, etc....

Puis, elle demande du pain, des raves et de la boisson.

 

Le 29 Mai 1818, elle lui confirme qu'elle l'attend le lendemain samedi, ainsi qu'il le lui a fait savoir par leur voisin CORNET.

"Je suis on ne peut plus satisfaite du soin que tu prends à me donner de tes chères nouvelles ainsi que nos enfants. Je n'oublie point Nannette".

 

Mais son cher coeur n'est pas venu la voir à Périgny. Aussi, lui écrit-elle le 31 Mai :

"J'ai été bien peinée, mon bon ami, de ne pas te voir hier, suivant ta promesse; surtout ne manque pas à celle de demain 1er Juin. Avec notre bonne Nannette je vous tiendrai le dîner prêt. J'enverrai au devant de vous comme de coutume...... Notre Octave ayant fini Jeudi, nous solemnisons aujourd'hui la fête du Sacré-Coeur en grande cérémonie. La musique de Villeromain est toujours des fêtes. J'assisterai à toutes les cérémonies religieuses avec exactitude. Il faut prêcher d'exemple ...... J'ai été bien contente de recevoir la lettre de Charles que tu m'as envoyée. Elle est un peu consolante ; nous causerons ensemble de son contenu".

 

(Il est dommage que nous n'ayons pas cette lettre qui devait être une réponse à celle que BEZARD-LEGRAND lui avait écrite le 02 Mai).

 

"Bonjour mon cher coeur ; reviens auprès de celle qui ne fait consister son bonheur que par l'amitié et la délicatesse d'une épouse fidèle. Je suis et ai été toute la vie et serai jusqu'au dernier soupir ta fidèle : Fe LEGRAND Fe BEZARD".

"Tu me feras plaisir d'apporter avec vous, de l'huile, des petits pois, quelques choux et du pain frais pour toi".

 

On ne peut s'empêcher de s'imaginer quelle a dû être la douleur des époux BEZARD-LEGRAND en apprenant la décès de leur petit fils un mois après qu'ils venaient de s'entretenir ensemble des sentiments exprimés par Charles ROGER. Après avoir eu 4 enfants, il ne leur restait plus que leur fils Pierre Samuel et la petite Emilie.

 

Il n'existe pas d'autres lettres de Madame BEZARD-LEGRAND depuis cette dernière.

Ces lettres permettent de saisir sur le vif la vie familiale des BEZARD et de se faire une idée assez précise de leurs séjours à Périgny.

 

 

I - Mariage de Pierre Samuel Bezard et Cession du Magasin

 

Après la tourmente révolutionnaire, malgré les deuils qui l'accablent (mort de sa fille le 26 Décembre 1799 - mort de son fils Beaujour le 23 Septembre 1807) BEZARD-LEGRAND continue à s'occuper activement de son commerce et de l'exploitation de ses biens. Jusqu'à sa mort, il habite dans sa maison de Blois, Grande Rue, près de la Porte Chartraine à laquelle il a adjoint en 1792 la maison de sa soeur AMIOT dans le Cul de Sac du Cygne et en 1793 celle de la Rue Chemonton.

(Mais il avait vendu le 08 Octobre 1793, un jardin situé près de l'église Saint-Nicolas à Blois et le 05 Octobre 1810 un autre jardin au Haut Bourg).

 

Agé d'environ 55 ans, il envisage de vendre son affaire commerciale.

Le 11 Janvier 1810, en effet, un jeune homme qui signe seulement de ses initiales "M.L." demeurant aux Montils lui écrit :

"Monsieur, j'ai reçu votre lettre avec un grand plaisir, accompagnée des bonbons que vous m'avez envoyés ; je les ai reçus avec joie quoique je vous eusse défendu de m'en envoyer avant que les affaires fusses terminées..... Ma mère a fait part de votre lettre à mon père et des intentions que vous avez pour moi et que vous espériez le gagner par votre constance ; il lui a fait réponse qu'il n'était pas dans l'intention de m'établir ; qu'à l'âge de 25 ans il pourrait y penser ; aussi Monsieur, je serais au désespoir de vous faire manquer un établissement favorable. il me sera cependant, difficile de rompre les noeuds d'amitiés que nous avons formés. Cependant Monsieur, si vous m'aimez véritablement, vous pourrez faire le sacrifice d'attendre jusqu'à 21 ans ; à cet âge, étant dans mes droits et ayant des amis qui voudrait bien se prêter pour nous, nous le faire aussitôt...... J'attends votre décision avec inquiétude, dans la crainte que vous ne soyez pas aussi constant que moi ......

 

Mais, BEZARD-LEGRAND n'a pas voulu attendre et il cédera son fonds de commerce à son fils, Pierre Samuel. On peut d'ailleurs se demander pourquoi, dès 1810, il ne réservait ce commerce à son fils ?

Celui-ci avait alors 27 ans ; il pouvait donc parfaitement lui succèder. A cette époque Pierre Samuel BEZARD songeait à se marier.

 

Le 27 Mars 1810, il écrivait à son père alors chez un Monsieur LANGE à Montoire (avec une orthographe catastrophique !).

"Mon cher papa,

"Je vous dirais avoir vu Monsieur PEAN, marchand de fer, lequel m'a dit faire des affaires avec le Maître de Forges a fer à Fréteval, lequel est propriétaire de la verrerie de Rougemont ; il a de 6 à 7 enfants, que cette maison était fort riche et qu'il y avait la demoiselle aînée qui a 22 ans et beaucoup d'usage, laquelle m'a-t-il dit fera très bien mon affaire quant au commerce.

Il m'a dit que pour des renseignements, Monsieur MARGANNE pourrait vous en donner parce qu'ils font des affaires ensembles. Vous ne pouvez me donner de preuve plus grande de votre amitié paternelle, quoique je n'en ai pas besoin après toutes vos bontés. Les enfants de ce Monsieur sont en pension à Vendôme. Il parait que le fils aîné est à la tête de la verrerie de Rougemont, et le père de sa demoiselle sont à Fréteval. Monsieur PEAN la dépeint comme très adroite, ayant perdu sa mère.

Je vous supplie de parler pour moi auprès de Monsieur MARGANNE.

Je suis avec la plus haute reconnaissance, votre très honoré fils.

 

Il ajoute en post-scriptum : "Je vous conseillerai de faire percer une porte en place de la croisée près le puits, pour éviter le passage dans votre chambre. Vous pourrez la donner à forfait".

 

Note de BEZARD-LEGRAND : "Pris renseignements, notamment auprès de Monsieur MARGANNE qui n'y a pas confiance. Autrefois très riche ; n'est pas élevé".

 

Le projet de mariage avec la fille du Maître de Forges de Fréteval n'aboutit donc pas, bien qu'elle aurait fait l'affaire de Pierre Samuel "quant au commerce".

Il épouse au début de Février 1812 (contrat de mariage reçu par Me POISSON, notaire à Romorantin, le 03 Février) Emilie Marguerite PORCHER, fille mineure de défunt Jean-Louis PORCHER et dame Marie Marguerite AUCHER (voir famille PORCHER-AUCHER).

Article 2 du contrat de mariage "Ledit sieur futur époux est pris par la demoiselle future épouse avec la somme de 20.000 Frs que lesdits sieur et dame BEZARD ses père et mère lui constituent en dot, dont 10.000 Frs pour le prix d'un maison en laquelle demeurent lesdits sieur et dame BEZARD, située ville de Blois, rue Porte Chartraine, dont le futur époux aura la jouissance à compter du 1er Janvier 1813, et 5.000 Frs que lesdits sieurs et dame BEZARD promettent de fournir à leur fils en marchandises de leur état. A l'égard du surplus de ladite somme de 20.000 Frs, se montant de 5.000 Frs lesdits sieur futur époux déclare l'avoir en sa possession, en objets mobiliers lui provenant de ses économies".

 

De ce mariage naîtra une seule fille, le 29 Juillet 1813 à Blois : Emilie Marie Brigitte (dont nous avons le portrait fait en 1819 avec un petit chat dans ses bras) qui épousera Léon LEMAIGNEN.

 

BEZARD-LEGRAND cède son fonds de commerce (plus exactement ses marchandises, car la vente de fonds de commerce est alors inconnu) à son fils le 14 Avril 1814 ainsi qu'il résulte de l'inventaire des marchandises en magasin établi à cette date.

Il rédige une affiche pour solder ses marchandises : "BEZARD père, ex marchand, au fond de la cour porte B à gauche à VENDRE en gros et en détail, draperies, toileries, rouenneries et autres marchandises en dessous du cour de 10%".

D'après une tradition de famille, quelques jours avant, le 02 Avril 1814, l'Impératrice Marie Louise de passage à Blois vers l'exile, se serait dans la boutique de BEZARD-LEGRAND et le petit roi de Rome aurait été assis sur le comptoir, pendant que Marie Louise choisissait des tissus. Aucun document écrit ne confirme ce fait , mais il est fort possible que l'Impératrice logeait lors de son passage à Blois à la Préfecture ait été incitée par la Baronne de CORBIGNY à faire les achats dans la boutique de BEZARD-LEGRAND.

Pierre Samuel BEZARD reçoit sa patente de commerçant le 20 Avril 1814 et succède à son père qui profite de la cessation de ses activités commerciales pour se consacrer au recouvrement de nombreuses créances qu'ils lui sont dues par ses clients et divers débiteurs. il existe de nombreuses lettres de ces débiteurs qui sollicitent des délais de paiement. BEZARD-LEGRAND les menace de poursuites par huissier. L'un d'eux cependant lui écrit le 19 Mars 1814 : "Vous avez dû recevoir hier une lettre de Monsieur MALLET qui m'a écrit aussi. Je vous prie de passer chez moi et d'apporter avec vous mon billet de 3.090 Frs et un sac vide. Je suis dans ce moment libre". Le sac était certainement destiné à être rempli de Louis en paiement du billet.

Il fait alors partie d'une société littéraire qui le convoque à une réunion le 28 Avril 1814 à 7 heures du soir.

On remarquera que BEZARD-LEGRAND s'était aux termes du contrat de mariage de son fils de lui laisser la jouissance de la maison de la Porte Chartraine le 1er Janvier 1813 et lui faisait don de 5.000 Frs de marchandises, ce qui semblait indiquer que son fils allait lui succèder prochainement. Cependant il ne lui succède que le 14 Avril 1814. Pourquoi ce retard ? Il semble bien qu'il est eu des difficultés entre le père et le fils et que les rapports étaient tendus entre eux.

En effet, le 02 Mars 1815, intervient pardevant Me PARDESSUS, notaire à Blois, une convention entre Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND et Monsieur et Madame BEZARD-PORCHER dans laquelle il est exposé que les marchandises d'un montant de 5.000 Frs promises par le contrat de mariage n'ont pas été livrées. "Monsieur et Madame BEZARD-PORCHER voulant donner à Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND un témoignage de leur attachement, déclarent qu'ils rennoncent par le présent à exiger de Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND tant qu'ils vivront, la dite somme de 5.000 Frs. En conséquence, cette somme ne sera exigible qu'après le décès du survivant de Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND, sans intérêts". Cette somme sera prélevée sur les plus clairs deniers de la succession, et ne sera pas payée en marchandises, mais en espèces d'or et d'argent au poids et au cours du jour.

Pourquoi BEZARD-LEGRAND n'a-t-il pas exécuter les promesses du contrat de mariage ?

Une quinzaine de feuillets couverts de notes et de chiffres par BEZARD-LEGRAND entre 1812 et 1815 permettent de répondre partiellement à cette question et de se faire une idée sur les rapports qui existaient alors entre le père et le fils.

BEZARD-LEGRAND rédige le 24 Décembre 1812 ainsi libellé :

"BEZARD-LEGRAND père et BEZARD-PORCHE (sic) consentent à passer titre à première réquisition de l'un ou de l'autre pour la Therasse (sic) qui donne sur le Cul de Sac du Cygne appartienne à l'un et à l'autre, ayant moitié chacun rapport à la maison n° 100. (De la rue Porte Chartraine). Nous soussigné, convenons que les réparations seront faites par moitié et que nous paierons l'imposition de même. Dans le cas de la mort du papa ou de la maman, ladite terrasse seulement appartiendra au fils BEZARD-PORCHE, en totalité, sans que Charles ROGER-BEZARD puisse y prétendre".

Cette convention n'a pas été signée. Elle dénote qu'à peine après le mariage de Pierre Samuel, il y avait déjà des difficultés de voisinage entre le père et le fils au sujet de leur deux maisons contiguës.

 

Lorsque BEZARD-LEGRAND a donné à son fils la maison rue Porte Chartraine, aux termes de son contrat de mariage, il aurait convenu, d'après une note rédigée par BEZARD-LEGRAND certaines réserves :

"Observation : Si BEZARD se rappelle nos conditions expresses et même par écrit, sans cela je ne l'aurais pas marié : j'ai retenu la glace et le chambranle de marbre blanc et (je lui ai demandé de) me rembourser les meubles à vue d'experts. Pour le contrat de mariage (sans doute les frais de ce contrat), c'est aux époux de me rembourser au lieu de 1.169 Frs ; qu'ils me donnent son billet dans un an sans intérêt de 1.100 Frs (?) ou qu'ils me remettent les glaces et autres objets".

 

Dans une autre note, BEZARD-LEGRAND précise :

"Objets dont mon fils aura à me tenir compte ou à rendre : au premier étage, deux encoignures 110 Frs ; une armoire 72 Frs ; un buffet et autres objets 105 Frs ; à la boutique (divers objets pour) 119 Frs. Total 406 Frs. Le marbre de la cheminée en blanc, 200 Frs ; la glace au-dessus 400 Frs, etc....".

 

Dans une autre note :

"BEZARD-PORCHE m'oblige à vue d'expert et au prix qu'ils estimeront à me payer la glace et le chambranle en marbre blanc qui est dans la chambre où je couche à présent pour tenir compte de mon ...... (illisible) 30 Décembre 1812.

 

Une autre note rédigée après l'acte notarié sus analysé du 02 Mars 1815, est ainsi libellée :

"J'ai vendu à mon fils BEZARD-PORCHE le 03 Mars 1815 pour conserver la bonne harmonie : une glace de cheminée ; je lui ai offert de la prendre pour 450 frs, le marbre blanc de la cheminée valant 250 Frs ; les deux encoignures d'armoires valant 140 Frs ; le buffet de la chambre 100 Frs ; une grande armoire de mon beau père LEGRAND 70 Frs. Total 1.060 Frs et 708 Frs de frais de contrat de mariage. J'ai reçu de BEZARD-PORCHE 700 Frs pour une valeur de 1.768 Frs".

 

Mais ce qui est le plus grave c'est la note suivante :

"BEZARD-LEGRAND déclare devant mon fils et la famille de sa femme qu'en son âme et conscience il a reçu 20.000 Frs, savoir : 10.000 Frs pour la maison de commerce + 5.000 Frs par quittance du 03 Février 1812. Ce qui s'est effectué le 13 Avril 1812 : étant dans mon cabinet il a reçu les 5.000 Frs en billets au porteur dont il a fait l'usage que bon lui a semblé. Je lui ai réclamé un billet de 3.000 Frs qu'il a enlevé de mon cabinet qui était à échéance à la fin de Janvier 1813. Ce qui a fait du bruit, car j'ai dit à sa femme devant plusieurs personnes : vous m'avez volé ! Je le soutient encore ! Il est ridicule de faire passer un père pour un être regardant et tirant. On le vole et ne peut élevé la voix. 5.000 Frs remis en marchandises de ma boutique pour solde de son contrat de mariage en Décembre. Les 3.000 Frs je saurai m'en rappeler et y faire droit".

 

L'indignation de BEZARD-LEGRAND est à son paroxysme et il rédige de nombreuses notes, toutes à peu près semblables pour prouver que son fils lui doit de l'argent, sans compter les intérêts, par exemple :

 

"Doit BEZARD-PORCHE :

- 1er inventaire des 30 et 31 décembre 1812 8954 livres, 4 sols, 9 deniers

- 2ème vente du 15 Janvier 1813 5556 livres, 6 sols, 6 deniers

----------------------------------

14510 livres, 11 sols, 3 deniers

 

"Redû au 1er Janvier 1813 : 5.000

et une reconnaissance : 2.583, 6, 8

----------------

7.583, 6, 8

7583 livres, 6 sols, 8 deniers

-----------------------------------

"Il revient à BEZARD-LEGRAND 6927 livres, 4 sols, 7 deniers

 

 

"à me tenir compte à partir du 15 Janvier 1813 à 5 %. Laissé écrit entre nous".

 

BEZARD-LEGRAND mélange allègrement les Francs et les Livres. Plusieurs autres comptes semblables détails le montant des intérêts dus par Pierre Samuel, avec quelques variantes sur le décompte des sommes dues et l'un d'eux porte en outre la mention : "Il doit de plus pour la glace et marbre et meuble encore 1.292 Frs".

Sur une autre note :

"En terminant nos comptes convenus ce qui est juste : j'abandonne 1.292 Frs 13 en mobilier. Passer acte devant notaire. Plus à prendre après notre décès de l'un et de l'autre 4.000 Frs par donation à titre de préciput et hors part ce qui veut dire en sus de ce qui lui reviendra en sus de Charles ROGER.

La glace et meuble et marbre seront à BEZARD-PORCHE ; qu'il se souvienne du billet qu'il a pris dans mon cabinet en Avril 1812. Je le prouverai. Si je voulais le perdre dans l'opinion. Mais je suis père".

 

Encore ne suffit-il pas que son fils le vole ; sa femme elle-même prend parti pour son fils : "Avant le mariage de mon fils, ma femme pardevant notaire à mon insu, une note où elle donne à son fils 6.000 Frs à prendre sur ce qu'elle laissera après sa mort. C'est, je crois, un testament qu'elle a fait. Est-il bon, oui ou non ?".

C'est pour mettre fin à ce litige qu'est signé la convention notariée du 02 Mars 1815 par laquelle BEZARD-PORCHER "pour témoigner de son attachement à ses parents" renonce à exiger le paiement des 5.000 Frs promis par son contrat de mariage. Mais BEZARD-LEGRAND estime que c'est lui qui a fait un cadeau à son fils ! En effet il déclare dans une note : "Nous avons donné le 03 Mars 1815 à prendre sur la succession après notre mort la somme de 5.000 Frs, ce qui forme les 20.000 Frs de son contrat de mariage, en vertu de l'acte de PARDESSUS du 03 Mars 1815".

Si Pierre Samuel était un voleur, BEZARD-LEGRAND n'était-il pas, comme le dit son fils "regardant et tirant" ?

Pour préparer cette convention du 02 Mars 1815 (et non pas le 03 Mars) le notaire PARDESSUS avait envoyé une note à BEZARD-LEGRAND : "Monsieur BEZARD pour égaler son fils en raison des sacrifices qu'il a fait pour l'éducation de son petit fils, peut par sa donation donner à son aîné 5.000 Frs à prendre sur sa succession et celle de son épouse, au décès d'eux, à titre de préciput et hors part". Note de BEZARD-LEGRAND : "Hors part, c'est à dire en sus de ce qui lui reviendra dans nos deux successions après notre mort".

Puisqu'il ne s'agissait de payer tout de suite ces 5.000 Frs, BEZARD-LEGRAND a accepté de suivre les conseils du notaire et de signer la convention du 02 Mars 1815 ; mais il reste convaincu que c'est un cadeau immérité qu'il fait à son fils.

 

 

Donation à Pierre Samuel BEZARD

 

A partir de cette date on ne trouve aucun document sur les relations entre BEZARD-LEGRAND et son fils qui ont du redevenir normales sinon cordiales. Il est d'ailleurs devenu le seul héritier, puisque Charles ROGER est décédé le 05 Juillet 1818.

Aussi, par acte de Me GAULTIER de la FERRIERE, notaire à Blois du 12 Septembre 1820 (titre de Périgny), Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND font-ils donation à Pierre Samuel de tous leurs biens immeubles.

Il lui avait déjà vendu par acte du 06 Décembre 1817 : "une chambre tenant à la maison des vendeurs située Grande Rue, alcôve dedans, garnie de boisures croisée au levant et porte à deux vantaux au midi, cour commune devant, ladite chambre joignant de galerne et abritant d'abas sur les vendeurs, de solaire et d'amont sur la cour commune" moyennant le prix de 300 Frs payé comptant à la vue du notaire. BEZARD-PORCHER habitait au n°98 de la Grande Rue (rue Porte Chartraine).

 

Les biens donnés par l'acte de donation comprenaient :

1°) Le lieu et domaine des Portes Rouges situé dans le bourg du bourg de Périgny composé de maisons de maîtres, jardin, charmilles, bâtiments de fermiers composés entr'autre d'un chambre basse à cheminée servant de fournil, écurie, étable à vaches, bergerie, grenier sur le tout, cave, poulailler, grange à blé et à avoine, basse cour et jardin potager derrière les bâtiments, dans lequel se trouvent complantés plus de 50 arbres fruitiers, et remise ; un hectare 47 ares 35 centiares d'herbage près des bâtiments complantés de peupliers. Terres, près et vignes sur Périgny, Villeromain et Coulommiers ; le tout d'une contenance de 52 hectares 94 ares 82 centiares.

2°) La Closerie de Villejoint, commune de Blois, avec bâtiment de maître et du Closier et 2 hectares 6 ares 42 centiares de vignes.

3°) Une maison aux Basses Granges, lieu-dit la Goislière, comprenant une chambre, fournil, grange, cave et cellier.

4°) Une maison à Blois, n°100 Porte Chartraine (autrefois n°60), comprenant boutique sur la rue, chambre, cour, cuisine, cave ; au premier étage 3 chambres et au deuxième étage également 3 chambres.

5°) Un maison à Blois, n°61 dans le fond du Cul de Sac du Cygnes sur la rue de la Porte Chartraine, habitée alors par Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND, comprenant une chambre basse, cour, cuisine ; deux chambres au premier étage, un petit cabinet, une autre chambre au second étage.

6°) Deux autres maisons, rue Chevremouton à Blois : la première n°23 et 24 comprenant, 4 chambres de plain pied, 4 cabinets, deux chambres hautes, un cabinet, 4 gardes robe et un petit cabinet, une cour basse, une chambre à niveau de cette cour, une écurie, une autre chambre, un hangar, allée ouvrant sur le Cul de Sac qui conduit dans la grande rue, et 3 caves, joignant le Cul de Sac du Cygne d'Amont. La deuxième maison portant le n°22 comprenant 6 chambres, 3 cabinets, écurie, latrines, cave et grenier.

 

Tous ces immeubles acquis de communauté à l'exception de la propriété de Villejoint qui était propre à BEZARD-LEGRAND.

Les donateurs se réservaient la jouissance de la maison qu'ils habitaient à Blois, de la maison de maître et du jardin des Portes Rouges à Périgny et de toutes les promenades dépendants de ladite ferme et de la récolte des fruits.

Cette donations a été faite à charge par le donataire de rembourser un prêt de 10.000 Frs dû par les donateurs, une rente viagère de 100 Frs due à une demoiselle HADOU, une autre rente viagère de 400 Frs due à un Abbé DEBOURNEUF, prêtre à St-Calais, et en outre, une rente viagère de 1.400 Frs au profit des donateurs, la livraison de 8 hectolitres, 1 décalitre, 3 litres, 3 décilitres plus 4 hectolitres 67 décilitres ou un muid et demi de blé, 4 hectolitres 47 litres 2 décilitres ou 2 poinçons de vin blanc de Sologne et même quantité de vin rouge et Chambon ou Molineuf.

 

 

J - Les dernieres annees de Bezard-Legrand

 

Après avoir ainsi donné ses biens à son fils, BEZARD-LEGRAND continue à vivre à Blois rue Porte Chartraine. Il se rend de temps à autres à Périgny. Il est toujours membre du conseil municipal de Villeromain, car il est convoqué à une réunion de ce conseil en Avril 1820.

Sa domestique Nannette était toujours à son service car le 03 Janvier 1821 il payait 72 Frs à Monsieur RABIGLIA oculiste à Blois pour une opération de son oeil droit.

Par contre, Mademoiselle LECOMTE semble l'avoir quitté dès 1818 car le 06 Mai de cette année, elle écrivait d'Oucques pour remercier Madame BEZARD-LEGRAND de son aimable invitation.

Le 29 Juin 1820 il loue à Madame DE LA SAUSSAYE, une chambre garnie dans une maison 19, rue Chemonton à Blois pour 12 Frs par mois, et un Monsieur REMEON chirurgien de St-Louis et de St-Lazare, à l'hôpital Troussay lui écrit le 04 Juillet 1820 qu'il ne peut pas répondre du paiement de ce loyer et que la fortune de Madame DE LA SAUSSAYE ne lui permettra pas de payer ce loyer attendu les malheurs qui lui sont arrivés.

Il ne semble pas que BEZARD-LEGRAND est entretenu des relations suivies avec les membres de sa famille, notamment avec ses soeurs AMIOT et LEROUX ; du moins ne trouve t-on aucune correspondance avec elles.

Toutefois il écrit le 08 Octobre 1818 à Me ROMURE-GARDINON, notaire à "Chatorneaux" (Chateaurenault) :

"Mon ancien ami,

Les circonstances malheureuses de la Révolution ne nous ont jamais divisées. C'est un motif de plus de nous qualifier du titre ci-dessous.

A un ami, peut-on ouvrir son coeur ? Madame AUBOIS (mère de la femme de son neveu LEROUX) a écrit à mon neveu, son malheureux gendre ; ladite lettre est tombée entre les mains de sa mère qui est ma soeur. Madame AUBOIS marque à ce malheureux LEROUX, mon neveu, que sa femme était à Nancy, qu'elle en est sûre, ayant des nouvelles certaines. Cette dame a eu l'inconséquence de lui marquer que sa fille s'était trouvée à Nancy à un bal que Monsieur le Préfet a donné et qu'elle avait été bien vue (je m'interdis toute réfexion !).

Or, mon ami, nous avons su respecter la vertu et mépriser le vice.

Revenons à ce malheureux LEROUX qui vient d'être frappé aujourd'hui de la cruelle séparation de sa pauvre mère qui vient d'en mourir de chagrin ; elle est ma soeur, O douleur trop amère.

Il faut mon ami, oublier ce qui s'est passé en mon absence, je n'ai point participé au contrat ni au mariage, je suis bien sur d'être accueilli par toi, et mon ancien huissier Me BARIEUX.

Il faut vous entendre avec la famille des deux êtres qui seront toujours malheureux, étant séparés l'un de l'autre. Qu'elle fasse un retour sincère sur elle-même, et, se jetant aux pieds de son légitime mari, je crois qu'il lui pardonnera ; toi avec Me BARIEUX, et moi présent, qui suis ton oncle.

Mon ami tu es parent et si tu partages mes sentiments, et que la mère ne participe en rien de son éloignement. Qu'elle se réunisse au sentiment d'honneur de la réunité des deux époux et oublie le passé et vive en bonne intelligence. La religion nous le commande.

J'attends de toi une réponse positive et crois moi pour la vie. Ton sincère ami, ton dévoué serviteur".

On ignore si ces sages objurgations ont été suivies d'effet.

 

Nous n'avons d'ailleurs plus aucune lettre ni document quelconque permettant de savoir ce que sont devenus les époux BEZARD-LEGRAND depuis 1821 jusqu'à leur décès.

Peut-être leur vieillesse ne fut pas très heureuse ainsi que semblerait en témoigner une lettre écrite par l'Abbé DORE, prêtre desservant de Périgny et Villeromain, le 12 Août 1821 à Madame BEZARD-LEGRAND :

"Permettez que votre consolation et la mienne je m'entretienne un moment avec vous. Etant l'un et l'autre à la veille de consommer notre dernier sacrifice, marchant ensemble par la voix des souffrances, la seule que nous ait tracé notre divin modèle pour arriver à la véritable vie, gardons nous de nous décourager, soyons avec notre chef si nous voulons régner avec lui ; allons par la croix nous reposer sur le Tabor. C'est un article de notre fois que notre père Céleste ne nous reconnaîtra pour être à lui qu'autant qu'il nous trouvera conforme à l'image de son fils souffrant. Voilà le type qu'au sommet de la montagne du calvaire il nous commande à tous de nous modeler, ce s'étant fait homme que pour nous donner dans sa personne l'exemple des vertus qu'il nous fallait pratiquer pour mériter le Ciel" etc..... "Voyons sans regret périr pour quelques jours cette maison de boue à laquelle nous avons peut être été trop attachée, ce corps, cette chaire si souvent rebelle que nous n'avons, hélas! que trop flattée"..... "Après tout, mourir pour un vrai Chrétien, n'est-ce pas commencer à vivre"..... "Mourons, mourons avec joie puisque ce n'est que par cette voie que nous pourrons nous promettre de jouir, de contempler à loisir cette beauté toujours ancienne, toujours nouvelle qui fait la félicité des habitants du ciel".

Il y a trois pages d'écriture fine et serrée sur ce ton !

Cette lettre était écrite à Madame BEZARD-LEGRAND en raison de la grave maladie dont elle était atteinte car elle décéda trois semaines plus tard à Blois le Samedi 08 Septembre 1821 à 8 heures du matin, ainsi qu'il résulte de la facture délivrée par le vicaire de l'église St-Nicolas le 09 Septembre 1822, pour "messe basse d'anniversaire pour Feue Dame Françoise Louise Brigitte LEGRAND, épouse du sieur Pierre BEZARD".

Ce décès est également précisé par une note de Pierre BEZARD-LEGRAND dans son livre de comptes concernant Périgny à la page 47 : "Ma respectable femme est morte à Blois le 08 Septembre 1821 à 8 heures du matin, le Samedi après trois mois de maladie ; enterrée le 9, Dimanche".

Son mari lui a survécu 4 ans sans qu'il soit possible d'apporter aucune précision sur ce que fut sa vie durant son veuvage.

A la page 55 de son livre de comptes concernant Périgny, il note : "J'ai arrivé à Périgny de Blois le 18 Avril 1824. A observer que je ne pouvais ni lire ni écrire pendant un mois".

Ce livre de comptes se termine à la date du 18 Août 1825 ; les dernières pages sont écrites d'une écriture tremblotante.

Il demeurait à Blois, continuait-il à venir de temps à autres à Périgny dont il s'était réservé les promenades aux termes de l'acte de donation faite à son fils un an avant la mort de sa femme ? C'est peut être pendant ce temps qu'il classa soigneusement ses papiers. On image combien ces quatre années ont du lui être pénibles à la fin d'une vie brillante et agitée. Il avait perdu tous les membres de sa famille, sauf son fils Pierre Samuel qui s'était démis de tous ses biens en sa faveur "Et nunc Dimittis.....".

On ignore comment il est mort. On sait seulement qu'il est décédé à Blois, rue Porte Chartraine, le 20 Octobre 1825 et qu'il a été inhumé le lendemain dans le cimetière St-Nicolas à l'âge de 71 ans.

 

 

Grâce à l'abondance extraordinaire des documents laissés par Pierre BEZARD-LEGRAND il a été possible de le découvrir et de la faire revivre.

Son tempérament autoritaire, son sens des affaires commerciales, l'adresse avec laquelle il a su s'adapter aux événements politiques qu'il a traversé en font le grand homme de la famille.

Son écriture volontaire, appuyée, mais qui suit difficilement sa pensée, et difficile à déchiffrer et son orthographe et des plus fantaisiste ; il conservait les brouillons de ses lettres et les surchargeait d'annotations et de chiffres, les classant et les épinglant méthodiquement.

Il avait la passion des comptes. Le tableau qu'il a peint lui même (dans un costume milieu du XVIIIe siècle) symbolise d'ailleurs cette passion, puisqu'il s'est peint en train de tenir un livre de comptes. Sur une table à côté de lui, un compas, un fusain, et des crayons rappellent son goût pour le dessin. Ce tableau porte au bas la date "1747" ; il l'avait volontairement antidaté pour une raison inconnue (précision fournie par Monsieur Fernand LEMAIGNEN).

Malgré son âpreté au gain, et ses spéculations qui ne furent peut être pas toujours très honnête et lui valurent notamment son procès d'usure, il semble avoir toujours eu le désir de rendre service à ses amis, surtout si cela ne lui coûtait rien.

Quels qu'aient pu être ses défauts, on ne peut s'empêcher de penser que, malgré sa réussite financière, c'est un homme qui a profondément souffert dans ses affections les plus chères, puisqu'après avoir perdu trois enfants, son petit fils et sa femme il ne lui restait plus que son fils Pierre Samuel qui ne semble pas lui avoir donné de bien grandes satisfactions.

Enfin sa biographie et ce n'est pas son moindre intérêt, permet de suivre les événements historiques au milieu desquels il a vécu.

C'est incontestablement le grand ancêtre de la famille à qui nous devons la propriété de Périgny.

 

 

IV - PIERRE SAMUEL BEZARD-PORCHER

ET LEON LEMAIGNEN-BEZARD

 

 

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3 décembre 2018

Saga Bezard-Lemaignen 2/4

 

 

 

IV - PIERRE SAMUEL BEZARD-PORCHER

ET LEON LEMAIGNEN-BEZARD

 

Alors que nous possédons une quantité considérable de documents sur BEZARD-LEGRAND, nous n'en avons que très peu pour retracer la vie de son fils, Pierre Samuel : quelques actes notariés, une maigre correspondance et un lot de factures de couturière, d'épicier, d'entrepreneurs et autres fournisseurs, constituent notre seul documentation que ne permet pas de se faire une opinion précise sur ce que fut la vie de Pierre Samuel BEZARD qui ne semble pas avoir eu le caractère de forte personnalité de son père.

Il est né à Blois en 1783 ; il était le deuxième enfant de BEZARD-LEGRAND...... Nous ne savons rien de son adolescence, il ne dut pas faire des études très sérieuses car son style et son orthographe sont déplorables. Il a travaillé dans le commerce de son père que celui lui cédé en 1814.

On a vu qu'il avait épousé au début de Février 1812, Emelie Marguerite PORCHER.

Sa femme lui avait apporté en dot, outre des créances et objets mobiliers, et 120 pièces d'eau de vie, la petite et la grande Closerie de Favras, commune de Feings (voir famille AUCHER-PORCHER).

Peu après son mariage, aux termes d'un partage en date du 08 Août 1812 de la succession du grand-père de sa femme décédé le 20 Juillet 1812 (voir famille AUCHER-PORCHER) sa femme reçoit une métairie à la Poulinière, commune de Pruniers, deux maisons, rue des Limozins à Romorantin, une autre maison, faubourg de Blois à Romorantin, et diverses pièces de terre.

On a vu également que Monsieur et Madame BEZARD-LEGRAND avait donné à leur fils Pierre Samuel le 12 Septembre 1820, outre la propriété des Portes Rouges à Périgny, la Closerie de Villejoint, une maison, deux maisons à Blois, rue Porte Chartraine, impasse du Cul de Sac du Cygne et deux maisons rue Chemonton à Blois.

Enfin, après le décès de sa mère, Madame BEZARD-PORCHER reçoit (partage du 21 Janvier 1854 - Famille AUCHER-PORCHER) une maison, rue Chemonton à Blois, une Closerie à Beauregard, une Closerie aux Grouets et des créances (famille AUCHER-PORCHER).

Au cours de son mariage, Pierre Samuel BEZARD a vendu tous ces immeubles et à des dates qui ne peuvent être précisées ; il n'en subsistait en tout cas aucun lors de son décès. En outre, il vendit en 1827 le fonds de commerce de marchand de tissus que lui avait donné son père.

Il résulte d'une facture du 06 Mars 1823, qu'il exerce encore son commerce, 98 Grande Rue à Blois, mais le 12 Mars 1827 on trouve une facture TROTIGNON-DESVARENNES, successeur de Monsieur BEZARD-PORCHER, 98 Grande Rue à Blois, "Magasin de Draperies, Rouenneries, Nouveautés".

Il est vraisemblable qu'il vendit ce fonds de commerce peu après le décès de son père, vers 1825, ne se sentant aucune vocation pour le commerce.

TROTIGNON-DESVARENNES, c'est au surplus ce qui résulte de ces livres de comptes arrêtés en 1825, revendit ce fonds de commerce à un dénommé Léon BRUERE (facture du 09 Novembre 1831) qui était peut être un cousin de Madame BEZARD-PORCHER et qui s'installa ensuite à Poitiers.

Léon BRUERE avait revendu ce fonds de commerce à un dénommé Prosper CORBIN qui ce qui qualifie sur une facture de 1853 "Marchand d'étoffes et de tissus, 98 Grande Rue à Blois, successeur de BRUERE".

Pierre Samuel BEZARD n'a donc pas continué longtemps l'activité commerciale de son père et a vécu de la produit de la réalisation de ses nombreuses propriétés immobilières.

Il a cependant consacré une partie de ses réalisations à l'amélioration de sa propriété de Périgny. Il fait en effet de nombreuses acquisitions de terres à Périgny et Villeromain (au moins une quinzaine d'hectares), construit une nouvelle écurie (bail du 16 Août 1841) qui doit être le garage actuel, une importante grange en 1853 (grande LOISEAU) et acquière au nom de sa fille en 1855 une partie du parc et la maison du bas de la propriété (maison du jardinier et grange).

En outre, il fait entièrement construire vers 1856 la maison actuelle à l'emplacement de l'ancienne maison de maître, dont il ne conservera que le salon qui devient la cuisine.

Nous ne possédons malheureusement aucun devis ni aucun plan de cette construction, qui parait-il aurait coûté 25.000 Frs. Il a été retrouvé depuis la rédaction de ce texte un mémoire de travaux de menuiserie effectués en Janvier 1857 daté du 02 Mai 1857 et acquitté le 27 Septembre 1857 s'élevant à 1.354 Frs 69 centimes et un mémoire de travaux de plâtrerie de la même date acquitté le 30 Septembre 1857 ; ces deux mémoires visés par Monsieur MARGANNE, architecte à Vendôme. Samuel BEZARD n'a pas dû habiter longtemps la maison puisqu'il est décédé le 20 Octobre 1857.

Il semble que le fermier est continué à habiter quelques temps encore les anciens bâtiments de la ferme, démolis depuis, et qui se trouvaient en bordure de la rue, puisque les bâtiments de la ferme LOISEAU ne furent construits qu'en Juin 1868. (Dossier Titres de Propriété de Périgny).

En 1821, il fait dresser un plan et un relevé cadastral de ses propriétés de Périgny et de Villeromain. Il aménage la disposition du parc et remplace le jardin potager et le verger entourés de charmilles qui se trouvaient devant la nouvelle maison, par une pelouse. Tous les visiteurs admirent son parc, ses dahlias et ses bosquets. On lui doit la disposition des pelouses et parcs sensiblement dans leur état actuel.

S'il n'hésite pas à dépenser des sommes importantes à la mise en état de sa propriété et à diverses constructions, il semble discuter cependant avec parcimonie certaines dépenses. Par exemple un certain GOURDET de Périgny, lui écrit le 06 Décembre 1830 :

"Je suis bien surpris de ce que vous êtres fâché mal à propos au sujet du marché que nous avions terminé de la rivière ; vous dites à tout le monde que nous vous avions demandé 16 sous et qu'au contraire, à preuve de témoin nous vous avons demandé que 10 sous. Je suis très mécontent du mépris et de l'influence des faux rapports que vous faites partout où vous allez. Je vous ai toujours servi fidèlement et honnêtement..... Vous n'avez donc point d'amour propre pour dire des choses semblables..... Je ne suis point surpris des sottises que plusieurs individus vous ont couvert, parce que vous forcez à vous en dire quoique ferme que l'on soit. Ce n'est point avoir de bon sang dans les veines que de quitter de bons ouvriers. Je souhaite que vous soyez aussi bien servi comme vous l'avez été depuis que je travaille pour vous, j'espère que vous ne direz plus de mensonge......".

 

Malgré l'intérêt qu'il porte à Périgny, Pierre Samuel BEZARD n'y séjournait pas d'une façon régulière. Il a d'ailleurs eu plusieurs domiciles. D'abord, 98 Grande Rue à Blois jusqu'à la cessation de son commerce. Il habite ensuite rue Fontaine des Elus, puis en 1849 à Vendôme, Faubourg Saint-Bienheuré (pourquoi ?) et en 1851 à Blois, rue du Bourgneuf n°52 où il habite encore en 1854. Ce n'est semble-t-il qu'après 1859 qu'il vint habiter sa nouvelle maison de Périgny où il décéda.

Malgré ces différents domiciles, il semble bien qu'il était surtout attaché à Périgny : le 20 Décembre 1834, il fait un don de 100 Frs à la commune de Périgny pour la construction du presbytère.

Mais son domicile légal est certainement à Blois, du moins dans les premières années car il reçoit une convocation "de se trouver le 24 Janvier 1832, à midi à l'Hôtel de la Mairie de Blois, en tenue d'hiver, pour aller au devant de l'Etat Major du 17ième Léger", en sa qualité de musicien de la Garde Nationale de Blois".

On sait que Pierre Samuel BEZARD et Emelie Marguerite PORCHER eurent une fille : Emelie Marie Brigitte née à Blois le 29 Juillet 1813 (portrait peint en 1819, avec un petit chat dans les bras). Elle fit semble-t-il de bonnes études (peut-être à l'Institution de Mademoiselle BARDET, 18 rue Chemonton à Blois qui invitait encore ses parents à une distribution des prix le 20 Août 1849). En tout cas, elle rédige ses lettres avec aisance sans aucune faute d'orthographe, contrairement à ses parents, et avec une belle écriture.

Emelie Marie Brigitte BEZARD épouse à Blois le 29 Juillet 1833 Léon LEMAIGNEN-VILLORCEAU, avocat, né à Vendôme le 12 Février 1809 (mariage religieux à l'église Saint-Louis), demeurant à Vendôme, rue de la Grève chez son père.

C'est à l'occasion de ce mariage qu'a été établie le 24 Octobre 1833 une longue facture de pâtisserie, petits fours, sirops, bonbons et autres friandises par LEVAIN-ESTIENNE, Confiseur Distillateur et Glacier, 9 place du Marché Neuf à Blois.

A titre de curiosité on consultera une facture du 24 Juillet 1851 pour fourniture de chocolat par "La Maison Spéciale de Fabrique de Chocolats Perfectionnés POULAIN, 68 Grande Rue à Blois". Il s'agit du fondateur de la Chocolaterie POULAIN qui n'avait alors qu'un magasin artisanal de fabrique de chocolat ainsi que mon grand-père MORIN me l'avait déjà dit.

Le contrat de mariage est reçu le 10 Juillet 1833 par Me Auguste PARRAIN, notaire à Blois en présence du père du futur époux et de Louis Coradin AUCHER, son cousin germain à cause de Nelly LEMAIGNEN, son épouse ; et, du côté de la future épouse, de ses père et mère, de Madame veuve PORCHER-AUCHER, sa grand-mère, de Jean-Louis PORCHER son oncle, ancien notaire demeurant alors à Blois, rue d'Angleterre, et de Marie Laure PORCHER, sa cousine.

Il est constitué en dot à la future épouse par ses père et mère, 2.000 Frs de trousseau, 3.000 Frs de meubles et 40.000 Frs d'espèces.

Les futurs époux étaient très lointainement cousins par un ancêtre commun : Jacques LEMAIGNEN-FLEURIAU, né à Talcy en 1665, décédé à Ménars le 24 Mars 1740 qui eut au moins dix enfants dont :

1°) Benoît Nicolas LEMAIGNEN époux de Marguerite DELAUNAY, qui eut 6 enfants notamment Catherine Marguerite épouse de François AUCHER, grand-mère de Madame BEZARD-PORCHER.

2°) André LEMAIGNEN, époux de Marie HEMERY qui eut 17 enfants, dont André Michel LEMAIGNEN qui de son 2ème mariage avec Marie Anne Victoire POIRIER eut un fils François LEMAIGNEN dit VILLORCEAU, père de Léon LEMAIGNEN.

La famille LEMAIGNEN était d'ailleurs si nombreuses qu'on se retrouve souvent les membres mêlés à l'histoire des BEZARD. Rappelons qu'un fils LEMAIGNEN était camarade, aux armées de Beaujour BEZARD. Une dame veuve LEMAIGNEN était libraire à Blois en 1824-1825, ainsi qu'il résulte d'une facture de fournitures livrées à BEZARD-PORCHER.

On ne sait pas grand chose sur la vie des époux LEMAIGNEN-BEZARD au début de leur mariage.

Léon LEMAIGNEN avait soutenu sa thèse de licence en droit à la Faculté de Droit de Paris le 10 Mars 1832 sur l'absence (2 pages et 1 page de droit romain en latin !).

Il était avocat à Blois et le jeune ménage habitait rue Fontaine des Elus, avec les époux BEZARD-PORCHER.

Le 05 Août 1833, Monsieur et Madame BEZARD-PORCHER vendent à Monsieur et Madame Léon LEMAIGNEN-BEZARD en emploi de la dot de Madame LEMAIGNEN-BEZARD, la Closerie de Favras, ayant appartenu à la famille AUCHER-PORCHER, deux maisons à Blois, rue Chemonton et une petite maison aux Basses Granges, commune de Blois.

Léon LEMAIGNEN revendit la Closerie de Favras à Divers acquéreurs en 1840 et 1844 (voir copie de la déclaration de succession de Madame veuve Léon LEMAIGNEN - Dossier Léon LEMAIGNEN).

Léon LEMAIGNEN fit plusieurs acquisitions de terres pour agrandir Périgny en 1836, 1837, 1838 et 1845. On se demande pourquoi ces acquisitions ont été faites par lui et non par son beau-père, qui d'ailleurs en faisait aussi dans les mêmes années.

Du mariage des époux LEMAIGNEN-BEZARD est né un fils unique, à Blois, le 27 Mai 1835 : Léon Ernest LEMAIGNEN qui fut élevé par sa mère, après le décès de son père survenu à Saint-Maurice, près de Paris le 29 Juillet 1854 (exactement, jour pour jour, 21 ans après son mariage).

Pour essayer de mieux connaître Pierre Samuel BEZARD, il n'est pas inutile de parcourir les quelques lettres que nous avons de lui, de sa femme, ou de ses parents. Elles nous apportent quelques renseignements sur son caractère, sa santé, ses occupations, quoiqu'avec infiniment moins de détail que la correspondance de son père.

Pierre Samuel BEZARD ne fut pas un procédurier comme son père. Il ne nous est resté qu'une petite liasse de procédures en 1816 contre un certain LEGENDRE, marchand, rue des Orfèvres à Blois pour recouvrement d'une facture de marchandises qu'il lui avait vendues.

Pierre Samuel semblait préférer aux choses de négoce, les bals et soirées chez des amis et des réceptions à sa propriété de Périgny.

 

D'une facture d'un voiturier du 20 Janvier 1834 :

"Note des voyages de Monsieur BEZARD, propriétaire à Blois pour le mariage de Mademoiselle sa fille : pour l'avoir mené à l'église et ramené : 6 francs ; du 13 Janvier : pour avoir mené et ramené Monsieur BEZARD et 4 personnes du bal : 3 francs 50 ; du 16 Janvier : avoir conduit Monsieur BEZARD et 4 personnes, aller et venir, au bal de Mlle DEFRAY : 3 Frs 50 ; du 18 Janvier : avoir mené et ramené 4 personnes, etc....".

Le 04 Février 1841, il est invité au bal chez le Comte et la Comtesse LEZAY-MARNESIA, un peu plus tard chez Me RIFFAULT, notaire à Blois (avec sa fille), le 15 Janvier 1847 au bal donné par Monsieur et Madame LEMAIGNEN-BARAULT ; le 19 Juin 1848 au mariage de Mademoiselle Nelly LEMAIGNEN, fille des LEMAIGNEN-BARAULT avec Léon VALIN, qui aura lieu à l'église Saint-Nicolas le 27 Juin 1848.

 

Le 22 Septembre 1836, une demoiselle AMAURY, de Tours (est-ce une cousine descendante de LEGROUX BEZARD ?) lui écrit :

"Monsieur et cher voisin" (pourquoi voisin ?)......

"Nous sommes charmés que vous nous ayez fait part de l'affermage de votre terre.... Votre campagne deviendra plus agréable à habiter ce dont nous nous félicitons ; nous attendrons le beau temps pour jouir ensemble de vos jolies promenades.... Nous vous remercions infiniment de vos bonnes intentions pour notre jardin qui a besoin de la surveillance charitable de nos bons voisins, étant trop éloignés pour nous en occuper nous-mêmes.

Nous vous applaudissons d'avoir un cheval à vous.....

Nous allons sortir de chez nous et nous aurons bien du plaisir à voir les dispositions de votre joli pré ; nous irons en juger le plus tôt possible. Embrassez le joli Ernest. Mille choses honnêtes et amicales à Monsieur Léon et ne m'oubliez pas auprès de Madame PORCHER".

Le 18 Août 1843, la même demoiselle AMAURY qui signe "votre sincère et éternelle ami" lui écrit, toujours de Tours (mon cher voisin), pour lui exprimer son plaisir de le revoir, peut-être, à la distribution des prix à la pension d'Ernest. Elle remercie des détails que BEZARD lui donne dans sa dernière lettre :

"Nous voyons que vous avez pu raccommoder votre curé avec la société ; il ne peut qu'y gagner ne voyant chez vous que des personnes aimables et estimables.

Nous apprenons avec plaisir que Madame PORCHER, votre bonne maman se porte toujours assez bien pour conserver le goût des voyages ; engagez la donc à faire celui de Tours avec vous tous, maman, papa et petit-fils, quel bonheur pour nous de vous revoir encore.... J'ai de très belles fleurs surtout de beaux dahlias, ce qui me rappelle le temps où j'enviais le vôtres à Périgny ; je voudrais bien pouvoir encore admirer vos charmants bosquets, car je crois bien que tout cela s'embellit de jour en jour. Nous vous félicitons de votre agréable voisinage du Coudray" (qui donc habitait alors au Coudray ?).

Présentez nos respects à Monsieur le Curé de Périgny quand vous le verrez".

 

Par acte de Me ROLLAND, notaire à Vendôme du 12 Décembre 1841, Marguerite Bonne AMAURY et Madeleine Emelie AMAURY, sa soeur, toutes deux célibataires demeurant à Tours, vendaient à BEZARD-PORCHER des près à Bezard, qu'elles avaient acquis de BEZARD-LEGRAND le 03 Novembre 1817, et par acte du même jour, elles vendaient à Léon LEMAIGNEN des terres à Périgny qu'elles avaient recueillies dans la succession de leur soeur, Mlle Marie Rose AMAURY, décédée à Vendôme quelques années avant et qui les avait elle-même acquises de GODINEAU (titres de propriété de Périgny).

 

Le 08 Août 1846, il reçoit une lettre d'un dénommé BOUCHER, demeurant à Périgny qui l'entretient de "l'élection communale" qui doit avoir lieu à Périgny le Dimanche 08 Août 1846 à 7 heures du matin. Certains électeurs voudraient élire Pierre Samuel BEZARD et d'autres Léon LEMAIGNEN : "Il faudrait chercher le moyen de se mettre bien d'accord pour que l'un de vous deux fasse partie du Conseil".

 

La nièce de Madame BEZARD, Laure DUTHEIL, lui écrit le 31 Décembre 1844 une lettre de bonne année, pleine de banalités mais qui révèle un événement économique :

"Vous deviez, Ma Bonne Tante, venir cet été avec mon oncle, passez quelques temps avec nous ; il me semble avoir entendu dire que le chemin de fer serait inauguré à Blois ce mois de Mai et ce ne serait pas bien de ne pas l'étrenner. Si Emelie et Léon étaient aussi assez aimables pour venir, pendant la belle saison, faire une nouvelle excursion dans notre grande ville (Paris) accompagnés du Cher Petit Ernest, oh alors ! cette année sera réellement heureuse pour nous".

 

Le père de Laure, Jean-Louis PORCHER écrit à son beau frère Pierre Samuel le 07 Janvier 1849 : il s'occupe de plusieurs affaires qui lui donnent beaucoup d'embarras, notamment de la succession d'Antonin TRINQUART, un cousin ; il a dîné la veille chez LEROUX ; est-ce le fils d'Anne BEZARD, le cousin de Pierre Samuel ?

 

Le 29 Juillet 1849, Madame BEZARD-PORCHER écrit à sa mère que Monsieur ALARDET ira la voir le lendemain. Ce ALARDET revient souvent dans la correspondance des BEZARD et de Jean-Louis PORCHER, c'était un lointain cousin.

 

A partir de cette année 1849, les lettres de Pierre Samuel n'ont guère trait qu'à ses ennuis de santé.

 

Le 25 Octobre 1849, étant à Blois, il écrit à sa femme, Faubourg Saint-Bienheuré à Vendôme :

"Ma Chère Amie, j'ai vu Monsieur DESFRAY (son médecin) qui m'a recommandé de prendre de l'exercice, des bains le soir avant de me coucher et de prendre en me mettant au lit une cuillère de "Locqu" (remède) pour faire dormir, et même dans la nuit dans le cas ou une ne suffirait pas. Tu comprends le vif désir que j'éprouve à me rendre auprès de vous trois ; je fais tout pour une prompte guérison ; je me résous à faire tous mes efforts. Je viens de voir Monsieur "Daute Clocque" (de Haute Cloque ?) qui a vu notre maison ; il a écrit à une famille de Paris en attendant la réponse il en fera part à Mr MANTOIS (?), dans le cas où il y aurait apparence d'arrangement. Il pense que la personne préférera acheter vu qu'il désirerait faire parqueter" (de quelle vente s'agit-il ?).

 

Puis il donne des nouvelles de plusieurs amis ; puis il revient sur sa santé:

"Je désire vivement me trouver parmi vous et mettre de l'ordre à nos affaires. J'ai vaincu la tristesse. Dieu venant à mon aide m'accordera j'espère le bonheur d'être plus à moi, seul moyen d'être heureux".

 

Trois jours après, le 26 Octobre, il écrit à nouveau à sa femme uniquement pour l'entretenir de sa santé :

"Je profite de l'occasion de M. DELAFORGE (est-ce le Châtelain de Danzé qui était ami de Madame François LEMAIGNEN-VILLORCEAU ?) pour vous donner à vous trois de mes nouvelles. Les souffrances aiguës que j'éprouve depuis longtemps ont été moins fortes cette nuit ; j'attribue cela à un locque que m'a donné Monsieur DESFRAY, m'a-t-il dit pour me faire dormir suivant l'ordonnance ; je l'ai pris bien exactement et ai pu dormir, je ne reste pas agité ; j'en ai pour quelques jours et me persuade avec tout le courage possible que le mieux doit en résulter, ô ma bien bonne et adorable amie. Je vous avoue que mes souffrances sont au-dessus de mes forces et que ce matin notre bonne maman (Madame PORCHER) a traité de singeries en disant que seul je pouvais guérir par des promenades, beaucoup de distractions, surtout de la gaieté, etc.... Je vous embrasse du meilleur de mon coeur ; ton époux pour la vie. J'embrasse bien tendrement mon adorable enfant".

 

Le 11 Décembre 1849, Madame BEZARD-PORCHER, alors à Vendôme, Faubourg Saint-Beinheuré écrit à sa mère :

"qu'elle espère aller bientôt la voir, ça dépendra comment mon mari s'accoutumera. Ici il parait raisonnable ; dans ce moment il croit qu'il s'accoutumera avec le temps ce qui adoucira un peu nos peines..... Mon mari, Emelie, Ernest et moi t'assurons de nos respects et amitiés".

 

Pierre Samuel écrit 4 jours après à sa belle mère, le 15 Décembre, étant à Vendôme :

"Je fais tout pour m'habituer étant près de ma femme, ma fille et notre excellent Ernest lequel à pour moi mille bontés. La maladie ne m'a pas laisser la vie supportable. Je prie Dieu de me soutenir dans mes projets qui sont, comme vous le voyez bien raisonnables ; mes étouffements sont moins fréquents, etc..."

 

Le 12 Janvier 1851, Madame BEZARD-PORCHER est à Périgny, elle écrit à sa mère :

"J'ai remis au messager un petit paquet de tilleul pour toi. J'irai demain à Villeromain pour avoir de tes nouvelles. A la campagne, en ce moment il y a beaucoup de boue".

 

Le 03 Juin 1851, elle écrit de Vendôme à sa mère :

"Je viens de recevoir à l'instant une lettre de Monsieur BEZARD qui nous dit qu'ils se portent bien tous les deux (qui ?). Il nous tranquillise ; dès que je saurais quelque chose de nouveau je te l'écrirai. Je désire que toutes ces affaires là finies, nous puissions vivre en paix".

 

Lettre de BEZARD, datée de Paris du 04 Juin 1851 à sa belle mère "Le bon frère PORCHER a tenu à vous écrire ..... nous sommes tous dans l'attente d'une bonne solution. Ca va autant bien que possible"......

 

Il s'agit dans ces deux dernières lettres de la santé de Léon LEMAIGNEN ainsi qu'on le verra ci-après.

Le 30 Août 1851, BEZARD alors à Blois demande à sa belle-mère de lui envoyer des prunes pour faire des confitures et le 05 Septembre 1851, de Périgny, il lui écrit :

"Nous profitons du bon voisin GIRARD qui descend à la Gerbe d'Or pour vous envoyer 2 perdrix et 1 caille avec du cresson pour mettre dessous. Ernest les a tuées aujourd'hui à 3 heures 1/2 du soir. La chasse est très abondante".

 

Le 18 Octobre 1851, il écrit à sa femme pour lui raconter son voyage aux Blanchardières auprès de son "bon frère".

Le lendemain, 19 Octobre, Ernest LEMAIGNEN qui demeure avec sa mère à Tours, rue de la Grandière où ils sont allés habiter pour permettre à Ernest de poursuive ses études au collège des Jésuites, écrit à ses grands-parents qu'ils sont maintenant tout à fait installés à Tours. Il les invite à venir les voir et ils iraient rendre visite à Monsieur DEMEZIL à sa campagne. Il est entrée en rhétorique et est tout à fait habitué.

Puis le 30 Novembre suivant il leur écrit à nouveau ; lui et sa mère vont aller dîner chez les DEMEZIL.

Le 1er Avril 1852, Madame LEMAIGNEN-BEZARD écrit à sa mère pour lui donner des nouvelles d'Ernest, qui a été légèrement malade.

Ernest écrit d'ailleurs à sa grand-mère le 03 Avril 1852 que sa grippe est sur son déclin. Mais la bonne Bathilde à la fièvre et sa mère un rhume.

Le 08 Juin 1852, elle écrit à nouveau qu'Ernest va mieux, mais la "Crue" l'a fatigué. Elle a hâte de revenir à Périgny. Elle désire des nouvelles de Monsieur ALARDET.

Même lette semblable du 24 Juin 1852.

Le 29 Avril 1852, Pierre Samuel BEZARD est à Périgny et sa santé n'est pas plus brillante. Il écrit à sa femme alors chez sa mère, rue du Bourg Neuf à Blois (on se déplaçait beaucoup à cette époque".

"Je reçois ta lettre et vois avec bonheur que notre excellente mère a eu la visite de son pasteur. Il est 4 heures 1/2 Monseigneur nous quitte accompagné de Monsieur DORE et Mr VENAULT qui doit aller voir Vendredi à Villeromain. J'étais près de M. DORE ...... (illisible). Monseigneur m'a dit : j'irai vous voir à Périgny. A l'issu du dîner avec 20 autres personnes qui l'ont accompagné, et au milieu du Bourg, dans la conversation il s'est aperçu que j'étais essoufflé .... Je me demanda excuse de ce qu'il avait été trop vite, et il tenu, ainsi que M. DORE que je lui donnas mon bras. La promenade chez nous a duré 1/4 d'heure par le plus beau temps possible. Il nous a comblé de ses vifs remerciements et de sa bénédiction. Votre maison admirable est bien les Champs Elysées. M. LAURAND me l'avait bien dit. M. VENAULT a été reçu par Monseigneur avec joie lorsque à Villeromain je lui ai dit qu'il venait mercredi et passer le jeudi avec nous.

Il me dit "c'est votre parrain il est l'homme le plus aimable et le plus obligeant ; il tient de la famille".

 

Monsieur DORE était le curé de Périgny qui écrivait en 1821 à Madame BEZARD-LEGRAND et Mr VENAULT, devint Vicaire Général à Blois. Il était parent de Me Jacques LEMAIGNEN-MORIET (testament de Madame veuve LEMAIGNEN-MORIET) - (Voir chapitre "Enfant de Jacques LEMAIGNEN-FLEURIAU).

Le 10 Juin 1852, Ernest écrit à ses grands-parents que M. DEMEZIL et sa femme ont l'intention d'aller voir M. ALARDET vers le 15 Août. Les vacances seront probablement le 11 ou le 12 Août.

Le 12 Octobre 1852, il invite ses grands-parents à venir le voir à Tours pendant la visite du Président (Louis Napoléon) :

"Il y a de grands préparatifs. La rue Royale est remplie de mats où flottent des banderoles. Des estrades vont être élevées sur la place du Palais de Justice. Le défilé aura lieu depuis l'embarcadère jusqu'au Palais de Justice ; il remontera la Rue Royale jusqu'à la rue de l'Archevêché pour se rendre à St Gratien. Le Président ouvrira le bal avec Mlle DE COURTIGIS, fille du Général. La Mairie et le Musée seront réunis par un pont suspendu. Toute la ville sera illuminée.

Je suis entré en philosophie..... Toute la famille DEMEZIL est à la campagne".

 

Le 16 Octobre 1853, Jean-Louis PORCHER écrit à sa nièce Emilie LEMAIGNEN-BEZARD au sujet du recouvrement d'une créance douteuse contre M. de SAINT-LOUP et lui indique qu'il a demandé conseil à leur voisin LEMAIGNEN : qui est ce LEMAIGNEN qui doit être un juriste ? Il l'invite à venir le voir à Paris, car, lui, ne veut plus revenir en Blésois depuis qu'il a fait faillite....

Le 10 Janvier 1854, Emilie LEMAIGNEN-BEZARD écrit à sa mère :

"Ernest est actuellement à Paris. Il n'a pas le temps de s'ennuyer ; il est une partie du jour à l'Etude et le soir en soirée. Il est allé Samedi dernier passer la soirée chez M.DORE (qui devint Commissaire de Police à Blois) où il y avait 7 ou 8 jeunes gens et s'est bien amusé. Il va ce soir chez un autre jeune homme qui est également chez M. DEMEZIL et qui est très bien et d'une bonne famille. Il est de l'âge d'Ernest. Vendredi il compte aller au bal qui a lieu à la Mairie au profit des pauvres, et de Mercredi en huit à la Préfecture où il y a 4 soirées. Tu vois que pour Ernest voilà de quoi l'occuper. Nous avons eu Dimanche la Famille DEMEZIL à dîner. M. DEMEZIL est aussi étourdi qu'à l'ordinaire. J'ai un quart de vin que je fais soutirer et qui est tout prêt à envoyer à Blois ; M. DEMEZIL m'a vendu un quart de cidre qui est très bon".

 

Ernest, après son bachot, était donc entré à l'Etude de M. DEMEZIL, avoué à Tours.

 

Nous n'avons aucun renseignement sur la vie de Pierre Samuel BEZARD depuis 1854 jusqu'à son décès survenu vraisemblablement à Périgny où il habitait alors le 20 Octobre 1857. Encore, ne connaissons-nous la date de son décès que par l'inscription sur sa tombe dans le cimetière de Périgny.

Quelle était exactement la maladie dont il se plaignait, n'était-elle pas due à son manque d'activité, comme le prétendait sa belle-mère ?

Il donne l'impression d'un personnage assez falot, surtout après la forte personnalité de son père, instable, inactif et tourmenté.

Il semble que lors de son décès il ne possédait plus aucun immeuble à Blois.

Sa veuve continua à habiter à Périgny où elle décédera le 27 Juillet 1877 à 84 ans.

D'après sa photographie, c'était une dame assez petite, à l'allure austère et autoritaire, paraissant bien avoir eu le même caractère que sa mère, Madame PORCHER-AUCHER.

 

 

Maladie et décès de Léon LEMAIGNEN

 

On a vu ci-dessus que Madame Léon LEMAIGNEN-BEZARD dans une lettre du 03 Juin 1851 et que Pierre Samuel BEZARD dans une lettre du 04 Juin 1851 faisaient allusion à la santé de Léon LEMAIGNEN. Celui-ci avait été traumatisé par les événements de la révolution de 1848, peut-être sous l'influence de l'oncle de sa mère, Jean-Louis PORCHER (voir sa correspondance) et, après avoir été un brillant avocat à Blois, où il demeurait rue Fontaine des Elus, dut être hospitalisé dans une maison de santé à Paris, puis à Saint-Maurice près de Paris où il décéda six ans après, le 29 Juillet 1854 à l'âge de 45 ans.

 

Le 04 Juin 1848, Laure DUTHEIL écrivait à Pierre Samuel BEZARD, son oncle:

"Aussitôt après avoir reçu ce matin votre lettre, mon père s'est mis en route pour prendre des renseignements sur les meilleurs maisons de santé et sur les meilleurs médecins.... Il m'a chargé de vous tracer ces quelques lignes pour vous tranquilliser et vous dire que nous nous occupions de vous avec toute l'activité et l'intérêt dont nous sommes susceptibles. Il s'est rendu chez notre médecin qui est un des premiers de Paris pour avoir des informations et être guidé par lui dans ses démarches ....

Je vous dirais combien nous sommes affectés par le malheur qui vous a frappés, mes chers parents ....... Espérons que nos prières seront exaucées ; c'est du fond du coeur ce que je demande à la Providence. Quant au logement pour Amélie, elle n'a pas besoin de s'en occuper dans ce moment. Elle descendra avec son fils d'abord chez mon père ; nous sommes en mesure de les recevoir ; puis elle avisera après à ce qu'elle veut faire ...."

Laure DUTHEIL ajoute à cette lettre quelques lignes très affectueuses pour "Amélie" (Emilie LEMAIGNEN)

 

Il ne semble pas que les recherches de Jean-Louis PORCHER aient alors abouti et Léon LEMAIGNEN a dû rester à Blois, car le 1er Juin 1849, un an après, il écrivait à Ernest LEMAIGNEN, qu'ayant reçu une lettre de son beau frère BEZARD :

"Il s'était mis à la recherche d'une maison convenable. Ma fille de son côté à pris de renseignements. La maison que M. AUBRY vous a indiquée est celle sur laquelle nous avons d'abord jeté nos vues, mais les prix en sont élevés ; d'un autre côté salle commune .... Celle de Passy est sur les bords de la Seine, l'air y est délicieux et l'établissement que le Docteur BLANCHE y possède, et que j'ai visité est très bien tenu et son prix convenable. C'est 500 frs à donner de suite en amenant le malade et 4 à 500 Frs pour chacun des mois suivants..... Pendant le traitement toutes les relations seront suspendues avec la famille, et on ne pourra voir le malade que lorsque le médecin le jugera possible. Il aura deux chambres, l'une pour séjourner, l'autre pour coucher..... Si après plusieurs mois il n'allait pas mieux, on lui affectera un gardien ce qui fera une somme de 100 Frs par mois....".

Suivent d'autres détails. Il y a un jardin et une salle de billard. Le Docteur BLANCHE peut recevoir dès maintenant le malade dans son établissement, 2 rue de Seine à Passy.

 

Le 18 Juin 1849, Jean-Louis PORCHER écrit à sa mère :

"Je n'entrerai ici dans aucun détail sur l'installation de Léon dans la maison de santé de Monsieur BLANCHE à Passy, ma soeur te les aura donnés de vive voix. Notre malade s'y trouve très bien et dit lui-même qu'il est dans une très bonne maison ; il n'y a que les deux gardiens qui lui déplaisent ; je lui ai dit que c'était l'usage de la maison et il s'est résigné. Il y a déjà une amélioration très sensible dans sa santé et il ne déraisonne que lorsqu'il tombe sur la politique ; sur le reste, ses idées sont très suivies et il se loue de tous les soins qu'on lui prodigue. Il a écrit hier une lettre à sa femme ; on ne dirait jamais que c'est celle d'un homme dans sa position. Espérons donc que le temps le rétablira tout à fait. Les médecins ne veulent qu'il ne voit ni sa femme ni son fils....".

Le même jour (18 Juin 1849) Pierre Samuel BEZARD écrit à sa belle-mère, Madame PORCHER-AUCHER une lettre dont l'orthographe est toujours aussi invraisemblable :

"Notre bon Léon va un peu mieux. PORCHER l'a trouvé chez le Docteur BLANCHE lisant le journal. Il aime beaucoup le Docteur BLANCHE et le regarde comme son sauveur et un véritable père. Léon vient d'écrire à sa femme, et il lui fait part du chagrin qu'il éprouve, des peines qu'il lui cause ... puis il bivouaque disant que son fils pourra faire un laboureur....".

Malheureusement, un mois après la santé de Léon LEMAIGNEN empirait définitivement, car Jean-Louis PORCHER écrivait à sa mère le 20 Juillet 1849 que Pierre Samuel BEZARD et sa fille étaient arrivés à Paris la veille

"à 1 heure après midi en très bonne santé... Ce matin à dix heures nous sommes partis pour Passy ; nous y avons vu Léon, mais seulement de derrière une persienne au bas de laquelle son médecin, qui était avec lui, lui a fait tenir une conversation dans laquelle il a complètement déraisonné. Il se porte très bien physiquement, mais au moral, il est bien malade. Je persiste dans mon opinion qu'il ne se rétablira jamais. C'est un homme perdu pour sa famille. Cependant ses médecins n'ont pas tout à fait perdu espoir.....".

Jean-Louis PORCHER se plaint ensuite de la situation à Paris qui est devenue une ville invivable par suite des événements politiques consécutifs à la Révolution ; il aspire à quitter Paris pour venir profiter du calme de la campagne.

On sait que le 04 Juin 1851, Jean-Louis PORCHER écrivait :

"Nous sommes dans l'attente d'une bonne solution ; ça va autant bien que possible....".

Cependant, Léon LEMAIGNEN dut quitter la maison du Docteur BLANCHE à une date indéterminée, puisqu'il est décédé à Saint-Maurice 3 ans après. Nous n'avons aucune précision sur ces dernières années ni sur son décès.

Le 05 Juin 1849, il avait donné une procuration générale à sa femme pour gérer ses affaires.

Madame LEMAIGNEN-BEZARD avait été nommée tutrice à l'interdiction de son mari par délibération du Conseil de Famille tenue devant le Juge de Paix de Blois le 16 Avril 1851.

Par acte de Me PELTEREAU, notaire à Vendôme du 05 Septembre 1862 confirmant un acte sous signatures privées du 15 Mars 1857, il était procédé entre elle et son fils Ernest, au partage de communauté et de la succession de Léon LEMAIGNEN avec reddition de compte de tutelle à Ernest. La communauté était entièrement absorbée par la reprise de la dot de Madame LEMAIGNEN.

La succession de Léon LEMAIGNEN comprenait, outre diverses créances, les terres acquises par lui à Périgny et Villeromain, les fermes de la Foresterie et des Usages à Danzé dont il avait hérité de son père François LEMAIGNEN-VILLORCEAU (tous les autres immeubles recueillis par lui dans la succession de son père avaient déjà été vendus - Voir famille FERRON).

Madame Emilie LEMAIGNEN-BEZARD habitait soit à Tours soit à Périgny avec Ernest. Elle décéda à Tours le 14 Avril 1895 à 82 ans.

Fernand LEMAIGNEN a connu sa grand-mère et son arrière grand-mère, Madame BEZARD-PORCHER, qu'on appelait à Périgny "les deux grand mères".

Madame Emilie LEMAIGNEN-BEZARD semble avoir été une femme de grand caractère ; malgré la maladie et le décès de son mari, elle s'est consacrée avec courage et sérénité à l'éducation de son fils. C'était bien la petite fille de BEZARD-LEGRAND.

Ainsi prend fin la famille BEZARD qui fait désormais place à la famille LEMAIGNEN.

 

 

Avant d'étudier la famille LEMAIGNEN il convient de faire l'historique des familles DEMEZIL et FERRON qui se sont alliées, ainsi qu'on le verra, à François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, puis à son petit fils Ernest LEMAIGNEN.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille Demezil

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA FAMILLE DEMEZIL et

LES FAMILLES TIRONNEAU - VERITE et COUSIN

 

 

Ainsi qu'on l'a vu dans l'histoire de la famille BEZARD (Chapitre V - Famille BEZARD-PORCHER et LEMAIGNEN), Léon Ernest LEMAIGNEN avait épousé le 23 Septembre 1862 Louise DEMEZIL, fille unique de César DEMEZIL, médecin à Couture et de Pauline TIRONNEAU.

La généalogie des familles DEMEZIL et TIRONNEAU peut être assez aisément établie à l'aide de l'importante liasse de titres de propriété de la Ferme de Mons, commune de Marolles-les-Saint-Calais dont ces familles était propriétaires.

Outre leur intérêt généalogique, ces titres méritent une étude attentive car ils sont presque complets depuis 1573 ; non seulement ils permettent de suivre les différents propriétaires de cette ferme depuis cette date reculée, mais aussi la désignation des bâtiments et des terres qui la composent, qui n'ont guère variés pendant les quatre siècles où cette ferme est restée aux mains de la même famille, sauf peut-être une courte interruption de 1771 à 1787. De plus, le lieu de Mons, ou Mont, était un petit fief hommagé par plusieurs vassaux dont il est très intéressant de lire les déclarations d'héritage et devoirs de cens et rentes rendus au sieur de Mons et payables le jour de Toussaint en la recette de cette Seigneurie (sans doute la grande chambre à cheminée gothique qui existe toujours) qui avait droit de basse justice.

Le lieu de Mons relevait lui-même de l'abbaye de Saint-Calais, à cause de son fief de la Margerie. Foi et hommage simple à charge de 15 deniers de service chaque an payable le jour et fête de Saint-Calais (1er Juillet) en l'église Notre-Dame de Saint-Calais (déclaration d'héritage du 26 Mars 1764).

 

 

LA FAMILLE COUSIN

 

Le Dimanche 10 Décembre 1573, honorable femme Catherine VALLET, veuve de Robert ROUSSEAU demeurant à Tours, paroisse de Saint Saturnin vendait à honnête personne Germain COUSIN, marchand, demeurant à Marolles près de Saint-Calais et Mathurine ANGEVIN, sa femme, le lieu, fief, terre et seigneurie appelé, près de Saint-Calais, ainsi que lesdits fief, terre et métairies se poursuivent en maison, grange, étables, toits à bêtes rousses, courtils, garennes à connils, terres labourables ou non, bois de haute futaie, prés, noues, pâtures entourées de haies et buissons.

Germain COUSIN et Mathurine ANGEVIN son épouse, décèdent avant 1608 laissant quatre enfants qui se partagent leurs biens le 12 Janvier 1621, savoir :

1°) Magdeleine COUSIN, décédée avant 1628, épouse de Rougelin ROUSSEAU demeurant à Cormenon (était-il apparenté à Robert ROUSSEAU dont la veuve avait vendu le fief de Mons le 10 Décembre 1573 ? c'est possible).

2°) Michel COUSIN, notaire royal à Saint-Calais qui vivait encore 1621.

3°) Germain COUSIN, marchand à Saint-Calais, époux de Laure MOUSSU.

4°) Barbe COUSIN époux de Laurent (ou Florent) GLANDAZ, demeurant à Cormenon qui vivait encore en 1621.

Les enfants de Germain COUSIN et de Mathurine ANGEVIN avaient payé le solde du prix d'acquisition du fief de Mons le 04 Janvier 1608.

 

Aux termes d'un partage en date du 12 Janvier 1621 intervenu entre les enfants de Germain COUSIN et Mathurine ANGEVIN, le fief de Mons fut attribué pour 2/3 à Magdeleine COUSIN, épouse de Rougelin ROUSSEAU et pour 1/3 à Germain COUSIN.

Le 14 Août 1628, Jacques ROUSSEAU, marchand à Montoire, et Rougelin ROUSSEAU, son frère, marchand, demeurant à la Chapelle Vicomtesse, se partagèrent les 2/3 du fief de Mons échus à leur parent Rougelin ROUSSEAU et Magdeleine COUSIN.

En vertu de ce partage les 2/3 du fief de Mons furent attribués à Jacques ROUSSEAU qui les vendit le 24 Juin 1641 à Germain COUSIN l'aîné, marchand, demeurant à Saint-Calais, époux de Laure MOUSSU, déjà propriétaire de l'autre tiers en vertu du partage du 12 Janvier 1621 (voir la reproduction quasi intégrale de cette vente dans l'analyse des titres de propriété de Mons avec l'indication de l'origine de propriété).

 

Germain COUSIN, époux de Laure MOUSSU décéda à une date qui n'a pu être précisée laissant deux enfants :

1°) Françoise COUSIN, dame de Mons, veuve en 1678 de Charles FROGER, avocat à St-Calais qui eut un fils, Charles FROGER, prêtre au diocèse de Chartres qui vivait en 1724. Françoise COUSIN hérita d'une partie du fief de Mons et le donna en avancement d'hoirie à son fils lors de sa prêtrise.

2°) Germain COUSIN, marchand à Saint-Calais, sieur de Mons qui épousa en premières noces, Renée de TERNAY et en secondes noces Claude BAGOT. Il décéda en Août 1679 laissant :

1°) De son premier mariage :

Renée COUSIN, épouse de Louis BARBIN, sieur de BEAUREGARD, Conseiller du Roi et son Lieutenant au siège de l'élection de Château-du-Loir.

2°) De son deuxième mariage :

- Germain COUSIN, curé de Coulanges.

- Françoise COUSIN, épouse de François VERITE, avocat à Saint-Calais, décédé avant 1719.

- Marguerite COUSIN, épouse de Jean CHASSELOUP, avocat à Mondoubleau, décédé sans enfant avant 1719.

Ses trois derniers, mineurs en 1688.

 

En vertu du partage en date du 20 Février 1688 de la succession de ce Germain COUSIN, décédé en Août 1679, l'autre partie du fief de Mons fut attribué à Claude BAGOT, veuve dudit Germain COUSIN.

Renée COUSIN, épouse de Louis BARBIN de BEAUREGARD eut vraisemblablement trois enfants :

1°) Louis BARBIN, prêtre à Besse-Sur-Braye.

2°) Renée BARBIN, demeurant Paroisse St-Martin à Château-sur-Loir.

3°) Louis BARBIN, de BEAUREGARD, conseiller du roi et Lieutenant de l'élection de Château-du-Loir, comme son père, époux d'une dame CLOPET.

Le 30 Juillet 1719, Louis BARBIN de BEAUREGARD, époux CLOPET acquit à titre de licitation de Germain COUSIN, curé de Coulanges, et de François VERITE, veuf de Françoise COUSIN, ayant agi pour le compte de ses enfants mineurs, les 2/3 appartenant à Germain COUSIN et aux mineurs VERITE, comme héritiers de Marguerite COUSIN, épouse CHASSELOUP, de la partie du fief de Mons, dont il était lui-même propriétaire pour 1/3 comme héritier de ladite dame COUSIN-CHASSELOUP.

L'autre partie du fief de Mons qui appartenait à Françoise COUSIN, épouse FROGER fut vendue le 13 Janvier 1724 par son fils, Charles FROGER, prêtre au diocèse de Chartres et Louis BARBIN, prêtre à Besse qui décéda le 20 Avril 1752 laissant pour héritier, notamment, Hardouin Pierre BARBIN, sieur de Villiers, la Vieillière, Mons et autres lieux, prêtre à Besse, fils des époux Louis BARBIN de BEAUREGARD-CLOPET qui devint seul propriétaire de cette partie du fief de Mons en vertu d'un partage avec ses cohéritiers qui n'a pas été retrouvé.

En sorte que Hardouin Pierre BARBIN réunit sur sa tête la totalité du fief de Mons. Il le vendit le 24 Décembre 1771 à Louis Antoine de SERIGNAC, comte de Sérignac, ancien capitaine au régiment du Roi infanterie, seigneur de nombreux lieux, demeurant au château de Bellemont, paroisse d'Ardins et Armagnac, province de Gascogne, alors présent en son château de Patin, paroisse de Savigny, moyennant 6.000 livres payées comptant, mais avec réserve d'usufruit du vendeur. Il est constaté dans cette vente la remise de 52 titres de propriété. Hélas il en manque beaucoup !

 

Comme on vient de le voir la transmission du fief de Mons depuis 1573 jusqu'en 1771 est singulièrement compliquée. Mais ces nombreux partages et licitations auxquels elle a donné lieu, permet de reconstituer assez fidèlement la généalogie de la famille COUSIN.

 

 

LA FAMILLE VERITE

 

On a vu que le 30 juillet 1719, Louis BARBIN de BEAUREGARD avait acquis à titre de licitation une partie du fief de Mons de ses cohéritiers et notamment de François VERITE ayant agi pour le compte de ses enfants mineurs issus de son mariage avec Françoise COUSIN.

Qui étaient ces enfants ?

 

Il résulte de deux quittances écrites à la suite de l'un des 3 exemplaires de cette licitation que le prix en avait été payé à :

1°) Jacques François VERITE, prêtre, neveu de Marguerite COUSIN, époux CHASSELOUP, le 10 Février 1721.

2°) Anne VERITE, nièce la ladite dame, le 11 Février 1730.

 

Ce sont donc incontestablement le frère et la soeur, enfants de François VERITE et de Françoise COUSIN.

Ils étaient l'un et l'autre mineurs en 1719. Jacques François VERITE est majeur en 1721 et sa soeur en 1730. Jacques François est donc né vers 1695 et sa soeur sans doute quelques années après (tout au plus 9 ans après).

Or, on verra ci-après (famille TIRONNEAU) qu'une Marie Madeleine Louise VERITE, avait épousé, étant âgée de plus de 25 ans, Louis Pierre PERINEAU.

Il résulte de son contrat de mariage en date du 05 Octobre 1779 qu'elle était fille de Charles VERITE, marchand à la Ferté-Bernard et qu'elle avait une tante : Marie Anne VERITE, témoin à son mariage.

On peut dès lors se demander si Charles VERITE n'était pas un troisième enfant de François VERITE et de Françoise COUSIN. Qui, dans ce cas, serait donc né avant 1719 ; mais il aurait eu plus de 60 ans lors du mariage de sa fille, ce qui est beaucoup.

On peut également se demander si la tante Marie Anne VERITE ne serait pas la même que Anne VERITE née au plus tard en 1704, qui aurait eu 75 ans lors du mariage de sa nièce.

Cette hypothèse serait séduisante car elle éblirait le lien entre la famille COUSIN, propriétaire du fief de Mons et la famille TIRONNEAU qui en devint propriétaire en 1787.

Mais il est assez difficile de s'y rallier, car elle repose sur la présomption de l'existence d'un 3ème enfant de François VERITE et de Françoise COUSIN dont il n'est nullement fait mention à la suite de la licitation de 1719. Et si elle était vrai, il faudrait admettre que Charles VERITE et Anne (ou Marie Anne) VERITE sa soeur, étaient bien âgés lors du mariage de Marie Madeleine Louise VERITE.

On remarquera en outre que Jeanne Marie Anne DAGOREAU, épouse de Thomas Antonin TIRONNEAU (voir ci-après) avait un frère : Jean Baptiste François DAGOREAU qui épousa une Anne Emilie VERITE (décédée le 10 Janvier 1866).

Si nous ne sommes pas certain de l'ascendance de Charles VERITE, du moins connaissons-nous sa descendance, notamment par un inventaire en date du 31 Décembre 1838 après le décès de François Marie LHEUREUX.

Précisons tout d'abord que Charles VERITE avait, ainsi qu'on vient de le voir, une soeur Marie Anne VERITE. Il avait épousé Marie Renée MOULINEUF décédée le 05 Octobre 1779, fille de Louis Nicolas Gervais MOULINEUF qui avait eu 3 autres filles : Madeleine Louise, Françoise Louise et Louise demeurant toutes à la Ferté-Bernard lors du mariage de leur nièce.

 

Du mariage de Charles VERITE et de Marie Renée MOULINEUF sont issus 4 enfants :

1°) Marie Madeleine Louise qui épousa Louis Pierre PERINEAU (contrat de mariage du 05 Octobre 1779) lequel était fils de Pierre PERINEAU, demeurant à Bonneval, décédé avant 1779 et de Anne BEAUPERE (ou BEAUPAIRE). Louis Pierre PERINEAU avait une soeur : Marie Anne épouse de Jean-Louis ROULON-BAILLY, notaire royal à Bonneval et maire de cette ville en 1779.

2°) Louis Charles René VERITE qui eut une fille Sophie, qui épousa Pierre Jean Baptiste GIGAULT de la BEDOLLIERE, directeur des Contributions Indirectes à Fontenay-le-Comte.

3°) Henriette VERITE.

4°) Marie Louise VERITE.

L'une de ces deux dernières épousa André LHEUREUX, fils de François LHEUREUX et de ...... FERGON. De ce mariage sont issus 3 enfants :

1°) Edme François LHEUREUX décédé avant 1838.

2°) Alexandre Iris LHEUREUX, décédée avant 1838, qui épousa Isidore CLOTTE, pharmacien à la Ferté-Bernard.

3°) François Marie LHEUREUX, officier, décédé à Cherre près de la Ferté-Bernard le 11 Décembre 1838, sans enfant, laissant pour légataires universelles ses cousines : Madame GIGAULT de la BODELLIERE et Madame Anne Marie Charles PERINEAU, épouse de Michel TIRONNEAU.

 

 

LA FAMILLE DAGOREAU

 

Ce Michel TIRONNEAU, qui était notaire à Couture et dont la généalogie sera établie plus loin, était le fils de Thomas Antonin TIRONNEAU, notaire à Saint-Calais et de Jeanne Marie Anne DAGOREAU.

Cette dernière avait 4 frères et soeurs :

1°) Jean Baptiste François DAGOREAU, décédé à la Loutière, commune de Cogners (Sarthe) le 09 Octobre 1834, époux de Anne Emilie VERITE décédée le 10 Janvier 1866 sans enfant.

Elle était certainement parentes des VERITE dont la généalogie précède.

Un procès intervint entre les héritiers et représentant de son mari au nombre desquels figurait Madame LEMAIGNEN-DEMEZIL (voir dossier famille TIRONNEAU - Voir aussi une lettre de Me MARTELLIERE-BOURGOGNE, avocat à Vendôme adressée à Ernest LEMAIGNEN le 09 Décembre 1867 - dossier Ernest LEMAIGNEN-lettres et une lettre d'Ernest LEMAIGNEN à Jean-Louis PORCHER du 04 Mai 1867).

2°) Marie Angélique DAGOREAU, décédée avant 1868, épouse LEGRAND qui eut un fils, Charles qui vivait en 1868.

3°) Pierre Louis DAGOREAU, médecin à Saint-Calais, décédé après 1834 qui eut 4 enfants :

- Léopold époux de Claire PRUVOST décédé à Saint-Calais le 20 Novembre 1866 sans enfant.

- Louis.

- Edmond.

- Thomas.

Ces trois derniers décédés avant 1834.

4°) Gabriel Paul Louis DAGOREAU, qui eut 3 enfants :

- Félix Louis Léonor DAGOREAU, Capitaine d'Infanterie de Marine en retraite en 1868 demeurant à Suresne rue du Clos.

- Eugénie Léopoldine Pauline DAGOREAU, veuve en 1868 de François Benjamin BERTIN demeurant à Paris, 249 rue Saint-Jacques.

- ....... DAGOREAU, épouse GUELDRY, décédée avant 1868 qui eut un fils : Louis Victor Sophie Frédérick GUELDRY, gérant d'atelier, demeurant en 1868 à Paris, 64 rue Amelot.

 

Le 30 Septembre 1922 (voir dossier lettres adressées à Madame LEMAIGNEN-MESCHIN) une amie de Madame LEMAIGNEN, Mademoiselle Andrée de LAVERNETTE, qui avait fait sa connaissance à Tours où son père était mobilisé pendant la guerre de 1914 avec M. MESCHIN, lui écrivait de Saint-Calais, où elle était alors chez sa tante Mlle de la POTERIE, 1 rue Lhermite :

"Je voudrais vous donner un tableau généalogique DAGOREAU. J'y renonce car je m'embrouille dans tous ces demi-frères et soeurs. Ma tante me parle de tant de choses que ma pauvre cervelle ne peut les retenir. J'ai vu hier la maison de Madame DAGOREAU dans l'Impasse qui porte son nom. (Il s'agit certainement de Madame DAGOREAU-VERITE). Et je n'ai pas encore saisi s'il y avait une parenté entre M. DUCOUDRAY (il en sera question plus loin) et la fameuse Madame DAGOREAU. C'est égal le monde est bien petit et c'est curieux de se retrouver ainsi en pays de connaissance".

Puis dans une lettre du 28 Mars 1923, Mademoiselle Andrée de LAVERNETTE, alors dans la propriété de ses parents à Montrevost par Cuisery (Saône et Loire) explique à Madame LEMAIGNEN que sa mère avait une tante, L. de MONTREVOST, qui avait épousé un de la Poterie, lequel était le frère de Timoléon de la Poterie époux d'Hortense TIRONNEAU, soeur de Michel TIRONNEAU, grand-père de Louise DEMEZIL qui épousera Ernest LEMAIGNEN.

 

 

LA FAMILLE TIRONNEAU

 

La premier membre de la famille TIRONNEAU que nous connaissons est : Thomas Antoine TIRONNEAU, notaire royal à Saint-Calais époux de Jeanne Marie Anne DAGOREAU.

Il acheta le 10 Novembre 1787 à Louis Antoine de SERIGNAC le lieu, fief et domaine de Mons, situé Paroisse de Marolles et tous les sujets et censitaires qui en dépendent, relevant à foi et hommage simple du fief de Margerie de l'abbaye royale de Saint-Calais, sous le devoir de 15 deniers et service le jour de Saint-Calais, rachats et autres droits suivant la coutume.

Le tout appartenant au Seigneur de SERIGNAC, d'acquêt qu'il en a fait de Pierre Hardouin BARBIN de VILLIERS, prêtre ; cette vente consentie moyennant le prix de 2.000 livres payées comptant, contient une description précise des pièces de terre de la ferme de Mons avec leur dénomination actuelle.

Et le même jour, Thomas Antoine TIRONNEAU, achète également de Louis Antoine de SERIGNAC "ce qui faisait la composition du lieu nommé le Petit Mortier situé paroisse de Marolles", dont l'acte contient également la désignation détaillée, et qui forme le surplus de la ferme de Mons, acquise par le sieur de SERIGNAC de Pierre Hardouin de VILLIERS.

Cette vente a lieu moyennant 6.240 livres dont 1.240 livres payées comptant. Les 5.000 livres de surplus sont payables le 1er Mai 1788 avec intérêts au denier vingt. On ne s'explique pas pourquoi il a été établi deux actes de vente séparés du domaine de Mons.

Thomas Antoine TIRONNEAU décéda à Saint-Calais le 18 Décembre 1819 laissant 6 enfants :

1°) Thomas Jean Michel TIRONNEAU, greffier de la justice de paix de Saint-Calais.

2°) Me Michel TIRONNEAU, notaire royal à Saint-Calais.

3°) Jeanne Antoinette TIRONNEAU, épouse de René Jacques DUCOUDRAY, propriétaire, demeurant à la Ganterie, commune de Montaille.

4°) Mlle Sophie TIRONNEAU, majeure en 1820, demeurant à Saint-Calais.

5°) Henry Anne Hortense TIRONNEAU, épouse de René Thimoléon GUILLOT de la POTERIE, percepteur, demeurant à Conflans.

6°) Me Benjamin TIRONNEAU, notaire royal, certificateur et commissaire priseur à Saint-Calais.

Le 09 Décembre 1820 ils se partagèrent les biens dépendant de la succession de leur père et ceux qui leur avaient été donnés par leur mère le 10 Juin 1820.

Aux termes de ce partage de la ferme de Mons, minutieusement décrite tant en ce qui concerne les divers bâtiments dont on indique même les dimensions que les terres, est attribuée conjointement à Me Michel TIRONNEAU et à Sophie TIRONNEAU.

Une maison à Saint-Calais, grande rue, près de l'église dont Madame veuve TIRONNEAU avait la jouissance, restait indivise entre les 6 enfants.

On ne sait rien de plus de Thomas Jean Michel TIRONNEAU, si ce n'est qu'il eut une fille : Renée Joséphine TIRONNEAU, épouse de Philippe Charles CHARBONNIER qui était ancien notaire royal à Saint-Calais en 1840 et qui fut subrogé-tuteur de Louise DEMEZIL sa cousine par alliance (nomination de subrogé-tuteur du 26 Février 1840).

Madame DUCOUDRAY décédé sans enfant en Février 1851.

Sophie TIRONNEAU décéda célibataire après avoir vendu le 08 Février 1840 à Me Michel TIRONNEAU, son frère, la moitié lui appartenant dans la Ferme de Mons.

Madame GUILLOT de la POTERIE décéda après 1854 laissant une fille, Léopoldine, célibataire à Saint-Calais vers 1930 et un fils Avoué à Saint-Calais.

Benjamin TIRONNEAU décéda après 1854.

Quant à Me Michel TIRONNEAU, il épousa Anne Marie Charles PERINNEAU (dont il existe à Périgny un tableau peint en 1845, un an avant son décès) fille de Louis Pierre PERINNEAU, marchand à Bonneval qui avait épousé (contrat de mariage du 05 Octobre 1779) Marie Madeleine Louise VERITE, fille, ainsi qu'on l'a vu, de Charles VERITE. Les époux PERINNEAU-VERITE étaient majeurs de plus de 25 ans lors de leur mariage.

Louis Pierre PERINNEAU était fils de Pierre PERINNEAU, demeurant à Bonnval décédé avant 1779 et d'Anne BEAUPERE (voir ci-dessus : Famille VERITE).

Me Michel TIRONNEAU, décéda après 1840 et sa femme à Couture le 19 Décembre 1846 laissant deux enfants :

1°) Pauline TIRONNEAU qui épousera César DEMEZIL.

2°) Marie Hortense TIRONNEAU qui épousera Jean-Jacques ROUSSEAU, percepteur à Troo, fils de Jacques ROUSSEAU (décédé après 1848) demeurant à Montoire, et de Marie Marguerite DUCLOS (contrat de mariage devant Me GOBET, notaire à Montoire du 13 Août 1791). Les époux ROUSSEAU-TIRONNEAU décédèrent : pour le mari avant 1840 et pour la femme à Troo le 13 Avril 1840 laissant un seul fils : Jean Jacques Charles ROUSSEAU qui décèdera lui-même à Montoire le 22 Novembre 1854 à l'âge de 19 ans.

 

Outre Jean Jacques ROUSSEAU, était née du mariage des époux ROUSSEAU-DUCLOS, une autre fille dont on ignore le prénom, qui épousa un certain AUBONNELLE, dont elle eut 5 enfants qui vivaient tous en 1856, à savoir :

1°) Justine AUBONNELLE, épouse de Jean Charles CORMIER, marchand, Faubourg Saint-Lubin à Vendôme.

2°) François Just AUBONNELLE, marchand à Blois.

3°) Adèle AUBONNELLE, épouse d'Alexis Valentin ROTTIER, demeurant à Villedieu.

4°) Joseph Paul AUBONNELLE, marchand à Oucques.

5°) Jean Dominique CAZAUBON, fabricant de robinets, demeurant en 1856 à Paris, 76 rue de Nazareth, époux d'Augustine Cécile TASSET, sans doute petit fils issu d'un cinquième enfant.

 

 

LA FAMILLE DEMEZIL

 

On vient de voir que Pauline TIRONNEAU, l'une des deux filles de Me Michel TIRONNEAU, notaire à Couture, avait épousé César DEMEZIL.

César DEMEZIL était né à Tours le 24 Mars 1805 du mariage de Pierre André DEMEZIL, avoué, licencié de droit, juge suppléant au Tribunal Civil de Tours et membre de la commission administrative des prisons, demeurant à Tours, 12 rue de la Chèvre où il décédera en 1843, avec Marie Françoise Madeleine MESTAYER (ce sont sans doute les portraits des parents de Marie MESTAYER qui se trouvent à Périgny sur le palier du 1er étage).

La généalogie des familles MESCHIN, MAURICE et BRUNEAU nous donnent les précisions suivantes sur les ascendants de Pierre André DEMEZIL.

Le plus ancien ascendant connu est un Jean DEMEZIL, né vers 1640, époux VALLANSION qui eut 8 enfants dont Bernard DEMEZIL qui épousa Gabrielle GINET décédée en 1763. Elle était fille de Jean GINET et de Reine GAUDIN décédée le 18 Septembre 1742. Elle avait 5 frères et soeurs dont Jean GINET, prêtre à Rome, Pierre GINET, Procureur au Parlement de Paris et René GINET, Procureur au Présidial de Tours.

Les époux DEMEZIL-GINET eurent 3 enfants :

1°) .........DEMEZIL, curé de Ligre, décédé à Lerné près de Chinon dans une maison qui lui appartenait devenue depuis le presbytère.

2°) Gabrielle Françoise DEMEZIL, décédée le 31 Juillet 1780, épouse d'Eléonore René de la PORTE décédé le 03 Avril 1770 d'où sont issues les familles BRUNEAU - MAURICE et MESCHIN.

3°) Jean Pierre DEMEZIL, Grand Juge à Tours, époux de Rosalie MESTAYER, père de Pierre André DEMEZIL, né le 14 Juin 1774, décédé le 22 Mai 1843 (note portée par Fernand LEMAIGNEN sur son carnet de compte à la date du 25 Août 1924).

Du mariage de Pierre André DEMEZIL sont issus deux enfants :

1°) César DEMEZIL.

2°) Pierre DEMEZIL qui décéda célibataire à Tours le 17 Février 1871, en son domicile, 18 rue de la Préfecture (inventaire du 22 Février 1871 et partage du 25 Avril 1871).

Marie Françoise Madeleine MESTAYER décéda avant 1816 et son mari, Pierre André DEMEZIL, se remaria (contrat de mariage du 07 Septembre 1816) avec Louise Antoinette Emilie THEVENOT dont il eut un fils : Ernest Antoine DEMEZIL né à Tours le 18 Novembre 1817 qui fut Avoué à Tours, rue de la Grandière n°13, licencié en droit. Il épousa à Naveil le 26 Octobre 1846, Augustine Odile Lucie MIROIR née à Luneville le 11 Juin 1828.

Elle était la fille d'Alexandre Auguste MIROIR, né à Laigle le 19 Août 1787, Chevalier de la Légion d'Honneur, chef d'escadron à Dole (Jura) décédé à Naveil le 21 Juin 1851 et de Eugénie Madeleine Victoire LEMAIGNEN née à Vendôme le 24 Janvier 1808, décédée à Luneville le 24 Juillet 1828.

Eugénie LEMAIGNEN était la soeur de Léon LEMAIGNEN comme étant issue avec lui du mariage de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avec sa deuxième épouse : Madeleine Eugénie FERRON (voir famille FERRON et famille LEMAIGNEN).

On sait que Léon LEMAIGNEN épousa Emilie Marie Brigitte BEZARD dont il eut un fils : Léon Ernest LEMAIGNEN qui épousa Louise DEMEZIL fille de César DEMEZIL.

 

Il est curieux de relever ces imbrications entre la famille DEMEZIL et la famille LEMAIGNEN d'une part, et avec la famille MESCHIN d'autre part.

 

Les époux MIROIR-LEMAIGNEN, s'étaient mariés à Naveil le 11 Septembre 1827 (contrat de mariage Me RENOU, notaire à Vendôme du 09 Septembre 1827).

C'est également à Naveil que se marie leur fille avec Ernest Antoine DEMEZIL et que décéda Alexandre Auguste MIROIR. Cela n'est pas surprenant, car on verra plus loin que la famille FERRON était propriétaire de la Closerie de la Béguinière à Naveil. Cette Closerie avait été attribuée à Augustine Odile Lucie MIROIR, alors mineure, en vertu d'un partage du 13 Janvier 1830 analysé dans les titres de propriété de la Ferme du Bois aux Moines à Danzé. Cette Closerie fut vendue le 13 Juillet 1851 par acte de Me ROLLAND, notaire à Vendôme. Elle appartient aujourd'hui (1975) aux Consorts VIGNEAU.

Alexandre Auguste MIROIR avait une soeur : Julie Catherine Luce MIROIR, née à Laigle le 29 Juin 1789 décédée à la Béguinière, commune de Naveil, en son domicile le 25 Février 1845, célibataire, laissant pour seul héritier son frère (notoriété Me ROLLAND, notaire à Vendôme du 18 Novembre 1851).

Ernest Antoine DEMEZIL décéda à Tours le 17 Mai 1860 et Augustine Odile Lucie MIROIR son épouse, décéda à Tours le 29 Janvier 1902, laissant deux enfants :

1°) Marie Eugénie Marthe DEMEZIL, née à Tours le 08 Avril 1850, décédée à Joué-les-Tours, célibataire, le 02 Novembre 1884.

2°) Henri Ernest DEMEZIL né à Tours le 21 Mars 1848, décédé à Tours le 30 Avril 1907. Il fut clerc de notaire et travailla dans la même Etude qu'Ernest LEMAIGNEN (voir correspondance Ernest LEMAIGNEN, qui étant au collège de Tours après la mort de son père, avait pour amis intimes les époux DEMEZIL-MIROIR et leurs enfants ; il habitait d'ailleurs avec sa mère auprès de chez eux, rue Garandière).

Henri Ernest DEMEZIL épousa à Saint-Dyé sur Loire le 08 Août 1871, Marguerite FOUCAULT née à Blois le 25 Juillet 1849 décédée à Tours le 1er Octobre 1923.

Madame veuve DEMEZIL-FOUCAULT était une amie intime de son cousin Fernand LEMAIGNEN et c'est elle qui provoqua son mariage avec sa lointaine parente Marie MESCHIN.

 

Par Madame DEMEZIL-FOUCAULT, nous retrouvons encore un lien avec la famille LEMAIGNEN. En effet, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avait épousé en premières noces Marie Madeleine ELLEN née à Chateaudun le 1er Décembre 1778, décédée le 06 Décembre 1799.

De ce mariage était issue une fille : Marie Louise Caroline Nanine LEMAIGNEN, née à Paris le 04 Décembre 1799, décédée à Blois le 22 Décembre 1856 qui épousa à Navel le 06 Février 1821 Philippe FOUCAULT.

Du mariage FOUCAULT-LEMAIGNEN naquirent 3 enfants :

1°) Emile Eugène FOUCAULT (voir famille FOUCAULT).

2°) Marie Hélène FOUCAULT qui fut religieuses.

3°) Philippe François FOUCAULT né à Blois le 11 Décembre 1822, pharmacien à Blois, décédé à Saint-Dyé sur Loire le 29 Novembre 1870 qui épousa à Saint-Dyé le 28 Août 1848 Marie BEGENNE décédée à Tours le 05 Mars 1895.

Marie BEGENNE était née à Saint-Dyé le 14 Juillet 1827 du mariage de Jean Raphaël Auguste BEGENNE et de Marie Elise ROGER. Cette dernière était la fille de Charles Michel ROGER et de Sophie BRERONT. Charles Michel ROGER avait épousé en premières noces Marie Brigitte BEZARD, fille de BEZARD-LEGRAND (voir famille BEZARD-LEGRAND - lettre G).

 

Du mariage des époux FOUCAULT-BEGENNE est issue Marguerite FOUCAULT susnommée, épouse de Henri Ernest DEMEZIL.

 

Du mariage des époux DEMEZIL-FOUCAULT est issue une fille Marie DEMEZIL née à Joué-les-Tours le 19 Juin 1872, décédée au Carroir, commune de Soing-en-Sologne le 23 Décembre 1944 qui épousa à Joué-les-Tours Henri Georges MARTIN, né le 1er Janvier 1866, fils de Georges MARTIN, Chevalier de la Légion d'Honneur et Magistrat.

Henri Georges MARTIN, demeurant à Neuilly-sur-Seine, puis à Blois, décéda à Blois le ......... Janvier 1962.

 

Du mariage MARTIN-DEMEZIL naquirent 3 enfants :

1°) Madeleine MARTIN, née le 11 Janvier 1896, décédée le 03 Septembre 1896.

2°) Jacques MARTIN, né le 30 Novembre 1896, décédé le 02 Mars 1897.

3°) Jean MARTIN-DEMEZIL, né à Paris le 28 Novembre 1913, archiviste à Blois, puis à la Quantinière, commune de Vallières-les-Grandes qui épousa à Paris le ....... Septembre 1941 Jacqueline DUVAL née à Paris le 12 Mars 1915 (qui était apparentée aux AUCHER).

 

Après avoir étudié les ascendants et la branche collatérale DEMEZIL-MIROIR, revenons à César DEMEZIL et à sa fille Louise qui épousera Ernest LEMAIGNEN.

César DEMEZIL est né à Tours le 24 Mars 1805 ainsi qu'il résulte de son diplôme de Docteur en Médecine.

Son contrat de mariage (le 04/01/1837) avec Pauline TIRONNEAU fut reçu par Maître PESSON, notaire à Couture le 31 Décembre 1836.

Il était lors de son mariage Docteur en Médecine de la Faculté de Paris (diplôme délivré le 03 Avril 1832) et habitait déjà à Couture lors e son mariage.

Une tradition familiale prétend qu'il était également Docteur en Droit, ce qui ne serait pas surprenant étant donné qu'il appartenait à une famille de Juristes. Son grand-père était grand juge à Tours et son père Avoué à Tours. Son demi frère (Ernest Antoine) licencié en droit fut également Avoué à Tours.

Pourquoi César DEMEZIL, dont la famille habitait à Tours est-il venu s'établir médecin à Couture? Peut-être par goût de la nature.

César DEMEZIL était un homme très cultivé. Son importante bibliothèque qui nous a été conservée le prouve et il semble que ses connaissances médicales et scientifiques étaient solides et même en avance sur son temps. Il avait pressenti, avant Pasteur, l'existence des microbes. On trouve parmi ses livres, une histoire naturelle en 24 volumes, plusieurs traités médicaux et de nombreuses oeuvres littéraires. Ernest LEMAIGNEN, dans sa correspondance, parle souvent du "Bon Docteur" qui était tout dévoué pour ses clients.

Il existe à Périgny un tableau (palier du 1er étage) le représentant un livre à la main, en 1845.

Il perdit sa femme le 29 Décembre 1839, c'est à dire à deux jours près, trois ans après son mariage et deux mois après la naissance de sa fille Louise née à Couture le 27 Octobre 1839. Sa fille eut alors pour nourrice une Dame HERVE, de Couture, avec les descendants de laquelle la famille LEMAIGNEN est toujours restée en relations (aujourd'hui : Pierre HERVE demeurant au Fief commune de Couture, fils de Victor HERVE).

Le 26 Février 1840, le conseil de famille nomme comme subrogé tuteur de Louise DEMEZIL, son cousin germain Philippe Charles CHARBONNIER, ancien notaire à Saint-Calais. Parmi les autres membres du conseil de famille figuraient Michel TIRONNEAU, ancien notaire à Couture, son aïeul maternel et René Timoléon GUILLOT de la POTERIE, propriétaire, demeurant à Saint-Calais, son "bel oncle" du côté maternel à cause de Dame Henry Anne Hortense TIRONNEAU, son épouse.

Le 05 Mars 1840, Michel TIRONNEAU, ancien notaire à Couture et Anne Marie Charles PERINNEAU, son épouse, firent donation-partage de leurs immeubles à Marie Hortense TIRONNEAU leur fille, veuve de Jean Jacques ROUSSEAU et à la mineure Louise DEMEZIL, leur petite fille.

Aux termes de cet acte, il échu à Madame veuve ROUSSEAU une maison à Couture dite la Pavillon et diverses parcelles de terres, près et vignes à Coutures et à la mineure Louise DEMEZIL, la ferme de Mons, commune de Marolles-les-Saint-Calais et Sarge.

Le 15 Avril 1844, César DEMEZIL procéda au partage de la communauté ayant existé entre Pierre André DEMEZIL, son père, décédé en 1843 et Louise Antoinette Emilie THEVENOT, sa deuxième épouse et de la succession de son père, entre lui, Madame veuve THEVENOT, Ernest Antoine DEMEZIL son demi-frère et Pierre DEMEZIL, son frère. Ce partage, qui ne concernait pas les immeubles, comprenait de nombreuses créances et plusieurs valeurs de bourse.

Il fut suivi d'un partage sous signatures privées en date du 1er Novembre 1847 concernant le mobilier et les immeubles, à l'exception toutefois de la maison, 12 rue de la Chèvre à Tours. En vertu de cet acte il fut attribué à César DEMEZIL une pièce de vin et diverses créances et argent comptant.

Le 09 Janvier 1847, César DEMEZIL, en sa qualité de tuteur naturel et légal de sa fille Louise procéda avec Jacques ROUSSEAU, aïeul et tuteur datif du mineur (Jean Jacques) Charles ROUSSEAU, au partage de diverses créances dépendant de la succession de Anne Marie Charles PERINNEAU, leur grand-mère décédée à Couture le 19 Décembre 1846, veuve de Michel TIRONNEAU. Et le 12 Décembre 1848, il fut procédé à un partage complémentaire des créances dépendant de la succession de Madame veuve TIRONNEAU-PERINEAU, et du produit de la vente de son mobilier.

Le 29 Juillet 1855, il fut procédé par acte de Me GUION, notaire à Montoire, à la licitation des immeubles dépendant de la succession du mineur Jean Jacques Charles ROUSSEAU décédé à Montoire le 22 Novembre 1854. Ces immeubles étaient ceux qui avaient été attribués à sa mère, Marie Hortense TIRONNEAU, veuve de Jean Jacques ROUSSEAU aux termes de la donation-partage sus énoncée du 13 Avril 1840. Cette licitation eut lieu entre Madame Marie Marguerite DUCLOS, veuve de Jacques ROUSSEAU, aïeule paternelle dudit mineur ; et pour la ligne maternelle, Louise DEMEZIL, Benjamin TIRONNEAU ancien notaire à Saint-Calais et Madame Henri Anne Hortense TIRONNEAU veuve de René Timoléon GUILLOT de la POTERIE.

En vertu de cet acte, diverses pièces de terre, près et vignes, deux caves en roc situés à Couture et la maison dite le Pavillon au bourg de Couture furent adjugés à Louise DEMEZIL moyennant le prix de 11.200 Frs.

Ces divers immeubles, à l'exception de la maison furent vendus par Ernest LEMAIGNEN et Fernand LEMAIGNEN à diverses dates, dont la dernière le 09 Février 1951 (acte Me CROYERE) et la maison de Couture fut vendue à Monsieur André SAULNIER-LAFAILLE en 1973, après ventes en 1963, en divers lots, du terrain situé devant cette maison.

 

Louise DEMEZIL épousa à Couture le 23 Septembre 1862 (contrat de mariage Me DUBOIS, notaire à Couture du 22 Septembre 1862) Léon Ernest LEMAIGNEN, qui, alors qu'il était étudiant, vivait avec sa mère rue de la Grandière à Tours, près de la maison des époux DEMEZIL-MIROIR, ce qui lui permit sans doute de faire la connaissance du Docteur DEMEZIL, frère d'Ernest Antoine DEMEZIL-MIROIR. Louise DEMEZIL était une grande jeune fille de 22 ans, fort douce et aimant la campagne "où elle est avec son père qui était autrefois médecin à Couture près de Montoire mais qui a cessé à cause de sa mauvaise vue", ainsi que l'écrivait sa future belle-mère le 23 Juillet 1862 (voir correspondance d'Ernest LEMAIGNEN).

Après le mariage de sa fille, César DEMEZIL continua à vivre à Couture. Sa fille et son fils venaient souvent l'y voir. Lui-même allait assez fréquemment à Périgny. On sait qu'il y fut appelé d'urgence lorsque son petit fils Edmond LEMAIGNEN fut atteint du croup. Il se faisait accompagner par son domestique, Pierre, qui logeait alors dans la petite pièce située à côté du garage.

César DEMEZIL décéda à Couture le 03 Novembre 1869. Il est enterré au cimetière de Couture.

Après son décès, Me TAILLARDA, notaire à Saint-Dyé, ami des LEMAIGNEN établit un état de sa fortune le 28 Février 1870. Elle comprenait diverses valeurs de bourse, mobilier et créances s'élevant à 159.605,39 Frs et en outre, la ferme de la Chaise, commune de Chemille-sur-Deme et par extension communes de Montroveau, Epeigne et Couture qui lui provenait vraisemblablement de ses parents. Elle fut vendue par Fernand LEMAIGNEN par acte de Me ROY, notaire à Chemille-sur-Deme du 07 Novembre 1922, moyennant 118.000 Frs, au fermier qui avait proposé d'en payer le prix en Louis d'Or. Mais Fernand LEMAIGNEN préféra de bons billets de la Banque de France !

 

 

Il a été ainsi possible d'établir la généalogie de la famille DEMEZIL, depuis environ 1640. Elle était on l'a vu, lointainement apparentée à la famille MESCHIN par les BRUNEAU et les MAURICE et aux descendants de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

Du côté maternel, on peut établir la généalogie de Louise DEMEZIL épouse d'Ernest LEMAIGNEN, par les femmes (familles TIRONNEAU, VERITE et COUSIN) jusqu'en 1573, si toutefois l'hypothèse de la filiation de Charles VERITE avec Françoise COUSIN épouse de François VERITE est vraie.

César DEMEZIL et Pauline TIRONNEAU, son épouse, sont enterrés au cimetière de Couture (a peu près au centre du cimetière vers le côté droit). Chacun dans une tombe en pierre, les deux tombes entourées d'une grille en fer. Au début de l'année 1993, les croix de pierre de ces deux tombes furent brisées par vandalisme.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les Familles

 

Lancelot - Brillard

Denyau - Fouquet - Pitard

Melot - Peziere - Deras

Vallery et Breton

et Ferron

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU (1773-1837) était le père d'Eugènie Madeleine Victoire LEMAIGNEN, épouse d'Alexandre MIROIR et de Léon LEMAIGNEN (1809-1854), le grand-père d'Ernest LEMAIGNEN (1835-1903) et l'arrière grand-père de Fernand LEMAIGNEN (1870-1951).

 

Il avait épousé en secondes noces (étant veuf en premières noces de Marie Madeleine ELLEN) Madeleine Eugénie FERRON (1782-1809) fille de Claude Joseph FERRON et de Madeleine BRETON, dont la famille était originaire de Danzé où elle possédait notamment une maison au bourg, les fermes des Brosses, du Pré, des Saulettes et les Bigotteries de la Foresterie et du Bois aux Moines.

 

Une volumineuse liasse de titres de propriété, partages et pièces de procédures, comprenant plus de 200 pièces remontant aux premières années du XVIIe siècle, permet de retracer la généalogie de l'histoire de cette famille BRETON et de celles avec lesquelles elle était apparentée (familles DROUET, MELOT, LANCELOT, BRILLARD, PEZIERE, DERAS, DENYAU, FOUQUET, PITARD, VALLERY et HOUSSET).

 

La lecture de certains titres du XVIIe siècle est souvent difficile, voire impossible. Ce n'est qu'après leur examen minutieux et souvent par un raisonnement déductif qu'il a été possible de rétablir la généalogie de ces familles malgré l'absence quasi générale de dates de naissance, de mariage et de décès et l'habitude, courant à cette époque, de donner le même prénom aux fils aînés pendant plusieurs générations.

 

Les professions, les lieux-dits des biens possédés qui sont généralement les mêmes que ceux actuels, les procès, permettent de retracer sommairement la vie de ces familles, ancêtres du côté maternel de Léon LEMAIGNEN, depuis l'époque d'Henri IV.

LA FAMILLE LANCELOT

 

Le premier titre qui nous soit parvenu de cette famille date du 28 Mars 1591. Il commence ainsi :

"Sachent tous presens et advenir que en la cour du Roy nostre Sire Duc de Vendosmois à Vendosme, en droit, pardevant nous Estienne ROGOT notaire juré d'icelle, en la maison de Pierre DROUET au bourg de Danzé, d'avant midi, personnellement establi Pierre LANCELOT, laboureur, demeurant à Boisrond paroisse de Danzé. Lequel tant en son nom que comme se faisant fort de ses enfants a reconnu et confessé avoir vendu par héritage à Berthelot LANDRON tixier en toiles demeurant audict lieu en ladicte paroisse pour au nom et comme curateur de Lou, Jacques et Guillaume les HUETS, enfants de deffunct Simon HUET et Guillemine GAILLARD, leur père et mère, pour eux leurs hoirs et ayant cause, c'est à savoir : ce qui peut appartenir audit LANCELOT à cause de ses dits enfants, en une chambre de maison à cheminée et basse cour situés près le bourg de Danzé, le reste de laquelle chambre de maison à cheminée et basse cour devant appartient auxdicts Lou, Jacques et Guillaume Les HUETS.... par ledict LANCELOT audict nom, avec l'issue de la cour de ladicte maison et basse cour. Tenues les dictes choses de Monsieur Le Cellerier de l'Abbaye de la Saincte Trinité de Vendosme, sous le devoir de (en blanc dans le titre) cet acte et est faicte ceste présente vendition pour et moyennant le prix et la somme de quatre (illisible)....".

Les témoins de cet acte sont Jehan LANCELOT demeurant à Danzé et Gilles ...... moulinier, demeurant à Saint-Firmin-des-Près. Seul Jehan LANCELOT sait signer.

En Février 1606, nous trouvons un François LANCELOT, marchand à Danzé, époux de Jehanne AUGEREAU qui achète de Laurent GIRARD, laboureur à Danzé, neuf boisselées de terres aux Allets paroisse de Danzé.

Il est vraisemblable que Pierre LANCELOT qui vivait en 1591 était le père, veuf à cette date, de François et de Jehan LANCELOT, tous deux marchands à Danzé.

Nous ne savons rien d'autre de ce Pierre LANCELOT qui vivait dans la deuxième moitié du seizième siècle, ni de François LANCELOT. Il est cependant intéressant de noter que c'est l'ancêtre le plus éloigné de la famille LEMAIGNEN, dont nous ayons des traces sur des titres de propriétés.

M. de SAINT VENANT dans son dictionnaire (verbo "La Henrière"), indique qu'il existait en 1607 un Jehan LANCELOT héritier de Jehan FOUSCHER et de Anne AUGUEREAU, et en 1643 une Jeanne LANCELOT épouse de Pierre NEILZ, marchand à Vendôme.

Mais nous sommes mieux renseignés en ce qui concerne son fils Jehan LANCELOT qui était marchant à Danzé en 1614.

Le 06 Avril 1638, il achète, pardevant François FOUQUET, notaire à la Baronnerie de Mondoubleau, deux boisselées de terre aux Paillarderies, paroisse de Danzé, appartenant à Françoise HUET, veuve de Simon..... demeurant à Danzé et des Dames HUET demeurant au Plessis, paroisse de Crucheray en vertu de la procuration qu'elles lui ont données par acte de Me GIRAULT, notaire à Villeromain le 04 Avril précédent.

Le 05 Avril 1604, Anthoine HUET, laboureur à Danzé et Marie GAILLARD, sa femme, sans doute parents des HUETS, comparants à cet acte et à celui du 28 Mars 1591 sus énoncé, avaient vendu à une Mathurin HUET de Danzé, dix boisselées de terre à la corde et mesure de Vendôme situées à Danzé). Le 03 Décembre 1642, il achète devant Thomas BRILLARD, notaire à Danzé, de François LE BRETON, notaire et tabellion à Vendôme des terres à Danzé et le 27 Novembre 1651 de Charles GUINEBAULT, laboureur à Danzé et Jeanne TALBOT, sa femme, d'autres terres à d'Anzé.

Il participe au partage des successions BRILLARD-PILLON du 12 Mars 1651 (voir ci-après famille BRILLARD) en qualité de père et tuteur de son fils Jehan, à cause de Renée BRILLARD sa défunte épouse.

Le 10 Juin 1655, il achète de ...... JACQUEMIN, veuve de Mathurin TALBOT, demeurant à la Pierre, paroisse de Danzé, en son nom et comme tutrice naturelle de Julienne TALBOT sa fille, et de François POUTHOIR et Anne TALBOT sa femme demeurant aux Petites Allées, paroisse de Danzé et de Mathurin TALBOT, laboureur, demeurant au Marchais Rond, paroisse de Danzé, une portion de corps de logis aux Saulettes, paroisse de Danzé, joignant d'un côté veuve MELOT et Charles GUINEBAULT et environ 35 boisselées de terre.

Il est décédé entre cette dernière date et le 23 Mars 1658.

Nous ignorons quelle était la nature du commerce qu'il exerçait. Nous verrons que de nombreux membres de ces familles étaient qualifiés de "Marchand" ou de laboureur sans qu'il soit fourni aucune indication sur la nature exacte de leur commerce.

De son mariage avec Jehanne AUGEREAU, Jehan LANCELOT eut trois enfants : Pierre, Thomas et Jehan et peut-être Toussaint, curé de Danzé en 1644 puis à Pezou en 1658 (à moins que ce dernier ne soit son frère).

 

A - Pierre LANCELOT

On ignore la profession et le domicile de Pierre LANCELOT ; il était marié à Perrine MELOT (voir famille MELOT ci-après). Il est décédé avant le 17 Octobre 1637, laissant un fils mineur : François LANCELOT (partage MELOT du 17 Octobre 1637), dont on ne sait rien, et sans doute décédé célibataire car il ne figure pas au nombre des héritiers de Jehan LANCELOT.

 

B - Thomas LANCELOT

Thomas LANCELOT était marchand et laboureur à Danzé. Il était marié à Anne BRILLARD (voir famille BRILLARD ci-après). Il est décédé le 10 Juillet 1663 (acte de renonciation à communauté de 25 Juillet 1663) laissant sa veuve et plusieurs filles : Anne, épouse HOUSSET ; Renée, épouse de Thomas MICHON ; nous ignorons les prénoms des autres. (Voir requête du 26 Janvier 1682). Elles étaient encore mineures le 28 Février 1675.

Il possédait des biens sur la paroisse de Chauvigny.

En 1647, il intente un procès à Marie SALLIER, veuve de Jehan Julien JUMEAU, propriétaire d'un pré à Bourgneuf, paroisse de Danzé, clos d'une haie dans laquelle se trouvaient deux ormeaux que la veuve JUMEAU fit abattre par son fils Mathurin JUMEAU. Thomas LANCELOT, propriétaire d'une terre contiguë dépendant de la ferme du bourg à Danzé, revendique la propriété de ces ormeaux. Il en résulte une procédure qui s'échelonne sur les années 1647 et 1648 dont nous sont parvenues plus de trente pièces de rapports, assignations, auditions de témoins, enquêtes, contredits, etc.....

Le 04 Juillet 1650, il reconnaît devoir à Jacques VIBRAY, marchand à Vendôme, 90 livres tournois pour vente et livraison de huit moutons, lignages, une vache et un porc rouge.

Le 31 Janvier 1653, pardevant Thomas BRILLARD, notaire à Danzé, Thomas LANCELOT, laboureur et Anne BRILLARD, sa femme, vendent à Messire Françoise MELOT, prêtre curé à Danzé une pièce de terre de vingt boisselées à Danzé, moyennant 100 livres tournois à raison de 100 sols la boisselée.

Le 12 Mars 1654, il achète un petit clos de terre appelé le Puisard, appartenant à Toussaint BARRE, marchand boucher à Danzé, époux de Mathurine RAGOT, toujours par acte de Thomas BRILLARD qui recevra presque tous les actes ci-après.

Le 12 Avril 1656, Thomas LANCELOT, marchand, et Anne BRILLARD son épouse vendent à Jean BRETON, laboureur, demeurant au Bois ....... paroisse de Danzé, époux d'Anne TUILLIER, une boisselée et demie de terre plantée en vigne au clos de la Croix à Azé.

"La vendition faite pour et moyennant le prix et la somme de 12 livres tournois, de laquelle somme a été payée comptant par le moyen de ce que l'acquéreur a tenu quitte ledit LANCELOT de la somme de cent dix sept sols trois deniers pour sel de gabelle quy luy debvait pour la moitié de son taux de l'année dernière dont ledit acquéreur était l'année dernière collecteur de la paroisse de Danzé, et le surplus que ledit acquéreur a promis payer au vendeur dans dimanche prochain venant".

Dès lors, Thomas LANCELOT et sa femme vendent les terres et corps de logis dont ils sont propriétaires, y compris ceux qui ont été attribués à sa femme dans le partage de succession de ses parents, à Mathurin BRILLARD et Magdeleine PILLON du 12 Mars 1651 (voir famille BRILLARD).

Ces ventes sont les suivantes :

Du 25 juillet 1656, par acte de Thomas BRILLARD, notaire à Danzé, à Jean DENIAU, sagetier (?) demeurant à Danzé, époux de Mathurine DUTIOCHE (?) cinq boisselées de terre labourables en guéret au Pipain, quatre boisselées au Poirier Rouge et une autre pièce en guéret au même lieu ainsi que six boisselées aux Savoins (?) "ladite vendition faite et moyennant la somme de cent huit livres tournois en raison de six livres tournois pour chacune boisselée, le tout à la mesure et corde de Vendôme".

Du 06 Juillet 1656 à Toussaint DENIAU, laboureur, demeurant aux Bigotteries et Jeanne LEBLOY (nommé BLOY dans d'autres titres), sa femme, le bout d'une grange aux Bigotteries moyennant 47 livres tournois.

Du 03 Septembre 1656, à Me Jacques BOURGOGNE, procureur du Roy en la maréchaussée de Vendôme et notaire des finances de son Altesse Royale demeurant à Vendôme (sans doute ancêtre des BOURGOGNE, avoués à Vendôme au XIXe siècle), 18 boisselées de bois aux Bigotteries provenant du partage de la succession BRILLARD du 12 Mars 1651.

Le 10 Mai 1657, il vend à Jehan LANCELOT, marchand, demeurant à Danzé, 21 boisselées de terre moyennant le prix de "six vingt trois livres tournois" compensé en partie par une obligation de 12 livres tournois souscrite par lui au profit dudit Jehann LANCELOT, le ...... Juin 1653. Cette vente est alors qualifiée d'acte gracieux.

Cette obligation n'est pas la seule souscrite par Thomas LANCELOT. On en trouve une première de 67 livres souscrite le 14 Juin 1651 au profit de Toussaint LANCELOT, prêtre à Pezou, qui était peut-être son oncle ou son frère, une autre du 14 Février 1656 (illisible).

Le 22 Mai 1658, pardevant DUGUE, notaire et tabellion à Vendôme, il reconnaît devoir à Toussaint LANCELOT le jeune, prêtre demeurant à Pezou, la somme de onze livres tournois avec constitution de rente sur un corps de logis à Danzé et diverses boisselées de terre.

Et les ventes continuent presque chaque année.

Le 14 Mai 1658 (illisible).

Le 30 Mars 1659, à Urbain GILOUZE (?), laboureur à la Haie Bergerie, paroisse d'Azé et Madeleine DENIAU, sa femme, de 7 boisselées de terre.

Le 04 Septembre 1659, à Toussaint DENIAU et Jehanne BLOY, sa femme, d'une maison, jardin et fosse aux Bigotteries.

Le 06 Mai 1660, pardevant Pierre MOREAU, notaire à la Chastellenie de Lisle, à Jehan LANCELOT, procureur au siège de Vendôme, demeurant à Vendôme, de "deux boisselées de terre en nature de pré, à croître ou diminuer à la corde et mesure de Vendôme, situées au lieu appelées les Noues" paroisse de Danzé, moyennant 14 livres tournois.

On peut se demander si ce Jehan LANCELOT, procureur, est le même que Jehan LANCELOT qui achète le 10 Mai 1657 en compensation de sa créance de Juin 1653, alors qualifié de marchand ? Ou bien ce dernier était-il le père du procureur ?

Le 04 Janvier 1662, Thomas LANCELOT, qualifié marchand, alors que dans plusieurs des actes précédents il était qualifié de laboureur, vend à Messire François MELOT, prêtre curé de Danzé, 9 boisselées de terre labourable, dépendant du fief des Bigotteries, moyennant 85 livres.

Et encore ces ventes ne sont-elles pas les seules, car dans un acte d'acceptation bénéficiaire par sa veuve, du 30 Octobre 1683, qui sera analysé plus loin, sont énoncées toutes les ventes faites par les époux LANCELOT, comprenant celles ci-dessus, dont nous avons les titres, mais plusieurs autres, notamment sous seing privé.

L'une de ces ventes, du 10 Mai 1657, pardevant Thomas BRILLARD, notaire à Danzé mérite d'être partiellement reproduite. Par cet acte les époux LANCELOT vendent à Jehan LANCELOT, marchand à Danzé :

"Une pièce de terre labourable étant ensemencée en avoine contenant 14 boisselées à la corde et mesure de Vendôme située aux Chasteaux paroisse de Danzé, joignant .... etc.... Item une autre pièce de terre labourable et noue située au lieu appelé des Noues..... dite paroisse, ladite terre ensemencée en bled meteil, ledit bled avoine réservé par ledit vendeur avec la paille d'iceux, contenant icelle 5 boisselées aussi à la corde et mesure de Vendôme, à croître ou à diminuer au fur et à raison de la vendition ci-après, à la charge desdits vendeurs de bailler et livrer audit acquéreur un boisseau pour chacune boisselée, mesure de Vendôme, tant bled que avoir au fur et à raison de ce qui est en espérance de moisson, au jour de Toussaint prochain venant, suivant l'arpentage qui en sera fait par lesdits vendeurs dans 15 jours prochain venant ..... Tenues lesdites choses du fief et Seigneurerie des Bigotteries .... sous le devoir et hypothèque de trois sols quatre deniers que doit le Chasteau à la Seigneurie des Couetteries .... le tout payable au jour de la Vigille de Saint Martin d'huic ..... Item une autre pièce de terre labourable contenant quatre boisselées et demi ..... joignant d'un côté Messire François MELOT, curé de cette dite paroisse .... tenue de la terre à Seigneurie du Bouchet Touteville .... etc....".

"La vendition faite pour et moyennant le prix et somme de six vingt trois livres tournois ; sur laquelle somme a été payée comptant par ledit acquéreur auxdits vendeurs et notre présence et vue de nous, savoir la somme de 70 livres tournois en argent et 41 livres tournois pour demeurer quitte de pareille somme que lesdits vendeurs (illisible ....) acquéreur oblige de pareille somme tant par obligation que promesse qui ont été présentement remises entre les mains desdits vendeurs pour ladite obligation qui est de douze livres qui demeure entre les mains audit acquéreur pour servir d'hypothèque.... et le surplus sera payé par ledit acquéreur auxdits vendeurs après l'arpentage fait plus ou moins en faire se doit le tout conformément audit arpentage".

"Le présent contrat néanmoins fait à condition de grâce réservée par lesdits vendeurs pour le temps de .......aud'huy, et à eux accordés par ledit acquéreur pour le temps dont nous les avons jugé de leur consentement (illisible) et.... du vin de marché, faisant la somme de 6 livres 3 sols tournois dépensés, et le surplus payé à la fille desdits vendeurs dont quitte pour ce regard.... jugé, fait et passé en notre Etude audit Danzé en présence de Thomas BRILLARD, chirurgien et Jacques DHERBILLY demeurant audit Danzé. Ladite Anne BRILLARD et DHERBILLY nous ont déclaré ne savoir signer de ce faire interpelles" etc....

On ne peut pas dire que ce contrat soit rédigé dans le français du grand siècle.

Le 04 Janvier 1662, Thomas LANCELOT et sa femme avaient vendu, nous l'avons vu, une de leur dernière pièce de terre.

Le 25 Juillet 1663, Anne BRILLARD, veuve de Thomas LANCELOT expose "que depuis quinze jours déjà son mari est décédé, à la communauté duquel elle a du renoncer et de fait y renonce par les présentes, jurant et affirmant par serment de ce priée, n'avoir disposé d'aucun meuble de leur communauté .... etc...".

Thomas LANCELOT est donc décédé le 10 Juillet 1663, ayant dilapidé tous ses biens et ceux de sa femme.

Dans un document du 30 Octobre 1683, après le décès de la veuve LANCELOT, il est exposé qu'elle avait renoncé à la communauté d'entre elle et son mari "comme lui étant plus onéreuse que profitable attendu le mauvais ménage dudit défunt qui avait contracté grande quantité de dettes et consommé la plus grande partie de ses biens de lui et de ladite BRILLARD".

Puis il est dit que la veuve LANCELOT ayant réfléchi "comme une bonne mère, ne voulut pas pousser plus outre" et demanda que ses enfants acceptent la succession de leur père sous bénéfice d'inventaire.

Anne BRILLARD, veuve de Thomas LANCELOT dut décéder peu avant le 08 Novembre 1681 car à cette date une "lettre de chancellerie" accorde le bénéfice d'inventaire à Renée LANCELOT, sa fille, épouse de Thomas MICHON, car tel est notre plaisir. Donné à paris le 08 Novembre de l'an de grâce 1681 de notre règne le trente neuf".

La succession de la veuve LANCELOT ne devait pas être plus avantageuse que celle de son mari car des pièces de procédure du 12 Janvier 1682, et 20 Avril suivant intentée par Renée LANCELOT et Thomas MICHON son mari, héritière sous bénéfice d'inventaire de Anne BILLARD sa mère, contre des dames religieuses Ursulines de Vendôme, exposent "que la succession de la défunte BRILLARD leur était plus onéreuse que profitable".

Le 26 Janvier 1682 :

"Thomas MICHON, mari de Renée LANCELOT, fille de défunt Thomas LANCELOT et de Anne BRILLARD ses père et mère.... remontre que lui et sadite femme ont renoncé à la succession dudit deffunct LANCELOT et se sont seulement porté héritiers souls bénéffice d'inventaire de ladite deffunte BRILLARD. Et comme ils ont quelque prétention sur la succession dudict deffunt, à laquelle leurs aultres soeurs enfants dudit deffunt ont aussy renoncé en telle sorte qu'elle demeure vaccante, il requiert qu'il soit nommé et pourvu d'un curateur à ladite succession vaccante contre lequel il puisse diriger son action à laquelle fin il nomme la personne de Jean RAPICOST, laboureur, de la paroisse de Chauvigny". (Il s'agit plutôt de Jean RAPICAULT - Voir 30.10.1683).

Nous apprenons par cette requête que Thomas LANCELOT et Anne BRILLARD avait au moins trois filles, mais nous ne connaissons que celle prénommées Anne et Renée, dont nous parlerons plus loin.

(Famille BORDIER-MICHON et famille VALLERY-HOUSSET).

 

C - Jehan LANCELOT

Jehan LANCELOT était l'aîné des enfants de Jehan LANCELOT et de Jehanne AUGEREAU.

Nous ne connaissons pas la date de sa naissance. Nous savons seulement qu'il était mineur lors du partage BRILLARD du 12 Mars 1651 et qu'à cette date il était déjà veuf de Renée BRILLARD, soeur d'Anne BRILLARD épouse de son frère Thomas (voir famille BRILLARD), mais il était majeur le 23 Mars 1658 date à laquelle il présente une requête au Bailly de Vendôme contre Jean FOUQUET pour borner une champ.

Le 25 Janvier 1662 il achète de Denys CHEVAYE, laboureur à la Ville-aux-Clerc, époux d'Anne PONTHOIRE, 39 boisselées de terre à Danzé.

Dans cet acte, il est qualifié, comme dans tous les actes suivants le concernant : "Procureur au Siège de Vendôme".

On peut se demander comment le fils de Jehan LANCELOT, petit marchand à Danzé, encore que ce dernier possédât certains biens, a pu acheter la charge de procureur à Vendôme. Il avait alors 30 ou 35 ans. Peut-être est-ce grâce à la fortune de sa femme ? Quoiqu'il en soit on ne manquera pas de noter la différence de situation entre lui et son frère Thomas à qui il fait plusieurs prêts pour essayer de remédier à son impécuniosité.

Le 29 Mai 1666, il achète par acte devant Mathurin TASSINEAU, notaire et tabellion royal à Blois, de Jeanne, Elisabeth et Marie GILLOT filles majeures, demeurant à Blois, paroisse Saint Solemmes et de Judith GILLOT leur soeur majeure demeurant aussi à Blois, un corps de logis, 22 boisselées, 3 septéres et demi de terre labourable, un clos de terre d'une boisselée à la Douardière paroisse de Danzé, 10 boisselées de terre aux Sionniaires paroisse de Danzé, 8 boisselées de terre au même endroit, 38 boisselées de terre à Piergrandin (?), d'autres boisselées à la Douardière, 9 boisselées à Pionne (?), 7 boisselées au Clos de ..... (?) dépendant de la succession de Jeanne GAUSSANT veuve de Isaac MORIN, bourgeois à Blois.

Lors de cette vente il demeure à "Dansay" ; le notaire de Blois n'était pas très fixé sur l'orthographe de ce bourg.

On peut se demander si les venderesses n'étaient pas adeptes de la "religion prétendue réformée", en raison de leurs prénoms et de celui de leur père, et si, de ce fait, elles n'auraient pas été contraintes de vendre en raison de la révocation de l'Edit de Nantes ?

Cette vente est consentie moyennant le prix de mille trois cent livres tournois et trente livres tournois de "vin de marché" qui seul fut payé comptant. Les treize cents livres de prix principal étaient stipulées payables "dans deux années d'huy prochain avec le profit d'intérêts à raison d'un sol par livre à courir d'aujourd'huy jusqu'au paiement". Les venderesses durent intenter une procédure contre les héritiers de Jehan LANCELOT, qui sera relatée plus loin, pour se faire payer.

On peut même se demander s'il n'a pas dû emprunter pour envisager le paiement de ces 1.300 livres, ou pour toute autre cause, car le 24 Octobre 1666, François DAUDU, beau-père de son neveu par alliance René MELOT s'oblige avec lui au paiement d'une rente de 15 livres tournois constituée au profit des religieuses du Calvaire à Vendôme.

Jehan LANCELOT décéda avant le 17 Novembre 1671, date à laquelle, on le verra plus loin, est rendu un jugement en paiement du prix de la vente du 29 Mai 1666, contre ses héritiers.

Il avait seulement tout au plus 44 ans lors de son décès, peut-être seulement 40 ans. Il avait perdu sa femme étant encore mineur, et ne laissait pas d'enfant.

Il est difficile de savoir quels étaient ses héritiers en raison de la complexité des règles de dévolution successorale dans l'ancien droit coutumier, notamment dans la coutume d'Anjou dont il relevait.

Marcel PLANIOL fait allusion à cette complexité dans son "Traité élémentaire de Droit Civil", édition 1905, Tome III page 339.

Les acquêts suivaient le sort des meubles et étaient dévolus aux plus proches parents. C'est pourquoi, on trouve presque toujours un partage des meubles simultanément à un partage des immeubles. Mais dans le cas Jehan LANCELOT nous n'avons pas ce partage des meubles.

Les biens immobiliers propres, à défaut d'enfant, étaient dévolus à la famille dont ils provenaient, par application de la règle PATERNA PATERNIS ; MATERNA MATERNIS.

Or; plusieurs années après le décès de Jean LANCELOT le 15 Janvier 1674, il fut établi un partage de ses immeubles entre ses héritiers du "côté maternel" ; en fait il s'agit des parents de sa femme, les BRILLARD, dont provenaient sans doute ces biens ; mais les BRILLARD n'étaient nullement les ancêtres maternels de Jean LANCELOT ; mystère de la dévolution successorale de l'ancien régime !

Ce partage du 15 Janvier 1674 mentionne au surplus qu'ils sont faits "suivant et conformément aux partages cy devant faits entre les héritiers dudit deffunct du costé paternel et ceulx du costé maternel", ce qui concernerait le partage des meubles et acquêts.

Aux termes de ce partage qui a pu être entièrement reproduit car nous en avons deux exemplaires, ce qui en a facilité la lecture, Jehan LANCELOT laissait comme héritiers de côté maternel :

1°) Anne BRILLARD, veuve de Thomas LANCELOT et ses enfants (2ème lot).

2°) Marin DENIAU, Marie DENIAU épouse de Mathurin PLESSIER et Toussaint DENIAU époux de Jehanne LE BLOY, tous enfants de Simon DENIAU et de Magdeleine BRILLARD son épouse prédécédée (1er lot).

3°) Pierre BRILLARD (4ème lot).

4°) Thomas BRILLARD (6ème lot).

5°) Pierre FOUQUET, François FOUQUET, Jehanne FOUQUET, les enfants de François DAUVERGNE, et Françoise FOUQUET épouse de Louis RENARD, enfants de François FOUQUET et de Jehanne BRILLARD (3ème lot).

6°) René MELOT, Julienne (ou Jeanne) MELOT, épouse de René MELOT, et leurs enfants, et Cézard MELOT, enfants de René MELOT et de Marie BRILLARD (5ème lot).

C'est à dire, tous les BRILLARD ou leurs descendants alors vivants. (Voir famille BRILLARD ci-après).

Il semble bien que François DAUVERGNE était le mari de Jehanne FOUQUET (voir ci-après : C- Jehanne BRILLARD).

Mais du côté paternel (d'après la coutume d'Anjou) Jehan LANCELOT laissait comme héritiers, outre Cézard MELOT, Julienne (ou Jeanne) MELOT, et René MELOT, déjà nommé comme étant enfants de Marie BRILLARD, Jean MELOT, sa soeur épouse de Charles BALLON, et une autre soeur épouse de Pierre PEZIERE (tous trois enfants de Jacques MELOT le jeune). Tous ceux-ci sont en effet mis en cause en 1671 et 1682 dans la procédure de recouvrement du prix de la vente du 29 Mai 1666.

Mais d'après la généalogie que nous connaissons de la famille MELOT (voir ci-après famille MELOT), Jehan LANCELOT devait encore avoir pour héritiers, de ce côté : François MELOT, curé de Danzé, le ou les enfants de Magdeleine MELOT, une MELOT épouse PASQUIER, Judith MELOT et Julienne MELOT (ou les enfants inconnus de ces trois dernières).

Ce partage du 15 Janvier 1674 pose d'ailleurs un problème de date. Il débute ainsi : "Le quinzième jour de Janvier 1674 pardevant nous Jehan BEAUSSERON, notaire en Vendômois ...." ; puis, après la désignation détaillée des six lots, et l'énoncé des conditions accessoires du partage, ont lit : "Le tout conformément aux deux premiers partages faits entre lesdits héritiers dudit deffunct LANCELOT, tant du côté paternel que maternel, sans y déroger, faits et arrêtés ce jourd'huy troisième jour de Janvier 1675, etc...." sur la deuxième copie de ce partage cette dernière date est au surplus surchargée. un peu plus loin il est dit que ce partage est fait en exécution d'un "jugement rendu pour ce faire de Monsieur "le Bailly du Vendômois.... en date du 18 Décembre 1674, ce partage ne peut être que du 03 Janvier 1675 ou du 15 Janvier 1675 ; mais quelle est la bonne date ? Sans doute en écrivant "15 Janvier 1674" le notaire se croyait-il encore en 1674.

Ce qui confirme d'ailleurs, que ce partage a bien dû être fait en 1675 et non en 1674, c'est que la "Choisie" qui y fait suite est datée du 28 Février 1675, devant "Louis MARTIN, notaire en la baronnerie de Mondoubleau, pour l'absence de Me Jean BEAUSSERON, notaire à Vendôme".

Ce partage comporte encore deux anomalies inexplicables.

La femme de René DAUVERGNE est dénommée Jeanne au début du mariage ; puis Julienne dans la choisie, avec la précision qu'elle est décédée ("René DAUVERGNE mai de deffunte Julienne MELOT").

La "Choisie" se réfère à la coutume de Chartres, alors que les biens sont incontestablement dans le ressort de la coutume d'Anjou.

Il est cependant intéressant de relever les signatures autographes des copartageants sur l'un des exemplaires ; celui-ci n'est-il pas la minute authentique, distraite du Minutier de Me Jean BEAUSSERON ? Cependant il est écrit sur parchemin, ce qui n'était pas d'usage pour les minutes des notaires.

Les biens ainsi partagés dépendant de la succession de Jehan LANCELOT comprennent un corps de logis à Danzé, sans précision du lieu-dit, divisé entre les 6 lots, et de nombreuses boisselées de terre, pré, bois et vignes sur Danzé, et certaines sur Epuisay et Azé, représentant au total environ 55 hectares. Les principaux lieux-dits cités sont : la Douardière, la Haie Bergerie, le Clos du Houx, la Borde, la Boulatière (Epuisay), les Marchais, le Moulin à Vent, lieux-dits toujours dénommés à l'époque actuelle.

 

 

Poursuites en paiement du prix de la vente du 29 Mai 1666

 

Les 1.300 livres tournois formant le prix de la vente du 29 Mai 1666 stipulées payables "dans deux années d'huy prochain" n'étaient toujours pas payées au décès de Jehan LANCELOT. Aussi les venderesses, Jeanne, Judith et Marie GILLOT assignèrent-ellesses héritiers en paiement et obtinrent du Bailly de Vendôme le 17 Novembre 1671 un jugement condamnant au paiement de cette somme :

- Jean MELOT, marchand.

- Jacques PEZIERE.

- Charles BALLON et sa femme.

- Me Thomas BRILLARD.

- Me Pierre BRILLARD.

- François et Pierre FOUQUET.

- La veuve Thomas LANCELOT.

- La veuve DAUVERGNE "du bourg d'Azé" (c'est sans doute Jehanne FOUQUET).

La signification de ce jugement, avec la formule exécutoire n'ayant eu aucun effet, un nouveau jugement est rendu par le Bailly de Vendôme, onze ans après, le 16 Mai 1682, visant expressément le jugement du 17 Novembre 1671. Ce deuxième jugement est signifié le 23 Mai 1682 aux mêmes héritiers que ci-dessus, et le 26 Mai, en outre, à Thomas MICHON à cause de sa femme héritière de deffuncte Anne BRILLARD, veuve de Thomas LANCELOT. Les exploits d'assignation sont "donné au Pallais de Vendôme pardevant nous Jean de REMILLY, Seigneur de la Champignière et du Coudray, conseiller du Roy et de son ..... civil et criminel du pays Duché de Vendômois". Sur un titre du 25 Juin 1656 ont lit : "Jean de REMILLY, Seigneur de la Champignière et du Coudray, conseiller de Monseigneur le Duc, Bailly Juge ordinaire Civil et Criminel du pays de Vendômois.".

Ces assignations semblent prouver que Jean MELOT, Charles BALLON, et Jacques PEZIERE étaient héritiers de Jehan MELOT (par leur épouses en ce qui concerne les deux derniers) ils ne pouvaient l'être qu'en leur qualité d'enfants de Jacques MELOT le Jeune alors décédé. (Ils ne peuvent pas être les enfants de René MELOT et de Marie BRILLARD, car dans ce cas, ils auraient été parties du partage de 1675, avec Cézard MELOT , la femme DAUVERGNE et René MELOT fils). Toutefois, le doute subsiste en ce qui concerne Jacques PEZIERE ; nous connaissons un Jacques PEZIERE qui était époux de Marie LENOIR (voir ci-après famille MELOT) ; il semble qu'il était le fils de Pierre PEZIERE ; sans doute ce dernier était-il marié à une MELOT, fille de Jacques MELOT le Jeune, tous deux décédés avant 1671 ? Ce n'est qu'une hypothèse plausible mais non vérifiée.

On peut aussi se demander pourquoi l'assignation de 1682 a été faite à la femme de Thomas MICHON (Renée LANCELOT), et ne l'a pas été faite aux deux autres filles de Thomas LANCELOT et d'Anne BRILLARD ?

Pourquoi cette procédure n'a-t-elle pas été signifiée non plus aux autres héritiers de Jehan LANCELOT (les DENYAU, François LANCELOT, Magdeleine MELOT ou ses enfants, Jacques PASQUIER-MELOT, Judith MELOT et Julienne MELOT, ni Cézard MELOT et René MELOT ?). Peut-être ces assignations ne nous ont-elles pas été transmises ?

Rappelons que c'est sans doute à l'occasion de cette procédure que Thomas MICHON présenta le 26 Janvier 1682 une requête tendant à faire nommer Jean RAPICOST, curateur à la succession vacante de Thomas LANCELOT (voir ci-dessus à la fin de l'étude sur ce dernier).

On ignore si le prix de cette vente fut jamais payé. Comme on le sait, Jehan LANCELOT n'eut pas d'enfants. Nous retrouverons les descendants de sa famille dans les familles BRILLARD et MELOT.

LA FAMILLE BRILLARD

 

On a vu que Thomas LANCELOT avait épousé Anne BRILLARD et que Jehan LANCELOT avait épousé Renée BRILLARD. C'étaient les filles de Mathurin BRILLARD, notaire à Danzé et de Magdeleine PILON (ou PILLON).

En Février 1606, Mathurin BRILLARD, notaire et .... (?) demeurant à Danzé, époux de Magdeleine PILLON, achète de Françoise LANCELOT, marchand, demeurant au bourg de Danzé (sans doute fils de Pierre LANCELOT) la moitié d'un corps de logis composé de deux chambres dans l'une desquelles il y a cheminée, à Danzé.

Le 03 Janvier 1610, Robert DROUET, laboureur à Villemalin, paroisse de Crucheray, vend avec promesse de ratification par Jehanne LECONTE, sa femme, à Mathurin BRILLARD, qualifié alors de marchand, demeurant à Danzé, époux de Magdeleine PILLON "huit boisselées de terres plantées en bois taillis à la corde et mesure de Vendôme situées à la Taille de la Fontaine, paroisse de Danzé, joignant d'un côté et d'un bout à Jehan DROUET.... Trois boisselées de terre labourable situées au Boulleau de cette paroisse, joignant d'un côté à Thomas BRILLARD ..... d'un bout à Simon DAUVERGNE ....".

 

Mathurin BRILLARD et Magdeleine PILLON décèdent avant le Dimanche 12 Mars 1651 date à laquelle il est procédé, après midi, pardevant Simon BROSSET le jeune notaire et arpenteur en la Cour de Lisle et suivant la permission de Monseigneur le Bailly du Vendômois ou Monsieur son Lieutenant en date du même jour, au partage de leurs successions en sept lots, entre :

1°) Magdeleine BRILLARD, veuve de feu Simon DENYAU, fille aînée.

2°) Me Thomas BRILLARD, son frère.

3°) Toussaint DENYAU, fils de feu Simon DENYAU (pour assister sa mère).

4°) Jehan LANCELOT, père et tuteur de Jehan LANCELOT, son fils à cause de deffuncte Renée BRILLARD, sa femme.

5°) Maître François FOUQUET aussi notaire à cause de Jehanne BRILLARD, sa femme.

6°) Maître René MELOT, aussi père et tuteur des enfants de lui et de deffuncte Marie BRILLARD sa deffuncte femme.

7°) Honneste personne Thomas LANCELOT à cause d'Anne BRILLARD, sa femme.

8°) Maître Pierre BRILLARD.

 

Ce partage concernait "des logis et bâtiments, terres labourables et non labourables, prés, pastures et bois taillis". Le troisième lot (seul désigné dans ce partage) qui comprenait des bâtiments aux Bigotteries, paroisse de Danzé et environ 90 boisselées à cause d'Anne BRILLARD, sa femme.

 

Les époux BRILLARD-PILLON laissaient donc sept enfants. Parmi eux, nous avons déjà rencontré Renée BRILLARD, épouse de Jehan LANCELOT, décédée très jeune sans enfant.

Nous ne savons rien de Thomas BRILLARD, si ce n'est qu'il était notaire à Danzé, comme son père, (il était encore notaire le 26 Octobre 1664) ni de Pierre BRILLARD, dont on ignore la profession et dont on sait seulement qu'il habitait Danzé, qu'il était marié à Marie ESNAULT, et qu'il vendit à Jehan LANCELOT le 16 Avril 1653, pardevant son frère Thomas BRILLARD, une pièce de terre aux Bigotteries, paroisse de Danzé.

Marie BRILLARD épouse de René MELOT est décédée avant le 12 Mars 1651 (voir famille MELOT).

Mais nous avons plus de renseignements sur les trois autres enfants : Anne, Magdeleine et Jehanne.

 

 

 

A - Anne BRILLARD

Elle avait épousé Thomas LANCELOT. Elle est décédée peu avant le 08 Novembre 1681 laissant plusieurs filles mineurs, le 28 Février 1675, parmi lesquelles nous connaissons Anne, épouse HOUSSET et Renée, épouse MICHON (voir ci-dessus "Thomas LANCELOT").

 

B - Magdeleine BRILLARD

C'était la fille aînée. Elle avait épousé Simon DENYAU, dont elle était veuve lors du partage du 12 Mars 1651. Elle était décédée lors du partage de Jehan LANCELOT, c'est à dire avant le 15 Janvier 1674 (ou plutôt 1675).

Elle eut au moins trois enfants :

1°) Toussaint DENYAU, fils aîné, laboureur, demeurant aux Bigotteries, paroisse de Danzé, époux de Jeanne LEBLOY qui achetait de Thomas LANCELOT le 06 Juillet 1656, un bout de grange aux Bigotteries, et le 04 Septembre 1659, du même Thomas LANCELOT, une maison, un jardin et une fosse aux Bigotteries. Il est décédé avant le 15 Janvier 1675 laissant un fils prénommé également Toussaint, âgé de 21 à 22 ans à cette date.

2°) Marie DENYAU, épouse de Mathurin PLESSIER, laboureur à la Haye Bergerie, paroisse d'Azé. Il se faisait fort "des autres frères et soeurs" de sa femme lors du partage du 15 Janvier 1674 (ou 1675).

3°) Marin DENYAU, laboureur à la Bretonnerie, paroisse de Romilly, lors du même partage. Il avait un fils, André DENYAU, marguillier de l'église de Danzé, curateur le 02 Juillet 1708 des enfants mineurs de Thomas MICHON et de Renée LANCELOT (Anne, Jeanne et Madeleine).

Magdeleine BRILLARD, épouse de Simon DENYAU eut sans doute encore deux autres enfants :

1°) Madeleine DENYAU, épouse de Urbain GILOUZE (?), laboureur à la Haye Bergerie qui achète sept boisselées de terre à Thomas LANCELOT le 30 Mars 1659.

2°) Jean DENYAU, sagetier (?) à Danzé qui achète également des terres à Thomas LANCELOT le 25 Juin 1656.

 

En 1978, il existait à Danzé des familles BRILLARD et DENIAU. Il serait intéressant de savoir si ce sont des descendants de ceux qui y vivaient au XVIIIe siècle.

 

C - Jehanne BRILLARD

Jehanne BRILLARD avait épousé Me François FOUQUET, notaire à la Barronnerie de Mondoubleau (voir vente du 06 Avril 1638) qui la représente lors du partage BRILLARD du 12 Mars 1651. Ils sont tous deux décédés avant le 17 Novembre 1671, puisqu'à cette date, ce sont leurs enfants "François et Pierre les FOUQUET" qui sont condamnés au paiement du prix de vente dû par la succession de Jehan LANCELOT.

Ils laissaient quatre enfants, ainsi qu'il résulte du partage du 15 Janvier 1674 de la succession de Jehan LANCELOT :

1°) Jeanne FOUQUET.

2°) Françoise FOUQUET, épouse de Louis RENARD.

3°) Pierre FOUQUET, notaire en la Cour de Vendôme, à Danzé (vente du 25 Janvier 1662). Il a exercé pendant au moins trente ans puisqu'il était encore notaire le 11 Avril 1691 (partage LE BRETON. Voir famille MELOT) et le 14 Avril 1694 (acte de cette date énoncé dans la pièce de procédure du 05 Mai 1725. Voir famille PEZIERE).

4°) François FOUQUET le jeune, marchand à Danzé, qui vivait encore le 26 Février 1699, date à laquelle il achetait pardevant Marin MAILLET, l'aîné, notaire à Azé, de Jean GUILLEMEAU, homme de peine demeurant à la Charmoise, paroisse d'Azé, deux boisselées de terre en jardin et une boisselée de vigne aux Saulettes, paroisse de Danzé.

On a vu que le partage du 15 Janvier 1674 cite les enfants FOUQUET, au même rang que les "enfant de François DAUVERGNE". Ce François DAUVERGNE doit être vraisemblablement le mari de Jeanne FOUQUET.

De ces quatre enfants, nous ne connaissons que les descendants de François FOUQUET le jeune, dont nous allons maintenant retracer l'histoire et celle de la famille PITARD.

LA FAMILLE FOUQUET

 

C'est un partage du 31 Mars 1727 qui nous donne la clef des généalogies des familles FOUQUET et PITARD.

"Partage en deux lots des biens immeubles demeurés de la succession de deffunt François DAUVERGNE vivant laboureur demeurant paroisse de Danzé qui lui étaient eschus de succession de deffunte Jullienne PITARD sa mère, qui appartiennent pour une moithié à Michel PITARD aussy laboureur, demeurant aux Solettes dite paroisse de Danzé, et l'autre moithié à chacuns de Claude BALLU, tailleur d'habit, demeurant audit lieu des Solettes, dite paroisse, au nom et comme mary de Jeanne FOUQUET, François FOUQUET aussy laboureur demeurant au bourg et paroisse de Naveil, en la maison de François BRAULT en quallité de domestique, et à Martin FOUQUET aussy laboureur demeurant audit lieu des Solettes, dite paroisse de Danzé ; ladite femme BALLU avec lesdits FOUQUET, enfants et héritiers de deffunte Louise PITARD leur mère qui estait soeur dudit PITARD, et en cette quallité héritiers par représentation de leur dite deffunte mère pour l'autre moithié dudit deffunt DAUVERGNE leur cousin germain et nepveu dudit PITARD susestably. Lesquels héritages ont été mis et divisés en deux lots et partagés par lesdits BALLU et FOUQUET auxdits noms, comme étant leur dite defunte mère plus aisnée que ledit PITARD, pour estre choissy par iceluy PITARD, suivant et au désir de la Coutume d'Anjou et au dedans de laquelle sont lesdits héritages assis et situés. Au fait desquels partages a esté procédé ainsy qu'il s'ensuit pardevant nous Marin MORILLET, notaire royal en résidant à Azé soussigné le trente et un dernier jour de Mars l'an mil sept cent vingt sept avant midy.

Premièrement pour le premier lot partagé, aura et appartiendra des ce jourd'huy à toujours mais, c'est à savoir une chambre à cheminée, four au pignon d'icelle, une antichambre dans ladite chambre servant d'écurie, grenier au dessus, cour, la moithié du jardin devant ladite chambre avec la moithié du jardin de derrière, le tout en un tenant situé à la Paillarderie paroisse dudit Danzé, joignant etc.....

Item la moithié de vingt boisselées de terre etc... sera celuy à qui echerra ledit pressent lot tenu et obligé de payer auxdits BALLU et FOUQUET auxdit noms, la somme de huit livres pour les frais de partage tant pour le temps qu'ils ont passé à faire lesdits partages, que pour la dépance faitte en procédant à iceux, payable dans quinze jours d'huy.

Second et dernier lot et partage, aura et luy appartiendra aussi de ce jourd'huy à toujours mais c'est à savoir, une grange, cour et la moithié du jardin devant etc......

....tous les héritages partagés .... que les parties ont estimé, valloir la somme de trois cents livres".

Suivent les conditions ordinaires du partage (paiement des droits seigneuriaux, obligation de prendre les biens tels qu'ils existent et de se souffrir les passages de la façon la moins dommageable, partage en deux des récoltes ensemencées, etc... Le second lot a été choisi par Michel PITARD et le premier est demeuré à BALLU et aux FOUQUET. Les parties, fors ledit PITARD ont déclaré ne savoir signer, mais les deux témoins ont signé. Les biens partagés représentent une superficie de 104 boisselées (5 H 34 CA).

Nous apprenons par ce partage qu'il existait en 1727 trois enfants FOUQUET :

1°) Jeanne FOUQUET, épouse de Claude BALLU, tailleur d'habits, demeurant aux Saulettes, paroisse de Danzé.

2°) Martin FOUQUET, laboureur aux Saulettes.

3°) François FOUQUET, laboureur domestique chez François BRAULT à Naveil.

Ils étaient les trois enfants de Louise PITARD, alors décédée, et d'un FOUQUET. Or, nous savons qu'il existait un François FOUQUET le jeune, marchand à Danzé, fils de Me François FOUQUET, notaire en la Baronnerie de Mondoubleau, qui achetait des terres aux Saulettes le 26 Février 1699. Il était le frère de Pierre FOUQUET et avait été mis en cause avec lui (Pierre et François les FOUQUET) pour le paiement du prix de vente dû par la succession de Jehan LANCELOT, le 17 Novembre 1671. Il était donc majeur à cette date et par conséquent il avait dû naître avant 1646. Il parait douteux qu'il soit le mari de Louise PITARD car cette dernière est décédée avant 1727 alors domestique à Naveil est décédé, on le verra plus loin, en 1764. Il est donc vraisemblable qu'il était né vers 1690-1700. S'il avait été le fils de François FOUQUET le jeune, son père aurait eu environ cinquante ans lors de sa naissance, ce qui est beaucoup.

Il parait beaucoup plus plausible de penser que François FOUQUET le jeune (fils de François FOUQUET, notaire à Mondoubleau) eut un fils appelé lui aussi François FOUQUET le jeune dont nous trouvons la trace dans un aveu du 14 Mai 1721 pour une terre aux Bigotteries, paroisse de Danzé (son père aurait eu alors au moins soixante quinze ans ce qui paraît beaucoup). Dans cet aveu il est qualifié de laboureur, alors que l'autre était marchant en 1699. Il semble donc bien que ce soit ce deuxième François FOUQUET le jeune qui épousa Louise PITARD et qui eut pour enfants : Jeanne FOUQUET épouse de Claude BALLU, Martin FOUQUET et François FOUQUET de Naveil.

Nous ne savons rien des deux premiers de ces enfants, mais nous sommes mieux renseignés en ce qui concerne François.

Plusieurs acte de l'année 1735 que nous analyserons en étudiant la famille PITARD, nous apprennent que François FOUQUET avait épousé Julienne PITARD, sa cousine en deuxième mariage, étant veuf en premières noces d'Anne Marie HOUSSET dont il eut un fils : Jullien François FOUQUET décédé avant le 06 Avril 1764 et qu'il était alors laboureur à la Lombarderie paroisse de Danzé. Le 03 juillet 1735 il fait une déclaration d'Héritage aux Religieux de l'Abbaye de la Trinité à Vendôme, et il fait d'autres déclarations d'héritage le 13 Novembre 1736, le 13 Décembre 1739, le 23 Décembre 1739 et le 20 Juillet 1740.

Sa femme Julienne PITARD est décédée avant le 05 Juin 1759 car un "titre nouvel" de cette date, confirmant l'obligation de payer une rente de 4 livres 4 sols résultant d'un titre du 10 Mai 1698 est souscrit par :

1°) Michel FOUQUET, journalier à Beaulieu, paroisse d'Azé.

2°) François FOUQUET, laboureur à la Roullière dite paroisse.

3°) René LORILLIER, journalier, demeurant à la Chapelle Vicomtesse au nom de Julienne FOUQUET sa femme, et se portant fort de :

- Pierre FOUQUET leur frère majeur. "Héritier pour 1/4 de Julienne PITARD leur mère au jour de son décès femme de François FOUQUET, laquelle était héritière en partie de Michel PITARD, son frère".

Nous apprenons ainsi, outre la date approximative du décès de Julienne PITARD, le nom de ses quatre enfants.

François FOUQUET eut un cinquième enfant, prénommé encore François (le cinquième de ce nom) garde à Azé, issu de son premier mariage avec Anne Marie HOUSSET.

François FOUQUET-PITARD vivait encore le 17 Août 1763, date à laquelle il louait à compter de la Toussaint 1763 le bordage des Saulettes à Félix BELUE et Marguerite BRULE sa femme.

Il l'avait déjà loué le 19 Août 1757 à Charles VOISIN et Jeanne BALLU, sa femme.

François FOUQUET, veuf en secondes noces de Julienne PITARD, décéda avant le 06 Avril 1764.

En effet, à cette date devant Gilles François de TREMAULT, conseiller du Roy, Lieutenant général civil et de police au bailliage royal de Vendôme, comparait Denis POMMIER, marchand, demeurant paroisse d'Azé, seul expert par lui nommé d'office le 31 Mars précédent, pour déposer le rapport qu'il a été chargé d'établir, serment préalablement prêté, en vue de la vente des bâtiments du bordage des Saulettes, terres, prés, noues, grains et bestiaux dépendant des successions de François FOUQUET et de Julienne PITARD, à la requête de :

1°) Michel LEVE, laboureur à la Baratterie, paroisse de Danzé au nom et comme père "vitric" (beau-père) et tuteur institué par justice de Julien, Jeanne, Louise et Marie FOUQUET, enfants mineurs de Julien François FOUQUET, laboureur et de Jeanne MARTELLIERE aujourd'hui femme dudit LEVE.

2°) René LORILLIER, laboureur à Romilly, oncle paternel desdits mineurs à cause de Julienne FOUQUET sa femme.

3°) Michel FOUQUET, journalier, oncle paternel desdits mineurs demeurant aux Fontaines, paroisse de la Madeleine à Vendôme.

4°) François FOUQUET, garde à Azé, oncle paternel.

5°) Pierre FOUQUET, garçon majeur, laboureur à Danzé, oncle.

"Lesdits mineurs FOUQUET héritiers en partie par représentation de leur dit père de deffunts François FOUQUET et de Julienne PITARD leurs aïeuls paternels, et ladite femme LORILLIER et lesdits Michel, François et Pierre FOUQUET aussi héritiers conjointement avec lesdits mineurs desdits deffunts FOUQUET et de ladite PITARD, leur père et mère".

Suit la teneur de l'expertise de Denis POMMIER (nous retrouverons ce Denis POMMIER dans l'étude sur la famille DERAS) en date du 05 Avril 1764 faite en présence de François FOUQUET, Michel LEVE, René LORILLIER, Michel et Pierre FOUQUET, attendus de 8 heures à 9 heures du matin ne se sont pas présentés.

Les bâtiments sont minutieusement décrits et les réparations à y faire sont estimées. Il est intéressant de lire ces désignations très détaillées concernant tant les bâtiments que les travaux.

Puis il est procédé à l'estimation des bestiaux (une cavale à poil gris âgée de 9 à 10 ans, une autre cavale à poil blanc âgée de 10 à 11 ans, une autre cavale à poil noir âgée de 6 ans, une vieille vache âgée de 9 ans à poil rouge, une autre vache de même poil âgée de 5 ans, une taure noire femelle âgée de 15 à 16 mois).

Enfin, il est procédé à la visite des terres (347 boisselées soit 18 hectares et un quartier de pré) le tout en paroisse de Danzé.

"Lesquelles terres, noues, prés et bâtiments nous estimons devoir valoir en égard aux réparations et réfections qui sont a y faire, la mauvaise culture des terres, leur maigreur et celles qui sont en friche, et non compris les bleds qui sont en terre, à la somme de huit cent cinquante livres".

Le 14 Mai 1764, pardevant Antoine FERRAND, notaire royal au bailliage de Vendôme, résident et colloqué au bourg et paroisse d'Azé, furent présents :

1°) Michel LEVE, laboureur, demeurant à la Baratterie, paroisse de Danzé et Jeanne MARTELLIERE, sa femme, veuve de Jullien François FOUQUET en son vivant laboureur, fils du premier mariage de deffunt François FOUQUET, laboureur et de la deffunte Anne Marie HOUSSET. Ladite MARTELLIERE , mère et tutrice naturelle et de droit de Jullien, Jeanne, Louise et Marie FOUQUET, enfants mineurs d'elle et dudit Jullien François FOUQUET et ledit Michel LEVE à cause de sa dite femme, procédant au nom et comme tuteur aux personnes et biens desdits mineurs, élevé à ladite charge par acte .... etc....en conséquence de l'avis des parents desdits mineurs décerné et homologué.... etc...

2°) René LORILLIER, laboureur, demeurant à Bréviande, paroisse de Romilly du Perche, veuf de Julienne FOUQUET, fille dudit feu François FOUQUET et de deffunte Julienne PITARD seconde et dernière femme dudit FOUQUET.

"Procédant ledit Michel (sic) LORILLIER au nom et comme père et tuteur naturel et de droit de Michel, Pierre et Jean LORILLIER ses enfants mineurs et de ladite deffunte Julienne FOUQUET et par représentation d'elle, aussi héritiers pour un cinquième dudit feu François FOUQUET leur aïeul, et pour un quart en la succession de ladite deffunte Julienne PITARD leur ayeulle.

3°) François FOUQUET, garde, demeurant à Morillon, paroisse d'Azé et Jacquine ROYER, sa femme.

4°) Michel FOUQUET, journalier et Marguerite BRISIOUX, sa femme, demeurant aux Fontaines, paroisse de la Madeleine de Vendôme.

5°) Pierre FOUQUET, garçon laboureur majeur, demeurant au bourg et paroisse de Danzé.

"Lesquels dits François et Pierre et Michel FOUQUET sont aussi enfants desdits deffunts François FOUQUET et Julienne PITARD et leurs héritiers, savoir : pour un cinquième en la succession de leurdit père et pour un quart en celle de leur dite mère".

Lesquels voulant procéder à la vente et adjudication "au plus offrant et dernier enchérisseur" des biens dépendant des successions de François FOUQUET et Julienne PITARD, ont fait faire "des annonces et publications à l'issue des grandes messes paroissiales de Danzé et partout où besoin a été". Puis elles ont requis le notaire de donner lecture du procès verbal d'experts du 05 Avril 1764.

Plusieurs enchères sont portées dont la dernière par Me Léonard BRETON, greffier au bailliage royal de Vendôme y demeurant paroisse Saint-Martin, à la somme de 1.135 livres. L'heure de midi étant arrivée (on avait commencé à 10 heures) et plus aucune enchère n'étant portées, le notaire prononça l'adjudication au profit de Léonard BRETON (il était le père de Madeleine BRETON, épouse de Claude Joseph FERRON dont la fille épousa François LEMAIGNEN-VILLORCEAU).

Ensuite figure la désignation des bien vendus (bâtiments, terres, prés, bestiaux, récoltes) énoncés dans le rapport d'expert du 05 Avril 1764.

Il est constaté la remise à l'acquéreur de douze anciens titres de propriété des 15 Janvier 1674 (c'est le partage de la succession Jehan LANCELOT), 6 Mai 1664, 26 Octobre 1664, 26 Février 1699, 31 Mars 1727, 19 Mars 1735 (2), 1er Avril 1735, 10 Mai 1735, 30 Juillet 1735, 20 Février 1745 et 10 Mars 1750 (tous ces titres nous sont parvenus, sauf le dernier).

Enfin, sont énumérées les nombreuses dettes des époux FOUQUET-PITARD que l'acquéreur doit payer sur son prix d'acquisition.

Ensuite de ce procès-verbal d'adjudication figure le texte des affiches et annonces faites en vue de la vente, puis la quittance en date du 20 Mai 1764, par un créancier, à Léonard BRETON de la somme de 694 livres à lui due par les successions FOUQUET-PITARD qui paraissaient très obérées. Il n'a pas dû rester grand chose aux héritiers sur le prix de la vente.

Il est intéressant de consulter de procès-verbal d'adjudication, très complet et très lisible, et de la comparer avec deux états des terres du Bordage des Saulettes établis par Léonard BRETON après son acquisition indiquant les joignants et quelques acquisitions postérieures.

On ne peut manquer de remarquer qu'au XVIIIe siècle, le règlement d'une succession était beaucoup plus rapide qu'aujourd'hui. L'ordonnance du bailly pour la mise en vente et du 31 Mars 1764. L'expert procède à son estimation le 05 Avril ; l'adjudication a lieu le 14 Mai et les créanciers sont payés le 20 Mai. Heureux temps !

Nous ne possédons plus, après cette adjudication, aucun renseignement sur la famille FOUQUET.

Nous savons seulement que Pierre FOUQUET, fils de François FOUQUET et de Julienne PITARD, qui était laboureur en 1759, était Maître de Forges à Danzé le 09 Février 1768 et époux de Marie Anne BLAIN. Il achetait alors un bâtiment et des terres à la Vieille Métairie et au Prieuré, paroisse de Danzé, et une chambre à cheminée, bâtiments et terres aux Bigotteries dépendant des successions de Charles DORE et de Magdeleine VALLERY (voir ci-après famille VALLERY). Le 05 Novembre 1778, il faisait un échange avec Claude Joseph FERRON ; il était alors maréchal ferrant.

 

 

L'histoire de la famille FOUQUET de 1638 à 1778

peut se résumer ainsi

 

François FOUQUET était notaire à la Barronnerie de Mondoubleau en 1638. Il avait épousé Jehanne BRILLARD. Il est décédé avant le 17 Novembre 1671 laissant quatre enfants dont l'un, Pierre, était notaire à Danzé.

L'aîné de ce quatre enfants, dit François FOUQUET le jeune était majeur en 1671. Il dû naître vers 1630-1635. Il était marchand à Danzé. Il est décédé après 1699.

Son fils, appelé aussi François FOUQUET le jeune était laboureur à Danzé. Il dut naître vers 1660-1665. Il épousa Louise PITARD et décéda après 1727, laissant trois enfants majeurs lors du décès de sa femme qui survint avant 1727.

Si ces deux "FOUQUET le jeune" n'étaient qu'une même personne, elle serait née vers 1630-1635 et décédée après 1727 à 92 ou 97 ans, ce qui parait invraisemblable. De plus, ses enfants seraient nés vers 1655. Or son fils (François FOUQUET époux HOUSSET et PITARD en 2è noces) est né vers 1690-1700.

Ce deuxième François FOUQUET le jeune, eut trois enfants : Jeanne épouse de Claude BALLU, Martin et François, ce dernier épousera en premières noces Anne Marie HOUSSET. Il était domestique à Naveil, puis fut laboureur à la Lombarderie, commune de Danzé. Il dut naître vers 1690-1700. De ce mariage il eut un fils : Jullien François FOUQUET, laboureur à la Roullière, paroisse d'Azé, époux de Jeanne MARTELLIERE, qui eut quatre enfants : Julien, Jeanne, Louise et Marie, tous mineurs en 1764. Il a dû naître vers 1720-1730. Il décéda bien avant 1764 et sa veuve se remaria à Michel LEVE, laboureur à la Baratterie, commune de Danzé.

François FOUQUET, veuf d'Anne Marie HOUSSET, épousa en secondes noces vers 1725-1730, Julienne PITARD, décédée avant 1759, dont il eut quatre enfants, qui étaient majeurs au décès de leur mère, à savoir :

1°) Pierre FOUQUET époux de Marie Anne BLAIN, d'abord laboureur puis maître de Forges à Danzé.

2°) Michel FOUQUET époux de Marguerite BRISIOUX, journalier à Beaulieu puis aux Fontaines, paroisse de la Madeleine à Vendôme.

3°) François PITARD, garde à Azé.

4°) Julienne FOUQUET, décédée après 1759, mais avant 1764, épouse de René LORILLIER (ou LORILLER) journalier à la Chapelle Vicomtesse, puis laboureur à Bréviande, paroisse de Romilly.

François FOUQUET veuf en secondes noces de Julienne PITARD décéda au début de l'année 1764 et tous ses biens furent aussitôt vendus pour payer ses dettes. Il semble qu'après le décès de sa deuxième épouse, ses affaires soient devenues fort obérées. Il avait loué le bordage des Saulettes dès 1657. Il avait dû cependant continuer la culture de quelques parcelles de terre puisqu'il possédait à son décès, trois chevaux et deux vaches. Mais les bâtiments des Saulettes étaient en très mauvais état, plusieurs parcelles de terre en friche et il devait de nombreuses dettes, notamment au curé COSSON de Danzé "vingt et une livres pour paille, balle et agrats que ledit sieur curé aurait fourni et livré depuis peu pour engratter ledit bordage".

Les biens hérités de Jehan LANCELOT, des BRILLARD, de Me François FOUQUET, notaire, de Louise PITARD et de Julienne PITARD furent acquis par Léonard BRETON.

 

 

LA FAMILLE PITARD

 

Le partage du 31 Mars 1727 analysé au début de l'étude sur la famille FOUQUET concerne "les biens immeubles demeurés de la succession de deffunt François DAUVERGNE, vivant laboureur, demeurant paroisse de Danzé, qui lui étaient eschus de la succession de deffunte Julienne PITARD sa mère, qui appartiennent pour une moithié à Michel PITARD aussy laboureur demeurant aux Solettes dite paroisse de Danzé et l'autre moithié" aux enfants FOUQUET "enfants et héritiers de deffunte Louise PITARD, leur mère qui estait soeur dudit PITARD".

Louise PITARD épouse de François FOUQUET, Michel PITARD, laboureur aux Saulettes et Julienne PITARD, épouse DAUVERGNE étaient donc frère et soeur.

Nous avons rencontré Louise PITARD décédé avant 1727, en étudiant la famille FOUQUET.

Nous ne savons rien de Julienne PITARD ni de son mari ; nous ne connaissons même pas son prénom. Nous savons seulement qu'ils étaient tous deux décédés avant le 31 Mars 1727 et qu'ils avaient un fils unique, François DAUVERGNE décédé sans enfants peu avant cette date, laissant pour héritiers, Michel PITARD son oncle, pour moitié, et les enfants Jeanne, Martin et François FOUQUET ses cousins, pour l'autre moitié.

Quels étaient les parents de Michel PITARD, Louise PITARD et Julienne PITARD ? Nous l'ignorons. Mais en retraçant l'histoire de Jehan LANCELOT, marchand à Danzé, père du procureur, nous avons vu qu'il avait acheté le 10 Juin 1655, un corps de logis aux Saulettes, et des terres ; ces immeubles joignaient notamment un Michel PITARD.

Par ailleurs, le 26 Octobre 1664, Michel PITARD, maître maréchal de forges, demeurant à Danzé, époux d'Anne GUILLONE, achète, pardevant Me Thomas BRILLARD, notaire à Danzé, de Pierre DROUET le jeune, père et tuteur de Pierre, Marie, Françoise et ...... les DROUET, enfants de lui et de deffunte Marie GUILLONE sa deffunte femme, douze boisselées et demi de terre faisant la moitié d'un clos de terre appelé le Champ à ..... paroisse de Danzé, provenant de la succession de deffunt Messire Toussaint LANCELOT vivant prêtre curé de Pezou.

Et le 06 Mai 1664, le même Michel PITARD achète l'autre moitié de ce clos, de Me CALLAUX-DUGUE, notaire en, demeurant à Pezou et de Marie LANCELOT sa femme.

Ce Michel PITARD époux d'Anne GUILLONE, était peut-être le père de Michel, Louise et Julienne PITARD. C'est vraisemblable, mais nous n'en avons aucune preuve.

En revanche, nous possédons de nombreux actes concernant Michel PITARD, deuxième du nom, laboureur aux Saulettes, copartageant du partage du 31 Mars 1727.

Il résulte d'une déclaration d'héritage du 14 Mai 1721, épinglée à la vente sus énoncée du 26 Octobre 1664, que Michel PITARD, laboureur aux Saulettes (sans doute fils de Michel PITARD, maître maréchal de Forges à Danzé) frère de Louise PITARD et de Julienne PITARD, était alors veuf avec des enfants mineurs de Madeleine PLOUSE (?). Nous verrons plus loin que c'était sa première femme, et qu'il était marié en secondes noces à Anne BRANCHE, qu'il avait six enfants (trois du premier mariage et trois du second). Un contrat de vente du 30 Juillet 1735 nous apprend la date de son décès. Cet acte très intéressant sur de nombreux points, mérite d'être reproduit en grande partie.

"Pardevant nous Jacques BARRE, notaire royal à Vendôme soussigné, furent présents François ESNAULT vigneron et Marie PITARD sa femme ..... demeurant au lieu de Calais, paroisse de Lunay ....... lesquels ont vendu ....... de ce jourd'huy à toujours mais ...... avec garantie de tous troubles et évictions, dettes, hypothèques et autres empêchements généralement quelconques, à François FOUQUET, laboureur, demeurant à la Lomberderie, paroisse de Danzé .... C'est à savoir, la sixième partie auxdite vendeurs appartenant des propres de la dite Marie PITARD, d'un bordage appelé les Saulettes situé en ladite paroisse de Danzé consistant en une maison, une estable et une petite grange en ruine, douze septrées ou environ de terre labourable et noues en dépendant (une septrée = un arpent ou douze boisselées. Donc environ sept hectares et demi). Le tout indivis et à partager avec Jullienne PITARD, femme de l'acquéreur et femme de la venderesse (sic) et avec leurs autres frères et soeurs. Venu et eschu ledit bordage de la succession de deffunt Michel PITARD, père de la venderesse décédé depuis cinq mois en ça. Relevant ledit bordage et dépendant des Sieurs Religieux Bénédictions de Vendôme à cause de leur fief de l'Infirmerie, du fief des Bigotteries et autres, sous les anciens droits et devoirs seigneuriaux soit en argent, grains ou autrement. Et encore chargé de quatre livres quatre sols de rente de la nature qu'elle est due aux héritiers MANCHEAU ..... à prendre la dite sixième partie dudit bordage ....... avec la sixième partie des fruits et revenus d'iceux actuellement pendants par les racines ..... Cette vente faite pour et moyennant le prix et somme de quatre vingt livres que ledit acquéreur à présentement payé comptant audit vendeur qui l'a prise et reçue en escus de six livres et autre bonne monnaie ayant cours en ce royaume à vue de nous notaire et des témoins soussignés, dont sont contents et en tiennent quitte iceluy acquéreur, réservant seulement lesdits vendeurs du consentement dudit acquéreur, une busse de pommes de rennettes et autres de toutes espèces franches qu'il iront cuillir et chercher sur ledit lieu, a esté convenu par clause expresse et essentielle du présent contrat, et que l'acquéreur acquittera les vendeurs du douaire acquis à la veuve dudit deffunt Michel PITARD qu'elle a droit d'avoir sur ledit bordage comme aussy qu'il acquittera ledit vendeurs des tailles et autres impositions dudit deffunt PITARD et généralement de toutes autres dettes connues ou inconnues de la succession dudit Michel PITARD et de sa communauté avec sa veuve ....... Et pour les épingles de ladite venderesse l'acquéreur luy a payé trente sols en vin de marché, quarante sols dépensés entre les parties et le tout déboursé par l'acquéreur ...... Jugé et fait passé à Vendôme en notre Etude, l'an mil sept cent trente cinq le trentième jour de Juillet après midy en présence de Jean RENARD, tailleur d'habits, et de Pierre GIRAULT, marchand tonnelier, demeurant en cette dite ville, témoins à ce requis et appelés. Lesdits vendeurs ont déclaré ne scavoir signer de ce faire interpellés .... Controllé et insinué à Vendôme le premier Août mil sept cent trente cinq. Reçu trente six sols - Signé LANEAU".

On ne peut s'empêcher de constater que la formulation de cet acte de licitation n'a guère changé depuis trois siècles. Si ce n'est le rappel des droits seigneuriaux, et l'énonciation des divers accessoires don test assorti le prix de vente (épingles de la venderesse, vin de marché, et autres dépenses). On notera la réserve du douaire de la veuve venderesse et la réserve expresse de la récole de pommes rennettes, bien que les immeubles soient vendus avec leurs récoltes "pendantes par racine". Enfin ce titre, et ce n'est pas son moindre intérêt, nous apprend que Michel PITARD est décédé vers le 1er Mars 1735. Plus précisément il a du décéder quelques jours avant, car dès le 02 Mars il était procédé à la vente des meubles dépendant de sa communauté, ainsi qu'on le verra plus loin.

Le 20 Février 1745, pardevant Barthélémy MOTHERON, notaire en la Cour de l'Abbaye Cardinale de Très Sainte Trinité de Vendôme, colloqué au bourg et paroisse de Danzé, Michel PITARD; laboureur et Renée MOTRON sa femme demeurant à Beaulieu, paroisse d'Azé, vendent également à François FOUQUET et Julienne PITARD, sa femme, le sixième lui appartenant dans le bordage des Saulettes, désigné comme dans la licitations précédente (mais la grange est en ruine "comme à bas") dépendant de la succession de deffunt Michel PITARD père du vendeur décédé depuis onze ans en de ça. Cette vente moyennant la somme de quatre vingt livres, comme la précédente.

Préalablement à ces deux licitations, que nous avons relatées d'abord, parce qu'elles nous précisent la date du décès de Michel PITARD, ses héritiers avait procédé au partage de ses biens, mais non sans difficultés comme on va le voir.

Le 19 Mars 1735, c'est à dire peu après le décès de Michel PITARD, il est procédé au partage en deux lots des immeubles dépendant de sa succession, pardevant Jean PASQUIER, notaire et tabellion commis de la chatelenie de La Ville-aux-Clercs et Seigneurie de la haute justice des Vieilles métairies et autres lieux. Un autre exemplaire de ce partage est daté du 1er Avril 1735. Pourquoi ces deux exemplaires à des dates différentes ?

Les deux lots sont composés de bâtiments aux Saulettes, terres et noues au même lieu, au Buisson, au Château et à la Paillarderie à charge de payer le douaire de la veuve PITARD née Anne BRANCHE.

L'un des lots était destiné à François FOUQUET époux de Julienne PITARD, demeurant à la Lombarderie, paroisse de Danzé, à Michel PITARD laboureur à Azé et à François ESNAULT, marchand à Lunay ; l'autre à Anne BRANCHE veuve de Michel PITARD au nom et comme gardienne de ses enfants mineurs.

 

Michel PITARD avait en effet eu deux épouses :

La première, Madeleine PLOUSE (?) (déclaration d'héritage du 14 Mai 1721 sus énoncé) dont il eut trois enfants ;

1°) Julienne PITARD, épouse de François FOUQUET.

2°) Marie PITARD, épouse de François ESNAULT, vigneron à Lunay.

3°) Michel PITARD, laboureur à Beaulieu, paroisse d'Azé, époux de Renée MOTHERON.

La deuxième, Anne BRANCHE dont il eut également trois enfants, mineurs à son décès et encore mineurs au décès de leur mère en 1745 :

1°) François PITARD.

2°) Anne PITARD,

qui décéderont sans enfants,

3°) Marie PITARD qui épousera Gervais TROUILLARD.

 

Dans ce partage, Anne BRANCHE veuve PITARD était assistée de Claude BALLU "son neveu" (voir famille FOUQUET) qui lui conseille de choisir le second lot plus avantageux pour ses enfants mineurs qui pourront, lorsqu'ils seront majeurs, "faire refaire" ce partage.

A la suite de ce partage est expédié la vente des meubles dépendant de la communauté de Michel PITARD, en date du 02 Mars 1735, c'est à dire, peu après son décès. Cette vente mentionne les noms des différents enchérisseurs et le montant de leurs enchères. il est adjugé notamment :

- Une paire de chenets en fer, une pelle à feu, un petit rôtissoire, une broche à percer et une crémaillère pour 2 sols 10 deniers.

- Une vieille cognée, deux mauvais gouets et deux pieux à fendre pour 1 sol 15 deniers.

- Une vieille charrue roulante et son vieux soc pour 3 sols.

- Une fourche à trois doigts pour 9 sols 6 deniers.

- Trois mauvaises pelles à bêcher et une vieille pelle de bois pour 1 sol 1 denier.

- Une chèvre à poil gris âgée de 5 ans pour 3 sols.

- Un chalis de bois de noyer fort usé avec une vieille paillasse pour 2 sols.

- Une petite chèvre à poil noir âgée de 2 ans pour 2 sols 10 deniers.

- Un biquet pour 2 sols.

- Un vieux banc fermant à clef, une vieille poule.

- Un vieux coffre, une baratte, une vieille vache d'âge inconnu (5 sols), une méchante couverture (12 deniers), deux vieilles busses dans lesquelles il y a des poires cuites (3 sols 13 deniers), une vieille maie (12 deniers), un petit lit de plumes meslées et la ensouillé (2 sols 3 deniers), des boisseaux de chenevis, des boisseaux d'avoine mesure de Vendôme, une vieille table, deux bancelles et une vieille paire de souliers, une mauvaise poche, un bissac et une mauvaise chaise, deux mauvais draps et un autre très mauvais, deux busses dans lesquelles il y a de la boisson et un vieux quart aussi plein de boisson très mauvaise (la boisson réservée par la veuve PITARD), un chien barbet (10 sols), une vieilles braye à broyer le chanvre, paille, balles, foin et fumier et une échelle (18 sols 15 deniers), deux petits cochons (100 sols).

TOTAL DE LA VENTE : 80 livres, 2 sols, trois deniers.

 

 

 

Le 04 Mai 1735, Michel PITARD fils, assigne la veuve PITARD à comparaître devant Jean PASQUIER, notaire à La Ville-aux-Clercs, pour prendre connaissance du partage du 1er Avril 1735 et de procéder à la choisie des lots. Les enfants PITARD du premier lit et Anne BRANCHE comparaissent devant Me PASQUIER le 10 Mai. "Laquelle Anne BRANCHE veusve PITARD a été refusante d'accepter lesdits partages et de choisir pour lesdits mineurs".

Le Mardi 21 Juin 1735 "dans une des chambres du sieur Jacques LEGAY, marchand aubergiste, demeurant au bourg de la Ville-aux-Clercs ou pend pour enseigne l'image de Saint-Jacques attendu que le Palais et auditoire d'ycelle chatellenie sont impraticables et hors d'état d'y pouvoir tenir nos audiences ordinaires et extraordinaires", Jude Henri PINEL, licencié es loi avocat au parlement et bailliage de Vendôme, bailly juge ordinaire civil criminel et de police de la Chatellenie de la Ville-aux-Clercs, ordonne que le partage du 13 Mars 1735 sera exécuté en sa forme et teneur ; et il "adjuge une provision de vingt livres à la veuve PITARD à valoir sur ce qui lui doit revenir de la vente des meubles de la communauté que sur l'évaluation qui sera faite de son douaire et de son habit de deuil".

Le 10 Décembre 1735, François FOUQUET présente une requête au bailly de la Seigneurie de la Haute Justice de La Ville-aux-Clercs et des Vieilles Métairies pour obtenir que la veuve PITARD "vuide et déloge" une grange des Saulettes où elle s'est enfermée, ce qui empêche de battre le blé qui y est entassé, afin de payer les créanciers de la succession, et la contraindre à occuper une maison vacante dépendant de cette succession. Le 19 Décembre, l'huissier "prie, somme et requiert" la veuve PITARD de quitter cette grange "jusqu'après le bat des grains" et que faute par elle de le faire, François FOUQUET fera transporter ses meubles dans maison vacante. A quoi la veuve PITARD a répondu "qu'elle n'entend pas sortir de ladite grange qu'il n'en ait été ordonné autrement, le tout en présence de la nommée GUILBERT demeurant à Cuillerave, paroisse de Danzé où j'ai trouvé ladite BRANCHE qui s'était évadée de chez elle".

Le 07 Janvier 1736, elle fait déclarer par huissier à François FOUQUET qu'elle entend rester dans cette grange dont elle est propriétaire en vertu des partages. Elle est assistés de Rolland GUENETTE son procureur.

On ignore si Anne BRANCHE a consenti à sortir de sa grange et si François FOUQUET a pu battre le blé.

Il semble qu'Anne BRANCHE soit décédée avant le 10 Mars 1745, c'est à dire plus de dix ans après ces événements, car à cette date Michel PITARD agissant en qualité de tuteur des mineurs François, Anne et Marie, enfants d'Anne BRANCHE, ratifie le partage du 1er Avril 1735. Si Anne BRANCHE avait été encore vivante, c'est elle qui aurait agi au nom et "comme gardienne" de ses enfants plutôt que son beau fils. Il est précisé dans cet acte du 10 Mars 1745, que Michel PITARD n'avait plus aucun intérêts dans les biens des mineurs, ayant vendu le 1/6 lui appartenant desdits biens à François FOUQUET, le 20 Février 1745, et l'autre sixième a été vendu par Marie PITARD épouse ESNAULT le 30 Juillet 1735 au même François FOUQUET (voir ci-dessus).

Il a donc fallu attendre le décès d'Anne BRANCHE pour que puisse enfin se terminer le règlement de la succession de Michel PITARD qui cependant, n'était pas très importante si l'on en juge par la mauvaise qualité du mobilier qui a été vendu après son décès et son peu d'importance. On imagine aisément les tensions et les querelles qui ont dû exister entre les enfants du premier mariage et leur acariâtre belle-mère.

Il résulte des actes qu'on vient d'analyser que Michel PITARD, laboureur aux Saulettes, fils de Michel PITARD, maître maréchal de Forges à Danzé, est décédé dans les derniers jours de Février 1735.

Il avait deux soeurs :

- Louise décédée avant 1727, épouse de François FOUQUET.

- Julienne, décédée avant le 31 Mars 1727, épouse d'un DAUVERGNE.

 

Il avait épousé en premières noces Madeleine PLOUSE (?) décédée avant le 14 Mai 1721 dont il eut trois enfants :

1°) Julienne, épouse de François FOUQUET (fils du mari de Louise PITARD) décédée avant 1759. C'était la fille aînée.

2°) Marie, épouse de François ESNAULT, vigneron à Lunay.

3°) Michel, laboureur à Beaulieu, paroisse d'Azé, époux de Renée MOTHERON.

Ces trois enfants étaient mineurs le 14 Mai 1721.

Nous verrons plus loin que ce dernier, Michel PITARD est décédé à Vendôme, peu avant le 31 Juillet 1774, ayant vendu tous ses biens après le décès de sa femme.

Michel PITARD, laboureur aux Saulettes, après le décès de sa première femme, Madeleine PLOUSE (?) épousa en secondes noces après le 14 Mai 1721, Anne BRANCHE qui décède en 1745 et dont il eut aussi trois enfants : François, Anne et Marie qui étaient encore mineurs en 1745. Marie PITARD épousera Gervais TROUILLARD, charpentier à la Chapelle-Vicomtesse.

Ces renseignements sont confirmés par deux notes établies vraisemblablement par Léonard BRETON en vue de la rédaction de deux actes d'acquisition d'immeubles à Danzé appartenant à la famille PITARD, des 8 Mai 1773 et 26 Juin 1773 (voir ci-après Léonard BRETON).

L'une de ces notes se réfère expressément au partage ci-dessus analysé du 1er Avril 1735 et de sa ratification du 10 Mars 1745 et rappelle avec précision les parentés ci-dessus.

La seconde note a été établie en vue de la rédaction de la vente du 08 Mai 1773 et mentionne également sans contestation possible ces parentés. Elle précise en outre que Michel PITARD et Renée MOTHERON eurent trois enfants :

1°) Michel PITARD, garçon majeur demeurant à Vendôme.

2°) Catherine PITARD, épouse de François DHERBILLY (laboureur à Danzé aux termes de la vente du 08 Mai 1773).

3°) Marguerite PITARD, (mineure le 08 Mai 1773).

Or; il a été indiqué dans ces deux ventes du 08 Mai 1773 et du 26 Juin 1773, reçues par Me RENOU, notaire à Vendôme, que François et Anne PITARD (enfants de Michel PITARD et d'Anne BRANCHE) étaient les frères et soeurs de Catherine et Marguerite PITARD, alors qu'ils étaient en réalité leur oncle et tante.

De plus, dans un partage du 15 Janvier 1762 qui se trouve dans les titres de propriété de la ferme de la Foresterie à Danzé, il est dit que "pardevant Charles MANSION, nottaire royal garde notte au bailliage de Vendôme, résidence de Saint-Firmin, y demeurant, sont volontairement comparus en personne Gervais TROUILLARD, charpentier, demeurant au bourg et paroisse de la Chapelle-Vicomtesse, au nom et comme mary de Marie PITARD, fille et héritière pour un sixième au total de deffuns Michel et Anne PITARD ses frères et soeurs germains décédés sans hoirs .....". Or, Michel n'était pas décédé sans héritiers puisqu'on sait qu'il avait trois enfants (Michel, Catherine et Marguerite) issus de son mariage avec Renée MOTHERON. Le frère décédé sans héritier était en réalité François.

Il n'est pas sans intérêt de reproduire la suite de ce partage qui confirme ce que nous savons déjà sur la dévolution de la succession de Michel PITARD-BRANCHE :

....."Ses frère et soeur germains décédés sans hoirs ce qui fait qu'il revient à la ditte femme TROUILLARD des biens de laditte succession de son deffunt père, un quart au total ayant six enfants vivant lors du décès dudit deffunt père PITARD, tant du premier que du second lit"......

 

 

Nous venons de voir que les trois derniers descendants connus de la famille PITARD étaient Michel, Catherine et Marguerite. Ils vendirent les biens qui dépendaient des successions de leurs parents, notamment les Saulettes, paroisse de Danzé à Léonard BRETON les 08 Mai 1773 et 26 Juin 1773. Léonard BRETON avait déjà acquis les 14 Mai 1764 et 16 Juin 1764, les parts appartenant dans ces biens aux enfants de François FOUQUET (voir ci-dessus "Famille FOUQUET" et ci-après "Léonard BRETON").

Le dernier acte que nous possédons concernant la famille PITARD, est une renonciation par Marguerite PITARD à la succession de son père, le 31 Juillet 1774. Cet acte mérite d'être intégralement reproduit, car il nous apporte des précisions intéressantes sur les derniers membres de la famille PITARD :

Marguerite PITARD, fille majeure de 25 ans (on a vu qu'elle était mineure dans l'acte du 08 Mai 1773, ce qui nous précise approximativement la date de sa naissance) domestique demeurant au bourg d'Oucques, "chez le sieur Jacques BRIZION, aubergiste, paroisse de Saint-Jean, fille de feu Michel PITARD vivant journalier (il était auparavant laboureur) décédé en la Ville de Vendôme, et de deffuntes Renée MOTTERON sa femme, décédée avant ledit PITARD son mari, au Village de Beaulieu, paroisse d'Azé, et leur présomptive héritière avec Michel PITARD son frère germain, absent du pays, et Catherine PITARD femme de François DHERBILLY sa soeur germaine"...... renonce aux successions de sa mère et de son père "lequel à sa mort n'a laissé aucun mobilier, étant retiré à Vendôme après avoir vendu tout ses mobiliers......".

Comme on le voit, la famille PITARD s'éteignit assez misérablement. Elle vendit ses biens à François FOUQUET, puis à Léonard BRETON. Michel PITARD époux MOTHERON finit ses jours comme journalier à Vendôme après avoir vendu ses meubles. Son fils Michel, garçon majeur qui ne semble pas avoir eu de profession bien précise, quitta le pays en 1773 ou 1774. Sa fille Marguerite, également célibataire était domestique d'auberge à Oucques. Quant à Catherine, épouse de François DHERBILLY, on ignore ce qu'elle devint après 1773.

LA FAMILLE MELOT

 

Nous avons vu que le procureur Jehan LANCELOT avait deux frères :

1°) Thomas LANCELOT qui épousa Anne BRILLARD.

2°) Pierre LANCELOT qui épousa Perrine MELOT.

Après avoir étudié la famille BRILLARD, il convient d'étudier maintenant la famille MELOT, et auparavant de relater le peu que nous savons de la famille de Marie DROUET, mère de Perrine MELOT.

Le 28 Mars 1591, Pierre LANCELOT, laboureur à Boisrond, paroisse de Danzé vendait une maison à un certain Berthelot LANDRON, texier en toiles au bourg de Danzé. Cette vente était signée "en la maison de Pierre DROUET au bourg de Danzé".

Nous apprenons par un partage du 17 Octobre 1637 que nous analyserons plus loin, que ce Pierre DROUET était marchand à Danzé, époux de Judith GIROUST, tous deux décédés avant le 16 Janvier 1631. En effet, à cette date, par acte de DENYAU, notaire royal et arpenteur à Mondoubleau, relaté dans l'acte du 17 Octobre 1637, il est procédé au partage des biens dépendant des successions de Pierre DROUET et de Judith GIROUST, entre :

- Pierre DROUET.

- Judith DROUET, femme de François DUBOIS.

- Suzanne DROUET, épouse de François RUAU.

- Renée DROUET, épouse de Jehan DESTILLARD.

"Tous enfants et héritiers dudit deffunt DROUET et de ladite GIROUST", pour moitié.

L'autre moitié ayant été dévolue à Marie DROUET, fille "aisnée de deffunt Pierre DROUET en son vivant marchand demeurant au bourg de Danzé et de Judith GIROUST sa femme". L'acte du 17 Octobre 1637 contient partage de cette autre moitié entre les héritiers de "deffunte Marie DROUET et honneste personne Jacques MELOT".

Les cinq enfants de Pierre DROUET et Judith GIROUST étaient donc : Pierre, Judith, Suzanne, Renée, Marie (cette dernière décédée avant le 17 Octobre 1637).

Pierre DROUET le jeune, épousa Marie GUILLON, décédée avant le 26 Octobre 1664, laissant trois enfants mineurs à son décès : Pierre, Marie et François les DROUET (vente sus-énoncée à Michel PITARD).

Dans une vente du 03 Janvier 1610, que nous avons énoncée dans l'étude de la famille BRILLARD, on trouve un Robert DROUET, laboureur à Villemalin, paroisse de Crucheray, époux de Jehanne LECONTE qui vend un bois à Danzé joignant notamment Jehan DROUET. Nous ignorons qui étaient ces Robert et Jehan DROUET et nous ne savons rien d'autre sur la famille DROUET.

Nous ne savons rien non plus de Marie DROUET, fille de Pierre DROUET et de Judith GIROUST, ni de son mari Jacques MELOT, si ce n'est qu'ils sont tous deux décédés avant le 17 Octobre 1637, laissant, aux termes du partage de cette date, huit enfants :

1°) Messire Françoise MELOT, prestre-curé de la paroisse de Danzé.

2°) Me René MELOT, sergent ordinaire en.

3°) Magdeleine MELOT, épouse de Pierre RINDIE (?), marchand.

4°) .... MELOT, épouse de Jacques PASQUIER.

5°) Judith MELOT, épouse de François (?) GENTILS.

6°) Julienne MELOT.

7°) Jacques MELOT le jeune, marchand.

8°) Perrine MELOT, épouse de Pierre LANCELOT (tous deux décédés avant le 17 Octobre 1637, laissant un fils mineur : François LANCELOT, lui-même sans doute décédé sans enfant avant son oncle Jehan LANCELOT).

Dans ce partage, il est fait mention d'honorable homme André MELOT, receveur des droits des tailles à Vendôme" qui était créancier d'un rente sur l'un des immeubles partagés. Etait-ce un frère de Jacques MELOT-DROUET ?

Le 16 Novembre 1637, avant midi, devant Anthoine FERRON, notaire (à quelle résidence ?) il est précédé à la "choisie" des huits lots de ce partage (qui comprennent des bâtiments au bourg de Danzé et aux Saulettes et environ douze hectares de terre) entre :

"- Honneste personne Jacques MELOT le jeune, marchand, au nom et comme se faisant fort dudit François MELOT (LANCELOT) fils mineur de deffunt Pierre LANCELOT et de ladite Perrine MELOT et de PASQUIER et Julienne les MELOT ses enfants desquels il est tuteur et promettant leur faire avoir ces présentes pour agréables."

"- René MELOT, Sergent en demeurant au bourg et paroisse de DANZE."

"- Jacques MELOT le jeune."

"- François (?) GENTILS à cause de Judith MELOT sa femme demeurant paroisse de Busloup."

"- Pierre RUNDIE (?) à cause de ladite Magdeleine MELOT sa femme.

Héritiers de ladite Marie DROUET leur mère".

Le partage est fait "suivant et de coutume d'Anjou sous laquelle se régissent et gouvernent lesdits héritages".

"Ledit Jacques MELOT le jeune audit nom a prist et choisy :

* A scavoir pour ledit PASQUIER MELOT le second desdits lots,

* pour ladite Julienne le quart d'iceulx,

* ledit GENTILS audit nom de sixième lot,

* ledit Jacques MELOT le jeune le septième d'iceulx,

* ledit Maistre François MELOT le huitième lot,

* et partant, est demeuré audit Pierre RUNDIE (?) le cinquième et dernier desdits lots".

On remarquera que le premier lot a été omis. Il ne pouvait pas revenir au mineur François LANCELOT (appelé par erreur "François MELOT"). Le prénom de la femme PASQUIER n'est jamais mentionné. Judith et Julienne MELOT était mineures et avaient pour tuteur leur frère Jacques.

Il nous a paru nécessaire de reproduire avec exactitude les passages du partage du 17 Octobre 1637 et de la "Choisie" du 16 Novembre suivant, concernant les noms, prénoms et qualités des copartageants, car nous ne trouverons guère plus de précisions sur eux dans les titres postérieurs et il est très difficile de pouvoir comprendre quels furent leurs descendants.

Nous allons essayer de le faire en reprenant chacun des sept enfants de Jacques MELOT et de Marie DROUET (on a dit que leur petit fils, François LANCELOT, fils de leur fille Perrine, était vraisemblablement décédé sans enfant avant son oncle Jehan LANCELOT, puisqu'on ne le retrouve pas au nombre de ses héritiers).

 

A - La femme de Jacques PASQUIER - Judith MELOT et Magdeleine MELOT

On ne sait rien de la femme de Jacques PASQUIER (même pas son prénom) ni de Judith MELOT épouse de François (?) GENTILS dont on sait seulement qu'elle demeurait à Busloup ; ni non plus, de Magdeleine MELOT dont le nom du mari (RUNDIC ?) est indéchiffrable et dont on sait seulement qu'il se prénommait Pierre et qu'il était marchand.

 

B - Jullienne MELOT

Jullienne MELOT était mineure en 1637 (ainsi que Judith). On pourrait penser qu'elle a épousé René DAUVERGNE. En effet, dans l'acte de "Choisie" du 28 Février 1675 faisant suite au partage de la succession de Jehan LANCELOT du 15 Janvier 1674, il est mentionné, parmi les copartageants, "René DAUVERGNE, mari de deffunte Jullienne MELOT et tuteur des enfants de lui et d'elle".

Il est vrai qu'au début de ce partage, la femme de René DAUVERGNE est prénommée "Jeanne". On ne peut donc affirmer avec certitude que Jullienne MELOT était la femme de René DAUVERGNE, ni, dans ce cas, qu'elle était décédée avec des enfants mineurs avant le 28 Février 1675. D'autant plus que dans ce même acte, il est dit que le cinquième lot a été choisi par "lesdits MELOT et DAUVERGNE se faisant fort de Cézard MELOT leur frère". Or, on va voir que Cézard MELOT était le frère de Jeanne MELOT. René DAUVERGNE serait donc le mari de Jeanne MELOT comme il est dit au début du partage du 15 Janvier 1674, et non Jullienne.

Le doute subsiste. Cependant, nous verrons plus loin (cf les PEZIERE) que Jullienne MELOT avait vraisemblablement épousé un PEZIERE.

Rappelons pour mémoire, que la procédure du 17 Novembre 1671, dirigée contre les héritiers de Jehan LANCELOT, mentionne "la veuve DAUVERGNE du bourg d'Azé". Comme nous l'avons dit, c'était sans doute Jehanne FOUQUET. Le partage du 28 Février 1675 mentionne "les héritiers de François DAUVERGNE". Il est permis de penser que Jehanne FOUQUET serait décédée entre 1671 et 1675 et que son mari se prénommait "François". François DAUVERGNE était-il un frère de René ? Et parmi les "héritiers de François DAUVERGNE" n'y avait-il pas le mari de Julienne PITARD décédée avant le 31 Mars 1727 dont le fils s'appelait aussi François ?

Autant de questions sans réponses.

 

C - François MELOT

François MELOT était "prestre curé de Danzé". Il l'était déjà le 17 Octobre 1637 (partage MELOT).

De Saint Venant, dans son "Dictionnaire du" signale qu'il était déjà curé de Danzé en 1630. Il ajoute : "en 1682 il lègue ses livres aux Capucins de Vendôme".

Il est décédé, certainement très âgé, avant le 11 Avril 1691.

En effet :

"Le onzième jour d'avril mil six cent quatre vingt onze, après midi, en notre Cour de Vendôme, Pardevant nous Pierre FOUQUET notaire d'icelle résidant à Danzé soussigné, fut présent et personnellement establi honneste personne Estienne BRILLARD marchand (simagier ?) demeurant à Danzé mary de Margueritte LE BRETON sa femme héritière en partie à cause de (Jacques ?) FIRMIN de deffunt Messire François MELOT vivant prestre curé de Danzé, comme (héritière ?) à cause de (Jacques ?) FIRMIN et Messire Mischel LE BRETON pratissien demeurant audit Danzé pour faire la division en deux lots des biens qu'il leur est eschu en nature ..... avec leurs autres héritiers dudit deffunt ..... MELOT leur oncle, auquel partage nous y avons vaqué à la requête dudit FIRMIN plus ..... dudit LE BRETON .... Premier lot, etc ....." (maison et terres notamment aux Saulettes).

Le premier lot est choisi par Michel LE BRETON et le second est demeuré à Estienne BRILLARD.

Les témoins sont : Pierre VALLERY, Maréchal de Forges et Pierre PEZIERE.

Comme on le constate, ce partage ne nous éclaire pas beaucoup sur les qualités des héritiers de Messire François MELOT prestre-curé de Danzé.

Nous apprenons qu'il était l'oncle de Marguerite LE BRETON, épouse d'Estienne BRILLARD, marchand à Danzé, et de Messire Michel LE BRETON, praticien à Danzé. Ces derniers étaient-ils frère et soeur ? C'est vraisemblable ; mais alors pourquoi Marguerite LE BRETON intervenait-elle au partage, "à cause de Jacques FIRMIN ?" et pourquoi ce partage était-il fait à la requête de Jacques FIRMIN, alors que les deux lots sont divisés uniquement par Michel LE BRETON et Estienne BRILLARD ? Qui est ce Jacques FIRMIN ? Comment les enfants LE BRETON peuvent-ils être neveu et nièce de François MELOT ? Ils ne pouvait être que les enfants ou plutôt, les petits enfants d'une de ses soeurs, mais laquelle ? Magdeleine, Judith ou la femme PASQUIER. Dans ce cas, François MELOT aurait été leur grand oncle et non leur oncle, comme l'indique ce partage.

 

D - René MELOT

Nous sommes mieux renseignés sur les descendants de René MELOT qui était "sergent ordinaire en" et époux de Marie BRILLARD décédée avant le 12 Mars 1651 (voir famille BRILLARD). Il est décédé avant le 15 Janvier 1674 (ou 1675) date du partage de la succession de Jehan LANCELOT.

Il avait trois enfants mineurs en 1651 :

1°) Cézard MELOT, dont on ne sait rien.

2°) Jeanne MELOT, qui était peut-être l'épouse de René DAUVERGNE.

3°) René MELOT, époux de Marie DAUDU.

Nous connaissons un peu René MELOT grâce à plusieurs titres et pièces de procédure que nous allons analyser.

"Le 24 Octobre 1666 : pardevant Antoine CHARAY, notaire et tabellion à Vendôme, honneste personne François DAUDU, l'un des gardes des plaisirs et forrités (?) de son Altesse de Vendôme, demeurant à la Jousselinière paroisse de Saint-Ouyen, honneste personne René MELOT son gendre fermier de la terre et seigneurye du Plessis paroisse de Crucheray, promettant faire ratifier les présentes à Marie DAUDU sa femme, et honorable homme Me Jean LANCELOT procureur au siège de Vendôsme, demeurant à présent à Danzé", reconnaissent solidairement avoir vendu et constitué une rente de quinze livres tournois au profit des "Révérendes Dames Mères Religieuses du couvent de Nostre Dame du Calvaire de Vendôsme, Soeur Renée Marie de Sainte-Anne, prieure, Soeur Heleine de la Conception, Soeur prieure, Soeur Scolastique de Saint-Joseph, doyenne, Soeur Marie du Saint Sacrement, doyenne", présentes et acceptantes par toute leur communauté.

Cette rente est constituée "sur une maison manable, grange, étables, cour, jardin, terres labourables et non labourables et autres appartenances au nombre de trente septrés ou environ situées à la Jousselinière paroisse de Saint Ouyen" appartenant à Charles DAUDU. Et sur une maison et appartenances "size proche le grand cimetière, huit septrées de terres labourables ou environ sises à la Varennes de Vendôme" appartenant à René MELOT. Et "sur le lieu et métayrie de la Haybergerie "situés à la paroisse d'Azé et de Danzé consistant en maison manable, grange, terres labourables et autres appartenances", appartenant à Jehan LANCELOT.

Cette constitution de rente est consentie moyennant trois cent livres tournois. Elle est faite au parloir du couvent. Suit la ratification par Marie DAUDU.

Le 19 Juin 1674, les Révérendes Mères Bénédictines du Calvaire de Vendôme, vendent "à Soeur Renée COTTEREAU, tourière au dehors dudit couvent, demeurant paroisse de la Madeleine à Vendôme" la rente ci-dessus, due par François DAUDU et Jeanne BOURGUINEAU sa femme, deffunt René MELOT et Marie DAUDU sa femme.

Nous apprenons par cet date que René MELOT est décédé avant le 19 Juin 1674 et que François DAUDU, son beau père, était marié à Jeanne BOURGUINEAU.

Le 13 Juillet 1674 "sur l'heure de quatre le relevée" la Soeur Renée COTTEREAU fait signifier cette cession à "Jean MELOT, hoste, demeurant au faubourg Saint-Georges audit Vendosme, en la maison où pend pour enseigne les Trois Marchands, héritier de deffunt Me Jean LANCELOT vivant procureur, tant pour lui que pour ses autres cohéritiers ....... parlant à Marguerite BALLON femme dudit Jean MELOT".

Ce Jean MELOT n'est pas un fils de René.

Il est fils de Jacques MELOT ainsi que nous le verrons (chapitre "E-Jacques MELOT").

 

En vertu d'un acte reçu par Toussaint MICHAU, notaire à Vendôme le 26 Décembre 1682, Me Jacques CHAROT, diacre du diocèse de Chartres demeurant à Vendôme paroisse Saint-Martin, "ayant les droits de Renée BERNAY veuve de deffunt Mathurin ROULLEAU qui était héritier de deffuncte Renée COTTEREAU" reconnaît avoir reçu de "Charles MATELLIERE, fermier du prieuré de Danzé, au nom et comme curateur aux personnes et aux biens des enfants mineurs de deffunct René MELOT et Marie DAUDU, sa femme demeurant audit Danzé", ladite somme payée "en Louis d'or et d'argent et autres monnaies ayant cours".

Marie DAUDU est donc décédée avant le 26 Décembre 1682, laissant des enfants mineurs, parmi lesquels nous ne connaissons qu'Elisabeth MELOT, épouse de Pierre PILON, laboureur, demeurant à la Jousselinière, paroisse de Saint-Ouen qui, le 07 Novembre 1710 donne assignation à André DENYAU, marguillier de l'église de Danzé, au nom et comme curateur des enfants de Thomas MICHON et de Renée LANCELOT, héritiers de Jehan LANCELOT pour avoir paiement de la rente constituée le 24 Octobre 1666, dans le bénéfice de laquelle Elisabeth MELOT était subrogée en vertu de la quittance du 26 Décembre 1682.

 

E - Jacques MELOT

Jacques MELOT le jeune était marchand. Il es décédé avant le 17 Novembre 1671. On ignore le nom de sa femme.

Il pourrait sembler qu'il ait eu trois enfants, car le jugement du 17 Novembre 1671 mentionne, parmi les héritiers de Jehan LANCELOT : "Jean MELOT, marchand, Jacques PEZIERE, Charles BALLON et sa femme". Le jugement du 16 Mai 1682 condamne les mêmes personnes, citées dans le même ordre. On pourrait donc penser que Jean MELOT, la femme de Jacques PEZIERE et la femme de Jacques BALLON, étaient frère et soeurs, et enfants de Jacques MELOT. Mais nous allons voir que Jacques PEZIERE ne peut être un gendre de Jacques MELOT (voir famille PEZIERE ci-après). Il semble donc bien que Jacques MELOT n'eut que deux enfants : Jean MELOT et la femme de Charles BALLON dont on ignore le prénom.

Jean MELOT, qualifié marchand dans la procédure de 1671, était qualifié "hoste" dans l'assignation du 13 Juillet 1674. Il demeurait à Vendôme, faubourg Saint-Georges, dans une maison où pendait l'enseigne des Trois Marchands ; il était marié à Marguerite BALLON, sans doute soeur de Charles.

On ne trouve aucune autre trace de la famille MELOT dans les documents qui nous sont parvenus, à l'exception des PEZIERE dont nous allons maintenant parler.

LA FAMILLE PEZIERE

 

Nous venons de citer, parmi les membres de la famille MELOT, un certain Jacques PEZIERE qui est souvent signalé comme étant un héritier de Jehan LANCELOT.

Ce Jacques PEZIERE apparaît déjà dans un acte du 25 Décembre 1668.

"Pardevant Jullien PINEVOYSE l'aîné, notaire et tabellion à Vendôme fut présent Jean GOISLARD, sieur de l'Espau, Officier de feu son Altesse Royalle Monseigneur le Duc d'Orléans, demeurant à Vendôsme, paroisse de la Madeleine, lequel a baillé à titre de rente foncière annuelle et perpétuelle du jour de la feste du Sainct Jean Baptiste dernier passé à toujours mais, à honorable homme Jacques BEZIERE, archer en la maréchaussée de Blésois et Vendosmois, et Marie LENOIR sa femme, demeurant au forbourg Sainct Georges dudit Vendosme, pavé Sainct Lubin, une maison située au forbourg Sainct Georges composée de deux chambres basses se joignant l'une l'autre, une chambre haulte sur celle de devant, une escurie au derrière desdits chambres basses, grenier sur les chambres et l'escurie, le tout en un tenant .... etc ..." moyennant une rente de douze livres tournois par an.

Qui était ce Jacques PEZIERE et pourquoi a-t-il été condamné le 17 Novembre 1671 en paiement du prix de vente dû par les héritiers de Jehan LANCELOT ?

Puisqu'il était marié à Marie LENOIR en 1668, il ne pouvait être le mari d'une fille de Jacques MELOT en 1671. Dès lors on se demande en vertu de quelle parenté il était assigné en 1671 parmi les héritiers de Jehan LANCELOT, d'autant plus qu'il ne figure pas dans le partage de la succession de Jehan LANCELOT du 15 Janvier 1674 ni dans la "Choisie" du 28 Février 1675, alors que César MELOT et René MELOT y figurent. Mais rappelons que ces trois derniers étaient les enfants de René MELOT et de Marie BRILLARD et qu'ils intervenaient du chef de leur mère (en vertu de la règle "Materna Marternis") et non en tant que représentant de la famille MELOT.

Par ailleurs, Jacques PEZIERE ne saurait être rattaché aux familles BRILLARD, FOUQUET ni PITARD dont nous connaissons parfaitement les membres. Il se rattache donc incontestablement aux MELOT, mais comment ?

En raisonnant par élimination on est amené à constater qu'il ne pouvait être que le fils des filles MELOT ; or, il ne pouvait pas être un fils de Magdeleine MELOT qui était épouse de Pierre RINDEC (?) ni de la fille MELOT épouse de Jacques PASQUIER, ni de Judith qui était épouse GENTILS.

Il ne pouvait donc être que le fils de Jullienne MELOT dont nous avons vu que nous avions des doutes sérieux sur le nom de son mari, et qui était vraisemblablement un PEZIERE. Jullienne MELOT devait être décédée en 1671, c'est pourquoi la procédure a été dirigée contre son fils Jacques époux de Marie LENOIR.

Il apparaît bien que ce soit la seule explication possible pour justifier que Jacques PEZIERE était héritier de Jehan LANCELOT ainsi qu'il est dit à plusieurs reprises dans les procédures de 1671 et de 1682.

La recherche de cette filiation n'est pas sans intérêt car nous verrons par la suite que Jacques PEZIERE est un ascendant de François DERAS, grand-père de Madeleine BRETON qui épousa Claude Joseph FERRON, beau-père de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

 

 

Les enfants de Jacques PEZIERE et de Marie LENOIR

 

Jacques PEZIERE, archer en la maréchaussée de Blésois et, et Marie LENOIR sa femme, sont décédés avant le 27 Décembre 1694.

En effet, à cette date intervient une transaction entre :

1°) Mademoiselle Françoise GAUDRY, veuve de noble maître Jehan GOISLARD sieur de l'Epau, demeurant à Vendôme, paroisse St-Martin.

2°) Jehan BELLEVILLE, huissier au bailliage de Vendôme et Marie PEZIERE sa femme, héritière de Jacques PEZIERE et Marie LENOIR ses père et mère, demeurant à Vendôme, paroisse St-Lubin.

Madame GOISLARD de l'Epau "était sur le point de faire mettre à exécution certain jugement par elle obtenu de ce siège le 05 Novembre dernier à l'encontre dudit BELLEVILLE" et contre Jehan YVONNEAU et sa femme et Christophe FORTIN aussi héritiers desdits défunts PEZIERE et LENOIR "ledit FORTIN comme père et tuteur des enfants mineurs de lui de défunte Françoise PEZIERE sa femme".

Il est exposé dans cette transaction que les héritiers PEZIERE devaient à la Dame de l'Epau "18 livres pour une année et demi de rente foncière de 12 livres par an, eschues au jour de Saint Jean Baptiste passé assignés sur les biens et héritages délaissés par lesdits PEZIERE et sa femme, et spécialement sur une maison située au faulxbourg Saint Georges de cette ville" ; c'est la rente constituée en vertu du contrat du 25 Décembre 1668 sus énoncé.

La Dame de l'Epau "était sur le point de faire visiter ladite maison afin de la faire remettre en état attendu qu'elle a été presque toute insandyée et est à présent inhabitable, pour obliger lesdits BELLEVILLE et sa femme, YVONNEAU et sa femme, ensemble ledit FORTIN esdits noms, à faire rétablir ladite maison et payer lesdits arrérages" et était en droit de faire saisir les héritages délaissés par Jacques PEZIERE et Marie LENOIR.

En vertu de cette transaction, Jean BELLEVILLE et sa femme se sont engagés personnellement à payer à l'avenir cette rente foncière annuelle et perpétuelle de 12 livres "à compter du jour de Noël dernier passé" et, en conséquence, ils ont été subrogés par la créancière dans tous ses droits et actions contre les héritiers PEZIERE.

En outre, Jean BELLEVILLE et sa femme ont hypothéqué la maison du faubourg Saint Georges "dépendant desdits succession que ne sont pas encore partagées", et, en outre, une maison située au Bois-aux-Moines, paroisse de Naveil consistant en une chambre basse, grenier dessus, étable à côté, jardin devant, et un quartier de vigne au Clos Montaigu, paroisse de Villerable, ces deux derniers immeubles acquis par les époux BELLEVILLE.

Il semblerait, d'après cette transaction, que les époux PEZIERE-LENOIR n'avaient que trois enfants :

1°) Marie, épouse de Jean BELLEVILLE, huissier au bailliage de Vendôme.

2°) Françoise, décédée avant le 27 Décembre 1694, épouse de Christophe FORTIN, laissant des enfants mineurs.

3°) Une troisième fille, épouse de Jean YVONNEAU.

Or, nous allons voir qu'ils avaient en réalité cinq enfants. On peut se demander pourquoi les deux autres ne sont pas intervenus dans la transaction ci-dessus rapportée.

Le Samedi 05 Mai 1725, en la chambre du Conseil du Palais de Vendôme, en présence de M. de TREMAULT, Lieutenant général civil et de police, ROUGER assesseur civil et criminel, CADOT, conseiller et RIGAULT lieutenant particulier civil et criminel, rapporteur, est rendue une sentence à la requête de "Mathurin DERAS, père et tuteur naturel des enfants issus de lui et de deffunte Catherine PEZIERE sa femme, qui était fille et héritière pour un cinquième de deffunt Jacques PEZIERE et Marie LENOIR" contre Marie PEZIERE veuve de Jean BELLEVILLE, fille aînée de Jacques PEZIERE et de Marie LENOIR, pour qu'il soit procédé au partage en cinq lots de leurs successions, partage auquel la veuve BELLEVILLE aurait dû procéder en sa qualité de fille aînée suivant la coutume d'Anjou.

Il est expliqué dans cette sentence que la veuve BELLEVILLE avait joui des revenus de ces successions depuis 29 ans, c'est à dire, depuis 1696, ce qui confirme que les époux PEZIERE-LENOIR étaient décédés avant 1694, comme nous l'avons vu.

Cette sentence énumère les très nombreuses opérations actives et passives relatives à la gestion des biens indivis et notamment "la vente faite par Marguerite PEZIERE fille majeure dudit deffunt BELLEVILLE de la cinquième partie des héritages à elle appartenant en la succession de deffunt Jacques PEZIERE et Marie LENOIR ses père et mère moyennant la somme de 200 livres dont elle l'aurait tenue quitte au moyen de ce que de sa part, il la tenait quitte de tous les logements, nourriture et entretien qu'il lui avait fournis pendant six ans" (acte de PINEVOISE du 18 Novembre 1697).

Les dépenses mentionnées concernent notamment un bordage à Sainte-Anne (voir ci-après, famille DERAS).

Cette sentence nous apprend ainsi les noms des deux autres enfants des époux PEZIERE-LENOIR :

1°) Catherine, épouse de Mathurin DERAS (décédée en 1720 comme on le verra plus loin) ayant des enfants mineurs en 1725.

2°) Marguerite, majeure en 1697. On remarquera qu'elle est qualifiée par erreur "fille majeure dudit deffunt BELLEVILLE" alors qu'elle était en réalité fille des époux PEZIERE-LENOIR puisque son nom patronymique était "PEZIERE". Elle avait vécu pendant 6 ans au domicile de Jean BELLEVILLE son beau-frère.

Elle nous apprend aussi que Jean BELLEVILLE était décédé avant le 05 Mai 1725.

Il est encore fait mention dans cette sentence d'un "sieur BELLEVILLE curé de Villeneuve" qui était peut-être un fils de Jean BELLEVILLE.

Il résulte d'un jugement du 09 Février 1726 que le bordage de Sainte-Anne était loué à François SASSIER qui reconnaissait devoir aux héritiers de Jacques PEZIERE et Marie LENOIR "la somme de 102 livres pour trois années de fermage échues au jour de Toussaint 1724, d'un corps de logis et dépendances situés au bourg et paroisse de Sainte-Anne, et quatre vingt trois boisseaux deux tiers de boisseaux de blé pour moissons de terre, sous déduction de 45 sols qu'il a payé pour une clef et un sepeau (chaine de fermeture)". Ce jugement dispose que François SASSIER devra acquitter, sur les fonds qu'il doit, une rente foncière due à une demoiselle Marie DEMERE, le surplus devant être affecté aux réparations à faire au bordage de Sainte-Anne. Il résulte d'un autre jugement du 02 Mars 1723 que cette rente était due à Marie DEMERE en vertu de la transaction sus énoncée du 27 Décembre 1694. (Voir plus loin le long procès entre Marie DEMERE et les héritiers de Mathurin DERAS et Catherine PEZIERE).

Nous verrons que Catherine PEZIERE est décédée vers 1720 et que Mathurin DERAS son mari est décédé en 1735.

Nous ne savons rien de plus des enfants de Jacques PEZIERE et de Marie LENOIR, mais nous connaissons les descendants de Catherine PEZIERE et de Mathurin DERAS.

 

 

Les enfants de Catherine PEZIERE et de Mathurin DERAS

 

Nous les connaissons par une déclaration d'héritage du 10 Avril 1728, parfaitement écrite et qu' il est intéressant de reproduire intégralement :

"Déclaration des héritages que j'ai Mathurin DERAS, marchand demeurant au bourg et paroisse d'Azé, au nom et comme père et tuteur de Mathurin, François, Catherine et Jeanne les DERAS, enfants issus de moy et de deffunte Catherine PEZIERE ma femme à eux échus et advenus de la succession des deffunt Pierre PEZIERE leur père ayeul.

Tiens et advoüe tenir de vous mes Révérendes Dame abesse Religieuses et couvent de l'abbaye Royalle de la Virginité, Ordre de Citeaux au Diocèze du Mans, à cause de votre fief et Seigneurie des Curées situé paroisse de Villerable.

C'est à scavoir quatre boisselées de terre labourable situées aux Curées paroisse dudit Villerable joignant d'un costé à la dame veuve Me Mathurin GUINETTE vers solaire, d'autre costé du sieur DELAUNAY, d'un bout aux Dames Religieuses du Calvaire vers abas, d'autre bout à (en blanc).

Item trois boisselées de terre labourable situées audit lieu dite paroisse joignant d'un costé à la Dame DUVAL vers galerne, d'autre costé René LEROY, des deux bouts comme dessus.

Item deux boisselées de terre situées audit lieu dite paroisse joignant d'un costé à la ditte veuve Me GUINETTE vers solaire, d'autre costé au sieur PORCHER, d'un bout au Sieur CADOT vers abas, d'autre bout à la Dame veuve Me GUINETTE.

Tenu de vous mesdites Dames sous le devoir et hipotèque de deux sols six deniers de cens, cinq sols et une poulle de rente par arpent païable par chacun an à vostre recette ordinaire, au four banal à Vendôme devant la Place le jour de Sainte Catherine vingt cinq novembre.

Et outre tenu à droit de relief.

Lesdits héritages cy dessus appartiennent aux dits enfants à cause de deffunte Catherine PEZIERE leur mère, de la succession dudit deffunt Pierre PEZIERE leur père ayeul.

Qui est tout ce que je tiens et avoüe tenir de vous mesdites dames sous lesdits devoirs que je vous en suis tenu faire et payer par chacun an audit jour et lieu cy dessus.

Lesdits cens et rentes portans vantes, amendes, et autres proffits de fief quand le cas y echet suivant la coutume du pays, en témoing de quoy je vous en rend et baille la présente ma déclaration à laquelle j'ai fait arrest et ycelle affirme véritable et fait signer à ma requeste aux notaires roïaux soussignés auxquels j'ai déclaré ne savoir signer. Fait ce deuxième jour d'Avril mil sept cent vingt huit. Signé : J. NOURY notaire, MAILLET notaire. Controllé à Vendôme le dix Avril mil sept cent vingt huit. Reçu six sols , signé GILLET".

Cette déclaration d'héritage nous apprend les noms des quatre enfants de Catherine PEZIERE et de Mathurin DERAS.

Le père de Catherine PEZIERE y est prénommé Pierre, alors que nous savons que son véritable prénom était Jacques .

La famille PEZIERE était peut être originaire de Villerable, puisque Jacques PEZIERE y possédait quelques parcelles de terre.

Rappelons, à titre indicatif, que nous avons rencontré un Pierre PEZIERE qui était témoin dans un acte du 11 Avril 1691 : c'était peut être celui que nous connaissons sous le prénom de Jacques ?

LA FAMILLE DERAS

 

Mathurin DERAS (ou DERAST) veuf de Catherine PEZIERE est décédé en son domicile à Azé le 1er ou 2 Mai 1735. Il était cabaretier.

L'inventaire après son décès est dressé par Me Pierre BRETON, notaire royal à Azé les 5 et 6 Mai et 16 Novembre 1735 à la requête de :

- Mathurin DERAS, laboureur à Lancé, son fils.

- Catherine DERAS, sa fille, épouse de Gabriel POMMIER, marchand à Danzé (il fut ensuite laboureur à la Haie Bergerie paroisse d'Azé). Catherine était veuve en premières noces de Michel BARRE.

- Jeanne DERAS, sa fille, majeure, demeurant avec son père (elle épousera Pierre VALLERY et décédera en 1741).

- Magdeleine BORDIER, veuve de François DERAS, en son vivant laboureur à Azé, au nom et comme mère et tutrice naturelle de Madeleine et François DERAS, ses enfants mineurs, ayant pour curateur Pierre BERRY, laboureur, demeurant au Grand Buisé, paroisse d'Azé, nommé à cette fonction par acte du Lieutenant général de bailliage royal de Vendôme du 03 Mai 1735. Mathurin DERAS était donc décédé quelques jours avant, peut être le 1er ou le 02 Mai.

Nous verrons plus loin que François DERAS époux de Magdeleine BORDIER était décédé un peu plus d'un mois avant son père, le 25 Mars 1735.

L'estimation des meubles est faite par Joseph FERRAND, marchand à Teillé, paroisse d'Espereuse et par Joseph REGNARD, marchand à Courtozé. La prisée n'est pas rapportée. L'actif de succession, y compris les meubles s'élevait à 1.195 livres 14 sols et le passif à 229 livres 4 sols.

Les 17, 18 et 24 Novembre 1735 il est procédé par le même Pierre BRETON à la vente des meubles qui étaient restés en la possession de sa fille Jeanne. Le produit de cette vente s'élève à 1.130 livres 15 sols 6 deniers. C'est par cette vente qu'on apprend que Mathurin DERAS était cabaretier à Azé (dans les actes antérieurs il était qualifié de marchand).

Indiquons dès maintenant, pour comprendre l'analyse des derniers documents que nous possédons concernant la famille DERAS que :

a - Mathurin DERAS le jeune, épousa Anne DORE et décéda avant le 08 Décembre 1743. Il avait plusieurs enfants mineurs à son décès dont un fils : Pierre DERAS, né le 1er Mars 1733, laboureur à Averdon.

b - Jeanne DERAS, épouse de Pierre VALLERY décédée en 1741 sans enfants.

c - François DERAS, laboureur (ou "Soixton" dans d'autres titres, c'est à dire bordager) à Azé, époux de Magdeleine BORDIER, décédé le 25 Mars 1735 eut deux enfants : François DERAS, décédé mineur en Septembre 1747 et Madeleine DERAS, née le 12 Septembre 1733 à Azé qui épousera Léonard BRETON et dont la fille épousera Claude Joseph FERRON et sera la belle-mère de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

d - Catherine DERAS épousa en premières noces Michel BARRE dont elle eut deux enfants : Catherine qui épousa Marin DAY, et Marie qui épousa Denis POMMIER. Elle épousa en secondes noces, Gabriel POMMIER, laboureur à la Haie Bergerie dont elle eut trois enfants : Gabriel , Denis et Pierre. Elle est décédée avant le 20 Juin 1753.

Ces précisions préalables sont nécessaires pour comprendre la longue procédure qui dura du 16 Mai 1753 au 18 Septembre 1767, entre les membres de cette famille, concernant un bordage à Sainte-Anne.

L'analyse des pièces de cette procédure présente le grand intérêt de nous donner des renseignements précis sur les dates de naissance et de décès de la plupart des enfants DERAS et de leurs conjoints, ce qui nous manquait fâcheusement en ce qui concerne les membres des familles que nous avons étudiées jusqu'à maintenant puisque, bien souvent, c'est par un raisonnement déductif que nous avons trouvé leurs dates de naissance et de décès approximatifs et même leur filiation.

Cette procédure débute par une assignation en date du 16 Mai 1753 "à comparaître pardevant et en l'audience de Monsieur le Lieutenant général du bailliage Royal de Vendôme à huitaine suivant l'ordonnance au Palais dudit lieu, heure d'audience ordinaire des plaids", à la requête de :

"- Magedeleine DRAS fille et héritière de défunt François DERAS en son vivant "Soiton" (bordager) et de Magdeleine BORDIER sa veuve, depuis veuve et René DOLIVEUX et actuellement femme de Louis MENANT maître d'école à Vendôme, et encore héritière de Mathurin DERAS et de Catherine PEZIERE ses aïeuls paternels du chef et par représentation dudit François DERAS son père, et de Jeanne DERAS sa tante paternelle, et encore héritière de François DERAS son frère germain décédé en minorité émancipée d'âge ..... demeurant à Vendôme paroisse de Saint-Martin ....".

Contre :

"- Gabriel POMMIER laboureur demeurant à la Haie Bergerie paroisse d'Azé, tant en son nom à cause de la communauté qui a eu cours entre lui et Catherine DERAS, sa femme, que comme tuteur des enfants mineurs issus de lui et de ladite defunte Catherine DERAS sa femme, fille et héritière en partie desdits défunts Mathurin DERAS et Catherine PEZIERE, ses père et mère, et de ladite Jeanne DERAS tante desdits mineurs dont ils sont héritiers par représentation et du chef de ladite Catherine DERAS leur mère et de Marin DAY laboureur et de Catherine BARRE sa femme aussi fille et héritière de ladite Catherine DERAS issus de son premier mariage avec deffunt Michel BARRE, etc....".

"- Denis POMMIER marchand et cabaretier à Azé et Marie BARRE sa femme aussi fille et héritière de Catherine DERAS issue de son premier mariage avec ledit deffunt Michel BARRE, etc...."

" Et encore ledit Denis POMMIER au nom et comme tuteur et curateur de Pierre DERAS fils mineur de deffunt Mathurin DERAS qui était aussi fils mineur et héritier desdits deffunts Mathurin DERAS et Catherine PEZIERE ses père et mère".

"Et Pierre DERAS mineur émancipé "ayant pour curateur Denis POMMIER".

Cette assignation leur était faite pour :

"Répondre et procéder sur ce que ladite Catherine PEZIERE, ayeulle paternelle de l'adjournante (Madeleine DERAS) étant décédée la première dès l'année 1720, et le deffunt Mathurin DERAS son ayeul ayant toujours continué de jouir non seulement de tous les biens et effets de leur communauté qui a continué à défaut d'inventaire, et François DERAS père de ladite adjournante étant décédé le 25 Mars 1735, avant le décès dudit Mathurin DERAS son père et ayeul de l'adjournante qui n'est décédé qu'au mois de May de la même année, Magdeleine BORDIER veuve dudit François DERAS et mère de l'adjournante n'étant lors âgée que de vingt deux ans deux mois ainsi qu'il est justifié par son extrait batistaire du 1er Mars 1713 certifié par le sieur COSSON curé de la paroisse de Dané ........ Il aurait été procédé à un inventaire devant BRETON notaire royal à Azé le 05 Mai 1713 et jours suivants des biens de la succession dudit Mathurin DERAS fils, père dudit Pierre DERAS mineur héritier pour un quart en la succession dudit Gabriel POMMIER comme mari de ladite Catherine DERAS ; héritier pour un quart en la succession de ladite deffunte Jeanne DERAS ; et ladite Magdeleine BORDIER, mère de l'adjournante etc...

Puis il est exposé dans cette assignation que :

"Mathurin DERAS fils, père de Pierre DERAS, Gabriel POMMIER et Catherine DERAS sa femme, et Jeanne DERAS, profitant du bas âge de la minorité de Magdeleine DERAS et de François DERAS son frère et de la minorité de Magdeleine BORDIER leur mère qui ne pouvait valablement seule estre en droit pour eux, ont non seulement disposé et se sont appropriés tous les effets de la succession et de la communauté continuée desdits deffunts Mathurin DERAS et Catherine PEZIERE ayeuls de l'adjournante, et des deniers procédant à la vente publique des meubles", et encaissé les créances, "mais encore de tous les biens desdites successions, même des biens propres de ladite PEZIERE et notamment d'un bordage situé paroisse de Sainte-Anne composé de deux chambres à feu, grenier dessus, un cellier à côté et trois petites écuries, grenier au dessus de l'une d'icelle, grange, deux jardins clos, contenant environ douze boisselées, relevant du fief du Chatelet".

Ce bordage, dont le lieu-dit n'est pas mentionné (mais qui d'après une note du dossier de procédure entre Marie DEMERE et les héritiers DERAS, ci-après analysé, était situé :

"Vis à vis l'église" comprenait ou outre cent deux boisselées de terre, six enclos de vignes, quatre autres boisselées, "scize près l'Eglise et près la croix dudit lieu et paroisse de Sainte-Anne", huit autres boisselées "abutant au chemin de Sainte-Anne à aller à la Galloche et d'amont au chemin de la Guignardière à aller au Chatelet", dix huit autres boisselées de terres labourables, "quatre autres boisselées au lieu appelé le Pont de Sainte-Anne abutant d'amont au chemin de Sainte-Anne à la Rougerie" deux autres boisselées aux caves, abutant au chemin de Crucheray, deux autres boisselées au même lieu, "et plusieurs autres terres et héritages qui font partie des dépendances dudit bordage".

Ce bordage de Saint Anne contenait donc au moins neuf ou dix hectares.

Il est encore reproché aux héritiers DERAS de s'être approprié et d'avoir joui et disposé d'autres bien et rentes dépendant desdites successions situés sur la paroisse d'Epuisay contenant environ 18 boisselées de terre et bois, et de s'être emparé des meubles dépendant desdites successions.

Puis il était demandé, après restitution de ces biens, leur partage en trois lots.

 

Cette assignation, comme on vient de la voir, nous apporte des précisions très intéressantes sur la généalogie des enfants DERAS, et nous apprend que Catherine PEZIERE possédait des biens assez important à Sainte-Anne (et même à Epuisay). Nous savions déjà que son père possédait des terres à Villerable, ce qui confirme que la famille PEZIERE devait être originaire de cette région.

Avant d'analyser les autres pièces de cette procédure, résumons les faits.

Mathurin DERAS, cabaretier à Azé décède vers le 1er Mai 1735, veuf de Catherine PEZIERE, laissant 3 enfants : Catherine épouse en premières noces de Michel BARRE et en deuxièmes noces de Gabriel POMMIER, Mathurin et Jeanne décédés sans enfants en 1741 ; et deux petits enfants : François DERAS (décédé mineur en 1747) et Magdeleine DERAS, par représentation de François DERAS décédé un mois avant son père, époux de Magdeleine BORDIER.

Catherine DERAS avait eu 5 enfants de ses deux mariages : Catherine BARRE épouse de Marin DAY, Marie BARRE épouse de Denis POMMIER, Gabriel POMMIER, Denis POMMIER et Pierre POMMIER.

Quant à Mathurin DERAS le jeune, il avait un fils : Pierre DERAS.

Lors du décès de Mathurin DERAS père, le 1er mai 1735, Magdeleine BORDIER sa belle fille avait 18 ans, et Magdeleine DERAS, sa petite fille, 2 ans.

Les enfants DERAS continuent à gérer les biens dépendant de la succession de leur père sans se soucier de leur belle soeur, Magdeleine BORDIER, ni de leur nièce Magdeleine DERAS. A l'âge de 20 ans, cette dernière se fait émanciper et avec le concours de sa mère, intente la procédure en demande en partage contre ses oncles et tante des biens dépendant des successions de ses grands parents, comprenant notamment le bordage de Sainte-Anne qui était un propre de sa grand mère, et qui était laissé à l'abandon par ses cohéritiers.

 

Ceci dit, reprenons l'analyse des pièces de procédure :

Le 11 Juillet 1753, Magdeleine DERAS comparait devant le lieutenant général civil et de police au bailliage royal et prevoste de Vendôme et déclare que Louis MENANT, son père Vitric (son beau père, troisième mari de sa mère) n'a pas en sa possession certains documents, inventaires et autres pièces qu'il avait remis au Clerc de Me DESCHAMPS procureur à Vendôme, le 08 Septembre 1752 .....

Le 11 Août 1753, le lieutenant général prend acte des déclarations de Louis MENANT qui s'engage à rapporter ces documents.

Le 15 Décembre 1753, il est ordonné à nouveau à Louis MENANT de produire ces documents. Le même jour de longues conclusions sont présentées au lieutenant général en réponse à celles qui avaient été présentées par les défendeurs concernant notamment une somme de huit cents livres que Mathurin DERAS aurait donnée à son fils François lors de son mariage. Le procureur de Magdeleine DERAS s'élève contre "l'odieuse chicane des deffandeurs" et demande qu'on en vienne à un juste réglement car les défendeurs ont incontestablement "toujours joui et disposé de tous les biens et revenus dépendant des successions de Mathurin DERAS et de Catherine PEZIERE". Il est fait référence, dans ces conclusions à l'ouvrage de "Monsieur de LIVONNIERE, les Règles du Droit Français, chapitre neuf", à l'article 98 de la coutume d'Anjou, et à un certain juriste célèbre du nom de DUPINEAU.

Le 22 Décembre 1753, la cause est renvoyée "après les Rois" (après la fête des Rois, 6 Janvier 1754).

Le 12 Janvier 1754, les parties sont renvoyées devant Me DELATOUCHE et Me BODINEAU leurs avocats.

Le 13 Mars 1754, Magdeleine DERAS assigne Denis POMMIER après le décès de Gabriel POMMIER. Nous verrons plus loin que Gabriel POMMIER, après le décès de sa femme Catherine DERAS survenu avant le 20 Juin 1753 s'était remarié avec Marie PETIT et décéda avant le 23 Mars 1754.

Le 23 Mars 1754 intervient un jugement de reprise d'instance.

Dans toutes ces pièces de procédures, sont longuement reprises les qualités héréditaires des parties dans les mêmes termes, exactement, que dans l'assignation primitive du 16 Mai 1753.

Le 12 Novembre 1755, Magdeleine DERAS, fille émancipée demeurant à Vendôme chez le sieur MENANT son père vitric déclare que son frère François DERAS est décédé à Vendôme en Septembre 1747 et qu'il leur est échu la moitié du bordage de Sainte-Anne loué à bail à ferme moyennant un fermage de 198 livres 4 sols et qu'il ne dépend aucun autre bien fond de "ladite" succession. Elle a payé un droit casuel de 39 sols "faute d'avoir satisfait dans les six mois de l'ouverture de la succession". Il est encore indiqué dans cette pièce que Mathurin DERAS est décédé en Juin 1750. Nous verrons plus loin (procès Marie DEMERE) qu'il était déjà décédé lors d'une requête, en date du 08 Décembre 1743.

A partir de cette date, nous ne possédons plus aucune pièce de procédure relatives à cette demande en partage. Il semble que les parties aient abandonné la voie judiciaire et aient tenté un règlement amiable.

En effet, le 03 Juillet 1755, pardevant Jean Jacques GIRARD, notaire royal à Vendôme, comparait Joseph CHASSELOUP, maçon tailleur de pierre et entrepreneur de bâtiments demeurant à Vendôme, paroisse Saint-Martin, qui a été requis par Denis POMMIER tant en son nom que comme tuteur des enfants mineurs de Gabriel POMMIER son frère, par Pierre DERAS, laboureur à Tourailles, et pas Louis MENANT, époux de Madeleine BORDIER, pour procéder à l'expertise des travaux à faire aux bâtiments du bordage de Sainte-Anne "afin d'en éviter le cablir et dépérissement total". Ce bordage appartient, dit cet acte, en outre, à Marin DAY, dit "Colidon" demeurant à Danzé, époux de Catherine DERAS, et à Pierre DERAS, garçon majeur. Joseph CHASSELOUP déclare "faire cette estimation en son honneur et conscience".

"Premièrement, il faut remettre à la porte de la maison un poteau de 7 pieds de long et de 5 à 6 pouces de carissage ; se servir de l'ancien chapeau et refaire le bousillage d'au dessus. Pour fourniture et façon il convient de débourser la somme de 3 livres".

"Plus à la croisée de la chambre il est nécessaire de fournir et placer 2 barres de fert pesant 6 livres pourquoi il convient de débourser 36 sols".

"Plus au plancher de ladite chambre refiler à neuf une toise de planches et fournir la quenouilleau de terre et foin qu'il conviendra....".

Suit le détail de l'estimation de toutes les réparations à faire aux toitures, fenêtres, planchers, pignon de la grange "qui est prêt à câbler" et qu'il faut consolider, à la chaine et au treuil du puits etc.....

Le 15 Juillet 1755 est établi un marché de ces réparations entre les héritiers DERAS et Toussaint LAROCHE et Jacques BRILLARD entrepreneurs avec les conditions de paiement des travaux s'élevant à la somme de 156 livres.

Mais ces réparations urgentes une fois effectuées, le litige ne semble pas réglé pour autant, car le 26 Février 1757 "le sieur Léonard BRETON, principal notaire à la Chatellenie de l'Isle, demeurant au Temple lés Vendôme, paroisse Saint-Lubin, assisté de Me Pierre GAUSSANT son procureur, agissant au nom et comme mari de Magdeleine DERAS fille de deffunt François DERAS et de Madeleine BORDIER sa veuve, depuis veuve de René DOLIVEUX et à présent femme du sieur Louis MENANT maître d'écriture, héritière en partie du chef, et par représentation dudit DERAS son père, de Mathurin DERAS et Catherine PEZIERE ses ayeuls paternels, et encore héritière de Jeanne DERAS sa tante paternelle etc....", déclare qu'il reprend l'instance pendante.

Magdeleine DERAS s'était donc mariée avec Léonard BRETON, entre le 03 Juillet 1755, date de la visite des bâtiments de Sainte-Anne où elle était encore qualifiée de fille mineure, et le 26 Février 1757.

Léonard BRETON, en décidant de reprendre l'instance a du contraindre les adversaires à composer car un accord intervient le 12 Décembre 1757, pardevant Michel Thomas MARGANNE, notaire royal à Vendôme, entre :

- Léonard BRETON, praticien, et Madeleine DERAS sa femme, demeurant à Vendôme, paroisse Saint-Martin.

- Marin DAY, laboureur, mari de Catherine DERAS, demeurant à Danzé.

- Denis POMMIER, marchand, mari de Marie BARRE, demeurant à Azé.

- Gabriel POMMIER, garçon majeur, demeurant à Danzé.

- Pierre POMMIER, garçon mineur, demeurant à Azé.

- Pierre DERAS, garçon mineur de 25 ans, émancipé, demeurant à Françay.

Il est rappelé l'assignation du 16 Mai 1753 en demande en partage des successions de Mathurin DERAS et de Catherine PEZIERE sa femme, puis les jugements du 11 Août 1753 et 12 Janvier 1754 sus-énoncés, la reprise d'instance après le décès de Gabriel POMMIER, la reprise d'instance par Léonard BRETON du 26 Février 1757 après son mariage avec Magdeleine DERAS ; puis il est dit que sur les avis et conseils de leurs avocats les parties ont procédé à la transaction aux termes de laquelle il a été convenu que le tiers d'actif net à partager, d'après l'inventaire des 5 et 6 Mai et 16 Novembre 1735, étant de 88 livres, 15 sous, 3 deniers obole sera payé à Léonard BRETON et sa femme, par Pierre DERAS qui lui paiera en outre le tiers de cette somme soit 29 livres 11 sous 9 deniers, en sa qualité d'héritier de Jeanne DERAS sa tante. Que le deuxième tiers étant de 88 livres 15 sous, 3 deniers obole sera aussi payé audit BRETON et sa femme par Marin DAY et Catherine BARRE sa femme, Denis POMMIER et Marie BARRE sa femme, Gabriel, Denis et Pierre POMMIER, ainsi que le tiers de ce tiers (29 livres 11 sous 9 deniers) en leur qualité d'héritiers de Jeanne DERAS.

"Sauf à eux à se faire tenir compte ainsi qu'ils aviseront bon être, par Marie PETIT, veuve et seconde femme dudit deffunt Gabriel POMMIER et actuellement femme de Michel DUFAIX pour ce qu'elle pourrait en être tenue à leur égard, comme ayant été commune avec ledit Gabriel POMMIER".

"Et quant aux 29 livres 11 sous 9 deniers restant dû troisième tiers pour parfaire la somme totale de 266 livres 5 sous et 10 deniers obole, (montant de l'actif net à partager) ledit BRETON et sa femme s'en feront faire raison par ladite BORDIER leur mère et belle père, attendu qu'elle les a reçus ou du moins qu'ils ont été confondus lors du partage du mobilier de ladite Jeanne DERAS femme VALLERY".

"Quant aux revenus des biens immobiliers comprenant le bordage de Sainte-Anne dont la désignation détaillée est rappelée (loué à Michel BRETON pour 9 ans à compter de la Toussaint 1736, moyennant 38 livres d'argent et un boisseau et demi de blé par boisselée), deux clos se terre entourés de haies vives à Epuisay contenant environ 14 boisselées de terre, trois boisselées de bois, et une autre boisselée (affermés 5 livres dix sous au sieur CATHODEAU) ils ont payés à Léonard BRETON et sa femme dans la même proportion".

Au total, Léonard BRETON et sa femme devront recevoir de Pierre DERAS la somme de 249 livres 15 sous 9 deniers, et pareille somme de Denis POMMIER, Gabriel, Denis et Pierre POMMIER. Ces sommes ont été payées comptant, à l'exception de celle de 108 livres 4 sous due par la veuve CATHODEAU pour fermage des terres d'Epuisay.

Enfin, les copartageants se sont obligés à payer à Léonard BRETON et sa femme le coût des travaux de réparation du bordage de Sainte-Anne et les frais du partage.

Ainsi se termine cette longue procédure commencée le 16 Mai 1753 ; mais ce réglement ne concerne que les espèces et revenus des successions de Mathurin DERAS et de Catherine PEZIERE. Les immeubles demeurent dans l'indivision. Léonard BRETON va acquérir les parts des cohéritiers de sa femme au moyen des trois actes suivants :

 

A - Le 09 Avril 1758, pardevant Michel Thomas MARGANNE,

- Marin DAY, laboureur et Catherine BARRE sa femme, fille et héritière de Catherine DERAS veuve en premières noces de Michel BARRE, à son décès femme de Gabriel POMMIER, demeurant au bourg et paroisse de Danzé,

- Gabriel POMMIER, garçon majeur, maréchal ferrant, demeurant à Haye de Champ, paroisse de Saint-Firmin,

- Denis POMMIER aussi garçon majeur, laboureur, demeurant paroisse de Danzé,

- Pierre DERAS, laboureur, demeurant paroisse d'Averdon, majeur de 25 ans depuis le 1er Mars 1758.

Après avoir pris connaissance du réglement du 12 Décembre 1757 sus-énoncé, et l'avoir confirmé, vendent à Léonard BRETON praticien et à Madeleine DERAS sa femme, savoir :

Pierre DERAS, la tierce partie d'un petit bordage situé paroisse de Sainte-Anne.

Marin DAY et Catherine BARRE sa femme, Gabriel et Denis POMMIER, chacun pour 1/5è dans un tiers dudit bordage, "les deux autres cinquième appartenant à Denis POMMIER, marchand à Azé, mari de Marie BARRE et à Pierre POMMIER, mineur, frère des vendeurs, et l'autre tiers à la femme BRETON".

Il est rappelé que ce bordage, sommairement désigné, appartenait "à Pierre DERAS comme lui étant échu de la succession de Catherine PEZIERE son aïeule paternelle pour un quart, et pour un tiers dans un quart de la succession de Jeanne DERAS sa tante paternelle, et à ladite femme DAY et auxdits Gabriel et Denis POMMIER comme leur étant échu de la succession de Catherine DERAS leur mère".

Le prix de vente a été payé à la vue du notaire et des témoins "en écus de six livres et autre monnaie ayant cour en ce royaume" par Léonard BRETON, déduction faite des sommes qui lui étaient dues par les vendeurs en vertu du réglement du 12 Décembre 1757.

 

B - Le 18 Janvier 1759, pardevant Antoine FERRAND, notaire royal au bailliage de Vendôme, résidant à Azé, Denis POMMIER, aubergiste à Azé et Marie BARRE sa femme, après avoir approuvé et fait approuver par sa femme le réglement du 12 Décembre 1757, vendent à Léonard BRETON qui est devenu "commis à l'exercice du Greffe Civil et Criminel du bailliage royal et prevostal de Vendôme", un cinquième dans le tiers du bordage de Sainte-Anne, moyennant le prix de 60 livres, sur lequel l'acquéreur a retenu la somme de 20 livres 17 sols 3 deniers à lui due par les vendeurs.

 

C - Enfin, beaucoup plus tard, le 18 Septembre 1767, Pierre POMMIER, laboureur, demeurant paroisse de Saint-Amand vend à Maître Léonard BRETON, devenu Greffier au bailliage royal de Vendôme, la cinquième partie dans un tiers appartenant au vendeur dans le bordage de Sainte-Anne moyennant la somme de 60 livres "en principal achat et vin de marché" sur laquelle Maître BRETON a payé à la vue du notaire en écus de 3 livres et monnaie ayant cours celle de 3 livres 5 sols, le surplus étant compensé par pareille somme due par le vendeur à Me BRETON en vertu du réglement du 12 Décembre 1757.

Me Léonard BRETON et sa femme deviennent ainsi seuls propriétaires du bordage de Sainte-Anne, ce qui met fin à la procédure commencée 14 ans plus tôt. On ignore ce que sont devenus les terres et bois d'Epuisay.

A partir de cette dernière vente, nous n'avons plus aucune trace des enfants DERAS dans les titres qui nous sont parvenus.

 

 

Procédure entre Marie DEMERE et les héritiers de

Mathurin DERAS et Catherine PEZIERE

 

Avant de poursuivre l'Etude sur la famille DERAS par celle de la famille VALLERY qui lui était alliée, il faut analyser les quarante pièces d'un long procès qui dura de 1694 à 1763 concernant le paiement de la rente foncière de douze livres constituée par Jacques PEZIERE et Marie LENOIR sa femme en vertu de l'acte ci-dessus rapporté du 25 Décembre 1668. Plusieurs pièces de procès nous apportent des précisions intéressantes sur la famille DERAS.

Les pièces de cette procédure sont enliassées sous la mention :

"Titres de propriété de la rente de douze livres foncière payable au jour de Saint Jean Baptiste, par chacun an, assignée sur une maison située faubourg de St-Georges à Vendosme et depuis hypothéquée avec d'autres héritages, ladite rente due par les hérittiers BELLEVILLE à la dame RASLE veuve GOISLARD-DUPUY et au sieur et dame GOISLARD demeurant à Nogent le Rotrou, comme hérittiers de Demoiselle DEMERE leur tante".

On se rappelle que Jacques PEZIERE, archer en la maréchaussée du Blésois et Marie LENOIR sa femme s'étaient reconnus débiteurs par acte du 25 Décembre 1668 d'une rente foncière de douze livres par an assise sur une maison faubourg Saint Lubin à Vendôme, au profit de Jean GOISLARD, sieur de l'Epau.

On sait aussi que cette maison ayant été incendiée, et la rente n'ayant pas été payée depuis 18 mois, une transaction intervint le 27 Décembre 1694 entre Françoise GANNERY veuve de Jean GOISLARD sieur de l'Epau, et Jehan BELLEVILLE huissier à Vendôme et Marie PEZIERE sa femme, fille de Jacques PEZIERE et de Maire LENOIR. Aux termes de cette transaction Jehan BELLEVILLE et Marie PEZIERE s'engagèrent au paiement de la rente au lieu et place de leur cohéritiers et hypothéquèrent en outre des terres leur appartenant sur la paroisse de Villerable.

Cette rente n'a cependant pas été payée, car le 29 Octobre 1709 "Pierre RASLE Seigneur de Charnay receveur des Aydes de Montfort l'Amory, mari de dame Marie DEMERE, petite fille et hérittière de Me Jean GOISLARD son aïeul", fait commandement à Pierre CHAILLON, vigneron, de ne pas "vuider ses mains" à raison des deniers, grains, meubles et argent qu'il peut devoir aux héritiers BELLEVILLE, ceux-ci devant à Marie DEMERE 15 années de rentes échues depuis le dernier Noël.

Le 06 Juin 1712, le même Pierre RASLE appelle en justice Pierre CHAILLON pour reconnaître qu'il doit à Marie PEZIERE, veuve de Jean BELLEVILLE, 8 livres de fermage pour le bordage de Sainte-Anne qui, on l'a vu, dépendait des successions de Jacques PEZIERE et Marie LENOIR.

Le 18 Janvier 1718, le sieur de BELLEVILLE, curé de Villeneuve reconnaît devoir à Marie DEMERE la rente de 12 livres et promet de la lui payer à l'avenir. Ce prêtre était fils de Jean BELLEVILLE.

Le 30 Mai 1718 "Jean RASLE" (il s'agit de Pierre RASLE) sieur de "Charnay, ci devant receveur des Aydes de l'élection de Montfort Lamory demeurant à Chateaudun, tant en son nom que comme tuteurs des enfants de lui et de deffunte dame Marie DEMERE" faute de paiement fait par Marie PEZIERE veuve de Jean BELLEVILLE et par ses enfants de la somme de 282 livres fait saisir par huissier "de par le Roy, son Altesse et Justice" sur François SASSIER laboureur à Sainte-Anne, tous les biens, deniers, grains et meubles appartenant aux héritiers BELLEVILLE.

Marie DEMERE, petite fille de Jean GOISLARD serait donc décédée avant le 30 Mai 1718. Cependant le 23 Novembre 1722, il est délivré une assignation à la requête de "Marie DEMERE, hérittière de Nicollas DEMERE, sieur de GAUSARD, gendarme de la garde du Roy et de demoiselle Magdeleine GOISLARD, ses père et mère, héritière en partie de Françoise GANERY, veuve de noble Me Jean GOISLARD sieur de l'Espau" ce qui nous renseigne avec précision sur la filiation de Marie DEMERE, mais contredit formellement la date de son décès. Au surplus nous verrons plus loin que Marie DEMERE, fille (c'est à dire célibataire) est décédée le 20 Décembre 1756. Qui était alors Marie DEMERE, épouse de Pierre RASLE ? Cette assignation est faite encore à François SASSIER pour avoir paiement de 28 années de rente due par Marie PEZIERE et Marie BELLEVILLE épouse de François LECOEUR "estaminier", fille de Jean BELLEVILLE.

François SASSIER reconnaît le 13 Février 1723 qu'il est fermier du bordage de Sainte-Anne appartenant au sieur curé de Villeneuve et à Marie BELLEVILLE femme LECOEUR, et qu'il doit 34 livres de rente qu'il offre de payer sous déduction de 2 livres qu'il a payées sur l'ordre des bailleurs pour une clef et un "sepeau" à la porte d'une chambre et une clef à la porte de la grange.`

L'affaire est portée à l'audience du bailliage de Vendôme le 15 Février 11723 et le 21 Février. François LECOEUR conteste les 28 années de rente réclamées. Il produit, à l'appui de sa contestation, le 24 Février 1723 de nombreuses quittances de la rente de 12 livres datées du 22 Mars 1700, 11 Septembre 1701, 12 Avril 1702, 08 Mars 1703 (cette dernière par Jean RASLE), 24 Février 1704 (signée DEMERE), 11 Avril 1706 (singée GAULARD), 11 Février 1704 (reçu 6 livres et un poinçon de vin valant 6 livres), 24 Août 1777 (33 livres), 04 Septembre 1713 (livraison par Pierre CHAILLON de 39 boisseaux de blé méteil vendus au sieur LEQUEUX, boulanger à Vendôme à raison de 9 sols le boisseau), 21 Juillet 1714, 12 Novembre 1711, 14 Décembre 1709, 17 Décembre 1718, 24 Janvier 1721, 22 Août 1722. Malgré la preuve ainsi apportée du paiement de nombreuses annuités de la rente, la procédure continue.

Le 09 Février 1723 est rendu le jugement déjà analysé sous le chapitre "Les enfants de Jacques PEZIERE et de Marie LENOIR" (deux exemplaires nous sont parvenus) condamnant François SASSIER a payer les 102 livres de fermage et les boisseaux de blé "suivant les mercuriales de notre Greffe pour être employés au paiement des arrérages de la rente due à demoiselle DEMERE et aux frais par elle fait et le surplus être employé aux réparations les plus urgentes à faire aux bâtiments tenus à ferme par ledit SASSIER".

Le 05 Mai 1730, demoiselle Marie DEMERE, fille majeure demeurant à Chateaudun signifie à Mathurin DERAS, cabaretier au bourg d'Azé un jugement rendu au bailliage et prévosté Royale de Vendôme le 02 Mars 1729 et lui fait faire commandement "de par le Roy notre Sire de Justice" de payer "29 années de rente foncière de la somme de 12 livres dues par chacun an". Cette rente aurait donc été payée jusqu'en 1701 ce qui est en contraction avec le commandement sus énoncé du 29 Octobre 1709 et surtout avec les quittances présentées par François LECOEUR le 24 Février 1723.

Il semble que la procédure se soit interrompue du 05 Mai 1730 ou 08 Décembre 1743 ; du moins n'en avons-nous aucune trace durant cette période de plus de 13 ans. Mais après cette interruption elle connaît un nouveau rebondissement pendant l'année 1744.

Le 08 Décembre 1743 "Marie DEMERE, fille et héritière de deffunt Nicolas DEMERE escuyer sieur de GAUSARD, gendarme de la garde du Roy et de demoiselle Magdeleine GOISLARD, ses père et mère, héritière en partie de deffunte demoiselle Françoise GANNERY, demeurant en la ville de Chateaudun" (ce qui confirme sa filiation énoncé dans la requête du 23 Novembre 1722) requiert, "le Lieutenant général civil et de police au bailliage et prévôté unis de Vendôme" d'assigner Gabriel POMMIER, marchand et Catherine DERAS sa femme, demeurant à Danzé, Anne DORE veuve de Mathurin DERAS demeurant à Flarde, paroisse de Lancé, mère et tutrice de ses enfants mineurs, François LECOEUR et Marie BELLEVILLE sa femme demeurant à Vendôme et Me BELLEVILLE prêtre curé de Villeneuve, enfants de Jean BELLEVILLE huissier et Marie PEZIERE sa femme, pour rendre exécutoire contre eux le titre nouvel du 27 Décembre 1694, pour paiement de 348 livres pour 29 années d'arrérages de la rente de 12 livres.

Cette requête nous apprend que Mathurin DERAS avait épouse Anne DORE et qu'il était décédé avant le 05 Mai 1743, qu'il laissait des enfants mineurs (nous ne lui connaissons qu'un fils : Pierre) et que Me BELLEVILLE curé de Villeneuve était le fils de Me Jean BELLEVILLE huissier.

Il est encore indiqué dans cette requête qu'il était dû 29 années de rente, comme en 1730. Peut-être s'agit-il d'une formule pour éviter une prescription trentenaire ?

On peut se demander pourquoi Marie DEMERE ne met en cause que Messire BELLEVILLE, Marie BELLEVILLE épouse LECOEUR sa soeur, Gabriel POMMIER et Anne DORE veuve de Mathurin DERAS. Pourquoi n'assigne-t-elle pas aussi François DERAS ou sa mère Magdeleine BORDIER, ni Pierre VALLERY alors veuf de Jeanne DERAS.

Toujours est-il qu'en vertu de l'ordonnance du 08 décembre 1743, Marie DEMERE fait procéder le 09 Janvier 1744 à la saisie des fermages qui peuvent être dus à Gabriel POMMIER et à Catherine DERAS sa femme, à François LECOEUR et Marie BELLEVILLE sa femme et à Messire BELLEVILLE prêtre curé de la paroisse de Villeneuve-la-Frouville (vous voilà enfin renseignés sur le nom exact de cette paroisse) par :

- Michel BRETON, laboureur à Sainte-Anne.

- François LELONG, vigneron au Bois aux Moines, paroisse de Naveil.

- Jean BAGLAND, meunier faubourg Saint-Lubin à Vendôme.

pour avoir paiement de 348 livres.

Cette saisie est signifiée le 14 Janvier 1744 aux débiteurs susnommés de la rente.

A la suite de cette signification, ces derniers mettent en cause, le 19 Février 1744, Michel YVONNEAU, compagnon gantier, demeurant à Vendôme, paroisse de Saint-Lubin afin de payer les 348 livres "attendu qu'il jouit et possède les biens sujets aux charges de ladite rente". Jean YVONNEAU était un gendre de Jacques PEZIERE et Marie LENOIR qui, on le sait, avaient souscrit le titre de 12 livres de rente 25 Décembre 1668.

Cet acte nous révèle enfin le prénom de Messire BELLEVILLE : il se prénommait "Lubin" ; peut-être à cause du Saint de la paroisse de ses parents ?

 

Le 21 Février 1744, Jean BAGLAND "déclare qu'il tient à ferme et loyer" du sieur BELLEVILLE curé de Villeneuve, de LECOEUR et sa femme, une petite "maison située rue de la Grève paroisse de Saint Lubin à Vendôme par bail verbal, à raison de 14 livres chacun an de ferme et loyer, qu'il a exactement payé depuis la jouissance jusque et y compris le terme de Saint-Jean Baptiste dernier" et qu'il offre de payer le loyer en cours à demoiselle DEMERE ou autres, "sous déduction néanmoins de 26 livres payées par lui pour dixième royal suivant la quittance du préposée aux recouvrements en cette ville".

Le 22 Février 1744, François LELONG déclare qu'il ne doit rien et convient seulement que depuis plusieurs années il cultives et façonne pour le sieur BELLEVILLE les vignes d'une petite closerie située au Bois aux Moines, paroisse de Naveil et qu'il occupe une petite maison destinée au logement du vigneron, que le loyer en est déduit sur chaque année de façon à raison de 12 livres par an.

Le 06 Mars 1744, GAUSSANT, procureur de Marie DEMERE, déclare à Me René BEQUEREAU, procureur de Me Lubin BELLEVILLE et de François LECOEUR et à Me Augustin PICHERIE, procureur de Michel BRETON et de Michel YVONNEAU, qu'il porte l'affaire (assignation du 08 Décembre 1743) à l'audience du Vendredi suivant.

Dans toutes ces pièces de procédure la filiation de Marie DEMERE est toujours soigneusement rapportée dans les mêmes termes que dans l'assignation du 23 Novembre 1722.

Le 12 Mars, DESCHAMPS, procureur au bailliage de Vendôme déclare qu'il se constitue procureur pour Anne DORE veuve de Mathurin DERAS, tutrice annuelle de ses enfants mineurs, de Gabriel POMMIER et Catherine DERAS sa femme.

Le 13 Mars, GAUSSANT, procureur de Marie DEMERE déclare aux procureurs des Consorts DERAS qu'il portera la cause "à l'audience du bailliage et prevosté unis de Vendôme le salmedy vingtroisième du présent mois".

Le 21 Mars 1744, Lubin BELLEVILLE et François LECOEUR, mari de Marie BELLEVILLE présentent au lieutenant général du bailliage et prevoté de Vendôme, une longue requête contre Marie DEMERE et contre "Michel YVONNEAU", gantier, fils et héritier de François "PICHERE" à son décès femme de Jean "YVONNEAU". Le patronyme de "PICHERE" est toujours employé dans cette requête au lieu de "PEZIERE". Le femme de Jean YVONNEAU est prénommée Françoise, or, d'après la transaction du 27 Décembre 1694, Françoise est l'épouse de Christophe FORTIN, et l'épouse de Jean YVONNEAU n'est pas prénommée. Y a-t-il interversion de prénoms ?

Cette requête est très intéressante car elle relate longuement la procédure depuis la constitution de la rente en 1668 et la transaction de 1694.

Il y est indiqué que la rente fut payée jusqu'en 1720 par Jean BELLEVILLE et Marie PEZIERE, Lubin BELLEVILLE et la femme LECOEUR depuis le décès de leur père ; que ces derniers ont demandé à Mathurin DERAS mari de Catherine PEZIERE et à Jean YVONNEAU et Françoise PEZIERE sa femme de leur rembourser la somme de 174 livres payée par eux et leur quote part dans les frais de réparation du bordage de Sainte-Anne.

Sur quoi est intervenue une sentence du 05 Mai 1725 (qui nous est parvenue) dont il y eut appel en la Cour de Parlement et le procès fut distribué au sieur PARIS, conseiller des enquêtes. Le conseiller PARIS, rapporteur, nommé par la première Chambre des enquêtes décéda et son secrétaire pareillement, en sorte qu'il n'a pas été possible de récupérer les pièces produites.

"Que depuis de temps, Mathurin DERAS et la PICHERE, sa femme, sont décédés et ont laissé une fille actuellement mariée au nommé POMMIER, marchand de bois et cabaretier au bourg de Danzé, qui ne peut se dispenser de reprendre l'instance discontinuée".

"Mais, comme indépendamment de ladite instance, ladite demoiselle DEMERE, et faute de paiement des arrérages de la rente de 12 livres, a fait procéder à différentes saisies et arrests tant sur le sieur BELLEVILLE, LECOEUR et sa femme, que sur ledit POMMIER et Catherine DERAS sa femme, les mêmes sieur BELLEVILLE, LECOEUR et sa femme, qui quant à présent ne jouissent point des biens sujets et affectés à ladite rente, et deffunt Mathurin DERAS, père de ladite POMMIER s'est emparé de l'autorité privée et sans avoir fait aucun partage, dudit bordage de Sainte Anne dont lesdits POMMIER et sa femme jouissent actuellement, et sur lequel bordage ledit POMMIER a abattu un nombre considérable de gros ormeaux propres à ouvrage de charonnage et autres arbres fruitiers pour plus de 300 livres, et ont toujours joui et perçu les fruits dudit bordage. Et que ledit YVONNEAU de son côté est jouissant d'autre partie des biens affectés et hypothéqués à ladite rente de 12 livres et a même vendu un quartier de vigne à Chanteloup paroisse de Villerable qui était pareillement hypothéqué à ladite rente".

"Toutes ces raisons ont nécessité desdits sieurs BELLEVILLE, LECOEUR et sa femme de reporter et dénoncer audit YVONNEAU audit nom, les saisies et arrests et poursuites de ladite demoiselle DEMERE, et ont conclu à ce qu'il soit condamné sur les poursuites de ladite DEMERE à payer aussi bien que ledit POMMIER et sa femme, les arrérages de ladite rente dus à la demoiselle saisissante, comme possédant seuls les biens et héritages sujets et affectés à icelle, sans préjudices de leurs autres droits contre ledit YVONNEAU que contre ledit POMMIER et sa femme, comme héritiers dudit DERAS, pour raison des arrérages par eux payés et dont les quittances ont été produites et sont restées es-mains de Monseigneur PARIS, conseiller rapporteur nommé ainsi qu'il est dit ci-dessus, protestant de reprendre et faire juger le procès pendant et indécis en la Cour de Parlement ....... au moyen de quoi lesdits sieur BELLEVILLE curé de Villeneuve et ledit LE COEUR et sa femme concluent à ce que ledit YVONNEAU soit condamné ainsi que lesdits POMMIER et sa femme à payer et acquitter les arrérages demandés par la demoiselle DEMERE, et faire cesser lesdites poursuites et leur faire donner pleine et entière mainlevée desdites saisies et arrêts .......".

Ce jargon judiciaire a au moins le mérite de résumer l'affaire et d'apporter des précisions sur les dégradations commises par la famille DERAS sur la bordage de Sainte-Anne.

Bien entendu, à la suite de cette requête, le procès qui devait venir à l'audience du surlendemain (Salmedi 23 Mars 1744) ne fut pas plaidé, bien que le 20 Mars 1744 Michel BRETON ait reconnu devoir le fermage du bordage de Sainte-Anne en vertu d'un bail, dont nous avons la copie, devant Jacques BARRE, notaire à Vendôme du 23 Avril 1736.

Ce bail avait été consenti par Mathurin DERAS, laboureur à la Musse, paroisse de Lancé, tant en son nom que se faisant fort de Gabriel POMMIER et Catherine DERAS sa femme et de Jeanne DERAS, fille, demeurant à Danzé (depuis épouse VALLERY) moyennant un fermage de 38 livres pour les bâtiments, jardin et verger, et un boisseau et demi de blé froment, mesure du marché de Vendôme pour chaque boisselée de terre. Les conditions de ce bail sont sensiblement les mêmes que dans les baux actuels ; il est toutefois stipulé une condition particulière concernant un vieux poirier dont le preneur pourra disposer "comme il lui plaira bon être".

Le 27 Mars 1744, Gabriel POMMIER et Catherine DERAS sa femme, Anne DORE veuve de Mathurin DERAS, mère et tutrice de ses enfants, s'opposent à la saisie pratiquée contre Michel BRETON par Marie DEMERE qui, disent-ils, n'a aucune qualité pour procéder, attendu que Mathurin DERAS leur père et beau-père n'était pas "établi" dans l'acte de 1694 et que les défendeurs n'ont jamais possédé aucun des biens affectés au paiement de la rente, qui sont, au contraire, possédés par les héritiers de Jean BELLEVILLE et Marie PEZIERE sa femme, seuls obligés par cet acte.

Suivent deux notes établies par le procureur précisant notamment que Michel BRETON est fermier du bordage de Sainte-Anne situé "vis à vis l'Eglise".

A nouveau la procédure semble s'enliser ; nous trouvons dans les pièces de ce dossier, seulement une note du 14 Septembre 1744 qui rappelle les qualités des parties.

Elle s'enlise si bien que le 03 Avril 1749, Marie DEMERE se fâche et demande à Me GAUSSANT son procureur de lui rendre les pièces du dossier. Voici le texte de sa lettre manuscrite :

"A Monsieur, Monsieur GOSAND procureur de Vandome à Vandome"

"Monsieur,

Je n'ai plus à espérer d'obtenir le paiement de ma rante ni DERAS à la place des BELLEVILLE de la fason dont vous m'aves oublies Je suis persuades que vous ne desaprouvrez pas que je vous prie de me ranvoier mes titres et pièces par le porteur ou si vous ne les aves pas sou la main de vouloir bien les chercher et les remetres à Monsieur BOUSI a qui j'an ecrirai après vostres reponse sy vous voules bien man faire une Je suis très parfaitement, Monsieur, vostres très hinble et obeissante servante" Marie DEMERE. De Chateaudeun ce 3 avril".

Le procureur GAUSSANT a noté sur cette lettre : "Fait réponse le 3 avril 1749".

Le procureur de Marie DEMERE étant dessaisi, la procédure prend fin (du moins provisoirement) et Marie DEMERE décède le 19 Décembre 1756 ainsi que l'atteste l'extrait du registre des sépultures de la paroisse de Saint Denis de Mondoubleau Diocèse de Blois de l'année 1756 : "L'an 1756 le 20 décembre a été inhumé par nous Prieur Curé soussigné le corps de Damoiselle Marie DEMERE, fille, décédée hier à l'âge de 75 ans ou environ, inhumé dans le grand cimetière de Céans en présence de sieur Michel LE BRETON avocat en Parlement bailly du Temple et M. Martin DESTOUCHES aussi avocat en Parlement soussigné". Signé: VERNE Prieur Curé.

Maître DESTOUCHES et LE BRETON étaient sans doute ses nouveaux avocats dont elle s'était entourée jusqu'au jour de son décès.

Marie DEMERE a plaidé pendant près de cinquante ans (de 1709 à 1756) pour essayer d'obtenir le paiement de la rente constituée au profit de ses grands parents et qui lui était incontestablement due.

Elle s'est heurtée à la mauvaise foi de la famille DERAS qui a multiplié les artifices de procédure. Elle fait pratiquer les saisies arrêts entre les mains des fermiers du bordage de Sainte-Anne ou des vignes de Villerable, mais ceux-ci soutiennent, à chaque demande, qu'ils ont régulièrement payé leurs fermages et qu'ils ne doivent rien. Les enfants DERAS déclarent, chacun, qu'ils ne sont pas tenus au paiement de la rente qu'il faut s'adresser à l'autre qui est en possession des biens hypothéqués ; mais celui-ci prétend que ni lui ni ses parents n'ont été partie à l'acte constitutif de rente et que par conséquent ce paiement ne le concerne pas. ils soutiennent même que la rente a été régulièrement payée du moins jusqu'en 1720 et produisent une copie des quittances, qui paraissent d'ailleurs vraisemblables attendu les précisions apportées (24 Février 1723) mais ces quittances ne peuvent être représentées par suite du décès du Conseiller du Parlement de Paris et de son secrétaire. Les procureurs ont multiplié en vain les actes de procédure pendant cinquante ans. On ne sait ce qu'il faut admirer le plus : ou l'opiniâtreté de Marie DEMERE pour obtenir le paiement d'une maigre rente de 12 livres, ou les artifices de mauvaise foi des enfants DERAS, ou l'incompétence des hommes de justice "commis par le Roy notre Sieur de Justice".

On se rappelle que les enfants DERAS avaient dilapidé les biens revenant en héritage à la veuve Magdeleine BORDIER et à sa petite fille, l'orpheline Magdeleine DERAS qui eut les plus grandes difficultés à leur faire rendre des comptes.

Après le décès de Marie DEMERE, la procédure reprend à la requête de ses héritiers : au bureau des insinuations de Vendôme le 18 Juin 1787, Pierre GAUSSANT, procureur, "porteur d'un titre de création de rente par les héritiers BELLEVILLE et DERAS au profit de Demoiselle Marie DE MERE de la somme de 12 livres, et se faisant fort pour les héritiers de ladite demoiselle décédée à Mondoubleau il y a quatre ou cinq mois, déclare qu'il est du à ses héritiers douze livres de rente, assignés sur deux maisons, l'une au faubourg Saint Georges et l'autre au Bois aux Moines et un quartier de vigne en deux pièces situé à Cocagne et Montaigu.....".

Le 25 Avril 1759, un certain GOISLARD, sans doute petit fils de Jean GOISLARD de l'Epau, demeurant à Nogent le Rotrou, rue Dorée, écrit à Monsieur GODINEAU de Villemarchais avocat au Parlement de Vendôme :

"Monsieur l'Abbé JULLON, Curé de Villevillon, m'ayant dit il y a quelque temps que vous auries la bonté de vous charger de notre affaire contre les hérittiers BELLEVILLE nos débiteurs pour raison d'une rente foncière de 12 livres..... indivis entre DUPUY et nous .... vous nous ferai plaisir .... si vous les poursuiviez tant à l'effet du paiement des arrérages dûs.... qu'à la reconnaissance de ladite rente..... Et si les héritiers BELLEVILLE étaient gens à vouloir se libérer de cette rente, ils pourraient même venir icy et ils verraient que nous sommes traitables, ou nous dire leurs prétentions, et vous nous en feriez part. Sinon nous vous prions de la faire assigner à vendre ; peut-être qu'il pourra se trouver quelqu'un à qui elle conviendra. Nous savons que Madame DEPREVOST notre tante a droit dans partie des arrérages jusqu'au jour de Toussaint 1757 et que le surplus appartient à Madame DUPUY et à nous comme propriétaires de la rente".

Suit l'exposé d'un autre procès qui n'a aucun rapport avec celui qui nous occupe.

"Madame DUPUY, Monsieur, me charge vous faire mille compliments de sa part".

Cette lettre porte la mention : "Fait réponse le 13 May 1759".

Le 05 Juin 1759 le même GOISLARD et "RASLE veuve GOISLARD" écrivent à nouveau à M. GODINEAU de Villemarchais, avocat au Parlement et du bailliage de Vendôme, pour répondre à sa lettre du 13 Mai précédent :

"Je vous suis bien obligé de m'avoir mis en peu au fait de cette affaire dont je ne savais pas la moindre chose .... Je n'écris point à Me GAUSSANT notre procureur, n'ayant point l'honneur de le connaître.... Nous nous flattons, Madame DUPUY et moi que vous ne nous refuserez pas votre ministère pour finir cette affaire dont nous vous faisons entièrement le maître.... Nous ne voulons de composition qu'autant que les hérittiers BELLEVILLE nous rembourseront le principal de ladite rente...".

Il lui recommande toutefois d'être prudent dans sa transaction car il existe un partage sous seing privé entre Madame DUPUY, Madame du PREVOST et lui qui n'a pas été "controlé" (enregistré).

"Nous nous en rapportons entièrement à vous et vous laissons le maître de tout.... Une fois la Saint Jean passée, nous espérons que s'ils (les héritiers BELLEVILLE) n'approchent pas de belle grâce, vous devrez bien faire agir le procureur et les poursuivre comme il convient, voulant absolument finir cette affaire. S'ils ne veulent pas racheter la rente, vous aurez la bonté de ne pas différer à prendre un titre nouvel et d'y faire détailler tous les fonds au moyen de quoy la rente se trouvera bien hypothéquée..... M. DUVAL (le porteur de la lettre) vous remettra un sac dans lequel j'ai mis tous les titres .... concernant cette rente ... y compris ce titre primordial du 27 décembre 1668 passé devant Jullien PINEVOYSE notaire et tabellion à Vendôme.... etc....".

"Madame DUPUY vous fait mille compliments".

En note : "Fait réponse le 09 Juin 1759"

Le 24 Octobre 1759 le sieur GOISLARD écrit à nouveau à Me GODINEAU pour lui rappeler son affaire, car il n'en a pas de nouvelles. "Madame DUPUY, ma femme et mes filles vous font mille compliments ainsi qu'à Madame votre épouse que j'assure de mon respect".

En notre : "J'ai fait réponse le 26" (le surplus illisible).

Nous ignorons quelle procédure entreprit Me GODINEAU pour avoir paiement de la rente, ni même qu'il s'en est occupé réellement. En effet, deux années passent encore et M. JALLON estime nécessaire de venir voir son procureur à Vendôme pour hâter la solution :

"Le 6 novembre 1761, au Greffe des affirmations de voyage du bailliage Royal de Vendôme est comparu Me André JASLON, prestre curé de la paroisse de Villevillion au Perche, lequel au nom et comme héritier en partie de deffunte demoiselle DEMERE et assisté de Me Pierre GAUSSANT son procureur, nous a assuré et affirmé être venu expres dudit lieu en cette ville à cheval distant de dix lieues, dès le jour d'hier, pour donner ordre à son procureur de poursuivre une ancienne instance que la deffenderesse demoiselle DEMERE a au siège contre lesdits héritiers BELLEVILLE, dont il a requis acte à lui octroyé et a signé" (signé JALLON, curé de Villevillon, GAUSSANT et BRETON).

On notera que ce BRETON est Léonard BRETON, greffier, époux de Magdeleine DERAS.

Deux années s'écoulent encore (il y a maintenant 95 ans que le titre de rente a été constitué par Jacques PEZIERE !) et enfin on arrive aux termes de cette longue procédure par un acte en date à Mondoubleau du 05 Novembre 1763 aux termes duquel :

 

"JALLON prestre curé de Villevillon fondé de pouvoir de :

Dame Elisabeth Angélique RASLE de Charnay, veuve de Me Jean GOISLARD sieur DUPUY, avocat au Parlement Conseiller du Roy en l'élection de Mortagne au siège de Nogent le Rotrou,

Me Gabriel Alexandre GOISLARD avocat en Parlement et de dame Charlotte RASLE son épouse,

Hérittiers pour moitié de deffunte demoiselle Marie DEMERE.

Suivant leur procuration etc......"

"Et Me Jean LE BRETON avocat en Parlement et au bailliage Royal de Mondoubleau et Président du grenier à sel dudit lieu.

De dame Charlotte DEMERE veuve de messire Etienne de PREVOST, Chevallier de l'Ordre Royal et Militaire de Saint-Louis ancien Lieutenant Colonel du Régiment de Conty-infanterie.

Herittière pour l'autre moitié de ladite deffunte demoiselle Marie DEMERE

Suivant procuration etc....."

"Reconnaissons qu'en conséquence de la transaction passée entre nous et les héritiers et représentants BELLEVILLE devant Me MARGANNE notaire Royal à Vendosme le (en blanc dans le texte) 1760, lesdits héritiers BELLEVILLE nous ont payé et remboursé la somme de 440 livres pour les causes de ladite transaction, savoir :

Celle de 240 livres pour continuation et amortissement de douze livres de rente foncière dont ils étaient débiteurs envers la succession et hérittiers de ladite deffunte demoiselle DEMERE.

Et celle de 200 livres a quoy nous dits JALLON et LE BRETON esdits noms nous nous sommes restraints pour les arrérages de ladite rente de douze livres eschus jusqu'au jour de ladite transaction ..... le tout néanmoins sous déduction d'une somme de quarante deux livres reçue quant ce jour par moy LE BRETON de (en blanc) marchand boulanger à Villier l'un desdits hérittiers en trois poinçons de vin rouge dont je lui ay donné quittance ....

A moyen duquel paiement les héritiers et représentant BELLEVILLE demeurant vallablement quittes et dechargés des causes de la susditte transaction,.... et les herittages sur laquelle ladite rente était assignée dechargés d'ycelle et pourront lesdits représentants BELLEVILLE faire faire mention tant sur le titre créatif de ladite rente qui leur a présentement été remis avec tous les titres et reconnaissances et les procédures faites contre eux qu'en marge de la susdite transaction".

(Cette remise des pièces de procédure explique que nous les possédions du chef de famille DERAS).

Il est bien difficile de constituer la généalogie de la famille GOISLARD à l'aide des pièces du procès.

Jean GOISLARD, sieur de l'Epau et Françoise GANNERY eurent une fille, Magdeleine GOISLARD qui épousa Nicollas DEMERE, sieur de GAUSSARD, gendarme du Roy, tous deux décédés avant 1722.

Nicollas DEMERE et Magdeleine GOISLARD eurent une fille : Marie DEMERE (23 Novembre 1722) qui décéda à 75 ans environ, célibataire, le 19 Décembre 1756.

Ils durent avoir sans doute une autre fille : Charlotte DEMERE qui épousa Etienne de PREVOST.

Et ils durent avoir une troisième fille qui épousa Pierre RASLE seigneur de Charnay. Elle décéda entre le 29 Octobre 1709 et le 30 Mai 1718. Dans les deux actes de cette date elle est prénommée "Marie". C'est très vraisemblablement une erreur car celle qui se prénommait réellement Marie décéda en 1756 et était célibataire ; il est au surplus surprenant que les deux soeurs aient le même prénom.

Cette troisième fille épouse RASLE de Charnay eut deux filles :

1°) Elisabeth Angélique qui épousa Jean GOISLARD, sieur DUPUY, demeurant à Nogent le Rotrou.

2°) Charlotte qui épousa Gabriel Alexandre GOISLARD.

Ces deux dernières étaient donc bien les nièces du demoiselle Marie DEMERE, ainsi qu'il est indiqué au début de la procédure.

Mais quelle parenté y avait-il entre Marie DEMERE et l'Abbé JALLON (06 Novembre 1761) ?

Quant à Jean GOISLARD et Gabriel Alexandre GOISLARD ils devaient être les enfants ou petits enfants de Jean GOISLARD, sieur de l'Epau et de Françoise GAUNERY.

 

 

La longue procédure que nous venons de relater nous apporte des précisions intéressantes sur la famille DERAS et nous permet de mieux connaître ses activités, les biens qu'elle possédait et les lieux où elle vécut. Avec un peu d'imagination on voit revivre les membres de cette famille au travers de ce procès qui dura presque un siècle.

LES FAMILLES VALLERY ET HOUSSET

 

Nous avons vu que, parmi les autres enfants de Mathurin DERAS et de Catherine PEZIERE, figurait Jeanne DERAS qui avait épousé Pierre VALLERY, laboureur à Danzé. Elle est décédé en 1741.

Ce Pierre VALLERY était veuf en premières noces d'Anne HOUSSET qui dû décéder en 1724 ou avant.

Un partage des biens dépendant de la communauté VALLERY-HOUSSET eut lieu le 23 Janvier 1725 entre :

- Pierre VALLERY, alors remarié à Jeanne DERAS.

- Anne VALLERY, épouse de Thomas PALLY, laboureur aux Brosses, paroisse de Danzé et qui sera plus tard laboureur à Rocé.

- Pierre VALLERY.

- Madeleine VALLERY.

- Françoise VALLERY.

Ses quatre enfants alors vivant. Il avait eut de son mariage avec Anne HOUSSET, une autre fille : Marie, décédée avant le 23 Janvier 1725.

Les deux extraits de ce partage que nous possédons ne contiennent aucune désignation des biens partagés si ce n'est une chambre à cheminée et un petit jardin de douze boisselées dont la situation n'est même pas indiquée.

Ce Pierre VALLERY étant sans doute le fils de Pierre VALLERY, maréchal de Forges qui était témoin à un acte du 11 Avril 1691 sus analysé.

Le 06 Janvier 1734 intervient un partage des biens dépendant de la succession d'Anne HOUSSET entre :

- Pierre VALLERY le jeune.

- Charles DORE, laboureur aux Bigotteries, paroisse de Danzé, époux de Madeleine VALLERY.

- Thomas PALLY dit le jeune, laboureur, demeurant à Rocé, époux d'Anne VALLERY.

Pierre VALLERY père vivait encore, mais sa fille Françoise était décédée.

Les biens partagés comprennent le bordage des Bigotteries, commune de Danzé et des terres à la Ville-aux-Clers et Saint-Firmin des Prés, d'une valeur de 800 livres. Le premier lot a été choisi par Charles DORE (les Bigotteries, environ 90 boisselées).

Le 25 Juin 1735 Charles DORE fait une déclaration d'héritage aux Religieux de l'Abbaye de la Trinité de Vendôme à cause des terres du fief et Seigneurerie du prieuré de Danzé situées au Moulin à Vent, à la Douardière, à la Borde, et au bourg de Danzé, lui appartenant à cause de Madeleine VALLERY sa femme à laquelle ces terres sont échues du chef de la succession de Pierre VALLERY et d'Anne HOUSSET ses père et mère.

Les titres de propriété de la ferme de la Foresterie contiennent un autre partage du 23 Janvier 1734 entre Thomas PALLY, Pierre VALLERY le jeune et Charles DORE. Les terres de Danzé attribuées à Pierre VALLERY le jeune furent vendues à Léonard BRETON par sa fille, Marie VALLERY épouse de Pierre DIAN le 22 Mai 1773 (voir ci-après Léonard BRETON).

On ignore quand décéda Pierre VALLERY. Il n'eut pas d'enfants de son deuxième mariage avec Jeanne DERAS.

Qui était Anne HOUSSET sa première épouse ?

La réponse nous est fournie par divers actes d'une procédure en "retrait lignager".

Cette procédure nous permet de comprendre le mécanisme du retrait lignager qui permettait à un héritier de racheter un immeuble dépendant de sa famille, vendu par un de ses cohéritiers.

Elle présente en outre le grand intérêt de nous ramener à la famille LANCELOT et de nous fournir des précisions sur les descendants de Thomas LANCELOT et d'Anne BRILLARD son épouse.

Nous avions un peu perdu de vue cette famille LANCELOT et nous allons la retrouver par le biais des familles VALLERY, DERAS, PEZIERE et MELOT, puisque, rappelons-le, Perrine MELOT avait épousé Pierre LANCELOT, frère du procureur Jehan LANCELOT et de Thomas LANCELOT.

Ce n'est cependant pas du fait de cette descendance que s'exercera le retrait lignager dont nous allons parler, mais en raison de la parenté entre Anne HOUSSET première épouse de Pierre VALLERY et de Magdeleine BORDIER, qui descendaient toutes deux de Thomas LANCELOT.

Le 09 Février 1768, pardevant Me Michel PARRAIN, notaire royal en Vendômois, Blésois et Chartrain, résidant à La Ville-aux-Clercs.

- Charles DORE, garçon majeur, demeurant à Chatillon le Roy en Gatinois.

- Jacques PETIT, sacriste de la paroisse de René (Renay) et Madeleine DORE sa femme.

- Michel VALLERY, laboureur à Busloup, au nom et comme tuteur de Marie DORE, fille mineure.

vendent à Pierre FOUQUET, maréchal de Forges et Marie Anne BLAIN sa femme, demeurant à Danzé : une chambre à cheminée, un grenier dessus, la moitié d'une cave dessous, une écurie, une petite grange, la moitié d'un jardin, le tout situé au bourg de Danzé et diverses boisselées de terres situées aux Bigotteries et aux Vieilles Métairies, au Moulin à Vent, aux Châteaux et autres lieux, le tout indivis avec "les représentants PALLY" (environ 70 boisselées pour la moitié vendue), et douze livres 10 sols de rente foncière à recevoir de Denis POMMIER.

Ces biens dépendaient des successions de Charles DORE et Madeleine VALLERY sa femme, père et mère des vendeurs, en vertu d'un partage du 16 Janvier 1764 qui ne nous est pas parvenu.

Cette vente eut lieu moyennant le prix de 415 livres et 24 livres "pour vin et marché, épingle et pot de vin".

Cet acte nous apprend les noms des enfants de Charles DORE et Madeleine VALLERY décédés avant le 16 Janvier 1761, car le partage de leur succession, à cette date, est mentionné dans la vente que nous avions d'ailleurs citée en étudiant la famille FOUQUET.

Un mois après cette vente, le 08 Mars 1768 "Léonard BRETON" commis à l'exercice du Greffe du bailliage de Vendôme, "et Madeleine DERAS son épouse, fille de deffunt François DERAS et de Madeleine BORDIER, laquelle BORDIER était fille de Pierre BORDIER et de dame MICHON, laquelle MICHON était fille de Thomas MICHON et de Renée LANCELOT, qui était soeur germaine d'Anne LANCELOT et de ...... (en blanc) HOUSSET, lesquelles Renée et Anne LANCELOT étaient filles de Thomas LANCELOT et d'Anne BRILLARD" assignent en retrait lignager Pierre FOUQUET, maréchal de forge à Danzé, en raison de la vente qui lui a été faite par les enfants DORE le 09 Février 1768. Il est expliqué dans cette assignation, que les vendeurs étaient "enfants de Charles DORE et de Madeleine VALLERY, laquelle VALLERY était fille de Pierre VALLERY et d'Anne HOUSSET sa première femme, laquelle HOUSSET était fille de ...... (en blanc) HOUSSET et de ladite Anne LANCELOT qui était soeur germaine de ladite Renée LANCELOT femme de Thomas MICHON...... et à ce moyen ladite BRETON cousine dudit DORE....".

Léonard BRETON est Madeleine DERAS offrent à Pierre FOUQUET de lui rembourser le prix de son acquisition et les frais.

Le 16 Avril 1768, Gilles François de TREMAULT, conseiller du Roi, Lieutenant Général Civil et de Police du bailliage Royal de Vendôme, ordonne d'établir la justification de la parenté des parties.

Cette justification est fournie au Lieutenant Général par un acte signifié le 05 Mai 1768 qui renvoie l'affaire à l'audience du Vendredi 13 Mai suivant.

Il est expliqué dans cet acte que l'acte de baptême de Charles DORE "le fait naître" de Charles DORE et de Madeleine VALLERY, qui s'étaient mariés le 10 Novembre 1733, qu'il résulte de son acte de mariage que cette dernière était fille de Pierre VALLERY et d'Anne HOUSSET et que d'après son acte de baptême elle était née en 1708.

Qu'Anne HOUSSET était la fille de René HOUSSET et de Marie LANCELOT ce qui est justifié par son acte de mariage du 10 Juin 1693.

Que Marie LANCELOT était la fille de Thomas LANCELOT et d'Anne BRILLARD ainsi qu'il résulte d'une sentence du bailliage du 26 Janvier 1682.

Que dans l'acte de mariage de Pierre VALLERY et d'Anne HOUSSET, Thomas MICHON y est qualifié oncle d'Anne HOUSSET "et il l'était en effet ayant épousé sa tante Renée LANCELOT.... Ce Thomas LANCELOT et cette Anne BRILLARD sont donc incontestablement les trisaïeuls de Charles DORE". La filiation de Madeleine DERAS avec Thomas LANCELOT est également dûment établie par les actes de baptêmes, notamment celui d'Anne MICHON née le 21 Avril 1683. Anne MICHON a épousé Pierre BORDIER le 08 Octobre 1708.

Sur ces justifications indiscutables, l'affaire est jugée, comme prévu, le Vendredi 13 Mai 1768 et le retrait lignager au profit de Léonard BRETON et de Madeleine DERAS est prononcé contre Pierre FOUQUET.

On remarquera qu'il est fait référence dans l'acte ci-dessus du 05 Mai 1768, à une sentence du bailliage de Vendôme du 26 Janvier 1682 que nous avons analysée à la fin de l'étude sur Thomas LANCELOT (nomination d'un curateur à sa succession à la requête de Thomas MICHON et Renée LANCELOT sa femme). Nous avons vu aussi qu'aux termes de cette ordonnance du 26 Janvier 1682, il est dit que Renée LANCELOT épouse de Thomas MICHON avait renoncé à la succession de son père "ainsi que ses autres soeurs". Renée LANCELOT avait donc au moins deux soeurs. Nous ne possédons aucun document sur l'une de ceux deux soeurs et nous ignorons même son prénom. Mais nous savons que l'autre soeur se prénommait Anne et qu'elle avait épousé René HOUSSET, ce qui est d'ailleurs confirmé par l'assignation du 08 Mars 1768 ci-dessus analysée et par l'ordonnance du 16 Avril 1768 y faisant suite. Pourquoi Anne LANCELOT est-elle prénommée "Marie" dans l'acte du 05 Mai 1768 ? Etait-ce son véritable prénom ? Ou s'agit-il d'une erreur ?

Nous revenons à la conclusion de ce retrait lignager.

Le 20 Mai 1768, pardevant Gilles François de TREMAULT, Lieutenant Général Civil et de Police du bailliage Royal de Vendôme, Léonard BRETON paye à Pierre FOUQUET 276 livres 13 sols 4 deniers en remboursement du prix principal de son acquisition. 24 livres pour pot de vin et 63 livres 5 sols 5 deniers pour frais. Pierre FOUQUET "a pris et serré" cette somme totale de 363 livres 18 sols 9 deniers et a remis à Léonard BRETON l'expédition de son contrat d'acquisition "au moyen de quoi ledit retrait demeure bien et valablement exécuté".

Le prix d'acquisition était en réalité, nous l'avons vu, de 415 livres ; mais le tiers de ce prix soit 138 livres 6 sols 6 deniers revenant à Marie DORE, n'avait pas été payé en raison de sa minorité par Pierre FOUQUET (c'est pourquoi il n'est remboursé que les deux tiers, soit 276 livres 13 sols 4 deniers).

Aussi; le 04 Juillet 1769, Marie DORE, fille majeure demeurant au Vigneau, paroisse d'Epiais, reconnaît-elle avoir reçu "en écus de 6 livres et autres monnaies ayant cours", de Léonard BRETON, la somme de 138 livres 6 sols 8 deniers "pour son tiers à elle appartenant dans le prix principal dudit contrat de vente, et 7 livres 6 deniers pour les intérêts eschus et courus depuis la datte dudit contrat jusqu'à ce jour, déduction des vingtièmes et deux sols pour livre" soit la somme de 145 livres 7 sols 2 deniers.

"Au moyen de quoi elle approuve, confirme et ratifie laditte vente ci-dessus et consent qu'iceluy sieur BRETON soit et demeure propriétaire à toujours desdits héritages mentionnés audit contrat".

 

Avant de clore cette étude de la famille HOUSSET, rappelons de François FOUQUET, laboureur à la Lombarderie, paroisse de Danzé (voir famille FOUQUET) avant de se remarier avec Julienne PITARD, avait épousé en premières noces Anne Marie HOUSSET, décédée vers 1720-1730. C'était peut-être une soeur d'Anne HOUSSET première épouse de Pierre VALLERY ?

Signalons également que nous possédons un "extrait des registres des baptêmes, mariages et sépultures faits dans l'église paroissiale Saint-Martin de Danzé" ainsi libellé :

"Le troisième jour de décembre mil sept cent dix, fût par nous prestre soussigné, baptisé Balthazar né dudit jour du légitime mariage de Julien NEVEU et de Anne HOUSSET son épouse. Le Parrain fut Nicolas MALET et la Marraine Catherine HOUSSET qui a déclaré ne scavoir signer de ce requise. Ainsi signé MALET et B. GUION".

Encore une Anne HOUSSET ! Etait-ce aussi une fille de René HOUSSET et d'Anne (alias Marie) LANCELOT ? Et Catherine HOUSSET, la Marraine, était-elle une autre soeur, ou la soeur de René HOUSSET ?

Pourquoi cet acte de baptême nous est-il parvenu ?

Nous ignorons complètement qui était ce Balthazar NEVEU ?

LES FAMILLES MICHON, BORDIER ET BRETON

 

Il nous reste à étudier les familles MICHON, BORDIER et BRETON dont les membres sont les ascendants directs de Madeleine BRETON qui épousa Claude Joseph FERRON et dont la fille, Madeleine FERRON épousa François LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

Mais auparavant il ne semble pas inutile de rappeler sommairement les parentés des familles déjà étudiées, afin de préciser les liens qui les unissaient avec les familles MICHON, BORDIER et BRETON.

L'ancêtre commun est Pierre LANCELOT qui était laboureur à Danzé à la fin du seizième siècle.

Son fils Jehan eut trois enfants :

1°) Jehan LANCELOT, le procureur, qui décéda sans enfant.

2°) Pierre LANCELOT qui épousa Perrine MELOT, ce qui nous a permis d'étudier la famille MELOT et particulièrement les descendants de Julienne MELOT mère de Jacques PEZIERE dont une fille, Catherine, épousa Mathurin DERAS. Une fille de Mathurin DERAS, Jeanne, épousa Pierre VALLERY qui était veuf en premières noces d'Anne HOUSSET, petite fille de Thomas LANCELOT.

3°) Thomas LANCELOT qui épousa Anne BRILLARD.

Par la famille BRILLARD nous avons fait connaissance des familles FOUQUET et PITARD aux nombreuses ramifications.

Deux groupes de familles collatérales encadrent harmonieusement la famille LANCELOT :

D'un côté les MELOT, PEZIERE et DERAS, ces derniers finissant par se raccorder aux descendants de Thomas LANCELOT.

De l'autre côté, les BRILLARD et leurs descendants : les DENYAU et les FOUQUET avec leurs alliés les PITARD.

On verra (et nous l'avons déjà signalé dans les chapitres précédents) que c'est la descendance de Thomas LANCELOT, Madeleine DERAS et son mari Léonard BRETON qui va devenir propriétaire de la majeure partie des biens de ces diverses familles alors que son arrière arrière grand-père, Thomas LANCELOT était mort après avoir dilapidé toute sa fortune.

Léonard BRETON et Madeleine DERAS transmettront ainsi à leur petite fille Madeleine FERRON et à son mari François LEMAIGNEN-VILLORCEAU les biens immobiliers qui appartenaient aux diverses familles que nous venons d'étudier, descendantes ou alliées de Pierre LANCELOT, ce qui explique que nous soyons en possession des nombreux titres de propriété qui ont permis de reconstituer leur histoire.

LA FAMILLE MICHON

 

Nous avons vu que Thomas LANCELOT, décédé le 10 Juillet 1663 et Anne BRILLARD sa femme, décédée avant le 08 Novembre 1681 avaient eu trois filles, d'après la requête du 26 Janvier 1682 ayant nommé un curateur à la succession vacante de Thomas LANCELOT (Jean RAPISCOT ou RAPICAULT, d'après l'acte du 30 Octobre 1683).

Le prénom et la vie de l'une de ces filles nous sont totalement inconnus.

L'autre fille était Anne LANCELOT épouse de René HOUSSET.

La troisième était Renée LANCELOT épouse de Thomas MICHON, marchand et laboureur, décédé avant le 02 Juillet 1708 ainsi qu'il résulte d'un partage de sa succession et de celle de sa femme dont nous possédons trois exemplaires dont un, partiel, annexé à un acte du 04 Juillet 1650, déjà analysé dans l'étude sur Thomas LANCELOT, et qui lui sert de chemise.

"Ensuivent quatre lots des partages des logis et héritages et choses hereditaux estant des successions de deffunt Thomas MICHON vivant marchand laboureur et Renée LANCELOT sa femme, situés en cette paroisse de Chauvigny et au bourg et paroisse de Danzé, appartenant à :

- Pierre GAULTIER mary de Renée Madeleine MICHON sa femme.

- Anne, Jeanne et Madeleine MICHON filles desdits deffunts MICHON et LANCELOT et leurs héritières chacune pour une quatrième partie.

Iceux lods et partages faits par ledit Pierre GAULTIER et laditte Renée Madeleine MICHON sa femme demeurant à la Bord en cette paroisse de Chauvigny, ladite MICHON aînée esdittes successions, pour les présenter à André DENIAU marchand demeurant au Bourg de Danzé tuteur desdites Anne, Jeanne et Madeleine MICHON et curateur aux causes et pour le fait desdits partages de ladite Anne MICHON, à René RIVIERE aussi marchand demeurant audit bourg de Danzé, curateur aux causes et actions et pour le fait lesdits partages de ladite Jeanne MICHON, et à Charles CHEVEREAU laboureur demeurant à la Mornais paroisse dudit Danzé aussy curateur aux causes et actions et pour le fait d'iceux partages de ladite Madelaine MICHON, pour, par iceux DENIAU, RIVIERE et CHEVEREAU prendre choisir et accepter pour lesdites mineures celuy desdits lods qu'ils jugeront à propos, chacun à leur rang, suivant la coutume d'Anjou dans laquelle la plus forte et grande partie desdits logis et héritages sont situés......".

Notons qu'Anne, Jeanne et Madeleine étaient mineures le 02 Juillet 1708. Nous savons d'ailleurs qu'Anne était née le 21 Avril 1683 (retrait lignager Léonard BRETON sus analysé). Nous verrons plus loin que Jeanne était majeure dans un acte du 13 Novembre 1716, qu'elle était décédée à l'âge de 35 ans le 18 Août 1725 et qu'elle s'était mariée après le 13 Novembre 1716, alors que Madeleine était encore mineure. Rappelons aussi qu'André DENIAU, tuteur des mineures MICHON était marguillier de l'église de Danzé dans un acte du 07 Novembre 1710 (voir ci-dessus : René MELOT) et qu'il était le petit fils de Magdeleine BRILLARD (voir ci-dessus : Magdeleine BRILLARD).

On pourra lire avec intérêt ce partage, parfaitement lisible, pour retrouver les lieux dits et les joignants des biens partagés, dont plusieurs étaient des membres des familles FOUQUET, DAUVERGNE et BRILLARD.

Chacun des quatre lots comprenait "un corps de logis" et des terres (environ 150 boisselées dans chaque lot). Les immeubles du premier lot étaient situés paroisse de Chauvigny, sauf deux arpents, paroisse de la Chapelle Vicomtesse et un quartier de pré au Marais, paroisse de Danzé, proche la Douardière, "joignant le ruisseau faisant séparation des fiefs de la Chapellenie de Lisle et de l'Abbaye de Vendôme". Les terres et corps de logis des trois autres lots étaient situés à Danzé (les Bigotteries, le Moulin à Vent, les Saulettes, le Paillarderie, Bourgneuf, etc...). Les corps de logis du chaque lot étaient assez modestes ; par exemple celui du premier lot comprenait :

"Un corps de logis composé d'une chambre de maison manable ayant four et cheminée le matériel, grenier dessus, ledit four couvert de chaume, une autre chambre au bout de laditte maison avec un grenier dessus couvert de bardeau, le tout sous un même faite, cour et issus devant lesdits logis, un jardin derrière, le tout en un tenant situé au lieu de l'Etre au Four en cette paroisse de Chauvigny....".

Ce partage précise longuement les droits de passages réciproques, le sort des récoltes en terre, les grains, rentes et créances. "Et sera la marne qui est audit bourg de Danzé en monceau sur le trou, partagée par tiers entre les deuxième, troisième et quatrième lods".

Il est précisé que le bordage de l'Etre au Four paroisse de Chauvigny "dépendait de la succession de Thomas MICHON et de ses propres". Thomas MICHON, dont nous ignorons tout des ses ancêtres, devait donc être originaire de Chauvigny. Il n'est donné aucune précision sur l'origine des autres immeubles ; il est vraisemblable que ce devait être des acquêts de la communauté MICHON-LANCELOT, puisque Renée LANCELOT n'avait recueilli aucun bien dans la succession de son père.

 

Le 19 Juillet 1708, pardevant Jacques BODINEAU, notaire et tabellion à la Châtellenie de Chauvigny il est procédé à la choisie des lots :

- Le premier revient à Anne MICHON.

- Le deuxième à Magdeleine MICHON.

- Le troisième à Jeanne MICHON.

- Le quatrième à Renée Magdeleine MICHON, épouse de Pierre GAULTIER.

Nous possédons des déclarations d'héritage aux Religieux de l'Abbaye de la Saint Trinité de Vendôme par Jeanne MICHON du 22 Mai 1715, par Pierre VALLERY du 04 Mai 1686, par Thomas MICHON du 27 Janvier 1686 et par Toussaint LANCELOT, prêtre à Danzé du 17 Juin 1644 concernant des terres à Danzé.

 

Renée Magdeleine MICHON et Pierre GAULTIER son mari firent un échange le 08 Mars 1723 avec Julien BOIS, laboureur à Danzé. Ils étaient tous deux décédés avant le 04 Février 1732 (voir litige avec Jacques DUMANS ci-après) et ils laissaient deux enfants :

1°) René GAULTIER qui épousera Marie LATRON, laquelle, après son décès en 1765 se remaria avec Jacques MARAIS.

2°) Renée GAULTIER qui épousera Pierre DUMANS et qui est décédée avant le 1er Avril 1746.

 

Jeanne MICHON épouse de Jacques DUMANS, charron à Chauvigny est décédée le 18 Août 1725 âgée de 35 ans, après avoir reçu pendant sa maladie tous les sacrements des mourants ainsi qu'il en résulte de son acte de décès dressé en présence de son mari, d'Anne MICHON, alors veuve de Pierre BORDIER et de Michel DUMANS, son beau père (voir partage du 13 Novembre 1716 ci-après). Elle eut une fille : Marie DUMANS décédée à Danzé le 19 Octobre 1735, âgée de 15 ans "après avoir reçu les Sacrements d'Eucharistie et d'Extrême-Onction". Jacques DUMANS se remariera en 1732 avec Catherine NOBLET dont il eut des enfants (voir ci-après "litige avec Jacques DUMANS"). Il est décédé entre le 27 Octobre 1738 et le 1er Avril 1746.

 

Madeleine MICHON épouse de Georges CHOUSTEAU est décédée sans enfant avant le 21 Juin 1720.

Il résulte en effet d'un partage de cette date, qu'elle laissait pour héritières Renée MICHON, Anne MICHON et Jeanne MICHON, ses soeurs. Les biens partagés sont ceux qui composaient le deuxième lot qui lui était échu dans le partage du 02 Juillet 1708.

 

Nous n'avons pas d'autres documents sur Renée-Magdeleine MICHON, Jeanne MICHON et Madeleine MICHON, mais nous sommes beaucoup mieux renseignés sur Anne MICHON qui épousera Pierre BORDIER.

LA FAMILLE BORDIER

 

Pierre BORDIER, laboureur à Danzé épousa le 08 Octobre 1708 Anne MICHON, née le 21 Avril 1683, fille de Thomas MICHON et de Renée LANCELOT (voir retrait lignager Léonard BRETON ci-dessus).

Le 08 Novembre 1711 il est procédé entre Pierre BORDIER et Pierre HASLOUIN au nom et comme mari d'Anne BORDIER au partage des immeubles dépendant des successions de Pierre BORDIER en son vivant marchand et de Marie PILLON sa femme, leur père et mère.

Les biens partagés comprennent des immeubles situés à la Gaste d'Epuisay, échus à Anne BORDIER, et environ trente boisselées de terre à la Chaslerie, paroisse de Savigny échues à Pierre BORDIER.

Le 25 Octobre 1717, Pierre BORDIER et Anne MICHON sa femme se reconnaissent débiteurs envers "Françoise GUERRY, veuve de feu Me Emmanuel DEMARESCOT en son vivant Chevallier Seigneur DELPHIN de Chicheray et autres lieux, demeurant à Chicheray paroisse de Pezou" de sept livres dix sols de rente annuelle et perpétuelle assignée sur un corps de logis à l'Etre au Four, paroisse de Chauvigny et huit boisselées de terre au même lieu. Cette rente est constituée moyennant un versement de 150 livres payées par la dame DELPHIN. Le corps de logis et les terres assignés à la garantie de cette rente sont ceux provenant du partage du 02 Juillet 1708.

Cet emprunt nous porte à croire, que Pierre BORDIER ne devait pas avoir une situation très florissante. Il ne devait posséder que les trente boisselées (1 hectare 55) lui venant de ses parents et les immeubles (150 boisselées environ) recueillis par sa femme dans les successions de ses parents et de sa soeur.

Le 28 Mai 1721, il est laboureur à Chappe d'Ane, paroisse de Saint-Firmin et il fait une déclaration d'héritage à la Seigneurie des Bigotteries pour les terres qu'il possède dans ce fief.

Il décède avant le 18 Août 1725 puisqu'Anne MICHON est qualifiée de veuve de Pierre BORDIER dans l'acte de décès de sa soeur Jeanne survenu à cette date.

Anne MICHON est elle même décédée à Villiers le 16 Avril 1744. L'acte de décès est dressé en présence de René DOLIVEUX son deuxième gendre.

Du mariage de Pierre BORDIER et d'Anne MICHON est née à Danzé le 1er Mars 1713, Magdeleine BORDIER, leur seule enfant, qui avait pour parrain un certain Michel TAIZE et pour marraine Madeleine MICHON sa tante.

 

A - Magdeleine BORDIER

Nous possédons de nombreux documents sur Magdeleine BORDIER qui épousa en premières noces François DERAS (contrat de mariage du 02 Octobre 1727, elle avait donc 14 ans !), en secondes noces, René DOLIVEUX (contrat de mariage du 02 Août 1743) et, en troisièmes noces, le 27 Mai 1751, Louis MENANT. Elle décéda le 09 Mai 1766.

 

Premier mariage avec François DERAS

Nous avons vu en étudiant la famille DERAS que Magdeleine BORDIER avait épousé François DERAS, d'abord laboureur, puis soixton (bordager) à Azé et ensuite (d'après l'acte de décès de Magdeleine BORDIER) marchand de bois, fils de Mathurin DERAS et de Catherine PEZIERE.

 

De ce mariage sont issus deux enfants :

1°) Madeleine DERAS, née à Azé le 12 Septembre 1733 qui épousera Léonard BRETON.

2°) François DERAS qui est né un an après sa soeur (inventaire du 29 Juillet 1743) et qui est décédé mineur en Septembre 1747, ainsi que nous l'avons vu par un acte du 12 Novembre 1755 analysé ci-dessus sous le titre "Famille DERAS".

 

François DERAS, père, est décédé le 25 Mars 1735, un peu plus d'un mois avant son père Mathurin DERAS (voir ci-dessus "Famille DERAS").

Deux ans après son veuvage, Magdeleine BORDIER achète le 08 Avril 1737 de Julien BOIS, marchand et de Marie DENIAU sa femme, demeurant à la Douardière, paroisse de Danzé, une petite grange au bourg de Danzé joignant les biens qu'elle y possède, moyennant 100 livres payés comptant en un écu d'or et vingt quatre livres et treize écus de chacun six livres. Il est précisé dans cet acte que cette grange appartenait en propre à Marie DENIAU comme lui provenant de la succession d'Anne BRILLARD sa mère. Qui était cette Anne BRILLARD ?

Magdeleine BORDIER possédait alors le bordage de l'Etre au Four, paroisse de Chauvigny et corps de logis et des terres au bourg de Danzé lui provenant de la succession de sa mère, dont le tiers des immeubles provenant de la succession de sa tante Madeleine MICHON, les 30 boisselées de terre à la Chaslerie, paroisse de Savigny provenant de la succession de son père, et les biens de son mari, notamment dans le bordage de Sainte-Anne, alors accaparé par la famille DERAS.

 

 

Inventaire après le décès de François DERAS

 

Lors du décès de son mari, Magdeleine BORDIER avait 22 ans. Elle alla habiter à Danzé chez sa mère où elle éleva ses deux enfants âgés, la fille de 18 mois et le fils de quelques mois à peine. Elle dut intenter plusieurs procès pour défendre son patrimoine. Nous avons déjà exposé (ci-dessus "Famille DERAS") la procédure engagée par son mari contre ses cohéritiers à propos du bordage de Sainte-Anne, et qu'elle poursuivra pendant de nombreuses années. Nous verrons plus loin le procès qu'elle dut soutenir contre Jacques DUMANS son oncle et celui qu'elle dut intenter à René GAULTIER son cousin à qui elle avait acheté en 1738, moyennant une rente viagère, deux bordages et différents immeubles, paroisse de Chauvigny joignant sans doute son bordage de l'Etre du Four, ce qui dénote de sa part un sens avisé de la gestion de ses biens.

Maris on est surpris qu'elle ait attendu la veille de son remariage avec René DOLIVEUX pour faire dresser le 29 Juillet 1743 seulement l'inventaire après le décès de son premier mari. Cet inventaire n'a manifestement été dressé que pour défendre les droits de ses enfants et les siens, en raison de son remariage.

Le 29 juillet 1743, à une heure de relevée, par Me MALLET, notaire Royal à Vendôme, est dressé l'inventaire des biens dépendant

"de la succession de feu François DESRAS, en son vivant laboureur (rappelons que dans d'autres actes il était qualifié "soixton" et que l'acte de décès de sa femme il sera qualifié "marchand de bois") et de la communauté d'entre luy et de Magdeleine BORDIER sa veuve, fait à la requeste de la ditte DESRAS et de Pierre BERRY, laboureur demeurant à Buissé paroisse d'Azé, curateur aux causes et actions de Magdeleine DESRAS aagée de dix ans et de François DESRAS aagé de neuf ans, enfants mineurs issus dudit deffunt François DESRAS et de laditte Magdeleine BORDIER, sa veuve, institué par justice suivant l'acte expédié devant Monsieur le Lieutenant Général du bailliage Royal et prevosté unis de Vendôme le trois may mil sept cent trente cinq, dument signé, scellé et insinué".

Les effets sont "montrés" par la veuve DERAS et prisés par le sieur Paul MARGANNE, marchand demeurant "à la Ville de Saint Callais" expert nommé par le curateur, et par Pierre CHOUSTEAU laboureur à Danzé nommé par la veuve, qui après serment ont estimé les meubles "en leur ame et conscience, en égard au cours du temps et suivant leur juste valeur".

Il est très intéressant de lire attentivement cet inventaire extrêmement détaillé du mobilier et les estimations de chaques article prisé.

"Dans la chambre de maison de ladite veuve size au bourg et paroisse de Danzé, nous a été représenté par laditte veuve DESRAS, une crémaillère, une pelle, une paire de pincette, une paire de chenets, un gril, un rotissoir, un trepied, une chambrière et un soufflet, le tout mis à prix par l'un et l'autre desdits experts à la somme de huit livres".

"Item un chaudron moyen, un grand chaudron, un petit chaudron et un autre chaudron fort mauvais, le tout de potier, estimé par l'un et l'autre desdits experts à la somme de six livres".

"Item, trois pots de fert, deux couvercles et deux broches".

La désignation se poursuit. Notons entre autre :

"quatre poisles de fert tant bonnes que mauvaises, un chaudron d'airain, un poislon, une écumoire, une cuillère de pot, une lampe, deux chandelliers, le tout d'airain, 24 pots au lait, 37 livres "d'estain" commun estimées 16 sols la livre, une douzaine d'assiettes de faience, 11 fourchettes de "fert", une chopine de faience, un plat de caillou, un saladier de faience, deux "ferts" à repasser, une douzaine de chaises de paille, deux tables rondes l'une de poirier et l'autre de cormier avec leurs chaises et un banc de bois de poirier fermant à clef, une "mée" de bois de noyer, un coffre de bois de noyer fermant à clef, un lit composé de son chalis en bois de cormier avec ses crochets de fer, sa paillasse, un lit de plumes, sa souille, l'une de "coistil" l'autre de "brun", un traversin avec deux souilles d'une de toile commune, l'autre de brun, deux oreillers, une couverture de laine blanche, le ciel de planches de sapin avec ses rideaux, le tout de serge sur fil (lesdits rideaux faisant 22 aulnes de serge sur fil), un autre fil avec son chalis de bois d'alizier, le ciel et les rideaux de tourangelle avec leur tout et leur broche, une tasse d'argent et une paire de boutons aussy d'argent "pesés cy devant par le sieur changeur à Vendôme et par luy estimés valloir la somme de 24 livres", un coffre de bois de chesne fermant à clef contenant de nombreuses pièces de toile, notamment "une pièce de toille retournée des liez herbés contenant sept aulnes et demie", une pièce de toile commune retournée "d'étoupe", un manteau de gros drap commun, deux gilets de coton et une veste de basin, "une petite armoire à deux battants, l'un d'eux fermant à clef avec un tiroir au milieu, le tout de bois de guignier", estimée dix livres, dans cette armoire se trouvent : 7 petites nappes de toile de "ferrasse" usées ; une grande armoire de bois de noyer et chesne à deux battants fermant à clef prisée 66 livres, "ouverture faite d'ycelle, nous a été représenté par laditte veuve DESRAS" : une douzaine de draps "comme tout neuf", 14 draps de ferrasse au tiers usés, 3 draps de toile commune, un drap de toile de lin, 11 draps de toile de ferrasse dépareillés, tous usés, une douzaine de nappes de toile, une autre douzaine de nappes de toile de brun et d'étoupe, une autre douzaine de nappes de toiles de ferrasse, 70 serviettes toutes neuves, 6 douzaines de serviettes de toile d'étoupe, une demie douzaine de vieilles serviettes, deux nappes neuves, deux autres nappes, une douzaine d'essuie-mains, cinq vieux essuyes mains, une nappe de toile de ferrasse, 10 chemises presque neuves "à l'usage du deffunt".

Comme on le voit, Magdeleine DERAS possédait un beau trousseau de linge de maison ! Il n'est fait aucune mention de sa garde robe personnelle.

Après la prisée du mobilier contenu dans la chambre, l'inventaire se poursuit dans le grenier où l'on trouve divers objets de peu de valeur, notamment de l'étoupe, de la ferrasse, du chanvre, "une vieille et mauvaise quaisse couverte de cuir et garnie de clouds fermant à clef, laquelle, ouverture faite, il ne s'ent rien trouvé", des fruits cuits, des harnais, du seigle, du blé, de la laine et 3 livres de bouchons.

Dans une petite chambre ou fournil, on trouve une baratte, une paire de balances, deux tables à boulanger, de la ferraille, etc....

Dans la cour : cent bourrées.

Dans l'étable : une vache sous poil rouge de 7 ans (33 livres), une vache sous poil noir, une autre vache, une génisse de deux ans (32 livres), un veau (20 livres), un veau de lait, "une beste azine âgée de 12 ans avec son asnon âgé d'un an, estimés, y compris le bast 20 livres", une chèvre âgée de 3 ans (5 livres).

Puis la nuit étant venue, la continuation de l'inventaire est remise au lendemain à 7 heures de matin.

Le 30 Juillet on prise : 2 petits cochons, 5 poules, 9 toises de planches, 3 échelles, etc.... un fusil (8 livres), "28 bestes de laine tant moutons que brebis et agneaux" (84 livres).

La vacation est interrompue à midi. A 2 heures de relevée il est procédé à l'analyse des titres et papiers.

Il était dû par Gabriel POMMIER, mari de Catherine DERAS, 30 livres du chef de la succession de Jeanne DERAS, femme de Pierre VALLERY, 105 livres de fermage (3 années) du bordage de l'Etre au Four, dont le recouvrement est douteux et 55 livres de fermage par René BRETON pour un petit bordage à Chauvigny ; par Louis NORGUET, vigneron au Boutry, paroisse de Villiers, 50 sols restant dus pour livraison de bourrées vers l'année 1736.

Par contre, il était dû par la veuve DERAS, 15 livres au "collecteur" pour l'année 1742 et 7 livres à Collin SERREAU pour la fauche d'un pré à Danzé.

Les titres analysés sont : le contrat de mariage des époux DERAS-BORDIER du 02 Octobre 1727, un dossier de 8 pièces concernant un partage entre André DENIAU et ses cohéritiers du 19 Juillet 1708 (ce partage ne nous est pas parvenu), le partage BORDIER du 08 Novembre 1711 analysé ci-dessus, la renonciation par la veuve de Mathurin DERAS à la succession de son mari, divers anciens titres de propriété et diverses quittances de rente, les pièces de la procédure contre Jacques DUMANS que nous analyserons plus loin, les quittances de rente concernant Pierre DUMANS légataire de Renée GAULTIER sa femme (testament du 09 Novembre 1740), les pièces concernant la procédure avec René GAULTIER (frère de la précédente) et qui seront ci-après analysés, la vente par Jullien BOIS du 08 Avril 1737 d'une grange à Danzé, sus-analysée, une obligation par Louis DORE, laboureur à Azé à Magdeleine DERAS de 17 livres sur lesquelles il n'est plus dû que 6 livres, un bail du bordage de Chauvigny, une vente de coupe de bois à François DERAS par Monsieur de COULANGES pour 480 livres et une autre vente de bois taillis par les Religieux de l'Abbaye de Vendôme, ce qui justifierait que François DERAS était bien marchand de bois, divers baux et une soixantaine d'autres pièces diverses.

Puis la veuve DERAS "a juré et affirmé n'avoir recellé, sequestré, ny diverty directement ou indirectement aucun d'yceux effets mobiliers et papiers". C'est exactement la formule actuelle de clôture d'inventaire.

On remarquera qu'il n'est fait aucune mention dans cet inventaire du bordage de Sainte-Anne dépendant de la succession de François DERAS.

Après avoir longuement analysé cet inventaire, et avant de relater le deuxième mariage de Magdeleine BORDIER avec René DOLIVEUX, nous devons retracer deux procès la concernant, l'un contre Jacques DUMANS son oncle, l'autre contre René GAULTIER son cousin.

 

 

Litige avec Jacques DUMANS

 

Un petit drame familial survenu au début de l'année 1732 fut la cause d'un procès qui durera jusqu'en 1737. L'origine de ce procès remonte à un acte intervenu devant Me MALLET, notaire à Danzé "en la cour de l'Abbaye Cardinalle de la Très Sainte Trinité de Vendôme" le 13 Novembre 1716, entre :

- Pierre GAULTIER, mari de Renée MICHON.

- Pierre BORDIER, mari d'Anne MICHON.

- Jeanne MICHON, fille majeure "uzante de ses droits".

- André DENIAU, curateur de Magdeleine MICHON.

Héritiers de Thomas MICHON et de Renée LANCELOT.

Il fait suite à un partage de leur succession en date du 02 Avril 1712 qui ne nous est pas parvenu, dans lequel les enfants MICHON intervenaient

"pour se régler et s'égaliser ensemble des avances faites à Pierre GAULTIER par Thomas MICHON et Renée LANCELOT, et des sommes auxquelles se montent les meubles que Pierre BORDIER s'est fait adjugé à la vente qui en a été faite après le décès dudit MICHON".

"Sur les avis de leurs parents et amis, il a été reconnu que ledit GAULTIER lui avait été donné par lesdits Thomas MICHON et Renée LANCELOT pour avancement de droits successifs suivant son contrat de mariage, le somme de 300 livres en bon argent et 24 livres pour habits de "noces" et qu'il lui a été adjugé des meubles pour 116 livres 10 sols et 6 deniers".

Pierre BORDIER a reconnu avoir reçu de même ses habits de noces pour 24 livres et des meubles adjugés pour 505 livres.

Jeanne MICHON a reconnu qu'il lui a été adjugé des meubles pour 52 livres.

Quant à Madeleine MICHON, elle n'a rien reçu.

Suit un long détail des comptes entre les héritiers concernant les revenus des biens partagés.

Il en résulte notamment, que Pierre BORDIER devait à Jeanne MICHON qui épousera ensuite Jacques DUMANS, la somme de 122 livres 9 sols.

La bonne entente régnant sans doute entre les enfants MICHON, Jacques DUMANS ne réclame pas le paiement de cette somme.

Mais le conflit éclate au début de 1732, c'est à dire seize ans après, parce que Jacques DUMANS dont la femme Jeanne MICHON était décédée le 18 Août 1725 allait se remarier avec sa servante ce qui va provoquer une demande de reddition de compte de la part de sa belle-soeur Anne MICHON et de sa nièce Magdeleine BORDIER, car il ne semble pas qu'on lui pardonne cette mésalliance. Au cours du procès qui va s'en suivre on va employer tous les artifices de procédure possibles.

François DERAS, mari de Magdeleine BORDIER commence par demander l'apposition des scellés au domicile de Jacques DUMANS, le 04 Février 1732 :

"François DERAS, laboureur à Bussay paroisse d'Azé, curateur institué par justice de Marie DUMANS", fille de Jacques DUMANS, expose que "Jeanne MICHON est décédée il y a eu 6 ans neuf le mois d'Août dernier" (en réalité le 18 Août 1725) et que "son mari a continué à jouir des biens de la communauté sans en faire inventaire, jusqu'au mois de Juin dernier. Qu'étant sur le point de convoler en secondes noces avec Catherine NOBLET, sa servante, ses autres parents et sa fille le supplient de faire continuer l'inventaire par l'indication de l'actif et du passif, des grains et récoltes ce qu'il n'a pas encore voulu faire, et l'analyse des titres et papiers, et à rendre compte de sa tutelle envers les enfants mineurs de Pierre GAULTIER".

Et François DERAS demande que Jacques DUMANS soit assigné pour clore l'inventaire et requiert qu'il soit apposé "cadenas et cachets" sur les coffres et armoires. L'assignation est délivrée le 08 Février 1732.

Nous apprenons ainsi, incidemment que Renée Magdeleine MICHON et Pierre GAULTIER étaient déjà décédés et qu'ils laissaient des enfants mineurs. Nous verrons plus loin qu'il se prénommaient René et Renée.

Mais cette demande d'inventaire ne suffit pas à apaiser la rancoeur de la veuve BORDIER et de sa fille ; elles demandent 3 ans après, des comptes à Jacques DUMANS qui avait continué à jouir de certains biens dépendant des successions MICHON LANCELOT partagées en 1712.

En réponse, Jacques DUMANS assigne le 25 Mai 1735 "Renée MICHON veuve de Pierre BORDIER" (il s'agit en réalité d'Anne MICHON) et Magdeleine BORDIER, veuve de François DERAS sa fille, "devant le bailly de la très Sainte Trinité de Vendosme" pour avoir paiement de la somme de 122 livres 9 sols à lui due en vertu du partage du 13 Novembre 1716.

La procédure traîne et Jacques DUMANS est obligé de la reprendre le 18 Février 1737. Il est "laboureur et fermier des Vieilles Métairies, paroisse de Danzé, ayant Me Henry PINEL pour avocat". Il assigne "Anne MICHON veuve de Pierre BORDIER et Magdeleine BORDIER sa fille veuve de François DERAS, demeurant toutes deux ensemble à Danzé" à comparaître "salmedy prochain en huit jours" pour voir déclarer exécutoire contre elles l'acte du 13 Novembre 1716 et à payer les 122 livres 9 sols qui lui sont dues et les arrérages de rente des immeubles de Jeanne MICHON sa femme, depuis le partage fait le 02 Avril 1712 "avant le mariage dudit DUMANS".

Le 09 Mars 1737, l'avocat de Jacques DUMANS informe Anne MICHON et Magdeleine BORDIER que la cause sera portée à l'audience du bailliage le "Salmedy 16 présent mois".

Mais précisément le 16 Mars 1737, Anne MICHON et Magdeleine BORDIER "disent à Monsieur le Bailly que les copies des "pièces signifiées et sur lesquelles DUMANS fonde ses prétentions (il s'agit du partage du 13 Novembre 1716 et des actes de décès de Jeanne MICHON et de Marie DUMANS sa fille) sont si peu correctes et mal écrites qu'on ne peut "pas en comprendre le sens ; pourquoy elles requièrent la communication des originaux".

Ce sont cependant ces pièces mêmes qui nous sont parvenues. Elles sont parfaitement lisibles.

Jacques DUMANS réplique le 23 Mars 1737 que :

"C'est par une chicanne odieuse et grossièrement effectuée que, pour éloigner un jugement qu'on prévoit ne pouvoir être avantageux aux défenderesses, on a dit gratuitement qu'il n'était pas possible de lire les copies signifiées quoiqu'elles soient très lisibles, ce qui est justifié par la représentation qu'on ne peut se dispenser de faire. Cependant pour éviter toute autre mauvaise difficulté, on signifie (bien entendu aux dépens des déffenderesses) copie des extraits mortuaires de Jeanne MICHON et de Marie DUMANS"....

Le 30 Mars, il expose encore à Monsieur le Bailly de l'Abbaye de la Sainte Trinité de Vendôme que le partage du 13 Novembre 1716 justifie sa créance de 122 livres 9 sols, que la production des "certificats de mort" de sa femme et de sa fille justifient ses droits à agir. Qu'il a rendu son compte de tutelle à DENIAU, curateur de sa fille, et que depuis trente ans il attend le paiement de ce qui était dû à sa femme.

Cette longue chicane, pleine de mauvaise foi, se termine par une transaction du 13 Octobre 1737 "pardevant Pierre BRETON, notaire Royal en Vendômois colloqué et résidant en la paroisse d'Azé" entre Jacques DUMANS, laboureur aux Vieilles Métairies, paroisse de Danzé et Magdeleine BORDIER, veuve de François DERAS, demeurant au bourg et paroisse de Danzé.

Il est rappelé que Madeleine BORDIER soutenait que les 122 livres avaient été payées tant par son père que par sa mère et par son mari, attendu les frais exposés de part et d'autres et de l'avis des amis communs, les parties se sont assemblées pour mettre fin à ce procès à l'amiable. La veuve DERAS a payé à Jacques DUMANS la somme de 128 livres 10 sols en écus de six livres et autres bonnes monnaies ayant cours. En conséquence "le procès né entre lesdits parties demeure nul et assoupi, comme non commencé".

Et la veuve DERAS tient quitte le sieur DUMANS :

"Pour les arrérages qui sont dus pour retour de partages faits entre ladite deffunte femme DUMANS, la mère de ladite veuve DERAS, et cohéritiers dont le partage eschu à la femme dudit DUMANS était chargé de retour : cinquante sols chacun an de rente..... Cinquante sols de rente dont ledit DUMANS est tenu comme curateur de René et de Renée GAULTIER, enfants mineurs de deffunt Pierre GAULTIER et de Renée MICHON, sans préjudice à la somme de cinquante sols de rente dus pour retour de partage, que ledit DUMANS promet à s'oblige payer à l'avenir à la veuve DERAS tant qu'il sera jouissant du bien dont il jouit par ses enfants"...... (il avait donc d'autres enfants nés de son mariage avec Catherine NOBLET).

On ignore si après cette transaction, les relations furent plus amicales entre Magdeleine BORDIER, son oncle et sa deuxième femme.

 

 

Acquisition de deux bordages à Danzé

Litige avec René GAULTIER

(transaction du 1er Avril 1746)

 

Par acte de Me Charles MANSION, notaire Royal en Vendômois colloqué à Saint-Firmin, du 27 Octobre 1738, Magdeleine BORDIER ayant réglé depuis un an ses comptes avec Jacques DUMANS, achète de René GAUTIER, cardeur de son métier, et depuis marchand, demeurant au bourg et paroisse de Chauvigny, son cousin (il était le fils de Renée Magdeleine MICHON et de Pierre GAUTIER), un bordage situé au bourg et paroisse de Chauvigny dépendant de la succession de Pierre GAUTIER son père et 15 livres de rente due par un sieur François du HOULX, et en outre un autre bordage au bourg et paroisse de Danzé consistant en une chambre à feu, basse roue derrière, four, cour devant icelle chambre, autre chambre à feu basse, chambre haute, grenier avec la moitié d'une petite écurie, la moitié du jardin et une grange devant le cimetière et environ dix septrées quatre boisselées de terre labourable et environ trente boisselées et pré, un jardin dans l'un desdits prés, une fosse au bout dudit jardin qui en dépend. Ce dernier bordage appartenait à René GAUTIER comme lui provenant de la succession de Renée GAUTIER sa soeur épouse de Pierre DUMANS.

Cette vente est faite à charge par Magdeleine BORDIER de laisser jouir ledit Pierre DUMANS pendant sa vie du tiers dudit bordage, ce tiers lui ayant été légué par le testament de sa femme.

Cette vente comprend encore la moitié d'un bordage aussi situé dans le bourg et paroisse de Danzé consistant en bâtiments, jardins, cours et onze à douze septrées de terre labourable en plusieurs pièces et morceaux sis aux environ dudit Danzé et onze à douze boisselées de pré, appartenant à René GAUTIER comme lui provenant de la succession de Marie DUMANS sa cousine germaine maternelle. A charge par Magdeleine DERAS de laisser Jacques DUMANS jouir de cette moitié de bordage pendant sa vie ainsi qu'il en jouissait par usufruit par suite du décès de Marie DUMANS, sa fille. (Il est précisé dans la transaction du 1er Avril 1746 présentement analysée, que Jacques DUMANS était décédé avant cette date).

La vente de ces divers immeubles est consentie moyennant le prix de cent livres de rente et pension viagère que Magdeleine BORDIER s'est engagée à payer chaque année au vendeur pendant sa vie, en deux termes égaux à Pâques et à la Toussaint, et encore à la charge par Magdeleine BORDIER "de faire enterrer honorablement après son décès ledit GAUTIER, lui faire faire des services pour le repos de son âme pour la somme de cinquante livres et de fournir audit GAUTIER dans un mois lors prochain, un habit, veste et culotte de droguet d'Amboise et un chapeau et de lui fournir tous les six ans pendant sa vie, un habit, veste et culotte de serge sur fil".

Ce contrat a été scrupuleusement exécuté jusqu'en 1747.

Rappelons qu'en 1738, au moment où il fut conclu, Magdeleine BORDIER avait 25 ans, qu'elle était veuve depuis 3 ans de François DERAS, qu'elle habitait avec sa mère à Danzé et qu'elle ne s'est remariée avec René DOLIVEUX que le 31 Août 1743. Il faut donc supposer que ses revenus personnels lui permettaient de payer cette rente viagère dont la charge risquait de durer de longues années puisque René GAULTIER devait avoir sensiblement le même âge qu'elle. Cette vente à rente viagère laisse supposer qu'il n'avait pas d'enfant.

Cependant, pour des raisons que nous ignorons, René GAUTIER a obtenu le 24 Décembre 1743 des "lettres de rescission" de la vente du 27 Octobre 1738.

Magdeleine BORDIER, alors épouse de René DOLIVEUX conteste cette demande et rappelle que les bâtiments vendus étaient en mauvais état ainsi qu'il a été constaté par BRETON, notaire, le 22 Septembre 1739 et qu'elle les a fait réparer. Elle prétend que René GAUTIER n'avait pris ces "lettres de chancellerie" que parce que Jacques DUMANS, usufruitier d'une partie des biens vendus, était décédé et que, par suite de ce décès il aurait pu en jouir.

Le procès était ainsi engagé, et différents actes de procédure étant déjà intervenus, "pour obvier aux différentes discussions et procédures ruineuses dans lesquelles lesdites parties se trouveraient constituées dans la suite et poursuite d'une instance et procès dont l'événement pourrait être douteux, et pour autres bonnes causes, motifs et raisons, à elle connues, elles ont de ladite instance et procès, pacifié, transigé, et accordé par le conseil de leurs amis, et de leur pure et franche volonté, par le présent acte de transaction, en la meilleure forme que transaction peut avoir lieu et valloir ....".

Aux termes de cette transaction passée devant MALLET, notaire Royal à Vendôme le 1er Avril 1746, il a été convenu que René GAUTIER rentrera en jouissance et possession du bordage de Chauvigny, les autres bordages demeurant acquis à Magdeleine BORDIER en propriété et jouissance, y compris la rente de 15 livres, à charge de laisser Pierre DUMANS jour sa vie durant du tiers auquel il avait droit dans l'un d'eux, et ce, sans être tenue de continuer à payer la rente viagère de 100 livres stipulée au profit de René GAUTIER, ni de lui fournir à l'avenir aucun habit ni autres choses.

En outre, René DOLIVEUX et Magdeleine BORDIER, sa femme, ont cédé à René GAUTIER le bordage de l'Etre au Four situé paroisse de Chauvigny qui avait été attribué à Anne MICHON aux termes du partage du 02 Juillet 1708 analysé ci-dessus sous le titre "FAMILLE MICHON" et que Magdeleine BORDIER avait recueilli dans la succession de sa mère décédée deux ans avant cette transaction. Ce bordage est désigné avec précision (environ 173 boisselées = 8 hectares 94 ares 41 centiares). Ce bordage était loué à Michel LEGON moyennant 25 livres par an, 2 poulets et 2 chapons.

"Au moyen desdittes présentes, toutes instances et procès meu et à mouvoir entre les dittes parties demeurent assouplis, réglés et terminés sans aucun dépens de part ni d'autre".

 

 

Le Testament de René GAUTIER

 

René GAUTIER vécut encore près de 20 ans après cette procédure.

On sait qu'il avait été cardeur, puis marchand, il fut ensuite "Marcelot" puis marchand mercier à Chauvigny.

Le 24 Février 1765, il fit son testament dans les termes suivants :

"L'an mil sept cent soixante cinq, le vingt quatre février après midy, est comparu devant moy Curé soussigné, René GAULTIER, marcelot, gisant au lit, malade, toutefois sain d'esprit et entendement, comme il m'est apparu et aux témoins cy après nommés, ledit GAULTIER demeurant au bourg et paroisse Saint Jean de Chauvigny ; lequel m'a dicté de mot à mot le présent son testament de forme et manière qui suivent.

"Premièrement, le dit René GAULTIER testateur a recommandé son âme à Dieu, père, fils et Saint Esprit, à la Sainte Vierge Marie, Saint René son patron et à toute la Cour Céleste.

"En second lieu ledit testateur a déclaré que son corps serait inhumé dans le cimetière de la paroisse dudit Chauvigny, et que Marie LATTRONN son épouse luy ferait faire des services et prières selon sa volonté, la reconnaissant comme bonne Chrétienne.

"Et veut en troisième lieu que ladite LATTRON, son épouse paye tout ce que ledit GAULTIER testateur peut devoir.

"Quatrièment ledit René GAULTIER testateur donne à laditte Marie LATTRON son épouse tout son mobilier et tout de que la coutume du pays dans lequel il vit et où sont situés ses biens luy permet de donner à son épouse, sans en rien réserver, car telle est sa dernière volonté.

"Le présent testament m'a été dicté de mot à mot par ledit GAULTIER et par moy à luy lu et relu aussy mot à mot en présence du sieur Louis GREGOIRE, maréchal, de Jean POIRIER marchand, de Louis DUFOURNIER bordager, tous trois demeurant au bourg et paroisse dudit Chauvigny, lesquels témoins ont signé avec nous Curé soussigné, après que ledit GAULTIER testateur a déclaré ne savoir signer de ce interpellé, suivant l'Ordonnance (de d'Aguesseau). La minute est signée POIRIER, L. GREGOIRE, L; DUFOURNIER et VINCENT Curé de Chauvigny".

Ce testament fut déposé au rang des minutes de Michel PARRAIN, notaire Royal en Vendômois, Blésois et Chartrain et de la Chatellenie de Chauvigny résidant à La Ville-aux-Clercs, le 05 Avril 1765. Cet acte de dépôt est rédigé sensiblement dans les mêmes termes qu'actuellement.

René GAUTIER (ou GAULTIER) est vraisemblablement décédé quelques jours avant.

Très peu de temps après son décès, Marie LATTRON sa veuve se remarie avec Jacques MARAIS, marchand et va habiter avec lui à Cloyes, paroisse de Saint-Lubin ; le 03 Octobre 1765 Jacques MARAIS et Marie LATTRON sa femme font signifier ce testament à Magdeleine BORDIER alors veuve de Louis MENANT demeurant à Blois, mais se trouvant alors à Rochambeau "en sa Closerie paroisse de Thoré", à ce qu'elle n'en ignore, car elle pouvait se prétendre héritière de son cousin.

Cette Closerie de Rochambeau devait appartenir à son deuxième mari, René DOLIVEUX.

 

 

Deuxième Mariage avec René DOLIVEUX

 

Après le décès de son premier mari : François DERAS, survenu le 25 Mars 1735, alors qu'elle venait d'avoir 22 ans, Magdeleine BORDIER vécut avec sa mère à Danzé en élevant ses deux enfants.

Plus de huit ans après son veuvage, elle épouse René DOLIVEUX, maréchal de forges à Villiers, veuf de Marie BODIN.

Le contrat de mariage est reçu par Me COURTIN et Me MALLET, notaires Royaux à Vendôme le 02 Août 1743, en présence du côté du futur époux, de Paul MARGANNE, marchand à Saint-Calais, et du côté de la future épouse, de sa mère et de Jean BLIN, marchand à Danzé. Les futurs époux "promettent de se prendre par nom, foy et loy de Sacrement de mariage sitost que l'un en sera par l'autre requis" en face de la Sainte Eglise Catholique, apostolique et romaine. Ils seront régis par les dispositions de la coutume d'Anjou et leur communauté comprendra tous les acquis du jour de la Bénédiction Nuptiale. Ils mettent chacun en communauté la somme de huit cents livres.

Un inventaire avait été fait après le décès de Marie BODIN, première épouse de René DOLIVEUX, les 23 et 24 Juillet 1742, dont il n'avait pas d'enfant. Les biens meubles apportés par lui s'élevaient à la somme de quinze cents livres. En ce qui concerne l'apport de Magdeleine BORDIER il est rappelé que l'inventaire après le décès de son premier mari avait été établi par Me MALLET les 29 et 30 Juillet 1743 (deux jours avant le contrat de mariage).

"En cas d'alliénation des propres dudit futur époux pendant laditte communauté, le remploy en sera fait sur les biens de laditte communauté, et où ils ne suffiraient à l'égard de laditte future épouze, remploy s'en fera sur les biens dudit futur époux".

Puis est prévue la faculté pour la future épouse ou ses enfants de renoncer à la communauté, et la clause de reprises franches et quittes de toutes dettes.

Un préciput en habit, linge, hardes et armes est prévu en faveur du futur époux, ou la somme de trois cents livres ; et en faveur de la future épouse, un préciput en habillements et hardes, bagues et joyaux, ou pareille somme de trois cents livres "ensemble son habit de deuil, douaire, et autres conventions matrimoniales".

"Sera douée la future épouze, et la doue ledit futur époux du douaire coutumier".

"Et en considération dudit futur mariage, et pour la bonne amitié que ledit DOLIVEUX porte à laditte future épouze et pour lui en donner des marques, il lui a, par ces présentes, fait don entre vif, irrévocable et en la meilleures forme que donnation puisse valloir et avoir lieu, ce acceptante ladite future épouze, de tout et chacun les biens mobilliers, effects, or, argent et tout ce qui est censé et réputé mobillier qui se trouveront luy appartenir au jour de son décès, ensemble les fruits qui se trouveront pendant par les racines dans les biens fonds dudit DOLIVEUX au jour de son décès"......

Toutefois, il est stipulé que cette donation n'aura pas d'effet en cas d'existence d'enfants nés ou à naître du mariage, et que si la femme décède avant son mari, celui-ci tiendra compte à ses enfants de son apport en mariage.

Les dettes seront supportées par celui des futurs époux du chef duquel elles auront été créées.

Enfin, il est prévu que tous les biens meubles et immeubles du futur époux sont affectés et hypothéqués à la garantie de ce qui pourra être dû à la future épouse.

Comme dans les autres actes passés par elle, Magdeleine BORDIER déclare ne savoir signer. Le droit d'insinuation est de 24 livres.

Il a paru intéressant de rapporter longuement ce contrat de mariage, pour montrer l'analogie avec le régime de la communauté de biens réduit aux acquêts tel qu'il sera institué par le Code Civil.

Il résulte d'une note portée en marge d'une copie de l'acte de naissance de Magdeleine BORDIER qu'elle s'est mariée à Danzé le 31 Août 1743.

Après ce mariage, Anne MICHON vient habiter avec sa fille à Villiers.

Elle y décède le 16 Avril 1744 et l'acte de décès est signé par son gendre.

Ce deuxième mariage est de courte durée ; trois ans et six mois après sa célébration, René DOLIVEUX décède et l'inventaire après son décès est dressé par Me MALLET, notaire Royal à Vendôme le 09 Mars 1747 (ce qui laisse supposer que René DOLIVEUX est décédé quelques jours avant). Nous ne possédons pas cet inventaire, mais la communauté ne devait pas être très opulente, car le 1er Mai 1747, Magdeleine BORDIER y renonce, et va habiter à Vendôme, paroisse de la Madeleine. Elle avait du avoir la jouissance des biens de son mari, puisque nous avons vu que le 03 Octobre 1765, alors qu'elle était remariée à Louis MENANT, elle résidait à "sa Closerie de Rochambeau".

Aucun enfant n'est issu du mariage avec René DOLIVEUX.

Le 30 Juillet 1747 "René GILLARD, vigneron, demeurant à Meslay, fils et héritier de Gilles GILLARD et de Marie DOLLIVEUX, soeur germaine de René Toussaint DOLLIVEUX, père de René DOLLIVEUX, à son décès Maréchal de forges à Villiers, mary en secondes noces de Madeleine BORDIER, auparavant veuve de François DERAS cède à cette dernière la récolte et fruits de toutes natures estant actuellement à recueillir sur toutes les terres et les bordages à elle appartenant situés paroisse de Danzé".

 

 

Troisième mariage avec Louis MENANT

 

Un peu plus de quatre ans après le décès de René DOLIVEUX, Magdeleine BORDIER se remarie avec Louis MENANT, elle avait alors 38 ans.

"L'an 1751 le 27 may, après la publication des bans du futur mariage d'entre Louis MENANT, maître écrivain veuf de feue Marie (le document est déchiré) de la paroisse de Saint Martin de cette ville de Madeleine BORDIER veuve en dernières noces de René DOLIVEUX vivant Maréchal de forge, de cette paroisse, faite canoniquement aux prosnes des messes tant en cette Eglise qu'en celle de Saint Martin par trois jours de dimanche ou festes consécutifs comme il appert par le certificat du vicaire de Saint Martin du 22 du présent mois, nous signé VILLEMAIN, prestre avec paraphe sans qu'il se soit trouvé aucun empêchement ou opposition j'ay prestre vicaire, soussigné ay reçu en cette Eglise leur mutuel consentement de mariage avec les cérémonies prescrites par la Sainte Eglise, en présence de Jean et Florent LE BRETON , de Jullien BOULLAY, boulanger, de Gilles HUBERT et de Jean FOUQUET...... (signé) MAILLET".

Il résulte d'une note portée en marge de la copie de cet acte de mariage, que Magdeleine BORDIER habitait alors à Vendôme sur la paroisse de la Madeleine.

Nous n'avons pas beaucoup de renseignements sur la vie du ménage MENANT qui habitait à Vendôme, paroisse Saint Martin.

Le 27 Janvier 1753, Louis MENANT, maître écrivain, paroisse Saint Martin à Vendôme achète de Laurent GALLOYER, vigneron et de Marguerite COLLAS son épouse, demeurant à Chanteloup, paroisse de Villerable, 68 boisselées de terre aux Saulettes, paroisse de Danzé moyennant 153 livres "tant en principal achat que pot de vin". A cet acte d'acquisition est joint le titre de propriété antérieur (partage GALLOYER du 27 Mai 1752).

Le 23 Novembre 1754, Louis MENANT, au nom de sa femme loue pour 6 ou 9 années à compter de la Toussaint 1754 à Jean MOREAU, laboureur et Madeleine DENIAU sa femme, demeurant à Danzé, un bordage au bourg et paroisse de Danzé, y compris les terres acquises des époux GALLOYER. Il s'agit d'un bail à métayage ; les conditions de partage des récoltes, de compte des gerbes, de partage des fruits, sont scrupuleusement spécifiées, ainsi que l'entretien des bestiaux appartenant au bailleur, chevaux, jument, vaches, cochons, moutons et leur produit. Le bailleur se réserve un champ et une grange pour y mettre sa part de récoltes. Il fournira une certaine quantité de grains à ensemencer. Le preneur fournira au bailleur chaque année douze livres de beurre et deux couples de poulets.

Madeleine DERAS, fille de Magdeleine BORDIER épousa Léonard BRETON le 08 Février 1757.

Le 08 Mai 1758, Louis MENANT, au nom de sa femme rend compte à Léonard BRETON, paie en sa qualité de mari de Madeleine DERAS, de la gestion de ses biens.

Il lui tient compte d'abord du montant de la prisée des objets mobiliers en l'inventaire après le décès de François DERAS son père des 29 et 30 Juillet 1743. La tasse et le bouton en argent prisés en cet inventaire sont mentionnés et l'achat des récoltes fait par Magdeleine BORDIER de René GILLARD, le 30 Juillet 1747 sus énoncé. Il est tenu compte des droits de Madeleine DERAS dans la succession de Jeanne DERAS épouse de Pierre VALLERY, de la rente foncière payée à Françoise GUERY veuve de Messire Emmanuel DEMARESCOT, Chevalier Seigneur DELPHIN (acte du 25 Octobre 1717 - Voir famille BORDIER), de la somme payée par Magdeleine BORDIER à Jacques DUMANS en vertu de la transaction du 13 Octobre 1737, de celle payée aux héritiers de Mathurin DERAS en vertu de l'acte du 12 Décembre 1757 au sujet du bordage de Sainte-Anne. Le tout représente, d'après ce compte, une recette de 1.177 livres 2 sols 5 deniers.

Par contre Louis MENANT porte en dépenses :

Le coût de l'inventaire des 29 et 30 Juillet 1743 ("contrôle, papier, vacation et expédition") soit 33 livres.

"Item 19 livres 3 sols pour moitié de celle de 39 livres 6 sols pour les coûts de la sentence de nomination de René DOLIVEUX conjointement et solidairement avec laditte BORDIER pour tuteurs aux personnes et biens de ladite femme BRETON et dudit François DERAS, expédiée devant Mr. le Lieutenant Général le 20 aoust 1743, l'autre moitié devant être supportée par ladite BORDIER comme héritière mobiliaire dudit DERAS son fils".

Et le coût des lettres d'émancipation de Madeleine DERAS épouse de Léonard BRETON.

Soit au total 96 livres 6 sols 6 deniers.

Il est ensuite précisé dans cet acte qu'il ne sera pas tenu compte des revenus des biens appartenant à Madeleine DERAS et à Louis MENANT, car ils se compensent, en revanche il est fait mention du douaire revenant à Magdeleine DERAS épouse de Léonard BRETON sur le prix de vente de "différentes petites parties de biens situez paroisse de Naveil vendues par ma dite femme avec autres cohéritiers de deffunt le sieur BELLEVILLE prêtre, à René BADAIRE et autres depuis dix ou douze ans, de laquelle vente ma femme a touché 46 livres 5 sols". (Il s'agit de Lubin BELLEVILLE, curé de Villeneuve la Frouville - Voir ci-dessus procédure avec Marie DEMERE).

Il est encore expliqué que Magdeleine BORDIER et Louis MENANT avaient promis de donner à Madeleine DERAS une dot de 1.400 livres aux termes de son contrat de mariage et que les sommes dues à Madeleine DERAS en vertu du compte-rendu par Louis MENANT s'élèvent à 1.043 livres 3 sols 11 deniers ; il convient, pour parfaire le montant de la dot promise d'y ajouter 356 livres 16 sols 1 denier. La fin du compte-rendu par Louis MENANT à Madeleine DERAS et à Léonard BRETON son mari, est intégralement reproduite ci-après. Nous allons y retrouver la conclusion de la procédure qui opposait Magdeleine BORDIER aux héritiers DERAS en vertu de la transaction du 12 Décembre 1757 concernant le bordage de Sainte-Anne analysée ci-dessus sous le chapitre FAMILLE DERAS :

"Pour remplir ledit BRETON et sa femme de la somme de quatorze cent livres, Moy MENANT audit nom, je cedde quitte et abandonne audit BRETON et sa femme en propriété les objets qui suivent :

"Premièrement les cinquante deux livres sept sols neuf deniers qu'il a touché de Marin DAY et sa femme pour les causes énoncées dans la transaction dudit jour 12 décembre dernier, et sept livres cinq sols que ledit DAY et sa femme ont reconnu devoir en sus de ladite somme pour une erreur de calcul faite dans laditte transaction.

2° - Soixante trois livres douze sols neuf deniers qu'il a touché de Gabriel POMMIER pour les mêmes causes que l'article précédent et autres déboursés.

3° - Pareille somme par Denis POMMIER pour les mêmes causes.

4° - Pareille somme qu'il touchera par Pierre POMMIER mineur pour les mêmes causes.

5° - Trente neuf livres deux sols que ledit BRETON a pareillement touché de Denis POMMIER, marchand à Azé et portées par lad. transaction. Sur laquelle somme ledit BRETON a payé tant à Messieurs de la TOUCHE et GAUSSANT Avocat et Procureur celle de trente huit livres pour frais à eux dus dans l'instance contre lesdits DERAS et POMMIER suivant leurs reçus des quatorze et seize décembre dernier, au moyen de quoi cet article ne doit être tiré à la ligne que pour vingt deux sols.

"Plus moy MENANT audit nom cedde et abandonne pareillement audit BRETON et sa femme le tiers d'un petit bordage situé paroisse de Sainte-Anne pour la somme de trois cents livres, y compris le revenu de l'année eschue à la Toussaint dernière et en abandonnant ledit tiers pour ladite somme, je dépars du douaire et usufruit que je pourrais prétendre sur lesdittes choses à cause de ma femme.

Plus je cède et abandonne audit BRETON et sa femme le tiers de deux pièces de terre situées paroisse d'Epuisé estimé ledit tiers trente six livres treize sols quatre deniers et me dépars pareillement du douaire et usufruit comme dessus.

Plus je cedde pareillement audit BRETON et sa femme la somme de vingt livres qu'il a touchée de la veuve CATHODEAU pour les arrérages de jouissance desdittes deux pièces de terre eschus à la Toussaint dernière.

Toutes les sommes cy dessus revenantes à la somme de six cent huit livres six sols quatre deniers qu'il convient de déduire de celle de quatorze cents livres, partant il ne reste plus que sept cent quatre vingt onze livres treize sols huit deniers.

Laquelle somme il faut joindre celle de soixante et dix huit livres six sols quatre deniers pour quinze mois d'intérêts de ladite somme de quatorze aux livres à compter du huit février mil sept cent cinquante sept jour de leur mariage" (c'est ainsi qu'on en apprend la date, car nous n'avons aucun autre document à ce sujet) "jusqu'au huit may courant" (date de la reddition du compte) "déduction faite de neuf livres dix sols pour vingtième et quatre sols pour livres du premier vingtième.

Lesquelles deux sommes reviennent ensemble à celle de huit cent soixante et dix livres.

Sur laquelle somme il convient déduire celle de soixante et dix livres pour le prix d'une armoire de bois de noyer à deux battantes que moy MENANT abandonne audit BRETON et sa femme.

Da manière qu'il ne revient plus audit BRETON au moyen de toutes les déductions cy dessus que la somme de huit cent livres ; laquelle somme moy MENANT audit nom promet et m'oblige payer audit BRETON et sa femme à leur volonté et première requête et cependant l'intérêt à compter de ce jour.

Fait et arrêté double sous nos seings à Vendôme lesdits jour et an que dessus". "J'approuve l'écrit cy dessus pour ce qui est contenu". Signé BRETON.

 

Ce long compte précis et détaillé a été écrit par Louis MENANT, maître écrivain (ou maître d'école dans d'autres titres) mais a certainement été établi par Léonard BRETON, qui on l'a vu était notaire en la Chatellenie de Lisle en 1757.

Les derniers actes que nous possédons concernant Louis MENANT sont 16 pièces d'une procédure concernant une haie aux Noues, paroisse de Danzé, mitoyenne avec René LAUNAY, laboureur à la Couetterie paroisse de Danzé. Louis MENANT l'accuse d'avoir coupé vingt deux trognes de chêne complantées dans cette haie. Deux fagotteurs, commis par justice établissent un rapport détaillé duquel il résulte que 225 fagots et 17 bourrées ont été tirés de cette coupe représentant une valeur de treize livres cinq sols dont moitié doit revenir à chaque propriétaire. René LAUNAY fait appel du jugement du bailliage de Vendôme qui avait enterriné ce rapport et Louis MENANT l'assigne le 03 Décembre 1761 en "anticipation d'appel pardevant nos Seigneurs du Parlement de Paris". On ignore quelle fut la sentence du Parlement sur cette importante affaire.

 

Nous ignorons quand est décédé Louis MENANT. Nous savons seulement que le 03 Octobre 1765, Jacques MARAIS et Marie LATTRON sa femme signifient le testament de René GAULTIER à Magdeleine BORDIER, veuve de Louis MENANT, demeurant à Blois mais se trouvant alors à sa Closerie de Rochambeau. De plus, les pièces de la procédure de l'affaire GON (voir ci-après Léonard BRETON) nous apprennent qu'il était déjà décédé le 09 Mai 1764.

Pourquoi Magdeleine BORDIER, après le décès de Louis MENANT a-t-elle été habiter à Blois ? Sa fille était mariée à Vendôme ; elle devait se trouver bien seule. Elle décède peu après l'âge de 53 ans, sans doute chez sa fille.

 

 

Acte de décès de Magdeleine BORDIER

 

Du registre des sépultures de la paroisse Saint Martin de la ville de Vendôme, année 1766, a été extrait ce qui suit :

"L'an mil sept cent soixante six, le dix may, le Corps de Madeleine BORDIER veuve en premières noces du Sieur Françoise DERAS, marchand de bois et en secondes noces du Sieur Louis MENANT (sic) maître d'écriture en cette ville, décédée d'hier après avoir reçu dans sa maladie les sacrements de pénitence et d'Extrême Onction, âgée de cinquante trois ans, a été inhumée en cette église par nous prestre Curé de cette paroisse, licencié en droit de la faculté de Paris, en présence de Léonard BRETON gendre de la deffunte, à cause de demoiselle Madeleine DERAS sa femme, et autres parents et amis qui ont signé avec nous le registre". Signé HEUSLIN, prestre, NOULIN prestre, BRETON, GOUFFAU, PROUST, François FOUGERE, QUIMBECHE et J. B. PROUST Curé de Saint Martin.

 

A travers la sécheresse des actes de vente, des partages, des pièces de procédure qui dormaient dans un grenier depuis 200 ans, nous avons vu revivre Magdeleine DERAS, dont de dernier descendant, Fernand LEMAIGNEN, n'avait aucun souvenir, et nous nous sommes attachés à elle, sans pouvoir malheureusement cerner sa personnalité.

Qui étais-tu Magdeleine BORDIER ?

Nous savons qu'elle était l'arrière petite fille de Thomas LANCELOT le frère du procureur ; que ses parents et ses grand-parents étaient des petits cultivateurs à Danzé ; qu'elle s'est mariée à 14 ans avec un lointain cousin (François DERAS) qui était laboureur puis "soixton" puis marchand de bois à Azé ; que de ce mariage sont nés deux enfants ; que son mari décéda après 8 ans de mariage alors qu'elle avait 22 ans ; que son beau-père décéda deux mois après.

Il semble que durant son veuvage elle géra habilement ses biens puisqu'elle acheta à rente viagère les biens de son cousin René GAULTIER et se défendit adroitement dans la procédure qui l'opposa à son oncle Jacques DUMANS. Elle habitait durant son veuvage avec sa mère à Danzé où elle éleva sa fille et son fils qui n'avait que quelques mois lors du décès de son mari.

L'inventaire après le décès de ce dernier ne dénote qu'une petite aisance, sans plus, bien qu'elle possédât un respectable trousseau de linge de maison.

Après huit années de veuvage, elle épousa en secondes noces René DOLIVEUX, alors veuf, maître de forge à Villiers, peut-être un collègue de son mari et sa mère vint habiter avec elle à Villiers. Ce deuxième mariage ne dura que trois ans et demi, et Magdeleine BORDIER, qui avait perdu sa mère trois ans avant, se retrouvera veuve une seconde fois, et six mois après la mort de son mari, elle perd son fils. Les deuils s'accumulent autour de cette jeune femme.

Elle dut habiter dans la Closerie de Rochambeau dont on ignore comment elle en était devenue propriétaire mais que sa fille possédait encore lors de son décès.

A une date indéterminée elle alla habiter à Vendôme, paroisse de la Madeleine peut-être pour assurer l'éducation de sa fille. Elle y fit la connaissance de Louis MENANT, maître d'école qu'elle épousa quatre ans après son deuxième veuvage, le 27 Mai 1751, alors qu'elle avait 38 ans. Ce troisième mariage dura jusque vers 1762-1764 et Magdeleine BORDIER se retrouva veuve une troisième fois?

Au cours de ce troisième mariage, elle maria sa fille le 08 Février 1757 (elle avait 24 ans) à Léonard BRETON "principal notaire à la Chatellenie de Lisle" puis greffier au Greffe Civil et Criminel du bailliage Royal et prévôtal de Vendôme. Cette promotion sociale dut combler d'aise Magdeleine BORDIER et doit consacrer la bonne éducation qu'elle donna à sa fille malgré les difficultés dues à ses veuvages.

Dès que sa fille eut atteint l'âge de 18 ans, elle la fit émanciper pour pouvoir entamer la longue procédure que nous avons relatée plus haut (chapitre Famille DERAS) contre la famille DERAS qui s'était emparée des biens de son premier mari et elle fit preuve à cette occasion d'une belle ténacité pour obtenir la restitution des droits de sa fille.

Les dernières années de sa vie restent obscures ; elle dut se trouver bien seule après le décès de son troisième mari et le mariage de sa fille. Pourquoi alla-t-elle habiter à Blois ? Quelle fut la maladie dont elle décéda, sans doute chez sa fille à Vendôme à l'âge de 53 ans ?

On ne peut retenir un sentiment de compassion devant les différents malheurs familiaux de Magdeleine BORDIER et d'admiration pour la façon avisée dont elle géra ses biens.

Mais nous regrettons d'autant plus de n'avoir pu cerner davantage sa personnalité à travers la sécheresse des documents juridiques analysés.

Quelle était sa physionomie ? Comment vivait-elle ? Quels étaient ses sentiments, son caractère ? Nous n'avons, malgré l'inventaire de 1743 aucun renseignements sur la garde robe de cette jeune femme qui vivait à l'époque de Louis XV, le seul renseignement que nous ayons est négatif : elle ne savait ni lire ni écrire, à moins que son troisième mari ne l'ait instruite, ce que nous ignorons.

 

Qui étais-tu Magdeleine BORDIER, lointaine grand-mère de mes enfants ?

D - Léonard BRETON et Madeleine DERAS

 

2 décembre 2018

Saga Bezard-Lemaignen 3/4

 

D - Léonard BRETON et Madeleine DERAS

Si Magdeleine BORDIER mérite notre respect pour la façon dont elle a surmonté les nombreux deuils qui ont rempli sa vie, et pour la façon dont elle a préservé son patrimoine et élevé sa fille, son gendre, Léonard BRETON mérite non moins notre admiration pour l'opiniâtreté et l'adresse dont il a fait preuve pour accroître ses biens immobiliers et réunir sur sa tête ceux qui appartenaient à la famille de sa femme.

Léonard BRETON, dont nous ignorons la date de naissance, sans doute avant 1730, était "principal notaire à la Chatellenie de Lisle" en 1757, puis "praticien" en 1758, ensuite "commis à l'exercice du Greffe Civil et Criminel de bailliage Royal et Prévôtal de Vendôme" (1759) et enfin "greffier en chef du bailliage Royal de Vendôme" (1776).

Son père, prénommé comme lui "Léonard" assistait au mariage de sa fille avec Claude BRETON le 07 Octobre 1777. C'est malheureusement tout ce que nous savons de lui ; cet acte de mariage nous apprend aussi qu'il avait un frère, Denis, oncle de la mariée, vigneron à Thoré, qui d'après les pièces de la procédure en interdiction de Madeleine FERRON, eut deux enfants :

1°) Marie Anne BRETON, épouse de Jean BALLERIAU, demeurant à Thoré.

2°) Madeleine BRETON, épouse de François LEROY, vigneron à Thoré.

Il avait aussi une soeur dont nous ignorons le prénom et dont nous ne connaissons l'existence que par une lettre qu'il lui écrivit le 03 Mars 1768, servant de chemise à une acquisition du 02 Février 1768 :

"Ma chère Soeur

Je te diray que c'est pour m'informer de ta santé que je met la main à la plume et que tu as lettrenne d'une de mes lettres ; ainsy je te prie ma soeur, de me satisfaire en me donnant de tes nouvelles écrittes de ta main ; je les recevray avec bien du plaisir et je n'en epargneray point le port (le port était alors payé par le réceptionnaire) et je prie de me croire avec ma sincère amitié, ma chère soeur, ton frère BRETON".

Il avait épousé le 08 Février 1757, Madeleine DERAS, fille de Magdeleine BORDIER et de François DERAS, née, nous l'avons vu à Azé le 12 Septembre 1733. Nous ne connaissons la date de ce mariage que par l'acte de reddition de compte-rendu par Louis MENANT à Léonard BRETON le 08 Mai 1758, analysé ci-dessus. Il est bien dommage que nous ne soyons par en possession du contrat de mariage ou de l'acte de mariage, qui nous auraient certainement révélé des précisions intéressantes.

Nous ne savons rien de la jeunesse de Madeleine DERAS qui avait 18 mois au décès de son père ; elle vécut avec sa mère et sa grand-mère, Anne MICHON, d'abord à Azé, puis à Danzé ; ensuite chez René DOLIVEUX, deuxième mari de sa mère, à Villiers, et enfin à Vendôme chez Louis MENANT.

Elle fut émancipée le 10 Avril 1753.

"Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France de Navarre à notre Bailly de Vendôme, ou son Lieutenant Général de Vendôme, Sallut de la partie de Magdeleine DERAS, fille de deffunt François DERAS, vivant soiton à Azé en Vendomois et de Magdeleine BORDIER sa veuve, depuis veuve de René DOLIVEUX et actuellement femme Louis MESNARD (sic) maître d'Ecole à Vendôme, nous a été exposé qu'ayant présentement atteint l'âge de dix neuf ans six mois et s'étant toujours bien comportée depuis le décès de feu son père, elle est capable de jouir des biens qu'il lui a délaissé et de ceux qui lui sont echus d'autre succession, s'il nous plait lui accorder nos lettres sur le nécessaire. A ces causes, voullant favorablement traiter laditte exposante, nous vous mendons que les parents tant paternels que maternels appelés devant vous, s'il vous appert que l'exposante ait atteint ledit âge de dix neuf ans six mois et qu'elle soit capable de gouverner ses biens et revenus, en ce cas, du consentement desdits parents, permetiés à la ditte exposante de jouïr de ses biens meubles et du revenu de ses immeubles, tout ainsy que si elle était en âge de majorité, l'ayant quant à ce habilité et dispensé, à la charge néantmoins qu'elle ne poura vendre, aliénner ni hipothéquer ses immeubles qu'elle n'ait ataint l'âge de vingt cinq ans, à painne de nulité, car tel est notre plaisir. Donné à Paris, en notre Chancellerie du Pallais le vingt huit mars l'an de grace mil sept cent cinquante trois, et de notre reigne le trente huitième".

En marge : vingt livres douze sols six deniers. Scellé à Vendôme le premier avril 1753. Reçu trois livres et onze sols.

Ayant obtenu cette "lettre de chancellerie", Madeleine DERAS présente elle-même requête au Lieutenant Général Civil et de Police du bailliage Royal et Prévôté unie de Vendôme le 1er Avril 1753, afin de la faire "enthériner à votre siège, du consentement des parents" pour qu'elle ait plein effet, et pour qu'il lui soit nommé un curateur. Et elle fait assigner Denis POMMIER et Gabriel POMMIER à comparaître le Mardi 10 Avril au Palais.

"Le Mardi 10 Avril 1753, pardevant Gilles François de TREMAULT, Chevalier, Seigneur de Bellatour, Morillon, la Blotinière et autres lieux, Conseiller du Roy, Lieutenant Général Civil et de Police au bailliage Royal et prévôté unie de Vendôme, en son hostel à Vendôme à dix heures du matin" comparait Madeleine DERAS assistée de Pierre GAUSSANT son procureur, en présence du procureur du Roy, et ses parents, savoir :

- René GAULTIER, marchand à Chauvigny, cousin germain du côté maternel.

- François DELASALLE, Directeur des carrosses à Vendôme, cousin germain du côté maternel.

- Louis COUDRAY, marchand aubergiste à Vendôme, cousin maternel à cause de Catherine DELASALLE, son épouse.

- Jean-Louis MORINET, maître perruquier et barbier à Vendôme, ami.

- Marin DAY, laboureur à Danzé, cousin germain paternel à cause de Catherine BARRE sa femme.

- Le sieur Louis MENANT son beau-père.

Nous savons que Marin DAY était son cousin paternel et que René GAULTIER était son cousin du côté maternel.

Mais qui étaient François DELASALLE et Catherine DELASALLE ? Comment pouvaient-ils être ses cousins du côté maternel, alors que nous connaissons parfaitement les membres de sa famille maternelle ? Peut-être étaient-ils des enfants d'une soeur de Pierre BORDIER son grand-père ?

Gabriel POMMIER et Denis POMMIER son oncle et cousin paternels, dûment assignés, n'ont pas comparu.

En vertu de cette requête, le Lieutenant Général de l'avis des parents, entérine l'émancipation de Madeleine DERAS et nomme pour curateur le "Sieur MORINET et le jeune".

Seuls ont signé : Madeleine DERAS, DELASALLE, COUDRAY, MORINET et Louis MENANT, les autres ayant déclaré ne savoir le faire.

Cette émancipation a été rendue nécessaire pour que Madeleine DERAS puisse engager la procédure contre la famille DERAS et notamment contre Gabriel POMMIER et Denis POMMIER au sujet du bordage de Sainte-Anne dépendant de la succession de son père, procédure qui fut entamé le 16 Mai 1753 ainsi qu'on la vu au chapitre "Famille DERAS" et auquel on aura intérêt de se reporter.

Une quinzaine de jours après son mariage, Léonard BRETON, qui était alors "principal notaire de la Chatellenie de Lisle" et qui demeurait "au Temple lès Vendôme, paroisse de Lubin" reprend, le 26 Février 1757, l'instance pendante entre sa femme et les héritiers DERAS, notamment Denis POMMIER au sujet de la succession de Mathurin DERAS et du bordage de Sainte-Anne. Comme on le voit Léonard BRETON ne perd pas de temps pour défendre les intérêts de sa femme. Elle était assistées dans cette reprise d'instance par Jean-Louis MORINET son curateur. Nous apprenons par cet acte que le prédécesseur au Greffe du bailliage de Vendôme de Léonard BRETON était Pierre Toussaint OURY.

Léonard BRETON mène activement son affaire et un accord intervient le 12 Décembre 1757 entre lui et Marin DAY époux de Catherine BARRE et Pierre DERAS alors mineur de 25 ans émancipé, Denis POMMIER, Gabriel POMMIER et Pierre POMMIER. Nous avons longuement rapporté cet accord sous le chapitre "Famille DERAS" ; il est donc inutile d'y revenir. Rappelons aussi qu'à la suite de cet accord, Léonard BRETON, alors qualifié de "praticien" demeurant désormais à Vendôme, paroisse Saint-Martin, acquiert le 09 Avril 1758 des héritiers de Mathurin DERAS (à l'exception de Denis POMMIER et de Pierre POMMIER) les parts leur appartenant dans le bordage de Sainte-Anne, puis il achète le 18 Janvier 1759 les parts de Denis POMMIER et Marie BARRE sa femme. Il est devenu à cette date "commis à l'exercice du Greffe Civil et Criminel du bailliage Royal et prévôtal de Vendôme". Enfin, il achètera les parts de Pierre POMMIER le 18 Septembre 1767 seulement.

Léonard BRETON est Madeleine DERAS sa femme deviennent ainsi seuls propriétaires de ce bordage. Rappelons qu'il était d'une contenance de neuf à dix hectares.

 

 

Autres acquisitions par Léonard BRETON

 

Léonard BRETON continue à faire de nombreuses acquisitions : avant le 14 Mai 1764, Léonard BRETON est devenu Greffier du bailliage (il n'était auparavant que commis). A cette date il achète par adjudication publique, après annonces et publications faites à l'issu des grandes messes paroissiales de Danzé, le bordage des Saulettes, paroisse de Danzé, d'une contenance d'environ dix huit hectares, qui appartenait aux enfants FOUQUET, lointains cousins de sa femme (voir chapitre Famille FOUQUET). Rappelons qu'un état très détaillé des terres dépendant de cette métairie des Saulettes a été établi par Léonard BRETON après cette acquisition.

Le 16 Juin 1764 (titres à la ferme de la Foresterie), Léonard BRETON, demeurant alors paroisse de La Madeleine à Vendôme achète de Gervais TROUILLARD, charpentier et Marie PITARD son épouse, demeurant à la Chapelle Vicomtesse au Perche, environ 40 boisselées de terre à Danzé, notamment aux Saulettes dépendant des successions de Michel et Anne PITARD (sic) en vertu d'un partage du 04 Janvier 1762 qui ne nous est pas parvenu. Mais à cet acte d'acquisition est joint un partage du 15 Janvier 1762 qui pourrait bien être le même (voir famille PITARD ci-dessus).

Le 04 Mars 1768, "M. Barthélémy BONNAVENTURE, Félix MOTHERON, prestre vicaire de la paroisse Saint-Martin de Vendôme, seul et unique héritier de feu Me Barthélémy MOTHERON vivant notaire de l'Abbaye de Vendôme et de feu Margueritte FOURNIER, ses père et mère" vend à "M. Léonard BRETON, Greffier du bailliage de Vendôme y demeurant rue Guesnault paroisse de Saint-Martin, un terrain sur lequel il y avait autrefois un bâtiment appelé la Boissière situé au bourg de Danzé et qui était composé de deux chambres à feu dans l'une desquelles était un four, une chambre sans cheminée entre deux, une écurie dans laquelle était placée le dit four, une grange, une cour devant les dits bâtiments, un jardin ensuite et un autre petit jardin au bout, le tout joignant .... etc....".

Ce terrain appartenait aux époux MOTHERON-FOURNIER au moyen d'une baillée à rente qui leur en avait été faite par Me Nicolas MALLET, docteur en médecine et dame Anne LESUEUR, son épouse, par acte passé devant Me Claude COURTIN, notaire à Vendôme le 02 Mai 1742.

Cette acquisition est faite moyennant le prix de 70 livres 14 sols payé comptant.

A ce titre d'acquisition sont joints l'acte de baillée à rente du 02 Mai 1742 par Nicolas MALLET et Anne LESUEUR qui demeurait "au château paroisse de Saint-Georges à Vendôme", et un acte du 22 Novembre 1757 contenant quittance du remboursement d'un prêt par "Me Marin CHERON, avocat en Parlement et au siège du Marquisat de Querhoent y demeurant paroisse de Saint-Laurent (à Montoire) au nom et comme fondé de pouvoir de Me Jacques Barthélémy MOTHRON notaire Royal à Vendosme..... comme curateur à la personne et biens de Barthélémy Bonnaventure Félix MOTHRON, fils mineur de deffunt Me Barthélémy MOTHRON notaire et de dame Margueritte FOURNIER, ledit MOTHRON par représentation de sa ditte mère hérittier du sieur Louis FOURNIER son ayeul, mary de Damoiselle Geneviève VIE".

Cette quittance est donnée à Messire Pierre VIE, écuyer, sieur "DUVIGNEAU, ancien fourier de la maison de son Altesse Royale feu Monseigneur petit fils de France Duc d'ORLEANS, demeurant audit Querhoent (Montoire) paroisse de Saint-Laurent, héritier conjointement avec laditte demoiselle Geneviève VIE sa soeur, de deffunt Me Gilles VIE, leur frère".

Cette quittance portait sur une somme de 512 livres due en vertu de l'acte sus énoncé du 02 Mai 1742.

Le 02 Février 1768, Léonard BRETON achète de Claude Nicolas COURTIN, bourgeois demeurant à Vendôme, paroisse Saint-Martin, une septrée de terre au Maret, paroisse de Danzé, moyennat 65 livres "tant au prix pincipal que vin de marché, payé en écus de six et de trois et monnaye ayant cours". A cet acte est joint le titre antérieur (vente du 30 Novembre 1754 par Antoine HUET, laboureur demeurant aux Brosses paroisse de Danzé ; il est indiqué dans ce titre, que ces terres appartenaient antérieurement à son père Antoine HUET ; il s'agit sans doute de la famille HUET que nous avons rencontrée dans les ventes du 28 Mars 1591, du 05 Avril 1604 et du 06 Avril 1638).

Rappelons que le 20 Mai 1768, il avait acquis par voie de retrait lignager, la moitié indivise avec "les représentants PALLY" dans un corps de logis et des terres à Danzé aux Bigotteries, aux Vieilles Métairies, au Moulin à Vent, au Château et autres lieux (environ 70 boisselées pour la partie acquise) (voir ci-dessus Famille VALLERY).

Le 21 Mai 1771, il paie les cens et rentes de 8 boisselées de terre aux Curées, paroisse de Villerable dus depuis 14 ans ; les cens et rentes précédents avaient été payés le 11 Décembre 1756 par Louis MENANT.

Le 26 Décembre 1770, il achète de Michel LEVE, laboureur et Jeanne MARTELLIERE sa femme, demeurant à la Baratterie, paroisse de Danzé (voir famille FOUQUET) "deux boisselées de Noues très mauvaises sur lesquelles sont plusieurs trognes et épines situées aux Poulinières, paroisse de Danzé.... et deux autres boisselées de mauvais pré situées dans les prés de la Vallée de la Haye Bergerie ditte paroisse de Danzé" moyennant 45 livres payées comptant en écus de 6 et 3 livres.

Le 08 Mai 1773, Léonard BRETON achète encore pardevant RENOU, notaire à Vendôme, de François d'HERBILLY, laboureur et Catherine PITARD son épouse, demeurant paroisse de Danzé, se faisant fort en outre de Margueritte PITARD leur soeur et belle soeur, fille mineure, les parts et portions appartenant aux venderesses dans les successions immobilières de François et Anne PITARD, leurs frère et soeur, indivises entre eux et Léonard BRETON qui avait acquis les autres parts et portions des enfants de François FOUQUET, Gervais TROUILLARD et Marie PITARD sa femme, les 14 Mai 1764 et 16 Juin 1764. Les biens acquis étaient situées paroisse de Danzé. Le prix est de 46 livres 13 sols 4 deniers.

Et le 26 Juin 1773, Léonard BRETON achète de Michel PITARD, frère des précédents, garçon majeur demeurant à Vendôme, paroisse de Saint-Martin, ses droits dans les successions de François et Anne PITARD ses frère et soeur sur les mêmes biens, moyennant 23 livres 6 sols 8 deniers.

Comme on le voit, Léonard BRETON achetait morceaux par morceaux tous les biens qui appartenaient à la famille de sa femme.

Le 30 Octobre 1773, Léonard BRETON achète, pardevant RENOU, notaire à Vendôme, de Marin HEMONT "fondeur et ouvrier en seilleurie" et Marie Jacques LE COMTE sa femme demeurant à Danzé "une petite chambre basse à feu ayant cheminée, petite écurie à costé vers solaire, servant de boutique, sous même faiste, grenier sur le tout, couvert de bardeau, situé au bourg et paroisse de Danzé, joignant d'un côté, vers abas, à la rue qui conduit à l'Eglise, d'autre côté par derrière aux Sieurs Bénédictins, d'un bout au sieur acquéreur" à cause de son épouse, et une petite portion de jardin contenant environ une boisselée.

Il est expliqué que ces immeubles appartenaient aux vendeurs au moyen de l'acquisition qu'ils en avaient faite de Henri FISSEAU, Jacques GARNIER, François FISSEAU, François HUBERT, Mathurin DORSEMAINE, Jean GAUTIER, Marguerite CHAPELAIN et Jean GIGOU, tous héritiers de Jeanne CHAPELAIN leur tante, par acte devant Me MANSION, notaire à Saint-Firmin, le 11 Juillet 1773.

Cette vente est faite moyennant le prix de 300 livres que Léonard BRETON s'oblige à payer, à la décharge des vendeurs aux héritiers de Jeanne CHAPLAIN. Suivent les quittances données à Léonard BRETON par lesdits héritiers, en différents actes.

Sont joints à cette vente les titres antérieurs (ventes du 11 Juillet 1773, du 29 Mars 1770, du 27 Décembre 1759 et du 12 Novembre 1754) et une quittance du centième denier payé par Léonard BRETON, sur son acquisition, le 10 Novembre 1773.

Il résulte d'une note portée par Léonard BRETON sur ce titre d'acquisition, qu'il s'agit de "la maison du Bourg" dont le surplus appartenait à sa femme en vertu du retrait lignager du 20 Mai 1768 analysé ci-dessus sous le chapitre "Familles VALLERY et HOUSSET".

Dans la liasse des titres de propriété de la ferme de la Foresterie à Danzé, on trouve un acte d'acquisition par Léonard BRETON du 22 Mai 1773 de diverses parcelles de terre (une quinzaine de boisselées) dépendant de cette ferme, moyennant 143 livres. Les vendeurs étaient Pierre DIAN, marchand laboureur et Marie VALLERY sa femme demeurant à Beaufour, paroisse de "Fontaine Rou". Il est précisé que les biens vendus provenaient de la succession de Pierre VALLERY, père de la venderesse à qui ils étaient échus de la succession de Anne HOUSSET première femme de Pierre VALLERY, en vertu d'un partage du 16 Janvier 1734, joint au titre d'acquisition.

Le 30 Décembre 1773, Léonard BRETON "Greffier en Chef Civil et Criminel du bailliage Royal" de Vendôme, reconnaît les cens et rentes des 9 boisselées de terres appartenant à sa femme aux Curées, paroisse de Villerable (la quittance de ces cens et rentes sus énoncée du 21 Mai 1771 indique seulement 8 boisselées), dans les termes suivants :

"Lequel a reconnu et confessé tenir à titre de chef cens et rente seigneurialle et autres droits et proffits de fief cy après expliqués, des Révérendes Dames Abbesse, prieure et religieuses de l'Abbaye Royale de la Virginité, Ordre de Citeaux, Diocèze du Mans, paroisse des Roches Levesques, à cause de leur fief et seigneurie des Curées s'étendant paroisse de Villerable".

Suit la désignation de ces 9 boisselées de terres, en trois morceaux, avec leurs joignants, qui, chose curieuse, sont désignés suivant les points cardinaux (nord, orient) et non pas, comme il est d'usage par les vents de galerne, de solaire, d'abas ou d'amont.

"Chargé le tout de deux sols six deniers de cens, cinq sols et une poule de rente pour chaque arpent de seize boisselées, et en outre chargé du droit de relief à raison de vingt deniers pour livre, payables lesdits cens et rentes chacun an le jour de Sainte Catherinne en cette ville de Vendôme dans la maison du four banal du pontceau" (le canal du Ponceau est celui qui traverse le jardin du presbytère de la Trinité et aboutit rue Guesnault).

"Les dits cens et rentes portant droits de lods et ventes, saisines, deffaults, amendes et autres proffits de fief quand le cas y echet suivant la coutume".

"Mouvant et appartenant audit sieur avouant à cause de Madeleine DERAS sa femme à qui lesdits choses sont eschues de la succession du sieur François DERAS son père".

Il est possible que Léonard BRETON ait fait d'autres acquisitions mais les titres ne nous en sont pas parvenus.

En revanche, nous avons trois baux qu'il passa avec les fermiers ou métayers et avec le curé de Danzé.

Baux consentis par Léonard BRETON

 

Le 05 Octobre 1768, Léonard BRETON loue "à titre de ferme de moitié de blé et seigle et moitié de bestiaux et autres charges.... pour le temps à l'espasse de neuf années entières parfaittes consécutives et accomplies à commencer au jour et feste de Toussaint prochain et finir à pareil jour.

A Charles PILLON et Catherine CORBILLON sa femme .... C'est à savoir un bordage située aux Saulettes, paroisse de Danzé consistant en deux maisons manables pour le fermier, écuries aux chevaux et aux vaches, bergerie, grenier sur le tout, grange, tets à porcs, cour, jardin, issus, terres labourables et non labourables, prés, noues et patures .... sans que le bailleur en rien réserve sinon un noyer qui est dans la cour proche le jardin dont il se réserve les noix d'icelui pendant le cours du présent bail ; est aussy compris dans le présent bail une septrée de terre située au Maret paroisse de Danzé acquise par le bailleur dans le cours de la présente année du sieur COURTIN, bourgeois, et partie des terres qu'il a retiré sur Pierre FOUQUET qui les a acquises de Dame DORE...".

Rappelons que le bordage des Saulettes avait été acquis par Léonard FOUQUET le 14 Mai 1764, que l'acquisition COURTIN est du 02 Février 1768, et le retrait lignager contre Pierre FOUQUET du 20 Mai 1768.

Ce bail précise avec beaucoup de détails les conditions imposées aux preneurs, sensiblement dans les mêmes termes que dans les baux du début du XXe siècle, mais avec partage des gerbes autres récoltes. Il est fait obligation aux preneurs de payer les redevances en avoine, argent et volailles dues aux seigneurs des fiefs.

"Les bestiaux qu'il sera nécessaire d'avoir sur ledit lieu pour l'exploitation, d'icelui, tant en cavalles, vaches que brebis seront fournis moitié par moitié entre les parties, dont du tout sera fait évaluation, et dans le cas où les preneurs ne se trouveraient pas en état de fournir leur moitié, le bailleur s'oblige d'en fournir aux preneurs ; le prix de laquelle moitié, les preneurs s'obligent à en donner obligation devant notaire au bailleur de leur faire le payement en quatre termes égaux et dans les quatre premières années du bail".

"Seront tenus les preneurs de faire au bailleur pour chacun an, douze livres de beurre à deux termes moitié au mois de may et l'autre moitié au mois de septembre....".

Sont enliassés avec ce bail, un bail du bordage des Saulettes par François FOUQUET à Félix BELUE et Marguerite BRULE sa femme du 17 Août 1763, et un autre bail du même bordage par le même François FOUQUET à Charles VOISINE et Jeanne BALLU sa femme, du 19 Août 1757, analysés sous le chapitre concernant la famille FOUQUET. Dans ce dernier bail le bailleur se réservait déjà les noix du noyer et en outre une chambre, et les légumes du jardin "à son besoin et pour lui personnellement". "Et s'obligent en outre lesdits preneurs de blanchir le linge tant draps, chemises, cols et autres lignes à l'usage dudit FOUQUET en fournissant le savon sans diminution de la ferme".

Le 16 Août 1776, Léonard BRETON loue à Julien MOREAU et Anne MARTELLIERE sa femme, "une métairie appartenant à la femme du bailleur située au bourg de Danzé consistant en maison manable pour le fermier, écuries, étables, bergeries, grange, tets à porcs, cour jardins au nombre de quatre, une grange dans la cour ; quant à celle devant le cimetière elle est réservée par le bailleur ; terres labourables au nombre de onze à douze septrées par saisons, prés, noues, pature".... en renouvellement d'un bail consenti "par le sieur Louis MENANT à Jean MOREAU et Madelaine DENIAU sa femme, père et mère dudit MOREAU preneur" le 23 Novembre 1754 (soit environ 17 à 18 hectares).

La métairie louée n'est pas plus amplement désignée.

Le 18 Septembre 1776, Léonard BRETON loue à François BERTEAUME, curé de Danzé "pour le temps qu'il sera curé audit Danzé par ceds ou deceds, une chambre à cheminée avec grenier dessus et cour devant autant qu'elle en emporte sittuées au bourg et paroisse de Danzé" moyennant un loyer de quinze livres par an.

Etait-ce la "maison du bourg" ?

 

 

L'affaire GON

 

On vient de voir comment Léonard BRETON a réussi à acquérir la plupart des immeubles qui appartenaient à la famille de sa femme et à les gérer avec profit.

Mais il ne semble pas qu'il ait toujours agi avec une grande honnêteté. Il est possible qu'il ait usé de sa profession de greffier pour intimider ses cocontractants. L'affaire GON en est un exemple qui mérite d'être relaté en détail.

Le 17 Juin 1754, par acte de Me NOURY, notaire royal à Villiers, Louis GON, laboureur à l'Etre au Four, paroisse de Chauvigny reconnaît devoir à René DOLIVEUX, maréchal de forges au bourg de Villiers, mari de Madeleine BORDIER, la somme de 78 livres "restant du compte fait ensemble pour fermage d'un bordage appartenant à laditte BORDIER, situé à "l'Etre au Four" cette obligation est contrôlée à Vendôme le 19 Juin 1744. La date de l'acte (ou du moins de sa copie) est donc manifestement erronée ; il a été établi en réalité le 17 Juin 1744.

En vertu de la transaction du 1er Avril 1746 qui met fin à la procédure avec René GAULTIER en résolution de vente à rente viagère (voir ci-dessus "Madeleine BORDIER - Litige avec René GAULTIER) René DOLIVEUX et sa femme cèdent à René GAULTIER le montant de cette obligation (il est bien précisé dans cet acte qu'elle a été souscrite le 17 Juin 1744").

Le 29 Mars 1764, René GAULTIER fait assigner par le ministère de Me François Michel BAREAU "huissier à cheval au Chatelet de Paris, reçu et immatriculé en icelui demeurant à Doué", Julien DUFOY, homme d'affaires de Madame DEJOFFRE demeurant à la Massurie, paroisse de Chauvigny, acquéreur de pièces de terres à Chauvigny qui lui ont été vendues par Louis GON et Jean GON par acte reçu le 10 Avril 1763 par Me Antoine LE ROY, notaire à la Châtellenie de la Chapelle Vicomtesse, à comparaître à l'audience du bailly de la Châtellenie de Chauvigny pour être condamné à payer les 78 livres de l'obligation ci-dessus dans laquelle a été subrogé René GAULTIER ; "si mieux n'aime ledit sieur DUFOY, déguerpir ces deux pièces de terre pour être saisies et vendues par décret en la manière accoutumée, et les deniers en provenant être délivrés audit GAULTIER jusqu'à due concurrence". C'est très sensiblement notre procédure actuelle de saisie immobilière.

En réponse à cette assignation, Julien DUFOY fait sommation par acte du même huissier à cheval du 05 Avril 1764, à Jean GON et à Louis GON d'avoir à payer leur dette envers René GAULTIER.

Le 09 Mai 1764, René GAULTIER obtient un jugement qui met en cause Madeleine BORDIER "veuve en dernières noces du sieur MENANT" (on notera cette précision intéressante sur la date approximative du décès de Louis MENANT).

Le 29 Janvier 1766, Jacques MARAIS, demeurant en la ville de Cloyes, paroisse Saint-Lubin, au nom et comme mari de Marie LATRON, veuve et légataire de René GAULTIER, déclare qu'il reprend l'instance engagée "indécise par suite du décès de René GAULTIER" et fait signifier cette reprise d'instance le 07 Février 1766 au sieur DUFOY, qui fait assigner à son tour Jean GON le 15 Février suivant.

En conséquence (quelle belle procédure !), Jean GON fait assigner le 1er Mars 1766, la veuve MENANT, demeurant à Blois, pour lui faire reconnaître "qu'elle est plus que remplie des causes de l'obligation du 17 Juin 1754, s'étant emparé et ayant disposé des grains de la récolte de la dite année 1754, qui étaient pendantes par les racines dans la métaierie de l'Etre au Four".

Le 05 Mars 1766, en conséquence de cette assignation, Madeleine BORDIER constitue pour procureur Me GAUSSANT, et elle décède le 09 Mai suivant, ainsi qu'il est attesté par une copie de son acte de décès.

L'affaire s'endort pendant un an, mais le 08 Avril 1767, Jean GON assigne Léonard BRETON en sa qualité de mari de Madeleine DERAS, fille de Magdeleine BORDIER pour reprendre l'instance.

C'est alors que Léonard BRETON va déployer toute sa rouerie.

Le 19 mai 1767, il déclare au bailly de la Châtellenie de Chauvigny que l'action en reprise d'instance par Jean GON :

"ne se peut soutenir puisque les défendeurs ne sont assignés que comme hérittiers de Madeleine BORDIER, hors (sic) la dite Madeleine BORDIER n'est décédée à Vendôme que le 10 May 1766 (en réalité le 9). Par conséquent on n'a pas pu les assigner en reprise d'instance par exploit du 08 Avril 1766, plus d'un mois auparavant le décès de la ditte Madeleine BORDIER, ce qui se justifie par l'extrait mortuaire de laditte Madeleine BORDIER dont on a fourni copie en teste des présentes".

C'est un très mauvais argument : l'exploit est du 09 Avril 1767 et non pas du 09 Avril 1766. Léonard BRETON est vraiment de mauvaise foi. Mais ce n'est pas tout, il va encore développer un argument d'aussi mauvaise foi le 28 Juillet 1767. Il déclare en effet au bailly de Chauvigny que :

"la demande en évocation contre lui formée à la requeste de Jean GON, garçon majeur ne se peut en aucune façon se soutenir ; les nullités radicales qui résultent tant de l'assignation donnée à la requête dudit GON à déffunte dame veuve MENANT le premier Mars 1766 que des copies des pièces données en teste des exploits, entraînent absolument la nullité de toute la procédure. En effet l'action en interruption est formée en vertu d'une obligation subie au proffit de René DOLIVEUX comme mary de Magdeleine BORDIER par Louis GON, devant NOURY notaire Royal à Villiers le 17 Juin 1754. Or, on nie positivement que le 17 Juin 1754 NOURY ait reçu cette prétendue obligation puisqu'il y avait plus de six ans que le DOLIVEUX mary de Magdeleine BORDIER, et NOURY notaire Royal à Villiers étaient décédés. On ne peut imaginer comment Jean GON a eu la hardiesse de faire une pareille procédure .... et d'avancer que la veuve MENANT est remplie de ses causes de l'obligation du 17 Juin 1754, puisque non seulement elle n'a jamais existé mais même qu'elle n'a jamais pu exister par les raisons cy dessus. Ce serait, Monsieur, abuser de votre patience que de s'apesantir plus longtemps sur un pareil moyen ; on croit en avoir assez dit ".... etc....

 

Vraiment c'est nous qui nous demandons comment Léonard BRETON a eu "la hardiesse" de fonder toute sa défense sur une erreur manifeste de date dans la copie de l'obligation du 17 Juin 1744. Nous ignorons d'ailleurs quelle fut l'issue de ce procès et si le Bailly de Chauvigny s'est laissé intimider par les arguments fallacieux du Greffier en chef civil et criminel du bailliage et prévosté réunis de Vendôme !

 

 

Essai de récapitulation des immeubles possédés par

Léonard BRETON et Madeleine DERAS

 

Ayant analysé tous les actes qui nous sont parvenus concernant Léonard BRETON et Madeleine DERAS sa femme (à l'exception d'une obligation du 1er Mars 1778 que nous analyserons plus loin) ainsi que ceux concernant les familles DERAS, BORDIER, MICHON, VALLERY, HOUSSET, FOUQUET, PITARD, MELOT, BRILLARD et LANCELOT, nous allons tenter d'établir la liste des immeubles qui appartenaient à ces familles et qui se sont trouvés réunis à la fin du XVIIIe siècle sur les têtes de Léonard BRETON et de Madeleine DERAS.

Madeleine DERAS avait recueilli dans la succession de sa mère et Léonard BRETON avait acquis soit par licitation, soit par voie de retrait ligner, soit par adjudication ou acquisitions amiables :

- Le bordage de Sainte-Anne d'une contenance de 9 à 10 hectares.

- La Petite Closerie de Rochambeau qui appartenait à Magdeleine BORDIER.

- Le bordage des Bigotteries, à Danzé, contenant environ 3 hectares et demi, acquis par voie de retrait lignager.

- Une maison au bourg de Danzé qui devait être assez importante, et dont une partie fut louée au curé de Danzé en 1776. Cette maison fut vendue par Léon LEMAIGNEN le 13 Mars 1830. Elle joignait du midi la route du Mans à Orléans.

- Des terres à la Douardière, aux Vieilles Métairies, à la Borde, à la Haie Bergerie, paroisse de Danzé provenant notamment du partage de la succession de Thomas MICHON du 02 Juillet 1708 et précédemment du partage de la succession de Jean LANCELOT du 15 Janvier 1674, et d'une acquisition par Magdeleine BORDIER du 02 Juillet 1708, le tout d'une contenance de vingt à trente hectares. En 1813, l'inventaire après le décès de Madeleine Eugénie FERRON fera état de "La ferme du Bourg" à Danzé d'une superficie de 34 hectares (le bail du 16 Août 1776 porte sur 17 ou 18 hectares).

- Le bordage des Saulettes, provenant des familles PITARD et FOUQUET, d'une contenance d'environ 20 hectares, dont 2 hectares acquis le 16 Juin 1764 (ce bordage était de 33 hectares en 1813).

- Une pièce de terre aux Marets (62 ares) acquise le 02 Février 1768.

- Environ 45 ares de terre aux Curées, commune de Villerable provenant de la famille PEZIERE.

- Environ 77 ares à la Foresterie, paroisse de Danzé acquis le 22 Mai 1773.

Mais il est vraisemblable que Léonard BRETON et Madeleine DERAS devaient posséder d'autres immeubles dont les titres ne nous sont pas parvenus, car les biens possédés par leur fille et leur petite fille étaient beaucoup plus considérables, indépendamment de ceux acquis par Claude Joseph FERRON.

Nous savons notamment qu'ils possédaient une métairie aux Brosses qui était peut-être un propre de Léonard BRETON.

Il résulte d'un "Mémoire pour servir à faire la déclaration de M. BRETON au fief de Danzé" établi après le mariage de sa fille avec Claude Joseph FERRON, c'est à dire après 1777, que les époux BRETON-DERAS possédaient environ 17 hectares du fief de Danzé, sur les lieux dits : le Bourg, le Bourgneuf, le Pré Cordier, les Chaintres, le Moulin à Vent, les Quatre Vents, la Douardière, la Gaussanderie, les Noues, la Borde, etc.....

Après le décès de Léonard BRETON et de Madeleine DERAS, leurs enfants ont établi un projet de partage ainsi rédigé :

"Partage entre Messieurs BRETON et Madame FERRON.

1er lot : Les Grandes Brosses, la moitié de la Closerie de Rochambeau compris la cave et la chambre, le Bois Mort (20 boisselées), le Fonteneau (30 boisselées), le Bois Corné (30 boisselées), le Fonteneau (6 boisselées).

2ème lot : Les Petites Brosses, la chambre et le jardin ; la chambre de la Court Chedet ; les greniers, chambre, cave dont jouira la communauté jusqu'à la fin du baille de la ferme des Bénédictins..... (illisibles) ; le jardin de maître avec .... (illisible) jusqu'à la fin du baille ; le Temple (près Vendôme où habite François Nicolas BRETON) ; le Bois au Fonteneau (4 boisselées); le Bois Cochon (35 boisselées) ; le Bois des Petites Brosses (15 boisselées) ; le Bois Lamy (20 boisselées).

Ce lot est chargé de 1.000 livres dues par la communauté au sieur "des Brosses" (c'est Léonard Louis BRETON l'un des fils), de 150 livres pour la réparation de la cave du Paillard et de 150 livres pour le 1er lot.

3ème lot : La ferme du bourg de Danzé, la moitié des vignes de Rochambeau, la cave de Paillard, les 30 boisselées de terre dont jouit notre oncle, les 3 petits morceaux de pré et bois, le bois et de la Hutte de 70 boisselées, la noue près du bourg, la maison auprès de Madame CORNILLET et le jardin de la chambre rouge ; les 700 livres sur M. AZY (?) de Montoire.

 

"Chaque lot sera chargé du tiers de la rente de Madame JOUIN et du tiers des rentes viagères..... Tous les équipages des deux closeries seront partagés par tiers pour être transportés à la cave de Paillard aux frais de la communauté. Tous les meubles qui restent au Temple et à Rochambeau seront partagés par tiers".

On remarquera que ce projet de partage, qui semble avoir été établi au début du XIXe siècle, ne fait aucune mention des Saulettes, du bordage de Sainte-Anne et des terres des Curées. Certains de ces biens avaient peut-être été vendus. Cependant, les Saulettes existaient toujours. On ignore qu'elle est l'origine des terres et bois au Fonteneau : était-ce des propres de Léonard BRETON ?

D'après un relevé du cadastre établi en 1813, la ferme du Bourg était d'une superficie de 31 hectares 70 ares 49 centiares et comprenait les lieux-dits : le Bourg, la Dourdière, Neufmanoir, les Grands Chaintres, les Fouchères, les Bigotteries, etc...

La ferme des Brosses d'après le même relevé était d'une contenance de 38 hectares 22 ares 09 centiares et la ferme des Saulettes de 33 hectares 46 ares 46 centiares (lieux-dits : les Saulettes, les Châteaux, Bois Lami, Grandes Chaintres, la Poulinière, la Douardière, etc....).

D'après ce que nous verrons plus loin, le 3ème lot a été attribué à Madame FERRON, le 1er à Léonard Louis BRETON et le 2ème à François Nicolas BRETON qui a dû le vendre presque aussitôt en raison de ses difficultés financières.

Comme on le voit, Léonard BRETON et Madeleine DERAS laissaient un bel héritage à leurs enfants, encore qu'il soit difficile d'en fixer avec précision la désignation et la contenance. Les lieux-dits des terres possédées par eux constituent la presque totalité des lieux-dits actuels autour de Danzé : la Haie Bergerie, les Marets, la Lombarderie, les Métairies, la Douardière, la Borde, les Saulettes, les Brosses, les Châteaux, la Paillarderie, les Bigotteries, le Pont aux Choux, le Bois aux Moines, etc....

 

 

Les dernières années de Léonard BRETON

et de Madeleine DERAS

 

 

Nous n'avons pratiquement aucun renseignement sur les dernières années de Léonard BRETON et de Madeleine DERAS sa femme.

Le 1er Mars 1778, ils empruntent à une demoiselle Angélique Marie GASSELIN des BOMPART, demeurant à Vendôme, une somme de mille livres soit cinquante livres de rente.

Comment se fait-il que Léonard BRETON qui avait fait de nombreuses acquisitions jusqu'alors et qui venait de marier sa fille, ait été obligé d'emprunter une telle somme ?

Léonard BRETON et Madeleine DERAS ont du décéder peu après, car le 15 Janvier 1780 c'est Joseph FERRON leur gendre qui loue à Charles PILLON, laboureur et Roze MOREAU sa femme, demeurant aux Métairies, la ferme des Saulettes "telle qu'en jouissait déjà ledit PILLON et Catherine CORBILLON sa première femme, en vertu du bail de 05 Octobre 1768" que nous avons précédemment analysé. Le ferme des Saulettes était, on le sait, un propre de Madeleine DERAS, cela suppose donc qu'elle même et son mari étaient décédés.

On peut donc affirmer que Léonard BRETON et Madeleine DERAS sont décédés entre le 1er Mars 1778 et le 15 Janvier 1780. Madeleine DERAS avait environ 46 ans lors de son décès (elle était née le 12 Septembre 1733). Quant à Léonard BRETON, on sait qu'il était principal notaire à la Châtellenie de Lisle en 1757, on peut supposer qu'il avait alors 25 ou 30 ans. Il n'avait donc qu'une cinquantaine d'années lors de son décès. Il devait demeurer, nous l'avons vu, rue Guesnault, mais dans quelle maison ?

Il est bien regrettable que nous n'ayons aucune autre précision sur la vie de Madeleine DERAS. Nous savons seulement que les époux BRETON-DERAS eurent trois enfants, ce qui est d'ailleurs confirmé par un acte du 02 Août 1789 aux termes duquel Léonard Louis BRETON, Joseph Charles (sic) FERRON, et Madeleine BRETON sa femme et Nicolas François BRETON, reconnurent la dette de 1.000 livres souscrite par leur père et mère au profit de Mademoiselle GASSELIN des BOMPART le 1er Mars 1778. En vertu de cette reconnaissance, Joseph FERRON et sa femme s'obligèrent seuls à son remboursement en raison des "arrangements faits entre lesdits enfants BRETON des biens des successions desdits deffunts Me BRETON et son épouse leur père et mère". Cette dette fut d'ailleurs remboursée le 28 Brumaire An III. Il est bien dommage que ce partage ne nous soit pas parvenu ; il nous aurait apporté des précisions sur la date du décès de Léonard BRETON et de Madeleine DERAS et sur la consistance exacte de leurs biens.

 

 

Les enfants de Léonard BRETON et de Madeleine DERAS

 

Les trois enfants de Léonard BRETON et de Madeleine DERAS furent :

1°) Léonard Louis BRETON qui fut, comme son père, Greffier du Tribunal de Vendôme, époux de Marie Pétronille BRETON.

2°) François Nicolas BRETON, marchand de draps place Saint-Martin à Vendôme, le 02 Août 1789, puis demeurant au Temple lès Vendôme, époux de Marie Renée MARTELLIERE.

3°) Madeleine BRETON, épouse de Claude Joseph FERRON, dont nous étudierons la vie plus loin.

Nous savons peu de chose des deux fils.

Léonard Louis étant l'aîné, il était "Greffier en Chef Civil, Criminel et de Police du Bailliage Royal de Vendôme" le 02 Août 1789. Il avait succéder à son père dès son décès, puisqu'il était l'aîné et que sa soeur est née, nous le verrons, vers 1758 : on peut estimer qu'il est né vers 1750-1755.

Il possédait la Métairie des Brosses, commune de Danzé d'une superficie de 17 hectares. Elle fut vendue à François LEMAIGNEN-VILLORCEAU le 17 Octobre 1813 d'après une note portée sur un relevé du cadastre des biens appartenant à LEMAIGNEN-VILLORCEAU établi en 1813.

Il est indiqué en marge de ce relevé du cadastre : "Ferme des Brosses acquise de Me BRETON, ancien Greffier, le 17 Octobre 1813" or, nous verrons (procédure en interdiction ci-après) qu'il était décédé avant le 24 Décembre 1812 ce qui est d'ailleurs confirmé par la réunion du conseil de famille des enfants mineurs de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU du 12 Janvier 1813, pour faire nommer un nouveau subrogé tuteur par suite du décès de Léonard Louis BRETON. Il semble donc qu'il faille supposer que la vente de la ferme des Brosses du 17 Octobre 1813 a été faite par ses héritiers. Il avait dû laisser notamment un fils, car en marge du même relevé du cadastre, il est indiqué en face d'une parcelle : "M. des Brosses prétend que celui lui appartient". Comme Léonard Louis était alors décédé, ce M. de Brosses devait être son fils.

En raison de la possession de cette métairie, Léonard Louis BRETON se faisait appeler "Monsieur des BROSSES". Sa soeur, notamment, l'appelle ainsi d'après les pièces de son procès d'interdiction que nous étudierons plus loin.

Il fut nommé subrogé tuteur des enfants mineurs de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU. Lors de l'Inventaire dressé après le décès de Madeleine FERRON, leur mère, en Mai-Juin et Juillet 1809, il était "Greffier en chef du Tribunal Civil de première instance de l'Arrondissement de Vendôme". On ignore quand il cessa ces fonctions. Il habitait rue Ferme à Vendôme. Il ne devait avoir qu'une maigre fortune car dans un règlement du 12 Novembre 1817 entre François LEMAIGNEN-VILLORCEAU et ses enfants il est dit que ces derniers étaient "créanciers de la succession de Louis Léonard BRETON leur oncle maternel et qu'ils ont été colloqués du prix des rentes de cette succession pour la somme de 110 francs 90 centimes" résultant d'un prêt fait par Claude Joseph FERRON à Léonard Louis BRETON le 11 Ventose An XI à charge d'une rente annuelle de 27,50 Frs (Inventaire de 1809). Sa succession avait d'ailleurs été acceptée sous bénéfice d'inventaire. Il avait une fille, ainsi qu'il résulte d'un témoignage du procès d'interdiction.

En ce qui concerne François Nicolas BRETON, nous savons qu'il était marchand de draps à Vendôme, qu'il demeurait place Saint-Martin (02 Août 1789). Il fit de mauvaises affaires et alla habiter au Temple lès Vendôme. Puis il habita rue Ferme (procès en interdiction). Il était en excellents termes avec sa soeur qui lui loua le 1er Avril 1813 tous les biens dont elle avait réservé l'usufruit.

En raison de ses mauvaises affaires, le conseil de famille du 12 Avril 1813 sus énoncé, refuse de le nommer subrogé tuteur en remplacement de son frère : "le mauvais était de ses affaires prouvant son incapacité à remplir cette fonction".

Nous avons vu que Madeleine BRETON recueillit divers biens meubles et immeubles de ses parents Léonard BRETON et Madeleine DERAS, à l'exception du bordage de Sainte-Anne et des terres de Villerable qui ont sans doute été attribués à l'un de ses deux frères. Ces partages paraissent avoir favorisé Madeleine BRETON. Peut-être Léonard BRETON possédait-il des biens propres qui auraient été attribués aux fils ? Il est vraiment regrettable que "les arrangements faits entre les enfants BRETON" auxquels fait allusion l'acte sus-énoncé du 02 Août 1789, ne nous soient pas parvenus.

 

 

E - Madeleine BRETON et Claude Joseph FERRON

Mariage de Claude Joseph FERRON et de Madeleine BRETON

 

Du registre des Baptêmes et Mariages de la paroisse de Danzé, Evêché de Blois, généralité d'Orléans, du ressort du bailliage Royal de Vendosme année 1777 a été extrait ce qui suit :

"L'an mil sept cent soixante dix sept, le sept octobre, après que publication d'un banc du futur mariage d'entre le sieur Claude Joseph FERRON, garçon majeur Officier du Corps des Carabiniers de Monsieur, fils de deffunt le sieur Claude FERRON et de dame Marie MILLON ses père et mère, originaire d'Helmaurupt, paroisse de Saint-Maurice en Champagne, généralité de Chalons, en quartier à Vendosme, paroisse de Saint-Martin depuis trois ans, d'une part.

Et demoiselle Madelaine BRETON, mineure, fille de Me Léonard BRETON, Greffier en chef du bailliage Royal de Vendosme et de dame Madelaine DERAS ses père et mère, de la dite paroisse de Saint-Martin de Vendosme, d'autre part.

Faite en prosne de la messe paroissiale de l'Eglise de Saint-Martin de Vendosme, sans qu'il se soit trouvé aucun empêchement ou opposition quelconque suivant le certificat du sieur Curé de ladite paroisse en datte du cinq de ce mois, signé BRY curé de Saint-Martin, Monsieur POMMERY vicaire général du Diocèse ayant donné dispense des deux autres comme il parait par l'acte de dispense du jour d'hier signé POMMERY, Vicaire général, insinué duement le mesme jour que dessus, signé FARIAN.

Moy soussigné prestre curé de cette paroisse muny de la permission dudit sieur BRY pour la célébration du mariage

Ay reçu leur mutuel consentement de mariage et leur ay donné la bénédiction nuptiale, du consentement de M. de POYENNE, Chevalier des Ordres du Roy, Lieutenant Général des ses armées, Commandeur du corps des Carabiniers de Monsieur, et de M. le Marquis DUPLESSIS, mestre de camp de cavalerie, lieutenant colonel commandant l'Escadron des Carabiniers en quartier à Vendosme, en présence de M. DEROSSELLE, major de Cavalerie, Capitaine en premier des Carabiniers, de M. DECROVILLE Lieutenant, DEVOUGE Lieutenant et PILLEREAU porte-étendard chargé du détail, amis de l'époux.

Et en présence et du consentement, du costé de l'épouse, de ses père et mère, des sieurs Léonard BRETON, son ayeul paternel, Denis BRETON son oncle dudit costé, Léonard Louis et Nicolas François BRETON, ses frères, de demoiselles Catherine BERTHEAUME, Félicité et Flore JABRE du PLESSIS, de trois demoiselles LEROY amies, Geneviève DAY, tant parents qu'amis lesquels ont dit ne savoir signer fors les soussignés.

Le registre est signé BRETON, femme FERRON, FERRON, ROSSEL, de CROVILLE, femme Firmin DEVOUGE, PILLERAULT, DERAS femme BRETON, Firmin de la MOTTE, C. BERTHEAUME, BRETON, Hélène LEROY, Victoire LEROY, Julie LEROY, M. BEAUSSIER, MEREAUX, J. ADAM, Marthe HAUDRY, Félicité JABRE du PLESSIS, Flore JABRE du PLESSIS, BEAUSSIER, BRETON, BRETON, BAUDRY, RICHAUDEAU et BRETHEAUME curé".

Quelques précisions sur cet acte de mariage ne sont pas inutiles.

L'obligation pour un Officier, d'obtenir le consentement de ses supérieurs hiérarchiques pour se marier, supprimée depuis peu de temps, existait donc déjà sous l'ancien régime.

Les troupes en garnison à Vendôme étaient logées en divers bâtiments, faubourg Chartrain et faubourg Saint-Lubin, d'après de Saint-Venant. Les bâtiments de l'Abbaye étaient bien entendu encore occupés par les Bénédictins.

La famille JABRE DUPLESSIS était une vieille famille de Vendôme qui posséda une maison, rue Potterie où fut installé ce Tribunal après les bombardements de 1940 et détruite en 1978 pour la création du parking du parc du lycée Ronsard.

Les filles LEROY étaient des cousines de la mariée.

Geneviève DAY devait être une fille de Marin DAY et de Catherine BARRE, elle même petite fille de Mathurin DERAS époux de Catherine PEZIERE.

La mère de Claude Joseph FERRON assistait au mariage de son fils.

BEAUSSIER était médecin à Vendôme.

MEREAUX était notaire à Vendôme. Il avait du recevoir le contrat de mariage, mais celui-ci ne nous est pas parvenu.

On imagine facilement, dans la petite église de Danzé, en ce début du règne de Louis XVI, les uniformes des Officiers du Corps des Carabiniers de Monsieur, alors en garnison à Vendôme, et les fraîches toilettes des amies de la mariée, parmi la foule des "laboureurs" de la paroisse venus complimenter les jeunes époux qui étaient propriétaires des fermes louées à plusieurs d'entre eux.

Claude Joseph FERRON avait 39 ans lors de son mariage. Il était né le 17 Avril 1738 ainsi qu'il résulte de son brevet de pension militaire. Un doute existe sur le lieu de sa naissance : Saint-Maurice n'existe pas dans la Marne. Le nom d'"Hermaurupt" fait penser à RUPT sur Moselle dans les Vosges, près de Saint-Maurice sur Moselle. La généralité de Chalons s'étendait d'ailleurs jusqu'à la Lorraine.

Comment ce Champenois ou ce Lorrain est-il venu échouer en Vendômois où il habitait depuis trois ans lors de son mariage ? Sans doute au hasard des "quartiers d'hiver" des Carabiniers de Monsieur.

Bien que roturier, il put devenir Lieutenant, mais ne monta pas plus en grade, ainsi qu'il était presque de règle sous l'ancien régime.

Il a du faire connaissance à Vendôme de la fille du Greffier en chef du bailliage, qui était une riche héritière, au cours des soirées données par la Société bourgeoise de Vendôme aux Officiers de cavalerie de la garnison.

Madeleine BRETON avait 19 ans lors de son mariage. Nous ne connaissons pas la date de sa naissance, mais dans la procédure d'interdiction que nous verrons plus loin, elle déclare en Avril 1812, avoir 54 ans.

 

 

Acquisitions par Claude Joseph FERRON

 

Quinze jours avant son mariage, Claude Joseph FERRON "demeurant en quartier d'hyvert, paroisse Saint-Martin à Vendôme" achète de :

"Messire François René LEFEBVRE d'Ivry, Chevalier Seigneur de la Pinellière, les Moteaux, les Ronces et autres lieux, demeurant en son chateau des Ronces, paroisse de Romilly en Perche", trois fermes appartenantes audit "Seigneur vendeur, situées paroisse de Danzé, l'une appelée la Ferme du Pré, l'autre les Bourdinières et l'autre, celle des Foresteries" et "l'emplacement d'une écurie située au bourg de Danzé". En outre "est compris en la présente vente les récoltes de toutes espèces de grains qui sont engrangées dans les dites trois fermes provenant de la moisson dernière. Bien entendu que les parts qui appartiennent aux fermiers ne font point partie de celle cy-dessus abandonnée".

Cet acte de vente, reçu par Me René RENOU, notaire du Roi à Vendôme le 23 Septembre 1777, en la maison Seigneuriale de Messieurs les Bénédictins de Vendôme, ne comporte aucune précision sur la superficie des fermes acquises ni autre désignation.

En revanche, il précise que les biens vendus relèvent dans leur majeur partie du Prieuré de Danzé appartenant à Messieurs les Bénédictins de Vendôme,

"partie à droit de terrage de la nature qu'il est du, partie sous le devoir de moitié d'une rente solidaire de quatre septiers de bled froment, deux septrées de seigle et trente six boisseaux d'avoine, le tout à la mesure de Vendôme et autre partie à cens, menues rentes en argent et poulle. Une autre partie relevant de la Châtellenie de Lisle appartenant à Monsieur l'Abbé Cardinal de l'Abbaye de Vendôme. Une autre partie au Duché de Vendôme. Et le surplus les fiefs des Bigotteries, appartenant à Monsieur le Chevallier de Trémault, le tout en roture et sous les anciens droits et devoirs seigneuriaux et de la nature qu'ils peuvent être dus, de quelque nature et espèce qu'ils soient".

Il est intéressant de rappeler les termes de cet acte concernant les droits seigneuriaux qui semblaient être bien tombés en désuétude à la fin du XVIIIe siècle, attendu l'imprécision avec laquelle ils sont mentionnés. La nuit du 04 Août n'était pas loin.

Sont cependant mentionnées, en marge de cet acte, les quittances de ces droits seigneuriaux, lods, ventes et rentes données par les représentants des titulaires de ces droits.

Après l'abandon des droits seigneuriaux de la nationalisation des biens du Clergé, la République n'en abandonne cependant pas le recouvrement. On trouve dans les titres de la Foresterie plusieurs quittances de cens, rente et droits de terrage appartenant au ci-devant Prieuré de Danzé, données par le Receveur de la Régie Nationale de l'Enregistrement et des Domaines, à La Ville-aux-Clercs à Claude Joseph FERRON en 1791 et 1792.

Il est précisé dans cet acte que cette vente comprend le bétail et les semences qui appartenaient au vendeur.

Elle est faite moyennant la charge pour l'acquéreur de payer en l'acquit du vendeur la somme de 800 livres qu'il restait devoir au sieur HERPAIN précédent propriétaire. Cette somme fut payée par Claude Joseph FERRON le 07 Novembre 1777.

En outre, cette vente est consentie moyennant le prix de 30.720 livres "tant en principal achat que vin de marché, savoir celle de 25.500 livres pour les immeubles et celle de 5.220 livres tant pour le prix des récoltes que pour le bétail et avances faites aux fermiers".

Sur ce prix, Claude Joseph FERRON paye comptant 16.720 livres, le solde étant stipulé payable en quatre ans avec intérêt au dernier 20 (5 %) sur ces 16.720 livres, Claude Joseph FERRON déclare que 7.720 livres proviennent d'un emprunt par lui fait à l'un de ses amis. Il ne possédait donc que 9.000 livres pour faire cet important achat.

Il résulte d'annotations en marge de cet acte que le solde du prix fut payé le 25 Janvier 1787, soit près de dix ans après sa conclusion et que, bien que cela n'ait pas été précisé Pierre HERPAIN, ancien propriétaire de la ferme du Bois aux Moines, avait droit au logement gratuit pendant sa vie dans les bâtiments

Sur cet ancien propriétaire on pourra consulter les titres de propriété de la Foresterie remontant au 27 Novembre 1556.

Pourquoi Claude Joseph FERRON a-t-il acheté ces trois fermes qui devraient couvrir environ 130 hectares ? Pourquoi s'est-il ainsi endetté si lourdement ? Nous verrons qu'il va traîner toute sa vie le poids de cette dette. Est-ce Léonard BRETON son futur beau-père qui l'a poussé à faire cette acquisition ; c'est peut-être lui qui lui a prêté les 7.720 livres dont on ne trouve d'ailleurs aucune trace de remboursement.

Constatons seulement que l'acquisition de ces trois fermes par un officier de passage à Vendôme depuis trois ans a coïncidé exactement avec son mariage avec une toute jeune fille dont les parents possédaient déjà des biens immobiliers à Danzé.

Peu de temps après son acquisition le 05 Novembre 1778, Claude Joseph FERRON échange avec Pierre FOUQUET, maréchal ferrant à Danzé 4 boisselées de terre aux Fouchers, 2 boisselées de pré, une boisselée de pature et 3 boisselées de terre, dépendant de la ferme de la Foresterie, contre dix boisselées de terre et pré dont le lieu-dit n'est pas précisé. Cet échange devra être ratifié en 1783, quand Madame FERRON "aura l'âge" ce qui confirme qu'elle est née en 1758. Ce Pierre FOUQUET était marié à Marie Anne BLAIN, ainsi que nous l'avons vu en étudiant la famille FOUQUET.

Le 15 Janvier 1780, il loue à Charles PILLON et à Roze MOREAU sa femme, la ferme des Saulettes appartenant à sa femme, ce qui nous a permis d'en déduire que Léonard BRETON et Madeleine DERAS étaient alors décédés (voir "dernières années de Léonard BRETON").

Le 12 Février 1780, il loue à compter de la Toussaint 1780 à Louis NEVEU et Marie TENDRON sa femme, la métairie de la Foresterie, il se réserve le logement "dont joui pendant sa vie la veuve de Pierre HERPAIN" si cette dernière vient à décéder. Il se réserve également la pêche dans la fosse. Les preneurs devront achever de déffricher la pièce de terre appelée "les Ventes". Ils devront marner les terres.

Ils livreront chaque année 16 livres de beurre, deux bonnes oies, deux chapons, six poulets et six canards. Le bailleur fournira les semences ainsi que la moitié des "cavales, boeufs, vaches et bêtes à cornes". Les récoltes seront partagées par moitié.

Le 13 Novembre 1780, Louis NEVEU et Marie TENDRON reconnaissent devoir à Claude Joseph FERRON, alors en quartier à Saumur, 300 livres, 80 boisseaux de blé et cent boisseaux d'avoine, avancées pour l'exploitation de la Foresterie.

Claude Joseph FERRON s'occupe activement de sa ferme de la Foresterie. Le 18 Octobre 1788, pour satisfaire à la déclaration du Roi du 13 Août 1766, il déclare:

"qu'il entend faire défricher quinze arpents de terres incultes de temps immémorial à prendre dans l'Usage vulgairement appelé le Bois aux Moines situé dite paroisse de Danzé, joignant d'un côté audit sieur comparant, d'autre côté audit usage, d'un bout aux fermes des Bourdiguères et de la Foresterie à lui appartenant, et d'autre bout aux terres en culture donnant sur le grand chemin de Vendôme à Danzé".

Cette déclaration est affichée devant la principale porte de l'église de la paroisse de Danzé, "après Vespres dites et chantées" en présence de plusieurs témoins.

Ces terres avaient été laissées en friche par les Bénédictins de Vendôme.

Le défrichement de ces terres donnera lieu à un procès qui sera repris par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU en 1807 (voir vie de LEMAIGNEN-VILLORCEAU - Titres de propriété de la Foresterie).

Le 09 Mars 1793, il échange avec Pierre René GOEVIER (sans doute son futur fermier), 3 boisselées dépendant de cette ferme contre une boisselée et demi de jardin "derrière la maison du Citoyen FERRON au bourg de Danzé".

"Et comme ledit jardin a été acquis des administrateurs du district, comme bien national, GOEVIER garantit Claude FERRON de tous événements et dans le cas de non jouissance ledit échange deviendrait nul". On était prudent.

Le 25 Mai 1793, Claude Joseph FERRON, alors ancien officier des carabiniers, demeurant à Vendôme, paroisse de la Sainte Trinité, loue pour 9 années à compter de la Toussaint 1793 à Louis NEVEU et Marie TENDRON, sa ferme de la Foresterie dans les mêmes conditions que celles contenues dans le bail du 12 Février 1780 mais après adjonction de quelques boisselées de terre et pré. Toutefois, les preneurs devront payer 80 livres sur l'imposition foncière nouvellement créée, et un fermage de 60 livres (outre bien entendu la moitié des récoltes). Il est spécifié que les preneurs paieront les terrages et rentes "s'ils sont exigibles". Enfin, les preneurs reconnaissent toujours devoir les 300 livres prêtées par Claude FERRON le 13 Novembre 1780 et la moitié du bétail.

Le 11 Ventose An III, le bail est complété par un supplément de fermage en boisseaux de blé.

Par cet acte, nous apprenons que Claude Joseph FERRON habitait à Vendôme rue de l'Humanité. On aimerait bien savoir dans quelle maison de la rue au Blé, qui s'appelait alors rue de l'Humanité, habitait Claude Joseph FERRON.

Louis NEVEU son fermier étant décédé, Claude Joseph FERRON passe le 04 Brumaire An XI une convention avec sa veuve et ses enfants pour avoir remboursement de son prêt "qui réduit à sa véritable valeur, d'après l'échelle de dépréciation, s'élève à 518 francs 40 centimes".

Le 10 Messidor An X, Claude Joseph FERRON avait loué à Pierre GOEVIER et Jeanne LELIEVRE sa femme, la Métairie de la Foresterie. Il s'agit toujours d'un bail à moitié fruit, mais sans fermage ni remboursement d'impôt. La livraison de 16 livres de beurre, deux oies, six poulets et six canards est maintenue.

Si nous possédons des renseignements très complets, grâce aux anciens titres de propriété, sur la gestion par Claude Joseph FERRON, de sa ferme de la Foresterie, nous n'en possédons aucun concernant les fermes de la Bourguinière et du Pré qu'il avait acquises en même temps. Il est vraisemblable que les documents concernant ces fermes, ainsi d'ailleurs que ceux concernant les immeubles de sa femme, ont été transmis aux acquéreurs et aux attributaires en vertu du partage entre les enfants de LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

Outre les fermes de Danzé, Claude Joseph FERRON achète, suivant procès-verbal du Directoire du District de Vendôme du 14 Avril 1791 la Closerie de la Beguinière, commune de Naveil (Inventaire LEMAIGNEN de 1809). Cette closerie existe toujours. C'est une maison du XVIIe siècle qui appartient aujourd'hui (1979) à la famille VIGNEAU. Elle avait servi de quartier général à Henri IV lors de son attaque sur Vendôme (Bulletin de la Société Archéologique du Vendômois, année 1961, article de M. GOBILLARD sur la Porte fortifiée du Pont Neuf).

Il ne semble pas que Claude Joseph FERRON y ait souvent habité.

En revanche, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU y résidait fréquemment.

Enfin le 1er Ventose An XI, il achète par acte de Me RENOU, de Louis Joseph CHEVREUIL VALENCE, chef de bataillon de la 90e demie brigade et dame Marie Thérèze DUPLAT son épouse demeurant à la Rochelle, une maison située à Vendôme, rue de la Grève, "composée de plusieurs corps de bâtiments, cour, terrasse, bûcher, lavoir, lieux d'aisance" joignant du nord la rivière, et du midi "la rue ; et deux autres corps de bâtiments situés de l'autre côté de la rue, en face de cette maison, composés d'une remise, une écurie derrière, petite cour servant de fosse à fumier entre les bâtiments". Cette maison appartenait au sieur VALENCE pour l'avoir acquise du sieur François BOUTRAIS-LUMIERE, suivant acte de RENOU, notaire à Vendôme du 05 Février 1794.

Elle fut vendue par Léon LEMAIGNEN à Jacques Honoré CHAUTARD, ancien notaire demeurant à Malignas, par acte sous signatures privées du 1er Octobre 1835. Elle porte aujourd'hui le n° 7 (autrefois 5) de la rue de la Grève. Elle appartient à la famille DESVAUX (ancien épicier) et a conservé son état du début du XIXe siècle (voir origine de propriété acte Me ROLLAND, notaire à Vendôme du 28 Septembre 1876).

 

 

 

 

 

Vie Militaire

 

On ignore quelles furent les activités militaires de Claude Joseph FERRON avant son arrivée à Vendôme en 1774. Il fut affecté ensuite à Saumur, Metz et à Se, pour peu de temps.

Il avait été fait Chevalier de l'Ordre Royal et Militaire de Saint-Louis par ordre du Roi du 04 Octobre 1789 (alors que Louis XVI allait quitter Versailles pour Paris) et la Croix lui fut remise à Lunéville le 03 Janvier 1790. Il semble que sur son portrait soit représentée la Croix de la Légion d'Honneur et non celle de Saint-Louis.

Sa carrière militaire prend fin le 11 Mai 1791, date à laquelle il avait accompli "46 ans 11 mois et 5 jours de services effectifs, pendant lesquels il avait fait six campagnes". Il venait d'avoir 53 ans. Comme aujourd'hui les campagnes devaient compter double sur la retraite, sinon il aurait débuté dans la carrière militaire à l'âge de 6 ans !

Son brevet de pension intitulé "Récompense Nationale en faveur de Claude Joseph FERRON au nom de la République" par le Conseil provisoire exécutif, le 04 Février 1793 lui accorde une pension annuelle et viagère de 796 livres 8 sols un denier et demi en raison de son ancienneté et des "infirmités constatées". Il avait alors le grade de Lieutenant au premier Régiment de Cavalerie "cy-devant Carabiniers".

Lors de sa décoration il était "Lieutenant surnuméraire".

 

 

Les emprunts

 

Nous avons vu que Charles Joseph FERRON disposait de 9.000 livres quant il achète les fermes de Danzé.

Il avait prêté le 17 Juillet 1777, quelques mois avant, 700 livres au sieur Pierre SEIGNIER, maître chirurgien à Vendôme et Marie Anne SALLE son épouse. Le 05 Septembre 1782, les époux SEIGNIER confirment cet emprunt et s'obligent à la rembourser en quatorze termes de 50 livres, soit en espèces, soit en vin.

Mais après l'acquisition des fermes, Claude Joseph FERRON va être obligé de contracter plusieurs emprunts pour s'acquitter de son prix d'acquisition.

Le 25 Juin 1778, pardevant les conseillers du Roi de Monsieur, frère de sa Majesté, notaires à Angers, il emprunta à Pierre Etienne PILLERAULT, l'un des officiers qui assistaient à son mariage, alors en garnison à Saumur, la somme de 7.068 livres remboursables en 4 ans sans intérêts. Pour signer cet acte, Claude Joseph FERRON qui habitait toujours à Vendôme s'était rendu à Angers à l'Hôtellerie du Cheval Blanc, rue Saint-Aubin. Sur l'expédition de cet acte d'obligation figurent de la main de PILLERAULT les quittances de remboursement par petites sommes, des 06 Mai 1782, 15 Avril 1785, 08 Mai 1785, 15 Mai 1785, 29 Juin 1785, 02 Juillet 1785, 1er Septembre 1785, 27 Février 1786, 07 Mars 1786 et 1er mai 1786. Claude Joseph FERRON a eu bien du mal à rembourser.

Le 10 Janvier 1786, alors qu'il est en garnison à Metz, il emprunte avec Madeleine BRETON sa femme, qui était restée à Vendôme, 3.800 livres à messire Julien Toussaint CHEREAU, prêtre ancien curé de Saint-Cyr le Gravelais et à demoiselle Marie CHEREAU sa soeur, demeurant à Savigny, à charge d'une rente annuelle de 190 livres ; sans doute s'agissait-il de rembourser le prêt de son camarade PILLERAULT.

Ce prêt de 3.800 livres fut remboursé le 21 Brumaire An III.

Le 17 Septembre 1785, il avait emprunté déjà à une dame veuve BALLYER, 1.800 livres qui ne furent remboursées par sa veuve que le 28 Février 1806 et par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU son gendre, les 26 Août 1808 et 21 Octobre 1810.

Il résulte de l'inventaire dressé en 1809 après le décès de sa fille, qu'il avait emprunté à une date qui n'est pas précisée 19.000 livres à son camarade PILLERAULT, remboursables le 1er Juillet 1792 et qui ne furent remboursées à Madame veuve PILLERAULT par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU qu'après son mariage.

Le 10 Messidor An X (29 Juin 1802) alors qu'il habitait à Vendôme, rue au Blé, Claude Joseph FERRON, emprunte encore à Jean Philibert DESSAIGNE "l'un des directeurs du pensionnat de Vendôme" la somme de 16.000 Francs remboursable en numéraire ou en blé froment à charge d'une "rente annuelle ou intérêt" de 1.120 Francs. A la garantie du remboursement de ce prêt, les époux FERRON-BRETON hypothéquent trois métairies leur appartenant, commune de Danzé : les Bourdinières, la Foresterie et le Bois aux Moines, ainsi que la Closerie des Béguinières à Naveil. Cet emprunt fut remboursé à concurrence de 8.000 Francs le 29 Messidor An XI et les 8.000 Francs de surplus le 08 Janvier 1808 par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

On remarquera que les immeubles de Madeleine BRETON n'étaient pas hypothéqués, ainsi que la ferme du Pré. On n'a d'ailleurs aucune mention de cette ferme depuis son acquisition en 1777. Il existe dans les titres de propriété de la ferme de la Foresterie, un contrat d'acquisition du 07 Juillet 1838 par Léon LEMAIGNEN d'un bois et pré de 86 ares 11 centiares "aux prés" commune de Danzé. Le compromis joint à cet acte précise que cet immeuble appartenait à Madame ALARDET pour l'avoir recueilli dans la succession de Françoise Gabrielle Jeanne DESHAYES de BONNEVAL, troisième épouse de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, sa mère "laquelle en avait fait l'acquisition pendant la communauté qui a existé entre elle et son dit mari, de M. BRETON, ancien Greffier du Tribunal Civil de Vendôme". Ce BRETON ne peut être que Léonard Louis attendu la date de l'acquisition (au cours du troisième mariage de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU). Comment Léonard Louis BRETON était-il devenu propriétaire de cette parcelle de la ferme du Pré ? L'avait-il achetée de Claude Joseph FERRON ?

Madeleine BRETON, alors veuve et demeurant rue de la Grève, emprunta encore le 30 Messidor An XIII d'un sieur Henry François Benoît JOUIN, ex-notaire demeurant à Vendôme, faubourg Saint-Bienheuré, 1.300 "livres tournois" remboursables dans un délai de 3 ans avec intérêt aux taux de 10 %. Elle hypothéqua sa maison de la rue de la Grève et la Closerie de la Béguinière. Ce prêt fut remboursé par François LEMAIGNEN le 11 Juillet 1807.

Cependant, Claude Joseph FERRON, malgré ses nombreux emprunts avait prêté le 11 Ventose An XI, à Léonard Louis BRETON, son beau-frère, 550 Francs à charge d'une rente annuelle de 27 Frs 50 avec hypothèque sur la maison où il habitait, rue Ferme à Vendôme.

Nous avons vu plus haut, que Léonard Louis BRETON ne remboursera jamais cette petite dette. A la suite de la procédure d'ordre sur le produit de la vente de ses meubles, François LEMAIGNEN ne toucha au nom des enfants que 110 Frs 50 centimes.

 

 

Décès de Claude Joseph FERRON

 

On ignore où et quand décéda Claude Joseph FERRON. Il vivait encore le 11 Ventose An XI (02 Mars 1803) mais il était décédé le 30 Messidor An XIII (20 Juillet 1805). Une note en marge du procès verbal d'enquête pour l'interdiction de Madeleine BRETON du 12 Avril 1812 indique qu'il était décédé 8 ans auparavant, donc en 1804. Il avait par conséquent 66 ans lors de son décès.

 

Fut-il enterré à Vendôme ou à Naveil ?

 

 

Madeleine BRETON et sa fille Madeleine Eugénie

 

Après le décès de son mari, Madeleine BRETON habitait à Vendôme dans sa maison de la rue de la Grève.

De son mariage avec Claude Joseph FERRON était née une seule fille, à Vendôme, le 16 Septembre 1782, cinq ans après son mariage : Madeleine Eugénie FERRON qui épousa à l'âge de 25 ans, après le décès de son père, le 06 Février 1807, à Vendôme, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, veuf en premières noces de Marie Madeleine ELEN, et qui décéda le 23 Avril 1809, deux mois et demi après la naissance de son fils Léon LEMAIGNEN.

Dans le mémoire qu'elle produisit en Octobre 1812 en vue de sa défense contre la demande en interdiction formée par son gendre, Madeleine BRETON déclare :

"qu'elle a contracté mariage au mois d'Octobre 1777 avec Claude Joseph FERRON, Officier du Corps des Carabiniers ; elle a passé des jours heureux avec son mari, des jours purs et sans nuage. Le Ciel a voulu qu'elle survécut à cette homme honnête et respectable. Si elle put se consoler de cette perte, c'était sans doute de voir revivre le sieur FERRON en la demoiselle Eugénie, seul fruit d'un union fortunée qui, par la douceur de son caractère et la ressemblance des traits, était l'image vivante de son père ; l'amertume de son chagrin avait pu s'adoucir par la présence de cette fille qu'elle aimait tendrement, et la douce espérance qu'elle était appellée suivant le cours ordinaire de la nature (.... deux mots illisibles) ; mais la Providence en avait autrement décidé.

La demoiselle Eugénie FERRON fut recherchée en mariage par plusieurs personnes ; elle refusa plusieurs partis aussi avantageux ; Madame FERRON, qui s'était fait une loi de ne jamais le contrarier dans ses inclinations, par ce qu'elles étaient excellentes, la laissa libre dans son choix : le sieur LEMAIGNEN qu'elle fréquentait. On sait ce qu'il était lorsqu'il arriva à Vendôme ; on sait qu'il fit sur l'Octroi Municipal de la Bienfaisance de Vendôme pendant deux années, un grain considérable et que cet octroi fut véritablement un bienfait pour lui. Madame FERRON, guidée par un de ces pressentiments dont on ne peut positivement se rendre raison, mais qui trompent rarement, s'opposait au mariage ; la famille insista, Mademoiselle FERRON paru le vouloir ; sa volonté fut une loi pour sa mère et le mariage fut conclu en Février 1807. Madame FERRON combla sa fille et son futur gendre de ses bienfaits qui accrurent encore la fortune de ce dernier. En effet, par mariage, il se trouva seigneur du lieu de la Béguinière situé commune de Danzé (sic) de plusieurs métairies et autres biens situés commune de Danzé et d'Espereuse (aujourd'hui commune de Rahart). Mais cela ne suffisait pas au sieur LEMAIGNEN. Restait à Madame FERRON :

1° - Une maison sise à Vendôme rue de la Grève.

2° - La métairie du Bois aux Moines, commune d'Espereuse.

3° - Une autre métairie située au bourg et commune de Danzé.

4° - Une autre métairie appelée les Saulettes, dite commune de Danzé.

5° - Une maison sise au bourg de la même commune.

6° - 3 boisselées ou 15 ares 51 centiares de pré situé prés le bourg de ladite commune de Danzé.

7° - Un carreau de bois taillis dit La Hutte situé même commune, contenant quatre hectares huit ares 58 centiares ou 8 arpens à l'ancienne mesure des eaux et forêts.

8° - 6 hectares 82 ares 4 centiares ou 11 septrées de terres labourables, non logées, en pièces divisées en trois coutaisons inégales, situées dite commune de Danzé, formant le domaine réservé par ladite dame FERRON pour le cultiver à son bénéfice personnel.

Toutes ces propriétés étaient ou demeurant convoitées par le sieur LEMAIGNEN. D'abord, il s'est attaché à dépouiller la dame FERRON de la nue-propriété de ces objets ; il l'a tant sollicitée, tant tourmentée, qu'il y a réussi, car par acte passé devant BUFFEREAU et son collègue, notaires à Vendôme le 05 Octobre 1808, enregistré le même jour, la dame veuve FERRON a déclaré faire donation entre vifs, pure et simple, en la meilleure forme que donation puisse se faire, à dame Magdeleine Eugénie FERRON, épouse dudit sieur LEMAIGNEN ...... de la nue-propriété de tous les susdits objets, dont ceux énoncés aux n° 3 - 4 - 5 - 6 et 7 sont des propres à elle provenant des successions de ses père et mère, et ceux indiqués aux articles 1 - 2 et 8 forment la portion par elle réservée dans les conquets de la communauté qui a existé entre elle et son défunt mari".

 

 

Cette donation était faite à la charge par la donataire de payer diverses rentes souscrites par la veuve FERRON (une de 325 livres tournois due par elle et ses frères aux héritiers JOUIN, l'autre de dix livres due aux enfants du sieur Dominique JABRE DUPLESSIS, et la dernière de huit francs à la dame Georges MARTIN-AMAURY).

Et madame veuve FERRON ajoute dans son mémoire :

"Lorsque cet acte qui était le fruit de tant de sollicitations, pas et démarches fut consommé, le sieur LEMAIGNEN content et satisfait se reposa et dit dans la soirée du 05 Octobre 1808 : "Je suis enfin venu à bout de mon projet" ; mais comme il n'est point sur cette terre de béatitude parfaite, il ajouta "mais cela ne me suffit pas encore". On était dans l'impatience de voir éclore et sortir du cerveau du sieur LEMAIGNEN ce nouveau projet, dont l'accomplissement devait mettre le comble à sa satisfaction. Enfin il se décida à en faire confidence au sieur BRETON-MARTELLIERE. Il lui proposa de faire interdire la dame FERRON sa belle-mère d'en parler au sieur BRETON alors greffier;....

Puis François LEMAIGNEN fit part de son projet à sa femme, ses beaux-frères s'étant indignés de ses intentions mais :

"celle-ci, bien élevée, douée de généreux sentiments, qui rendait à sa mère qui l'adorait, tendresse pour tendresse, sortit en cette occasion de la douceur de son caractère et dit fermement qu'elle ne le souffrirait jamais".

"La dame LEMAIGNEN est décédée laissant deux enfants de son mariage ; elle est morte regrettée de tous ceux qui l'ont connue ; cette perte a été un nouveau sujet de deuil pour la dame veuve FERRON. La dame LEMAIGNEN sa fille était le lien commun entre elle et le sieur LEMAIGNEN son gendre ; sa présence dans la maison commune était seule capable de lui faire supporter le désagrément de la cohabitation avec son gendre ; après le décès d'icelle elle déclara formellement au sieur LEMAIGNEN l'intention où elle était d'être seule dans sa maison ou avec les personnes qui puissent lui convenir, et le sieur LEMAIGNEN se retira non sans peine de la Béguinière. Cependant elle a reçu, depuis la retraite du sieur LEMAIGNEN, plusieurs visites de lui toujours relatives à la cession de l'usufruit par elle réservé, et moyennant une pension ; il a toujours éprouvé le même refus parce que la dame veuve FERRON ne veut point être dans sa dépendance ....".

"La dame veuve FERRON a fait quelques économies depuis que le sieur LEMAIGNEN a quitté sa maison ; c'est pourquoi par acte devant VERITE, notaire à La Ville-aux-Clercs en date du 19 Mai 1809, elle a acquis du nommé BORDE, journalier à Danzé, moyennant la somme de 700 Frs un petit bordage nommé Le Paty situé commune de Danzé". (Elle revendit ce bordage le 04 Juillet 1816 moyennant 655 Frs. Elle habitait alors rue Ferme et était assistée de Me Louis Pierre Paul MEREAUX, notaire à Vendôme, son conseil judiciaire).

Ce long mémoire, que vous n'avons reproduit que partiellement, nous apporte des renseignements intéressants sur la vie de Madeleine BRETON et sur ses démêlés avec son gendre. Celui-ci était originaire de Mer. Son père eut 19 enfants, de deux mariages, dont 11 morts en bas âge (Voir famille LEMAIGNEN). Avant de venir à Vendôme où il obtint la concession de l'octroi municipal, il avait dû habiter à Paris où sa première femme était décédée. Si l'on en croit les déclarations de sa belle-mère, sa situation financière ne devait pas être très brillante à son arrivée à Vendôme et il dut être heureux de trouver une riche héritière en la personne de Madeleine Eugénie FERRON.

Le contrat de mariage fut reçu par Me Philippe Godefroi RENOU, notaire à Vendôme le l24 Janvier 1807 en présence, du côté de la future épouse de :

- Léonard Louis BRETON, greffier en chef du Tribunal Civil de Vendôme, son oncle et Marie Pétronille BRETON son épouse.

- François Nicolas BRETON, marchand, demeurant à Vendôme, son oncle et Marie Renée MARTELLIERE, son épouse.

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU apportait en mariage la somme de 17.760 Frs, suivant l'inventaire dressé le même jour, de sa première communauté.

 

Madeleine Eugénie FERRON apportait :

- Deux fermes situées au Bois aux Moines, commune de Danzé, l'une appelée les Bourdinières et l'autre la Foresterie, provenant des propres de son père, évaluées 40.000 Frs.

- La Closerie de la Béguinière, commune de Naveil, avec son mobilier, estimée 8.000 Frs y compris 750 Frs pour les meubles.

Mais son apport est grevé des emprunts faits par ses parents au sieur DESSAIGNE, aux enfants GUYOT et aux héritiers JOUIN (10.500 Frs au total).

Peu après le mariage de sa fille, le 30 Décembre 1807, madame veuve FERRON avait fait donation à sa fille de sa créance qu'elle possédait contre son frère Léonard Louis BRETON en vertu de la constitution du 27 Frs 50 de rente du 11 Ventose An XI ci-dessus analysée, et de divers meubles prisés par HOUDAIN, marchand fripier à Vendôme, à 1.980 Frs, comprenant :

"Un bois de lit à deux dossiers en bois peint, sanglé, deux matelas de laine ensouillés en cotonade à carreaux rouge et blanc".

(Il semble que ce soit le petit lit en bois peint qui existe toujours (1979) provenant de Danzé).

"Un lit, son travers et un oreiller de plume d'oye ensouillé de couty rose et blanc ; une couverture de laine blanche ; une autre couverture de coton blanc ; une housse de lit ; ciel, pentes et rideaux de coton blanc, ornés d'une draperie de satin rose garnie de granges et glands de soie ; un carré en bois peint et broches tournantes ; le tout estimé quatre cent Frs".

"Un autre lit composé comme le précédent, estimé trois cent quatre vingt francs".

"Une armoire de différents bois.... une table, une rôtissoire, un chaudron, un poêlon, une écumoire en cuivre jaune, une poissonnière et deux casseroles de cuivre rouge, un chaudron de fonte, deux poêles à frire, un lèchefrite, un passe bouillon, un pommier, une lanterne, une râpe, une cuillère à arroser en fer blanc, deux chenets, pelle et pince et une crémaillère, quatre flambeaux en cuivre argenté, un chaudron, un trépied et un tuyau à lessive, un garde manger, huit fauteuils peints en gris, garnis de crin, couverts en croisé de soie broché, deux rideaux de croisées, une table à jouer couverte de drap vert, une armoire en bois de noyer, une autre armoire en bois fruitier, une commode en marquetterie à dessus en marbre ayant trois tiroirs, un bois de lit en chêne, deux rideaux d'alcôve garnis de draperie de mousseline avec frange, cordonnet et glands de soie, une table de nuit, deux petits rideaux de mousseline, quatre petits rideaux de croisée, dix douzaines de serviettes, deux nappes de trois aulnes de long sur sept quarts de large, trois autres nappes de toile commune, trois autres nappes, six draps demi usés contenant chacun six aulnes et demie, cinquante draps presque usés, cinq autres draps, sept autres draps encore plus mauvais" (n'était-ce pas le linge de maison de Magdeleine BORDIER, grand mère de Madame FERRON - Inventaire du 29 Juillet 1743 ?).

"Une table à manger, six cuillères, cinq fourchettes, deux cuillères potagères, pezant ensemble quatre marcs deux onces, vingt chaises empaillées, un seau en faïence, un arrosoir de fer blanc, une pelle-bêche, un rateau et une sarfouette".

Moins d'un an après cette donation, Madame FERRON donnait à sa fille le 05 Octobre 1808, la nue-propriété de ses immeubles, ainsi qu'on vient de la voir dans son mémoire. De plus, elle logeait chez elle, dans sa maison de la rue de la Grève, le jeune ménage.

Elle avait donc tout fait pour être agréable à sa fille et à son gendre. Mais peut-être ces actes de générosité étaient ils provoqués par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, comme elle le prétend.

Six mois après cette dernière donation, sa fille décéda et les liens affectifs qui l'unissaient à son gendre se relâchèrent.

De plus le chagrin de la mort de sa fille sembla lui avoir troublé la raison et elle se mit à boire.

 

 

 

 

 

 

Procédure en Interdiction

 

A

 

Il est possible que François LEMAIGNEN-VILLORCEAU qui s'était remarié le 17 Février 1811 avec Françoise Gabrielle Jeanne DESHAYES de BONNEVAL ait profité des troubles mentaux de son ancienne belle-mère pour rompre définitivement avec elle et s'assurer la gestion exclusive de sa fortune au nom des deux enfants mineurs issus de son mariage avec Madeleine Eugénie FERRON, qui étaient :

1°) Eugénie Madeleine Victoire LEMAIGNEN née à Vendôme le 24 Janvier 1808 qui épousera Alexandre Auguste MIROIR et dont la fille épousera le 26 Octobre 1846 Ernest Antoine DEMEZIL.

2°) Léon LEMAIGNEN, né à Vendôme le 12 Février 1809 qui épousera Emelie Marie Brigitte BEZARD.

Une occasion se présenta qui permit à François LEMAIGNEN-VILLORCEAU d'intenter une procédure d'interdiction contre madame veuve FERRON.

Le 1er Avril 1812, un peu plus d'un an après le remariage de son gendre, elle loue par acte sous signatures privées, pour 12 années à compter rétroactivement de la Toussaint 1811 à François Nicolas BRETON, son frère, et Marie Renée MARTELLIERE sa femme, "tous les biens immeubles" dont elle jouit et qu'elle possède, savoir :

- La maison de la rue de la Grève à Vendôme.

- La Métairie du Bois aux Moines, commune d'Espereuse.

- Une autre ferme et ses dépendances, sise commune de Danzé avec les bâtiments de Maître, cour et jardin.

- Un petit pré situé sur la route de Danzé.

- La ferme des Sauterelles (sic), commune de Danzé.

- Le bordage du Patis des allées et ses dépendances, situé commune de Danzé (c'est celui qu'elle avait acheté le 19 Mai 1809).

- Toutes les terres de son domaine et ses dépendances composé de six hectares de terre, commune de Danzé.

Le tout à titre de ferme générale.

Moyennant 1.200 Frs et neuf cordes de bois de trognes.

Et à charge de payer les différentes rentes dues par la veuve FERRON.

"Ledit bail fait sous la réserve d'occuper par la dame veuve FERRON tel logement qu'il lui plairait dans sa maison". C'était tout de même bien le moins ! François Nicolas BRETON habitait d'ailleurs dans la maison rue de la Grève, car le bail précise les meubles lui appartenant dans cette maison, afin qu'il n'y ait pas de confusion avec le mobilier de la bailleresse.

On conçoit que François LEMAIGNEN-VILLORCEAU ait très mal pris les choses lorsqu'il eut connaissance de ce bail par lequel la belle-mère remettait toute la gestion de sa fortune à son frère qui, on le sait, avait une situation financière des plus obérée.

C'est pourquoi il présente requête au Président du Tribunal Civil de première instance de l'Arrondissement, commune de Vendôme, le 11 Avril 1812 afin de requérir la convocation du conseil de famille de la veuve FERRON en vue de son interdiction. Il expose :

"Environ deux mois après le mariage de sa fille vers la fin d'avril 1807, Madame FERRON donne des marques de folie. Elle chantait jour et nuit et débitait continuellement pendant plusieurs jours des paroles inintelligibles et des phrases sans suite, ces accès se terminant par des peurs continuelles témoignant la crainte qu'elle avait qu'on ne vint la chercher pour la mettre à mort.

Depuis cette époque, jusqu'à la mort de sa fille, elle eut plusieurs accès non moins effrayants et qui furent fort longs .....

Au cours de Juillet dernier, la notoriété publique lui apprit que sa belle-mère, qui était aller passer le temps de la moisson à Danzé s'y livrait à plusieurs actes de folie malheureusement trop caractérisés ; entre autres, dans les premiers jours de Juillet elle fut à une vente de meubles à Danzé où elle acheta un lit de plume, l'ouvrit et jetta les plumes à la figure des assistants et insulta quelques personnes.

Le vingt deux septembre après diner, elle sortit de sa maison, prit le bras d'un paysan étranger à ce village, se promena ainsi dans le bourg en donnant des marques de folie qui attirèrent bientôt la majeure partie du bourg sur ses pas.

Son frère ainé ayant eu connaissance de la conduite qu'elle menait à Danzé, l'envoya chercher par Chevallier carossier.

Il y a trois mois, elle s'est levée la nuit, est descendue dans sa cave sur les deux heures du matin, y est tombée et s'est grièvement foulé le bras. Ses domestiques ont été chercher des voisins pour l'en tirer.

Sa folie la conduit à boire du vin avec excès même la nuit .......

Le vingt mars dernier, elle fut sur les cinq à six heures du soir dans plusieurs quartiers de la ville, la tête échevelée, couverte d'un chapeau d'homme, une canne à la main, gesticulant et agissant de manière à se faire suivre d'une multitude de personnes et d'enfants. Monsieur GUILLOT, marchand, la ramena chez elle.

Le vingt sept mars, elle rappela la même scène dans la rue Ferme......

Enfin, elle vient de vendre ou affermer le droit d'usufruit dont elle jouit et qui compose tout son avoir, au sieur BRETON-MARTELLIERE dont les affaires sont dans le plus grand désordre".

Puis François LEMAIGNEN-VILLORCEAU déclare que ces fait peuvent être attestés par 35 témoins dont il cite les noms, professions et adresses.

Sur quoi le Tribunal ordonne la convocation du conseil de famille.

 

 

B

 

Le 14 Avril 1812, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU fait citer, pour composer le conseil de famille :

- Denis BRETON, vigneron à Thoré, oncle de la veuve FERRON.

- Jean BALLERIAU, mari de Marie Anne BRETON, cousin à Thoré.

- François LEROY, mari de Madeleine BRETON, cousin à Thoré.

- Le sieur BRETON-BRETON, ancien greffier, demeurant à Vendôme, rue Ferme, frère germain.

- Nicolas BRETON-MARTELLIERE, ancien marchand, demeurant au Temple, frère de la veuve BRETON.

- Jean-Baptiste BESNARD, laboureur, à la Forge Buffet, commune de La Ville-aux-Clercs, cousin maternel.

Il est précisé dans cette citation que la veuve FERRON est âgée de cinquante quatre ans. Elle est donc née en 1758. Nous savions seulement qu'elle était mineure lors de son mariage.

Le conseil de famille se réunit le 21 Avril 1812. Tous les parents cités déclarent que la dame FERRON jouit de toutes ses facultés intellectuelles, bien qu'ils aient entendu dire qu'elle était dérangée d'esprit, mais ils ne l'ont pas constaté. Nicolas BRETON sait

"qu'elle a eu des chagrins domestiques et des épreuves qui ont attaqué sa sensibilité, mais que sa raison n'en a souffert aucune atteinte ; qu'elle a géré toutes ses affaires et veillé à ses intérêts avec attention ; qu'il ne connait aucune faute à leur reprocher ; qu'elle jouit enfin de son entière raison ainsi que le Tribunal pourra s'en assurer".

Toutefois, Jean Baptiste BESNARD s'était bien aperçu que la conversation de la dame FERRON n'était pas suivie. Quant au Juge de Paix chargé d'après la loi de donner son avis, il joue les Ponce-Pilate ; n'ayant pas vu Madame FERRON depuis longtemps il ne peut donner un avis ; et cependant :

"à deux différents jours nous l'apperçumes nous même habillée d'une manière étrange à son sexe, mais que n'ayant point eu de conversation avec elle, nous ignorons le motif que l'a déterminé à cet acte d'inconséquence".

 

 

C

 

Le 1er Mai 1812, le Tribunal ordonne l'interrogatoire de la veuve FERRON, en Chambre de Conseil, en présence du Procureur Impérial.

Cet interrogatoire a lieu le 08 Mai. Madame FERRON déclare qu'elle a 54 ans. Elle reconnaît avoir loué ses immeubles à Nicolas BRETON-MARTELLIERE son frère. Elle le croit bien gêné, mais ne le croit pas insolvable. D'ailleurs elle lui a loué ses biens pour "le soulager dans sa position". Au sujet de ses incartades dans les rues de Vendôme, elle déclare seulement :

"qu'elle avait rencontré Monsieur GUILLOT au milieu d'une grande foule de monde ; lequel lui avait offert son bras qu'elle avait accepté et l'avait conduit chez elle ; elle déclare au surplus que l'attroupement qui la suivait était payé".

"A elle demandé s'il y a environ 25 ou 30 ans, par suite d'une couche laborieuse qu'elle avait eue, ses nerfs ont été tellement attaqués pendant une longue suite d'années, on a été obligé de la surveiller parce qu'elle donnait fréquemment des traits d'absence et de démence. A répondre que oui, cela était vrai. A elle demandé si elle n'avait pas l'habitude de boire avec excès, a répondu qu'ayant presque continuellement la fièvre, elle éprouvait une altération qui l'excitait à boire souvent".

Elle ne se souvient pas de ses extravagances à Danzé.

En ce qui concerne la chute dans la cave, elle répond que :

"n'ayant pas beaucoup de mémoire, elle crut dans la nuit devoir sonder son vin dans sa cave ; qu'elle se fit accompagner par sa domestique ; que son pied a pu glisser dans l'escalier qui n'est pas commode ; qu'elle s'est foulée effectivement le bras, mais qu'elle n'avait pas bu".

L'audition de Madame veuve FERRON ne parait pas avoir convaincu les juges de sa santé intellectuelle, car le Tribunal ordonne le 21 Mai 1812 qu'il soit procédé à une enquête sur les faits articulés contre elle. Cependant, il refuse la nomination d'un administrateur provisoire demandée par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

En conséquence, 26 citations sont délivrées par huissier aux témoins à comparaître devant Me BAUDICHON, Juge Commissaire, le 15 Juin 1812.

 

 

D

 

Le "Procès verbal d'enquête sur l'état moral de Madame veuve FERRON" est établi sur 114 pages recto-verso, de 21 cm sur 30 cm. Sa lecture est passionnante, car on y voit défiler tout un petit monde Vendômois, du médecin aux domestiques, en passant par le notaire et les commerçants, qui gravitait autour de Madame FERRON en ces dernières années de l'Empire. Il ne faut pas beaucoup d'imagination pour les revêtir des costumes de l'époque et leur donner vie. Mais on éprouve un sentiment de gène devant la crudité de certains témoignages, qui se répètent sans cesse, et dont on peut se demander s'ils n'ont pas été inspirés par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU. Nous verrons qu'ils sont souvent contradictoires ; mais ils sont extraordinairement vivants et permettent de cerner avec assez de précision la personnalité de Madame FERRON.

Madame FERRON était représentée par le célèbre Avoué, Pierre Nicolas HESINE bien connu des Vendômois pour ses opinions révolutionnaires (voir Bulletin de la Société Archéologique du Vendômois, années 1969 à 1973). François LEMAIGNEN-VILLORCEAU était présent et assisté de Me Simon François MARTELLIERE, son Avoué.

Le premier témoin cité est Pierre André GENDRON, médecin âgé de 47 ans, demeurant à Vendôme. il déclare qu'au cours de l'année 1808, il fut appelé auprès de Madame FERRON, que Monsieur BEAUSSIER, chirurgien soignait habituellement. Il la trouva dans son lit, en présence de M. BEAUSSIER. Elle refusa de se lever et s'enveloppa dans ses draps et couvertures. Enfin on la leva et l'installa dans un fauteuil ; alors elle leur tint des propos très déplacés dans la bouche d'une femme honnête. Puis elle s'agita en témoignant la crainte que l'on attentait à ses jours disant qu'elle était condamné à mort. Il fut convenu que la malade serait saignée du pied ; qu'on lui administrerait des bains, des douches, des boissons et contre-remèdes antispasmodiques et propres à son état.

Puis comparait Jacques Guillaume BEAUSSIER, chirurgien à Vendôme, âgé de 56 ans. En 1806, il avait été appelé par la fille de Madame FERRON qui était habituellement dans un état de rêverie et de tristesse dont rien ne pouvait la tirer, mais que cet état céda à l'usage des bains et de boissons délayantes qu'il donna ; et Madame FERRON revint à son état naturel pendant 5 mois. Mais à la fin de la même année, il fut rappelé par Mademoiselle Eugénie FERRON car sa mère tenait des propos incohérents. Il fut appelé une troisième fois en Avril 1807 et la trouva en état de démence et folie complète, ne donnant aucun signe de raison. Il ordonna à nouveau des bains et saignées de pied. Il fallut mettre une personne auprès d'elle pour l'empêcher de sortir de sa maison. Puis au bout de six semaines l'usage de la raison lui revint pendant 5 mois. En 1808 ou 1809, le Docteur BEAUSSIER fut témoin d'une crise violente, elle déchirait les rideaux de son lit et adressait des propos à des êtres que son imagination lui présentait, criant qu'on voulait la tuer. Puis elle bâtit sa domestique, que le Docteur BEAUSSIER dut soigner ; elle en fut malade pendant 8 jours. En 1809, elle avait pris en haine son entourage, même sa fille. On fut obligé de la séquestrer dans une chambre haute et de renouveler les bains et saignées de pied.

Le troisième témoin est François MACOT, concierge de la maison d'arrêt de Vendôme. Il raconte une histoire piquante : En avril 1812, Madame FERRON s'est présentée à la maison d'arrêt et accompagnée de sa domestique ; elle demanda à voir les prisonniers et entra dans une grande chambre avec un chapeau rond d'homme sur la tête, les cheveux épars et une canne à la main ; elle se fit présenter plusieurs prisonniers, entre autres des militaires. Elle demanda au concierge d'aller prendre chez son boulanger six grands pains et chez son boucher, un veau. Il s'y refusa pensant qu'elle était prise de vin ou folle. Le brigadier de gendarmerie LEBLANC qui était présent dit que c'était une belle charité ; elle répondit que ce n'était pas une charité, mais un devoir. Deux heures après, ce concierge entendit du bruit dans le rue. Il sortit de la prison et vit Madame FERRON au bras du sieur GUILLOT, marchand, dans la rue Ferme, suivie d'une multitude d'enfants qui criaient. La prison était alors située rue Ferme "proche la porte qui conduit au Pont Neuf" d'après Saint-Venant (Tome II page 148 "Prison et gendarmerie"). C'est aujourd'hui la maison GOBILLIARD (voir Bulletin de la Société Archéologique du Vendômois, année 1961). Le lendemain, elle fit apporter à la prison six grands pains. Madame FERRON est revenue deux fois à la maison d'arrêt, accompagnée la première fois de sa domestique et la seconde fois de la fille de Monsieur BRETON-MARTELLIERE, une autre fois, elle reprocha au concierge de ne pas être dans sa guérite, mais à côté, le menaçant de sa canne.

Ensuite comparait Siméon Aimable BEAUSSIER, médecin à Vendôme, âgé de 32 ans, sans doute fils du chirurgien. Il a saigné deux fois Madame FERRON, car le sang lui portait à la tête. Il croit que cette abondance de sang vient de l'usage immodéré de la boisson. Il attribue d'ailleurs sa conduite extravagante à l'excès de vin. Lors d'une soirée qu'il a passé chez elle avec plusieurs autres personnes elle était fort aimable et ne tint aucun propose déraisonnable, car elle s'était abstenue de boire. Il est intimement persuadé qu'elle n'est pas folle. Il est le médecin habituel de Madame FERRON depuis la mort de sa fille, il a toujours constaté qu'elle ne perdait la raison que lorsqu'elle avait bu. Une dame Marie HATRY âgée de 33 ans, alors qu'elle aidait à la vendange à la Béguinière fut appelée précipitamment chez Madame FERRON pour aider à la soigner. Madame FERRON se débattait et menaçait les personnes de son entourage d'un couteau. Marie HATRY a été domestique de Monsieur LEMAIGNEN pendant 4 ans. A la Saint-Jean 1811 elle alla chez Madame FERRON avec "la demoiselle Eugénie fille aînée du second lit de Monsieur LEMAIGNEN" (elle avait alors 3 ans et demi) "Madame FERRON lui dit de sortir avec cette enfant, que si elle ne sortait pas sur le champ elle allait tordre le col de cet enfant".

Puis Me Joseph Marie Maximilien POTTIER, Notaire Impérial à La Ville-aux-Clercs âgé de 28 ans raconte l'affaire du lit de plume acheté à la vente mobilière à laquelle il procédait à Danzé durant l'été 1811. Il vit la veuve FERRON se battre avec son crieur, après qu'elle lui eut arraché des mains le procès-verbal de vente pour le lire lui-même. Il essaya de la ramener au calme ; "alors cette dame lui dit : qui es-tu, toi, pour me faire de pareilles observations ? Il lui répondit qu'il était fonctionnaire public et que, quoiqu'elle le tutoyât, il ne se permettait pas de manquer aux égards dus à son sexe. Cette dame s'appuyant sur sa canne le toisa de sa tête aux pieds et lui dit : ah, c'est heureux ! Il rentra alors dans la moisson, mais remarqua que Madame FERRON cherchait toujours querelle au crieur".

Comparait ensuite le crieur, Denis François GOUIN, menuisier, à La Ville-aux-Clercs âgé de 45 ans. Lors de la vente, il dit en plaisantant "voila un bon lit : il est mollet comme les tétons d'une jeune fille". Sur ce propos Madame FERRON se fâcha et lui dit : "A qui parles-tu ?" Il répondit "Madame ce n'est pas de vous", alors elle le menaça de lui donner un coup de canne sur son "baptême". Elle n'exécuta pas sa menace et le lit de plumes lui fut adjugé. Alors elle tira une pincée de plumes du lit et la jeta à la figure du crieur qui souffla dessus et la retourna sur Madame FERRON, et cela à deux reprises. Madame FERRON lasse de manège se fâcha tout de bon et le menaça de le faire mettre en prison et qu'à cet effet elle allait trouver le Maire. Monsieur BRETON, l'ancien greffier, son frère étant présent, l'apaisa et l'emmena. Le crieur pense que Madame FERRON avait bu le jour de la vente où elle se présenta avec un mouchoir sur la tête et une cravate au cou.

François LELIEVRE, laboureur à Danzé, âgé de 27 ans raconte qu'au mois d'Août 1811, un nommé TASSE, employé à la moisson, étant ivre, passant devant la maison de Madame FERRON, qui était à sa porte, la prit par la main et la mena sur la route et dansa 2 ou 3 petits tours sans aucune résistance de la part de Madame FERRON qui ensuite fit rentrer TASSE chez elle et le fit boire, beaucoup de monde s'assembla sur la route pour être témoin de ce spectacle.

L'audition des témoins est suspendue à quatre heures de l'après midi et remise au lendemain 16 Juin à neuf heures du matin.

Le neuvième et dixième témoin n'apportent pas de renseignements intéressants. Ce dernier s'appelait POTEAU et il était charpentier !

Le onzième et le douzième témoin confirment les déclarations du témoin François LELIEVRE concernant la danse avec le sieur TASSE à Danzé.

Le treizième témoin, Marguerite COLAS, 21 ans, demeurant au Bois aux Moines, commune de Naveil a été domestique chez Madame FERRON dès avant le mariage de sa fille. Elle est persuadée que Madame FERRON a la tête perdue. Elle aurait, une fois, mordu sa fille au bras et celle-ci demanda à Marguerite COLAS de la souffleter pour la dégager tant elle lui faisait mal. Plusieurs fois, Madame FERRON est venue trouver sa domestique dans sa chambre pour l'étouffer. Elle chante jour et nuit des airs d'opéra. Elle prétendait qu'on voulait la tuer.

Magdeleine APPERT, couturière, âgée de 49 ans, déclare que quinze mois après le mariage de Mademoiselle FERRON avec Monsieur LEMAIGNEN, étant en journée chez Madame FERRON avec une lingère, elle a vu cette dernière lever ses jupes devant et derrière et faire ses nécessités autour de la chambre et qu'on fut obligé de la sortir. Un autre jour elle le vit entrer dans la pièce où Monsieur LEMAIGNEN faisait ses comptes de l'Octroi et danser autour de sa table en chantant. La lingère confirme ces déclarations.

Le seizième témoin est Pierre Jean Baptiste GUILLOT, marchand à Vendôme, âgé de 52 ans. Sa déposition est tellement vivant qu'il faut la rapporter intégralement.

Dans le cours du mois de mars 1812 (d'après d'autres témoignages, c'était le vendredi Saint 25 mars), sortant de chez le sieur FOURNIER, perruquier, il rencontra Madame FERRON accompagnée de sa domestique, vis à vis la porte du sieur LUTANDU. Il lui souhaita le bon jour et lui demanda l'état de sa santé. Elle lui répondit que sa santé n'était pas très bonne, que depuis huit jours elle avait une fièvre continue, qu'elle était sortie pour prendre l'air. Il lui offrit son bras pour la promener. Elle lui demanda l'heure qu'il était et croyant qu'il était trop tard, elle dit qu'elle préférait rentrer chez elle et lui demanda de l'accompagner. Lorsqu'il la rencontra vis à vis le sieur LUTANDU, elle était suivie d'une troupe d'enfants, qui ne l'ont quittée que lorsqu'ils ont été au Pont Saint-Bié, sauf quelques uns qui l'ont encore accompagnée dans la rue Ferme. Arrivés Faubourg Saint-Lubin, les enfants du lieu se sont aussi rassemblés à leur suite, jusqu'à la maison habitée par ladite dame FERRON, où il est entré avec elle. Arrivée chez elle, elle a jeté sur un meuble, un chapeau d'homme qu'elle avait sur la tête ainsi qu'une badine qu'elle portait à la main. Elle demanda à boire à sa domestique qui lui apporta du vin dont elle but de suite deux verres tout pur. Il fut étonné qu'elle n'y mit pas une goutte d'eau. Elle voulut lui faire part de ses peines et chagrins ; que Monsieur LEMAIGNEN son gendre voulait venir habiter chez elle. Il lui fit remarquer que Monsieur LEMAIGNEN était trop honnête pour la dépouiller de sa propriété pendant son vivant. Elle ordonna à sa domestique de lui apporter un bonnet qu'il offrit de placer sur sa tête, ce à quoi elle s'opposa. Il resta à peu près une demie heure chez elle, et avant son départ, Madame FERRON se fit encore apporter un verre de vin par sa domestique et le but en sa présence. Il a remarqué que sa figure était extrêmement rouge et ses yeux convulsifs. Il ne l'avait jamais vue en pareil état. Elle lui demanda de revenir le lendemain pour lui donner le détail des peines qu'elle éprouvait. Il n'a point répondu à cette invitation. Il ajoute qu'elle avait l'habitude d'avoir une canne à la main et de porter un chapeau d'homme à la campagne mais non à la ville. Qu'à son avis, son comportement relève de l'ivresse et non de la folie. Tant qu'il a fréquenté la maison du père de Madame FERRON, il ne s'est pas aperçu qu'elle avait l'esprit aliéné. Il a connaissance qu'elle a été incommodée des suites de ses couches, mais que cet état étant de la compétence du médecin, il ne sait en quoi consiste ces incommodités. Lorsqu'il la rencontre au mois de Mars 1812, dans les circonstances qu'il vient de décrire, elle avait les cheveux pendant sur son col, ce qui n'est pas étonnant vu qu'elle les a très courts. Il la rencontrait souvent du temps qu'il travaillait chez son père et l'a vue plusieurs fois depuis chez son frère aîné. Il y a trente six ans qu'il l'a vue porter un chapeau d'homme et une espèce de calèche à Danzé. Il l'a toujours vue jouissant de la plénitude de sa raison, sauf une fois, après le décès de sa fille, où elle était ivre.

On peut se demander si ce fameux chapeau d'homme qui intriguait tant les contemporains de Madame FERRON, n'était pas un tricorne du XVIIIe siècle, puisqu'elle le portait depuis 36 ans.

Le témoignage de sieur GUILLOT est intéressant. Il connaissait Madame FERRON et son père depuis longtemps. Or, il affirme qu'elle n'est pas folle, mais qu'elle s'adonne à la boisson de façon immodérée.

Le dix septième témoin, Marie Victoire BREON épouse de François HUARD, marchand tailleur, âgée de trente huit ans, raconte à nouveau la scène dans la rue Ferme avec les enfants qui suivaient Madame FERRON et la rencontre de Monsieur GUILLOT qui lui donne le bras. S'étant approchée, elle entendit la dame FERRON dire à un Monsieur portant une redingote à grand collet "est-ce vous qui faites crier ces enfants après moi ?".

L'audition des témoins est à nouveau suspendue à quatre heures et reprise le lendemain 17 Juin à 9 heures.

Le 18ème témoin est Constance MARTELLIERE, journalière âgée de 32 ans. Une note en marge indique qu'elle est du nombre des personnes secourues par le bureau de bienfaisance. Elle a été domestique chez Madame FERRON pendant 24 jours, cinq mois auparavant. Elle a constaté que Madame FERRON buvait du vin en telle quantité chaque jour à son dîner et à son souper et même pendant la nuit, qu'elle était ivre tous les jours. Un jour elle la frappa avec un marteau. Le matin elle jouissait de toute sa raison et demandait excuse des excès auxquels elle s'était livrée la veille disant : "Ce sont les peines que j'endure à l'occasion de la perte de mon mari et de ma fille qui me rendent comme cela et me font boire avec excès".

C'est en marge de ce témoignage qu'a été portée la mention "mort depuis 8 ans" qui nous précise la date du décès de Claude Joseph FERRON.

Puis cette Constance MARTELLIERE raconte une scène qui nous dévoile le comportement de Léonard Louis BRETON. Elle a été domestique chez Madame FERRON pendant 24 jours cinq mois auparavant.

"Du temps qu'elle était au service de la dame FERRON le sieur BRETON des BROSSES, frère de cette dame vint une fois chez sa soeur avec laquelle il soupa.

Après souper, entre dix et onze heures du soir, Madame FERRON qui avait coutume de décompter son argent tous les soirs, le retira de son armoire et le compta en présence de Monsieur des BROSSES, qui pria la domestique d'aller se coucher. Elle sortit de la chambre et la porte fut fermée à clef sur le champ. Environ une demie heure après elle entendit Madame FERRON s'écrier : "ah ! le gueux, il m'a volée".

La domestique à ce cri courut à l'appartement où ils étaient, dont on lui ouvrit la porte. Etant entrée, Madame FERRON lui dit : "ah ! ma chère amie, le gueux, il me prend mon argent". Alors elle a dit à Monsieur des BROSSES : "Il faut que vous rendiez cet argent". Monsieur des BROSSES s'approchant de la table fit sortir de son gousset un peu d'argent en retournant ses poches. Monsieur des BROSSES écrivit sur un papier : "Ma soeur, je te signe de ne jamais remettre les pieds chez toi". Madame FERRON écrivit sur le même papier : "Je te signe, mon frère, de ne jamais remettre les pieds chez moi". Constance MARTELLIERE ajoute qu'à ce moment Monsieur BRETON des BROSSES et Madame FERRON étaient ivres l'un et l'autre".

Requise de signer sa déposition, Constance MARTELLIERE déclare ne savoir signer, comment dès lors, a-t-elle pu lire ce qui était écrit sur le papier ?

Sur l'interpellation qui lui est ensuite faite par François LEMAIGNEN, elle déclare qu'elle avait aidé la domestique Marianne, à sortir Madame FERRON qui était tombée dans la cave où elle la trouvèrent ivre couchée sous un poinçon.

Le 19ème témoin, mari d'une domestique de Madame FERRON, n'a rien vu, rien entendu et ne sait rien, malgré les nombreuses questions qui lui sont posées tant par François LEMAIGNEN que par Me HESINE. Il sait seulement "qu'elle était sujette à un cours du ventre, qu'elle n'est pas maitresse de se retenir et qu'on la suivait à la trace".

Pierre BUFFEREAU, huissier, 20ème témoin, est très sobre dans sa déposition. Il a vu Madame FERRON se promener vis à vis de l'Hôtel de Ville avec un chapeau d'homme et une canne, mais il n'y avait personne à sa suite.

Euphrasie HATRY, 21ème témoin, âgée de 21 ans, domestique chez les demoiselles ADAM, rue au Blé, a été au service de Monsieur LEMAIGNEN pendant 4 ans jusqu'à la Saint-Jean 1811 qui habitait chez Madame FERRON pendant les deux premières années de son service. Elle était chargée de porter les aliments de Madame FERRON dans sa chambre. Elle a remarqué que pendant ces deux ans, elle était plus souvent folle que raisonnable. Elle a entendu plusieurs fois Madame FERRON traiter Mademoiselle Eugénie, fille de Monsieur LEMAIGNEN d'Antéchrist. Plusieurs fois elle l'a vu se lever, voulant aller chercher cette enfant pour la tuer. François LEMAIGNEN, son employeur, n'a-t-il pas influencé la déposition de son ancienne domestique ?

Le témoin suivant, Catherine PAILLARD, âgée de 71 ans, domestique, avait accompagné Madame FERRON à la moisson à Danzé. Elle donne une version bien plus mesurée de la vente mobilière : un individu avait tenu des propos malhonnêtes à cette vente (c'était le crieur) et Madame FERRON leva sa canne mais ne le frappa pas. Elle n'a pas vu la scène du lit de plumes. Elle a bien vu un individu inviter Madame FERRON à danser sur la route, Madame FERRON s'y est refusée, "mais cet individu" l'a contrainte pendant une heure et demie à se promener avec elle, mais non point à danser. Elle ajoute que Madame FERRON avait l'habitude de jouer du violon pour faire danser et amuser des jeunes personnes de Danzé.

Elle sait que Madame FERRON "avait une grande chaleur intérieure qui l'obligeait à boire plus souvent que de raison".

Cependant, Madame FERRON "faisait bien ses affaires, les réglant elle-même, en faisant les calculs nécessaires avec beaucoup de facilité à l'aide d'un barème".

Le 23ème témoin est Marie Suzanne TENDRON, femme de Jean Baptiste CHOLLET, journalier, âgée de 41 ans. Elle a été sept semaines domestiques chez Madame FERRON, trois mois auparavant. Monsieur LEMAIGNEN lui aurait dit : "La mère, prenez Madame FERRON, mettez la dans la chambre la plus noire et prenez une grosse clef et des cadenas, enfermez la et vous serez tranquille. J'ai fait faire des cadenas exprès, donnez lui de l'eau d'orge et de l'eau pannée".

Elle couchait dans la même chambre que Madame FERRON et avait constaté qu'elle était attaquée d'un cours du ventre suite de couches, dont elle n'était pas maîtresse.

Elle n'a jamais remarqué aucun dérangement d'esprit chez Madame FERRON ni qu'elle se soit enivrée.

Comparait ensuite Marie Anne AUBIN, âgée de 54 ans, qui fut domestique chez Madame FERRON cinq ans auparavant. Elle ne s'est pas aperçue qu'elle avait la tête dérangée ni qu'elle s'adonnait au vin.

Le témoin suivant, Marie DESPRES âgée de 26 ans, a été elle aussi domestique chez Madame FERRON pendant 8 jours en Mars 1812, son témoignage est tout différent. Elle a vu sa patronne se promener la nuit dans sa chambre avec un chapeau d'homme et se regardant ainsi coiffée dans la glace. Puis elle se mettait à la fenêtre, répétait les chants du coq du voisin et appelait les messieurs de la municipalité en criant et notamment Monsieur BUCHERON qu'elle appelait "la Bûche". Alors Madame BRETON des BROSSES était obligée d'attacher la fenêtre avec un cordon de peur qu'elle ne se jetât par la fenêtre. Une nuit, Madame FERRON a détaché ce cordon, l'a coupé en petits morceaux et jeté au feu. La domestique fut obligée d'aller chercher Monsieur des BROSSES qui couchait dans un cabinet à côté. Celui-ci dit à sa soeur : "Si tu veux toujours faire comme cela, ton gendre te fera enfermer et moi-même je ne coucherai plus ici. Madame FERRON répondit qu'elle s'en foutait".

Une autre nuit (il s'est vraiment passé beaucoup de choses en 8 jours), Madame FERRON lui montra une petite boite qui était son trésor. Dans cette boîte étaient deux portraits, l'un de son mari, l'autre de sa fille, avec deux épaulettes d'Officier qui avaient appartenu à son mari. Elle attacha ces épaulettes avec des épingles sur les épaules de Madame FERRON, sur son ordre, et cette dernière mit un chapeau d'homme.

La huitième et dernière nuit, elle ne put parvenir à la faire dormir et dut appeler Mademoiselle BRETON des BROSSES pour essayer de la calmer.

Elle avait constaté que Madame FERRON écrivait beaucoup.

Le vingt sixième et dernier témoin, Marie Anne PETIT, 66 ans, était aussi domestique de Madame FERRON. Elle raconte à son tour la scène de la danse dans la rue à Danzé, de la chute dans la cave, l'aide qu'elle apporta à l'autre domestique pour la relever avec le concours des voisins. Madame FERRON avait beaucoup bu. Elle croit que les actes de folie dont sa maîtresse était atteinte étaient dus à son ivresse.

"Ce qui l'autorise à penser ainsi, c'est que lorsque cette dame n'avait pas bu, elle causait fort raisonnablement avec ceux qui l'entouraient ; que sur les observations qu'on lui faisait qu'elle buvait trop, elle répondait : je suis toujours en fièvre, j'ai trop de chagrin, il faut que je boive pour oublier. Que quand cette dame donnait des repas de 8 ou 10 personnes, elle s'observait et ne buvait pas et tenait une conversation très raisonnable".

 

On demeure perplexe devant les contradictions de ces 26 témoignages. Il semble cependant s'en dégager, qu'outre son infirmité physique, Madame FERRON avait été très affectée par la mort de son mari et par celle prématurée de sa fille, et que c'est la raison pour laquelle elle buvait. Ces excentricités paraissent dues plus à l'ivresse qu'à la déraison. Il apparaît d'ailleurs que c'était une femme assez cultivée. Elle tenait bien ses comptes et jouait du violon notamment pour faire danser la jeunesse de Danzé. Le remariage de son gendre contribua à l'aigrir. Son attitude devant le fonctionnaire de la prison, le port des épaulettes de son mari montrent qu'elle se souvenait être la femme d'un Officier et qu'elle devait être marquée par un certain sens du commandement et de l'autorité. Le déguisement avec un chapeau d'homme et la canne, n'en est-il pas un signe ?

Il est bien difficile de la juger sur ces témoignages parfois si cruels et si pénibles. On est plutôt enclin à la pitié devant la détresse de cette femme et le manque d'affection de ses proches après la mort de sa fille. L'un de ses frères la volait et l'autre, impécunieux, lui extorqua un bail général de tous ses biens. Parmi tous les témoins, on a vu défiler beaucoup de domestiques mais une seule amie. Il est vrai qu'ils étaient tous cités par François LEMAIGNEN, mais Me HESINE aurait pu faire citer des témoins favorables à sa cliente.

 

 

E

 

Nous avons vu cependant, au début de la procédure, que sa famille l'avait défendue.

Mais elle eut encore la douleur de voir son oncle, Denis BRETON renier la déposition qu'il avait faite en sa faveur.

Le 25 Septembre 1812, devant Me RENOU, notaire à Vendôme, il affirme que les déclarations qu'il avait faites lors du conseil de famille le 21 Avril précédent, l'avaient été "sous l'instigation et les discours insidieux d'un des proches parents de la dame FERRON, venu exprès à Thoré, accompagné d'une autre personne qui se disait son conseil" et qu'il sait parfaitement que sa nièce a depuis longtemps des accès fréquents de démence".

 

 

F

 

Le 05 Août 1812 François LEMAIGNEN-VILLORCEAU assigné Madame FERRON à comparaître à l'audience du Tribunal pour être interdite et lui signifie le procès-verbal d'enquête des témoins.

En Octobre 1812, Madame FERRON produit le long mémoire en défense que nous avons relaté ci-dessus (Madeleine BRETON et sa fille Madeleine Eugénie).

Le jugement est rendu le 17 Décembre 1812. Il y est longuement rappelé le déroulement de la procédure et le Tribunal, "convaincu que l'état habituel de la dame veuve FERRON est celui de la démence et nécessite son interdiction, ordonne qu'elle sera pourvu d'un curateur à son interdiction à l'effet d'administrer sa personne et ses biens, ordonne que le jugement sera levé, signifié et inscrit sur les tableaux à ce destiné d'après la Loi, et rendue publique l'interdiction et ordonne au surplus que les frais de l'interdiction demeureront à la charge de la dame FERRON".

Ce jugement est signifié le 24 Décembre 1812 à Madame FERRON qui était "alors logée chez la dame veuve BRETON, sa belle soeur rue Ferme". On appréciera la délicatesse de ce cadeau de Noël !

Cette signification nous permet de préciser la date du décès de Léonard Louis BRETON (Monsieur des BROSSES). Or il vivait encore en Décembre 1811 ainsi qu'il résulte de la scène du vol rapportée par le 18ème témoin. C'est donc dans cette fourchette : Décembre 1811 - Décembre 1812 qu'il est décédé, c'est à dire au cours de la procédure en interdictions, ce qui n'a pas dû manquer d'accabler encore plus sa soeur.

Conformément à la loi, extrait de ce jugement fut affiché au Tribunal Civil de Vendôme le même jour (24 Décembre 1812) et à la Chambre des notaires de l'arrondissement de Vendôme.

 

 

G

 

Madame FERRON ne tarde pas à réagir : le 29 Décembre 1812, elle assigne François LEMAIGNEN à "comparaître devant Messieurs les Président et Juges conseillers en la cour impériale séante à Orléans pour voir, dire et ordonner qu'il a été mal fait et jugé par ce jugement et le mettre à néant".

Elle présente le 26 Mai 1813 un long mémoire où elle expose qu'elle "est soumise à l'épreuve la plus cruelle" du fait de son gendre. Ce mémoire reprend à peu près les termes de celui qu'elle avait produit en Octobre 1812 et expose toute la procédure ; à propos de l'assignation à comparaître au Tribunal pour l'interrogatoire du 08 Mai 1812 il y est dit : "oh ! combien elle fut douloureuse cette signification pour la dame FERRON ; combien son coeur sentit l'injustice affreuse de l'accusation et l'humiliante procédure à laquelle elle était condamné par celui qu'elle avait appelé son fils ...". Sont ensuite rappelés toutes les dépositions des témoins. Puis ce mémoire soulève un point de droit : la demande en interdiction doit émaner d'un parent d'après l'article 490 du Code Napoléon. Or, François LEMAIGNEN n'est pas parent mais allié de Madame FERRON ; il ne peut donc agir valablement.

A ce mémoire, François LEMAIGNEN répond par un autre mémoire du 28 Mai 1813.

Le 04 Juin 1813, la Cour Impériale d'Orléans, Chambre Civile et Correctionnelle réunies, tenant audience solennelle rend l'arrêt "mettant à néant le jugement dont est appel, donnant décharge à l'appelante des condamnations contre elle prononcées" ; mais "usant du pouvoir attribué par l'article 499 du Code Napoléon ordonne que la dame veuve FERRON ne pourra désormais plaider, transiger, emprunter, recevoir aucun capitaux ni en donner décharge, aliéner ni grever ses biens d'hypothèques sans l'assistance de Maître MERAUX, notaire à Vendôme que la cour nomme pour conseil de ladite dame veuve FERRON".

Dans leurs considérants les juges d'appel font remarquer que les faits les plus graves reprochés à Madame FERRON sont antérieurs à l'acte de donation de 1808 "époque à laquelle elle jouissait entièrement de toute sa raison, et que ceux qui sont postérieurs n'offrent pas la preuve d'une démence actuelle et caractérisée qui rende ladite veuve FERRON incapable de gouverner sa personne et ses biens et de jouir convenablement des ses revenus". Il ne semble pas que les juges d'appel aient bien lu les dépositions des témoins : les faits les plus graves sont incontestablement postérieurs à 1808. Ils auraient mieux fait de dire que les faits reprochés ne leur paraissaient pas suffisamment déterminants pour déclarer l'interdiction.

Et pour justifier la nomination d'un conseil judiciaire, ils disent "que tout annonce chez elle un affaiblissement d'organe qui l'expose au danger d'être surprise dans les affaires d'intérêts qu'elle pourra traiter, et qu'à cet égard, l'assistance d'un conseil doit suffir pour tranquiliser entièrement la justice et la famille".

On ne sait si cela a tranquillisé entièrement François LEMAIGNEN, mais on doit reconnaître que cette décision était plus équitable que celle des juges de Vendôme.

Telle est la longue et douloureuse histoire de ce procès qui a, au moins, le mérite de nous avoir apporté des détails fort intéressants et même pittoresques sur Madeleine FERRON, sa famille et son entourage dans ce Vendôme de la fin du Premier Empire.

 

 

Dernières années de Madame FERRON

 

Nous avons vu sous le chapitre concernant les acquisitions de Claude Joseph FERRON, qu'il avait fait afficher devant la porte de l'église de Danzé son intention de défricher quinze arpents de terre inculte dans l'Usage du Bois aux Moines et que cette demande donna lieu à un long procès repris par François LEMAIGNEN en 1807. Ce procès se termina par jugement du Tribunal Civil de première instance de l'arrondissement de Vendôme du 02 Avril 1813 qui reconnut la propriété de ces quinze arpents tant à François LEMAIGNEN qu'à Madame FERRON usufruitière et à Claude François RICHARD, chef de bataillon, demeurant à Vendôme faubourg Chartrain, acquéreur de la métairie du Bois aux Moines qui appartenait précédemment à un nommé TASSET. On trouvera dans les titres de propriété de la ferme de la Foresterie le volumineux dossier de ce procès. Parmi les pièces de procédure figure l'analyse des titres justifiant la propriété des quinze arpents des Usages depuis le premier titre, en notre possession, du 27 Novembre 1556. Il y est expliqué que, profitant des troubles révolutionnaires, les cultivateurs voisins s'étaient emparés de ces terres ; un dénommé RICHET y avait même construit une maison ; les bâtiments de la ferme des Usages étaient tels qu'ils étaient loués aux époux CHAUVIN et qui furent vendus le 20 Février 1971 (acte Me CROYERE).

Le 28 Juin 1814, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU et Madame FERRON, assistée de Me MEREAUX son conseil judiciaire, procédèrent au partage de ces quinze arpents avec le capitaine RICHARD, un plan précis des immeubles partagés est joint à ce partage ; on y trouve notamment le plan des bâtiments de l a ferme du Bois aux Moines appartenant en usufruit à Madame FERRON, de l'autre ferme du Bois aux Moines appartenant à Monsieur RICHARD de la ferme de la Foresterie et de la ferme de la Bourdinière appartenant à François LEMAIGNEN et ses enfants, et de la ferme des Usages.

Le 30 Octobre 1814, Madame FERRON demeurant alors à Vendôme, rue Ferme, assistée de Me MEREAUX son conseil judiciaire, convoque en l'Etude de Maître RENOU, notaire à Vendôme, quatre cultivateurs (Eloi Richette, Marie Boucher veuve d'Antoine Huet et ses enfants, René Blin, Louise Dubois sa femme et René Guenette) qui s'étaient emparés de différents morceaux de terre dans les Usages et les avaient défrichés. Elle désirait "les laisser jouir de ces pièces de terre cultivées par eux pour les dédommager autant qu'il est possible des coûts et peines que leur ont occasionés ces défrocs". En conséquence, elle leur loue ces pièces de terre pour 9 ans à compter de la Toussaint 1814 moyennant, outre le paiement des impôts fonciers, deux décalitres, quatre litres, cinquante cinq décilitres de blé froment, livrés en ses greniers, par boisselée de terre louée, et en outre 4 poulets bons, gras et recevables".

Cet acte ne prouve-t-il pas que Madame FERRON n'était pas aussi "dérangée d'esprit" que son gendre voulait le faire croire ? Il témoigne en tout cas, des sentiments généreux qui l'animaient vis à vis des petites gens de sa commune de Danzé.

Son gendre ne semble pas avoir pris les mêmes dispositions bienveillantes envers les cultivateurs qui avaient défriché les parcelles des Usages, qui lui furent attribuées en vertu du parage du 28 Juin 1814.

Le 28 Août 1819, toujours assistée de Me MEREAUX, elle loue à François BORDEAU et Françoise MARTELLIERE son épouse la métairie des Saulettes, commune de Danzé (la contenance n'est pas indiquée) à moitié fruit et moyennant une "autre moitié" de cent cinquante francs, douze livres de beurre frais (5 kilogrammes 87 décagrammes), six poulets et autant de canards. Ils doivent encore lui livrer chaque année, en son domicile, treize stères, seize centistères ou trois cordes de bois qu'ils prendront sur les dépendances de la ferme, et ils devront "venir chercher la bailleresse en leur voiture chaque fois qu'elle voudra aller à Danzé".

Ce bail est le dernier document que nous possédons concernant Madame FERRON. Elle a dû décéder peu après, sans doute à Vendôme rue Ferme, car elle n'habitait plus, semble-t-il, depuis un certain temps la maison de la rue de la Grève (dans une police d'assurance de la Compagnie d'assurances Mutuelles contre l'incendie de Loir et Cher du 13 Juillet 1822 souscrite par François LEMAIGNEN, il est indiqué que cette maison portant alors le numéro 3 de la rue de la Grève, était à usage de pensionnat et était occupée par Mlle CLOUET de Saint-Martin. François LEMAIGNEN la repris vers 1825 après y avoir fait d'importants travaux dont nous avons les factures).

Nous ignorons la date exacte de son décès.

Le 27 Mai 1822, François LEMAIGNEN agissant en qualité de tuteur de ses enfants, vendait, avec promesse de ratification à leur majorité, une grange et environ 7 hectares de terres dépendant de la ferme du Bourg à Danzé. Madame FERRON qui en était usufruitière, ne comparait pas dans cette vente ; elle est donc déjà décédée.

Dans une note du dossier de François LEMAIGNEN concernant les dépenses qu'il a payées pour ses enfants, il est indiqué "par acte de RENOU, notaire à Vendôme du 14 Mai 1822, Mlle Jabre DUPLESSIS a reconnu avoir reçu de Monsieur LEMAIGNEN-VILLORCEAU comme tuteur de ses enfants, 130 francs, à quoi ils avaient composé, pour le remboursement d'une rente due par les enfants LEMAIGNEN comme héritiers et représentant de Monsieur et Madame FERRON".

Une facture de POTEAU, charpentier à Vendôme (l'un des témoins du procès d'interdiction), concerne la reconstruction "d'une bergerie sur la ferme du Bois aux Moines dont Madame FERRON avait la jouissance jusqu'au 1er Septembre 1820".

Serait-ce la date de son décès ?

C'est bien possible.

Le fait que Madame FERRON soit décédée dans le courant de l'été 1820 semble confirmé par une mention portée par François LEMAIGNEN sur son livre de gerbes pour l'année 1820 : "Le 05 Janvier 1821 il a été battu chez François GOIVIER (fermier de la Foresterie) 140 gerbes de bled. Madame FERRON donnait 100 francs de gages à TESSIER ...." Et le livre de gerbes de 1821 mentionne le nombre de gerbes récoltées sur le "domaine FERRON" par François LEMAIGNEN.

Il semble donc bien qu'on puisse affirmer, que Madame FERRON est décédée sinon le 1er Septembre 1820, du moins dans le courant de cette année 1820, à l'âge de 62 ans.

Il est surprenant qu'aucun document ne nous soit parvenu sur le décès de Madame FERRON. Peut-être ont ils été remis par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU à sa fille Eugénie Madeleine Victoire, soeur de Léon, qui épousa à Naveil le 11 Septembre 1827 Alexandre Auguste MIROIR, et dont la fille, Augustine Odile Lucie MIROIR épousera Ernest Antoine DEMEZIL.

Si nous avons un portrait de Claude Joseph FERRON, aucun portrait ni souvenir, ne nous est parvenu de sa femme. Nous ignorons tout de son aspect physique, alors que nous sommes abondamment renseignés sur sa mentalité, son comportement et sa personnalité.

Nous ignorons tout également de Madeleine Eugénie FERRON, sa fille unique qui épousa François LEMAIGNEN-VILLORCEAU ; aucune lettre, aucun portrait, absence totale de renseignements sur son caractère et son aspect physique. Il est vraiment curieux que Léon LEMAIGNEN n'ait conservé aucun souvenir de sa mère ; il ne l'a pas connue puisqu'elle est décédée deux mois et demi après sa naissance. Est-ce François LEMAIGNEN ou sa troisième épouse qui aurait fait disparaître toute trace de la famille FERRON ?

Il est cependant heureux que François LEMAIGNEN et Léon LEMAIGNEN aient conservé la majeure partie des anciens titres de propriété des biens possédés par les familles BRETON et FERRON sans les remettre aux acquéreurs de la ferme du Bourg à Danzé vendue en 1822 et 1823, et de la ferme des Saulettes vendue au détail par Léon LEMAIGNEN en 1830. Ce volumineux dossier d'anciens titres, resté dans l'oubli pendant 150 ans, nous a permis de reconstituer assez complètement l'histoire, jusqu'alors ignorée, des ascendants de Madeleine BRETON épouse de Claude Joseph FERRON, de sa grand-mère, Magdeleine BORDIER, petite fille de Thomas MICHON et de Renée LANCELOT, cette dernière étant elle même l'arrière petite fille de Pierre LANCELOT, premier ancêtre connu qui vivait sous Henri IV. C'est presque uniquement par les femmes que se fait cette filiation échelonnée sur neuf générations jusqu'à Madeleine Eugénie FERRON.

Rappelons que ce premier ancêtre, Pierre LANCELOT avait eu un autre petit fils, prénommé également Pierre, frère de Jehan le procureur, qui épousa Perrine MELOT ; de cette famille MELOT son issus notamment les PEZIERE, dont l'un des enfants, Catherine, épousa Mathurin DERAS, père de François, grand-père de Madeleine épouse de Léonard BRETON.

Outre leur intérêt généalogique, ces nombreux documents nous ont permis de reconstituer en partie la vie de ces ancêtres et de leurs collatéraux, leur caractère parfois pittoresque, leurs occupations, leurs démêlés familiaux et, grâce aux inventaires, les meubles au milieu desquels ils vivaient ; c'est presque toute la communauté paroissiale de Danzé qui sort ainsi de l'oubli, au travers des deux derniers siècles de l'ancien régime, et une partie des habitants de Vendôme sous ce premier Empire.

Ces documents présentent également un grand intérêt juridique en ce qui concerne les règles et coutumes de notre ancien droit, la rédaction des actes, le déroulement des procédures, les droits féodaux, les règles de dévolution successorales, etc....

Grâce au patient déchiffrement de ces vieux actes, nous avons pu faire revivre ces lointains parents et nous attacher, parfois avec émotion, à Pierre LANCELOT, laboureur au temps de Sully, à Jehan LANCELOT, le procureur, aux BRILLARD et aux FOUQUET alternativement laboureurs, marchands ou notaires, aux PITARD, maîtres de forge, à Anne BRANCHE enfermée dans sa grange, aux MELOT, à Jacques PEZIERE, archer de la Maréchaussée en Blésois et Vendômois, dont la maison faubourg Saint-Lubin fut incendiée, à la famille DERAS, ses démêlés à propos du bordage de Sainte-Anne, et son long procès qui dura près de cent ans avec Marie DEMERE et sa famille, à la touchante Magdeleine BORDIER, ses trois maris, ses deuils et ses procès, à l'entreprenant Greffier Léonard BRETON et à l'Officier des carabiniers de "Monsieur", Claude Joseph FERRON, son gendre, ainsi qu'à la forte personnalité de Madeleine BRETON si attachante à travers ses malheurs et les vexations que lui fit subir son implacable gendre après la mort prématurée de Madeleine Eugénie sa fille, mère de Léon LEMAIGNEN.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille Lemaignen

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les Origines de la Famille LEMAIGNEN

 

Nous avons vu que Fernand LEMAIGNEN (1870-1951) était le fils de Léon Ernest LEMAIGNEN (1835-1903) et de Louise DEMEZIL (1839-1907) ce qui nous a amené à étudier les familles DEMEZIL, TIRONNEAU, PERINEAU, VERITE et COUSIN.

Léon Ernest LEMAIGNEN était lui-même le fils de Léon LEMAIGNEN (1809-1854) et de Emélie Marie Brigitte BEZARD (1813-1877) petite fille de BEZARD-LEGRAND dont nous avons pu retracer longuement l'histoire de la famille. Son père, Pierre Samuel BEZARD (1783-1857) avait épousé Emilie Marguerite PORCHER et nous avions précédemment rappelé l'histoire des familles PORCHER et AUCHER dont elle était issus.

Léon LEMAIGNEN était l'un des enfants de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU (1773-1837) qui épousa en premières noces Marie Madeleine ELLEN, dont est issue la famille FOUCAULT. En secondes noces, Madeleine Eugénie FERRON et nous avons retracer l'histoire des familles FERRON et BRETON. De ce mariage sont nés, Léon LEMAIGNEN et Eugénie Madeleine LEMAIGNEN qui épousera Alexandre Auguste MIROIR dont la fille épousera le demi frère de César DEMEZIL. Enfin en troisièmes noces, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU épousa Françoise Gabrielle Jeanne DESHAYES de BONNEVAL dont sont issues les familles ALARDET, MALCOR et du PLESSIS de GRENEDAN.

Au cours de l'Etude de ces différents familles nous avons rencontré souvent des membres de la famille LEMAIGNEN, à diverses générations.

Il nous reste donc à étudier cette famille LEMAIGNEN.

Nous n'avons malheureusement aucun document pour retracer l'histoire de cette famille avant François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, et sa généalogie, assez complète, quoique présentant certaines erreurs et lacunes, a été établie par André Marie Louis LEMAIGNEN (1856-1951) demeurant à Veillène, commune de Bauzy (41) et complétée par son fils Robert LEMAIGNEN à qui nous devons la presque totalité des renseignements qui ont permis d'établir les tableaux généalogiques qui précèdent. Voir opuscule FAMILLE LEMAIGNEN, par Robert LEMAIGNEN.

Nous allons commenter ces tableaux sans qu'il soit possible d'apporter d'autres précisions.

Le premier ancêtre de la famille serait un Guillaume LEMAIGNEN dont seraient issues deux branches de descendants : l'une qui s'est établie dans les anciennes élections de MORTAIN et d'AVRANCHES, et l'autre dans l'élection de FALAISE dont la descendance est retracée sur le premier tableau avec certainement une lacune d'une ou deux générations, entre, 1382 et 1624.

Il résulte d'une lettre écrite par Jean MARTIN DEMEZIL à Monsieur Fernand LEMAIGNEN, son parrain, le 18 Octobre 1937 (voir dossier correspondance Fernand LEMAIGNEN) qu'il a relevé dans "DE LA CHESNAYE-DICTIONNAIRE DE LA NOBLESSE Tome IX P. 306 à 309" :

"LE MAIGNEN : une des plus anciennes familles de Normandie. En 1271 Guillaume Le MAIGNEN traite avec le Roi de France Philippe III.

En 1423 un Le MAIGNEN participe à la défense du Mont Saint-Michel contre les Anglais".

Jean MARTIN DEMEZIL continue :

"Un registre manuscrit de 1700 me donne les membres de la famille à cette date: ils vivent dans les généralités d'Alençon, de Caen et de Rouen. Je n'ai pas recherché dans toutes les Provinces. Ce nom n'est pas représenté en Touraine. Au XVIIIe siècle il existait deux branches à armes distinctes. Branche de l'élection de Falaise issue de Pierre Le MAIGNEN écuyer inhumé aux Cordeliers de Bayeux (+ le 10 Décembre 1382) son fils Estienne épouse Jacqueline de BONNECHOSE. Son blason porte : d'Azur à la Croix d'Argent cantonnée au premier quartier, d'une molette de même à bordure de gueule".

(Voir reproduction de ce blason sur cette lettre. C'est bien le blason des LEMAIGNEN. Voir lettre et cachet de Robert LEMAIGNEN). On verra aussi une lettre écrite à Fernand LEMAIGNEN par un héraldiste de Paris le 06 Février 1914 (correspondance Fernand LEMAIGNEN).

 

 

Pierre LEMAIGNEN

 

D'après la généalogie établie par Louis LEMAIGNEN et son fils Robert, un descendant de Guillaume LEMAIGNEN qui vivait en 1271, était : Pierre LEMAIGNEN décédé le 10 Décembre 1382, inhumé aux Cordeliers de Bayeux, époux de Jeanne de VILLEROT ou VILLEREAU.

Marie AUBERT, fille de Jacques AUBERT et de Cécile LEMAIGNEN, en préparant sa maîtrise d'histoire à la Faculté de Tours, eut la bonne fortune de retrouver en 1980, un jugement "donné en nostre Chastel le Montargis le 1er Novembre 1378" dont le texte est reproduit ci-dessous. (Archives Nationales 60, rue des Francs Bourgeois à Paris - Référence : JJ 113 N° LEMAIGNEN).

 

Charles Savoir faisons à tous présents et à venir que comme Pierre LeMaignen de Sainte Croix en la Hague au pays de Costentin, lontemps à lui estait soulz l'aage de douze ans ou environ se feust par dudit Costentin et transportez en Navarre et en Foix, comme jeune filz servant et es dites parties de Navarre et de Foix ait reprins on demoure par le temps que le Roy de Navarre ou le Conte de Foix ont eu guerre ou l'un d'eulx contre aucuns leurs adversaires.

Et depuis qu'il se put armé, ait tenu leur parti tant contre nous ou noz sulges pour ledit roy de Navarre comme contre le Conte d'Armagnac pour ledit conte de Foiz et mesmement ait esté avecques gens de compaignie englois et autres faisans guerre pour lesdiz roy de Navarre et compte de Foix et aussi sanz chief.

Et puis un an en ça il soit venu au fort de Chierebourc pour estre de la garnison dudit Chastel par avant ceste présente guerre commenciée entre nous et ledit Roy de Navarre et illecques ait tenu le parti dudit roy de Navarre jusques à naguerre, que il était et apparent que le dongon et toute la forteresse dudit Chastel de Chierbourc du baillée et mise en la main des Englois.

Et lors lui ce considerant en non volant tenir le parti des Englois se parti d'eulx de son propre mouvement et s'en vint et tourna par devers notre amé et féal Chevalier et Chambellent Guillaume seigneur des Bordes pour nous estant lors sur le pays.

En lui disant le convine de noz ennemis requerant que il se le preist en nostre merci lequel nostre chambellent le y prist et le assermenta de nous servir bien et loyalment à tousjours en envers touz et contre touz ceuls qui peuvent vivre et morir.

Et depuis ce, nous a servir en armes et chevaux en la compaignie de notre dit Chambellant et soy monstrant notre loyal subgé et encore fait de jour en jour si comme notre dit chambellent nous a relaté lequel Pierre aiant désir de continuer en notre service et d'estre doresenavant notre bon et loyal subgé et obéissant nous a fait requerir que attendu le jeune aage que il avoit au département de son pays, il nous plaist de lui avoir pitié et extendre notre grace.

Nous adecertenés eue considération aux choses dessus dites oye le relation de notre dit chambellanc sur les bons services ou fest depuis exposez vers nous tous les faiz dessus diz et chascun deulx pour lesquelx il s'est ou peut estre meffait envers nous avecques toute offense et peine criminelle et civile tout en commettant crime de lese maiesté comme autrement qu'il peut avoir encouru envers nous audit Pierre ou cas dessus dit, avons remis, quitté et pardonné, remettons quittons et pardonnons de notre auctorité royal plains puissance et grace espécial, et le restituons et remettons au pays à sa bonne fame et renommée et biens non confisquez sauf et réserv le droit de partie se il en y avait aucun qui en voulsist fere poursuite.

Si donnons en mandement au bailli de Costentin et à touz noz autres justiciers et officiers ou à leurs lieux tenants présents et à venir et à chascun d'eulx si comme à lui appartendra que de notre presente rémission, grace et pardon le facent, seuffrent et laissent joir et user à plain seinz le ariester, emprisonner ou molester en quelque manière en corps ne en biens, mais se aresté, emprisonné ou autrement molesté, le trouvaient ou quelque chose du sien empeschée.

Si le mettent ou facent mettre à plaine délivrance veues ces présentes sanz delay par la manière que dit est. Toutes voies ou cas qu'il retourneroit de la partie dudit Roay de Navarre ou d'autres noz adversaires et ennemis, nous voulons et déclarons que notre présente rémission et grace ne lui soit d'acun effect et valeur.

Et que ce soit chose ferme et estable à tous jours, nous avons fait mettre notre scel à ces lettres sauf en autres choses notre droit et l'autrui en toutes.

Donné en nostre chastel de Montargis le premier jour de Novembre l'an de grace mille trois cent soixante dix huit et le quinzième de notre régne.

Par le Roy - J. CABARY.

 

Il en résulte que Pierre LEMAIGNEN demeurait à Sainte Croix en la Hague au pays de Cotentin. Pendant la Guerre de cent ans, il prit le parti des anglais et combattit contre le Roi de France, avec le Roi de Navarre et le Comte de Foix, et "sans chef". Puis il teint garnison au fort de Cherbourg avec les anglais.

En 1377, il fait sa soumission au Roi de France entre les mains de son chambellan Guillaume Seigneur des Bordes, et par la sentence et pardonne "Pierre LEMAIGNEN de ses égarements de jeunesse attendu qu'il l'a servi depuis en royal sujet avec armes et chevaux en compagnie de son chambellan.

 

 

Jacques LEMAIGNEN époux de Rose SORET

 

Nous n'avons aucun autre document sur la branche de Normandie de la famille LEMAIGNEN, dont les membres étaient en général, des écuyers et des hommes d'arme.

Il résulte du tableau généalogique établi par Louis LEMAIGNEN, qu'un descendant de Pierre LEMAIGNEN fut : Jacques LEMAIGNEN né entre 1624 et 1630 à Saint-Pierre sur Dives où il est décédé le 08 Août 1677, époux de Rose SORET, née en 1633 et décédée à Talcy, en Loir et Cher, le 30 Février 1693 où elle était venue habiter après son veuvage.

Jacques LEMAIGNEN et Rose SORET eurent cinq enfants :

1°) Jeanne, née le 26 Janvier 1657, descendance inconnue.

2°) Charles, né le 18 Septembre 1660, descendance inconnue.

3°) Jacques, né le 27 Avril 1664, Notaire et Tabellion Royal à Talcy qui épousa à Mer (ou à Marchenoir) vers 1690 ou 1691 Marie Louise FLEURIAU (fille de Pierre FLEURIAU, notaire à Marchenoir puis à Mer) et décéda à Ménars le 24 Mai 1740.

4°) Guillaume, né le 28 Janvier 1671, décédé le 06 Février 1672.

5°) Nicolas, né le 20 Avril 1672, huissier au Bailliage Marquisart de Ménard et dont la descendance est inconnue.

Dès lors, cette famille de Normandie va s'établir dans la région de Talcy, Mer, Ménars, Marchenoir, Blois, Vendôme, la Sologne et Périgny et ses membres qui vont se multiplier considérablement seront en général, notaires, hommes de loi, bourgeois, parfois commerçants.

Il n'est dès lors pas étonnant que nous les retrouvions fréquemment au cours de l'histoire des familles que nous avons relatée.

 

 

Enfants de Jacques LEMAIGNEN-FLEURIAU

 

Jacques LEMAIGNEN et Marie Louise FLEURIAU eurent 9 enfants dont 8 sont identifiés et encore ignorons-nous la descendance de 4 d'entre eux. Parmi les 4 autres, l'un, Pierre décéda curé de Chitenay (41) et un autre, Jacques, eut, de deux mariages, 7 enfants dont seule une fille semble avoir survécu et décéda chanoinesse de Sainte-Véronique à Blois le 08 Septembre 1803.

 

Les deux autres enfants connus de Jacques LEMAIGNEN-FLEURIAU furent :

 

A - Benoît Nicolas LEMAIGNEN né à Talcy en 1703, décédé à Blois en 1763, époux de Marguerite DELAUNAY (1710-1806) qui eut 6 enfants que nous avons déjà rencontrés dans les historiques des familles AUCHER et BEZARD (voir contrat de mariage PORCHER-AUCHER du 21 Février 1786), ce sont :

1°) Benoît Pierre LEMAIGNEN époux BRUERE qui fut épicier à Blois.

2°) Jean Jacques Clément LEMAIGNEN, huissier Royal à Blois (1742-1822) qui épousa en 1765 Françoise Geneviève AMAURY (1737-1806) fille de Pierre AMAURY, notaire Royal à Blois.

Cette Françoise Geneviève AMAURY était peut être la soeur de Jacques AMAURY, marchand tonnelier à Blois qui épousa avant 1756 Marie LEGROUX, cousine de BEZARD-LEGRAND, et de Georges Martin AMAURY, marchand épicier à Blois, rue Beauvoir décédé avant 1811 époux en premières noces de Marie Elisabeth THOYER et en secondes noces d'Elisabeth Marie JARGOIS-DESGRANGES, dont est issue marie Georgette BILLAULT, grand mère de Robert LEMAIGNEN.

Y-a-t-il une parenté entre ces AMAURY et les demoiselles AMAURY qui habitaient à Tours au début du XIXe siècle et qui vendaient des terres à Périgny à BEZARD-PORCHER le 12 Décembre 1841 ? (Voir Pierre Samuel BEZARD-PORCHER).

3°) Marie Louise Marguerite LEMAIGNEN qui épousa Pierre BRUERE, épicier à Blois, sans doute le frère de la femme de Benoît Pierre LEMAIGNEN.

4°) André Pierre LEMAIGNEN époux de Marie GAILLARD.

5°) Jacques LEMAIGNEN qui fut notaire à Blois, époux de Jeanne MORIET. Il eut pour clerc et successeur Jean-Louis PORCHER.

Madame veuve LEMAIGNEN-MORIET est décédée à Blois en son domicile, Quai du Département le 11 Mars 1845, sans enfant (notoriété du 14 Avril 1841) après avoir institué pour légataires universels par testament authentique reçu par Me PARRAIN notaire à Blois le 11 Janvier 1841 :

- Louis Coradin AUCHER-LEMAIGNEN.

- Léon LEMAIGNEN-BEZARD.

à charge de délivrer de nombreux legs particuliers notamment à :

- un certain BRUERE-ROUX qui devait être son cousin.

- Madame veuve DESACHE-LEMAIGNEN demeurant à Blois, Grande Rue.

- L'Abbé VENOT, économe au Petit Séminaire.

- Pierre Daniel LANGE demeurant à Blois.

- LEMAIGNEN-DOULECRON avocat à Blois, rue des Minimes.

- Et de nombreux objets mobiliers à sa domestique.

6°) Catherine Marguerite LEMAIGNEN, décédée après 1787 qui épousa François AUCHER épicier à Blois (1730-1780). (Voir famille AUCHER).

 

B - André LEMAIGNEN né à Talcy le 08 Juin 1696, décédé à Marchenoir le 09 Septembre 1763, bourgeois et Syndic Perpétuel à Marchenoir où il épousa le 20 Février 1715 Marie HEMERY, née le 30 Avril 1697, décédée le 15 Juin 1776, soeur d'Agnès HEMERY épouse de Jacques LEMAIGNEN, son frère.

De ce mariage sont nés 17 enfants dont 9 sont morts en bas âge.

 

 

Enfants d'André LEMAIGNEN-HEMERY

 

Les huit enfants survivants d'André LEMAIGNEN et de Marie HEMERY sont :

1°) André Michel LEMAIGNEN, 4ème enfant né à Marchenoir le 26 Novembre 1719, décédé à Mer le 30 Août 1776. Il fut d'abord commerçant à Marchenoir, puis à Mer, et fut nommé par le Roi le 1er Février 1764, Secrétaire Greffier de la Juridiction du Point d'Honneur au Bailliage et Siège Présidial de Blois, succèdant dans cette charge à son beau-père Jean POIRIER.

Il épousa en premières noces avant 1747 Anne Marie Rose TRESSEY (1718-1755) dont il eut cinq enfants dont 4 morts en bas âge à Marchenoir (1747-1747-1747-1751). Le cinquième fut : Marie Anne Nicole LEMAIGNEN née en 1752, décédée en 1830 qui épousa à Mer en 1772 Pierre Joseph LENORMAND-GRANDCOUR.

Ces derniers eurent un fils André qui épouse ..... DUBICAT, ceux-ci eurent à leur tour un fils : André qui épousa .... BOY. Enfin ces derniers eurent deux enfants : Lionel LENORMAND-GRANDCOUR de LABORIEN, et Honorin LENORMAND-GRANDCOUR époux de Saint-Amand. Leur descendance et inconnue.

André Michel LEMAIGNEN épousa en secondes noces à Courbouzon près de Mer le 18 Mai 1756, Marie Anne Victoire POIRIER, née en 1794 dont le frère, décédé à Paris en 1811 fut jurisconsulte.

Leur descendance sera établie ci-après.

André Michel LEMAIGNEN décéda à Mer le 30 Août 1776.

2°) Jean Jacques Nicolas LEMAIGNEN, 6ème enfant, décédé en 1747 à Saint-Domingue (descendance inconnue).

3°) Pierre LEMAIGNEN surnommé DESOUCHE (8ème enfant), né en 1725, décédé en 1761, demeurant à Marchenoir qui épousa en 1753 Françoise PROVANDIER. Ils eurent un seul fils : Pierre François, né à Marchenoir en 1754 décédé à Mer en 1794, sans postérité. Il était gendarme et époux de Marguerite Thérèse DUBOIS, descendante des HUET de Périgny (voir titre de propriété de Périgny, vente à BEZARD-LEGRAND du 25 Frimaire An VII).

4°) Dominique Raymond LEMAIGNEN (9ème enfant) né à Marchenoir le 11 Février 1728, décédé à Beaugency le 10 Décembre 1797, greffier en chef civil et criminel du bailliage et Comté de Beaugency. Il épousa en premières noces en 1753 Madeleine PARIS, décédée en 1754 et en secondes noces Anne Thérèse Madeleine PETIT (1733-1812). Ses descendants sont : Honorat Constant LEMAIGNEN (05 Avril 1776 - 28 Octobre 1843), Henri Constant Casimir LEMAIGNEN (02 Janvier 1819 - 13 Avril 1881), Jules LEMAIGNEN (13 Juin 1856 - 06 Février 1934), Albert LEMAIGNEN (né le 11 Septembre 1883), Yves LEMAIGNEN (né le 19 Août 1915), avocat à Orléans qui épousa le 28 Juillet 1944 Nicole de GASTINES.

5°) Marcou Nicolas Charles César LEMAIGNEN, surnommé DELAFOSSE (12ème enfant), né à Marchenoir en 1732, décédé avant 1801 qui épousa à Villebout près de Cloyes en 1756 Marie Françoise IZARD décédée en 1806. Ils eurent 14 enfants dont la descendance est inconnue.

6°) Marie Anne Nicole LEMAIGNEN (13ème enfant), née en 1735 décédée en 1807.

7°) Agnès Thérèse LEMAIGNEN (17ème enfant), née en 1742 décédée en 1812.

Ces deux dernières furent chanoinesses régulières de Sainte Véronique à Blois.

8°) Louis Anne LEMAIGNEN (14ème enfant), surnommé DESPORTES (1740-1773) négociant à Oucques qui épousa en 1767 Marie Marguerite Françoise CHAHUNEAU (1749-1814). Ils eurent un seul fils : François Charles Henry LEMAIGNEN (1772-1849) sans descendance connue.

 

 

Enfants d'André Michel LEMAIGNEN et de Marie POIRIER

 

De son deuxième mariage avec Marie Anne Victoire POIRIER, André Michel LEMAIGNEN eut quatorze enfants dont 7 sont morts en bas âge (1757-1762-1763-1764-1768-1769-1772). Nous n'avons aucune précision sur l'un des sept survivants.

Les six autres sont :

1°) Marie Françoise Victoire LEMAIGNEN née à Mer en 1756, décédée à Saint-Dyé en 1824, épouse à Mer le 06 Juin 1776 Michel ROGER (1752-1816) notaire à Avaray. Ils eurent pour fils Charles Michel ROGER, né à Saint-Dyé le 03 Janvier 1777, décédé à Avaray le 21 Décembre 1843, notaire et Marie d'Avaray.

Il épousa à Blois le 29 Septembre 1797, Marie Brigitte BEZARD, née à Blois le 07 Septembre 1781, décédée à Blois le 26 Décembre 1799, fille de Pierre BEZARD et de Françoise Louise Brigitte LEGRAND (voir famille BEZARD-LEGRAND - Charles ROGER).

2°) Jean Michel Louis LEMAIGNEN qui épousa ..... JUIFFRENET (descendance inconnue). (C'était peut-être sa veuve qui était libraire à Blois en 1824-1825 ainsi qu'il résulte d'une facture délivrée à Pierre Samuel BEZARD-PORCHER).

3°) Madeleine Rose LEMAIGNEN, née en 1767, décédée en 1826, épouse en 1791 Guillaume Charles GALISSET, Juge au Tribunal de Blois, Administrateur du Département de Loir-et-Cher, Inspecteur des Finances (descendance inconnue).

4°) André Pierre Michel LEMAIGNEN, surnommé DESMARAIS, né à Mer le 03 Juillet 1770, décédé à Blois le 16 Février 1843, propriétaire à Blois. Il épouse à Blois le 03 Janvier 1797 Marie Eléonore DUFAY, fille de Claude Barthélémy DUFAY et de Marie Louise DUFOUR (1774-1845).

De ce mariage sont issus deux enfants :

- André Michel Barthélémy LEMAIGNEN, né à Mer le 05 Novembre 1797, décédé à Blois le 27 Août 1889, Président du Tribunal de Commerce de Blois, qui épousa le 27 Avril 1824 Jeanne Adélaïde BARAULT née le 02 Avril 1804, décédée le 26 Novembre 1886, fille de Jean Baptiste René BARAULT et de Jeanne Louise Françoise Adélaïde LESOURD.

(Voir ci-après : Enfants des époux LEMAIGNEN-BARAULT).

- Marie Anne Nelly LEMAIGNEN, née à Blois en 1803 qui épouse à Blois le 18 Juin 1821 François Louis Coradin AUCHER, fils de François AUCHER et de Catherine Marguerite LEMAIGNEN (elle-même fille des époux LEMAIGNEN-DELAUNAY et petite fille de Jacques LEMAIGNEN-FLEURIAU - Voir ci-dessus).

(Voir descendance famille AUCHER).

5°) Madeleine Agathe (ou Agathe Rose d'après le contrat de mariage de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avec Madeleine FERRON) LEMAIGNEN née à Mer le 24 Mai 1776, décédée à Blois le 27 Juillet 1845. Elle épouse à Mer, Gervais Auguste LENORMAND-MARTINIERE, né à Mer le 29 Avril 1778, décédé à Blois le 18 Août 1833, inspecteur des boucheries à Blois. Il était fils de Pierre LENORMAND, conseiller du Roi, Président du Grenier à Sel, et de Marie Madeleine GENTILS.

De ce mariage naît une fille : Louise Agathe LENORMAND-MARTINIERE née à Mer en 1797, décédée le 25 Avril 1865. Elle épouse en 1818 Charles Constant BODIN (1793-1843) sans postérité.

6°) François LEMAIGNEN dit VILLORCEAU né à Mer le 07 Octobre 1773, décédé à Blois le 03 Mars 1837.

(Voir ci-après "LEMAIGNEN-VILLORCEAU").

 

Notons l'existence de cinq LEMAIGNEN qu'il a été impossible de rattacher à cette généalogie :

1°) Auguste Dominique LEMAIGNEN-DOULECRON, avocat, Maire de Blois qui vivait le 21 Janvier 1854 (voir liquidation succession de Madame veuve PORCHER-AUCHER).

2°) D. LEMAIGNEN, Juge de Paix à Blois en 1860.

3°) Jean François LEMAIGNEN, libraire à Blois vers 1820. Sa veuve continuait son commerce en 1830. Il vivait en 1818 (témoin dans une notoriété du 08.09.1818).

4°) Françoise LEMAIGNEN veuve de François Philippe DEZAIRS, décédée à Paris, 32 rue de Penthièvre le 02 Août 1857 laissant pour héritiers ses petites nièces :

a) Adélaïde Auguste LEMAIGNEN, veuve de Alexandre Victor MEUNIER, maître de la Poste aux Chevaux à Beaumont-sur-Oise.

b) Victoire Aimée LEMAIGNEN, professeur de Piano, demeurant à Paris, Place Breda n° 10.

(Dossier Jean-Louis PORCHER).

5°) Un LEMAIGNEN, huissier à Blois en 1825.

 

 

Enfants des époux LEMAIGNEN-BARAULT

 

Les époux LEMAIGNEN-BARAULT eurent quatre enfants :

1°) Hélène Nelly LEMAIGNEN, née le 15 Mars 1824, décédée le 20 Septembre 1905. Elle épousa le 26 Juin 1848 Léon VALIN né le 20 Avril 1824, décédé le 17 Mai 1902. De ce mariage naquirent deux enfants :

- Paul VALIN, né le 03 Août 1849, décédé le 27 Juillet 1870.

- Marie Anne VALIN, née le 28 Octobre 1851 qui épousa le 26 Octobre 1869 Louis Charles BESNIER, né le 06 Juillet 1840, décédé le 06 Janvier 1892. Ils eurent un fils : André BESNIER, né le 21 Juillet 1870 qui épousa le 23 Octobre 1896 Yvonne PALLU DU CHAMPRENOU, née le 19 Juillet 1871. De ce mariage est né une fille : Charlotte BESNIER le 08 Octobre 1897 qui épousa le 09 Décembre 1919 André JOCHAUD DU PLESSIS, né le 30 Août 1890 : ils eurent deux enfants : Christiane JOCHAUD DU PLESSIS, née le 09 Octobre 1920 et Michel JOCHAUD DU PLESSIS, né le 05 Mars 1923.

2°) Adélaïde Nelly LEMAIGNEN, née le 21 Février 1825, décédée le 21 Octobre 1825.

3°) Henri René André LEMAIGNEN, né à Blois le 17 Septembre 1826, décédé le 1er Mai 1906. Il était Juge au Tribunal de Blois. Il épousa en premières noces le 20 Août 1855 Marie Georgette BILLAULT, née le 25 Juillet 1835, décédée le 13 Août 1857 et en deuxièmes noces à Orléans le 02 Avril 1861 Blanche FREMONT, fille d'Auguste Frédéric Mathilde FREMONT, Conseiller à la Cour Impériale et d'Agathe Elsa LEGIER, née le 05 Janvier 1841, décédée le 17 Novembre 1912.

 

La généalogie des ascendants de Marie Georgette BILLAULT (familles COUTURIER - ROUSSELET - JARGOIS - DESGRANGES - AMAURY - DUFAY et DONNAY) a pu être reconstituée depuis 1626 grâce aux titres de propriété de la Ferme de Villarceau, commune de Selommes qui appartenait à Madame Marie Jeanne Françoise LEMAIGNEN veuve de Monsieur Jacques Jean Charles TOURILLON et vendu par elle suivant acte de Me Jacques AUBERT du 24 Mai 1965 (voir la liasse de ces anciens titres et la généalogie établie ci-dessus).

 

Du mariage d'Henri René André LEMAIGNEN avec Georgette Marie BILLAULT est issu André René Marie Louis LEMAIGNEN, né à Blois le 04 juillet 1856, décédé à Blois le 27 Décembre 1951, demeurant à Blois et à Veillène, commune de Bauzy (41) à qui nous devons l'établissement de la généalogie de la famille LEMAIGNEN. Il épousa à Tours le 30 Septembre 1884 Alice FAYE, née le 18 Décembre 1864 décédée à Blois en Février 1943.

 

De ce mariage n'acquirent deux enfants :

- Marie Jane Françoise LEMAIGNEN, née à Bauzy le 22 Août 1885, demeurant à Angers, 25 rue d'Alsace qui épousa le 06 Février 1906, Jacques Jean Charles TOURILLON, né le 13 Avril 1877, Officier, décédé à Bordeaux.

Les époux TOURILLON-LEMAIGNEN eurent 5 enfants.

- Robert LEMAIGNEN né le 15 Mars 1893, Saint-Cyrien, Officier de Cavalerie puis Officier d'Aviation en 1914-1918. Président Directeur Général d'une Société d'Importation de bois exotiques, membre de la commission de la Communauté Economique Européenne, Commandeur de la Légion d'Honneur, Médaille de la Résistance. Il habite à Paris et à Veilléne. Il épouse le 1er Octobre 1913, Yvonne de NERVO, née le 29 Octobre 1898 dont il a 4 enfants :

a) Jean-Louis, né le 21 Août 1920, qui épouse à Paris le 31 Mars 1949, Nicole JEANSON.

b) Henri, décédé à la guerre d'Indochine en 1946.

c) Gérard, né le 28 Janvier 1923 qui épouse à Bruxelles le 14 Janvier 1948, Bernadette THYS et succéda à son père dans son entreprise.

d) Roger, époux de Roselyne LECOQ-VALLON.

 

4°) André Eugène LEMAIGNEN, né le 1er Avril 1833 décédé le 08 Novembre 1886. Il épouse le 16 Décembre 1861, Zéphirine PEAN, née le 19 Avril 1839, décédée le 26 Juin 1892. Il eut un fils unique : André LEMAIGNEN né le 20 Septembre 1872 qui épousa en premières noces le 30 Juin 1897 Thérèse ADELINE, née le 21 Août 1878, décédée le 09 Décembre 1905, et en secondes noces le 12 Septembre 1910, Marie MARTIN de la ROCHE, née le 18 Décembre 1866.

De son premier mariage il eut 3 enfants dont deux décédés en bas âge :

- Christine, née le 25 Juillet 1898, décédée le 10 Janvier 1910.

- Max, né le 27 Septembre 1905, décédé le 09 Avril 1906.

Le troisième enfant survivant est :

- Raoul LEMAIGNEN, né le 16 Juin 1900, demeurant au Gué-la-Guette, commune de Fontaine-en-Sologne épouse Jacqueline de CHANCHEVRIER et décède en 1965. Il eut une fille : Chantale LEMAIGNEN qui épousa Jacques Henri REROLE, fils de la soeur de Madame de GAULLE (mariage à Fontaine-en-Sologne du 03 Septembre 1966).

 

 

François LEMAIGNEN dit VILLORCEAU

 

On a vu que François LEMAIGNEN dit VILLORCEAU était l'un des quatorze enfants issus du deuxième mariage d'André Michel LEMAIGNEN, commerçant à Marchenoir puis à Mer et nommé en 1764 Secrétaire Greffier de la Juridiction du Point d'Honneur au bailliage et siège présidial de Blois, avec Marie Anne Victoire POIRIER.

Nous possédons une copie délivrée le 18 Vendémiaire An II de son acte de baptême : il est né à Mer le 07 Octobre 1773. Son parrain était François BERGERON-BIGNON et sa marraine Monique JUIFFRENET (qui fut peut être la femme ou la belle mère de son frère Jean Michel Louis LEMAIGNEN).

Il épousa en premières noces le 31 Octobre 1798, Marie Madeleine ELLEN (ou ELEN), née à Châteaudun le 1er Décembre 1778, décédée après un an de mariage le 06 Décembre 1799, à Paris, deux jours après la naissance de sa fille : Marie Louise Caroline Nanine LEMAIGNEN, née à Paris le 04 Décembre 1799. Faut-il en déduire que François LEMAIGNEN habitait alors à Paris ? On ignore quelle était sa profession à cette époque.

Marie Louise Caroline Nanine LEMAIGNEN épousa à Naveil où habitait alors son père ainsi qu'on le verra ci-après, le 06 Février 1821, Philippe FOUCAULT, fils de René Augustin FOUCAULT, Procureur au Parlement de Paris et de Marie Anne Félicité GIRAUD. Philippe FOUCAULT décéda à Paris le 20 Décembre 1866.

Les époux FOUCAULT-LEMAIGNEN eurent 3 enfants :

1°) Une fille, Marie Hélène, née à Paris le 06 Septembre 1828 décédée le 19 Septembre 1891 religieuse : "Soeur Marie de Saint Jean".

2°) Philippe François FOUCAULT, né à Blois le 11 Février 1822, décédé à Saint-Dyé le 29 Novembre 1870. Il épouse le 28 Août 1848 à Saint-Dyé, Marie BEGENNE, sa cousine, née à Saint-Dyé le 14 Juillet 1827, décédée à Tours le 05 Mars 1895, fille de Jean Raphaël Auguste BEGENNE et de Marie Elise ROGER (elle était issue du mariage de Charles Michel ROGER, notaire à Avaray avec sa deuxième épouse Sophie Adélaïde Françoise BRERONT). (Voir famille BEZARD-LEGRAND et ROGER, et voir ci-dessus : enfants des époux LEMAIGNEN-POIRIER).

Du mariage des époux FOUCAULT-BEGENNE est née une fille : Marguerite FOUCAULT, née à Blois le 25 Juillet 1849, décédée à Tours le 1er Octobre 1923 qui épousa à Saint-Dyé le 08 Août 1871 Henri Ernest DEMEZIL (voir famille DEMEZIL).

Quel imbroglio !

3°) Emile Eugène FOUCAULT, né à Blois le 06 Avril (ou 06 Mars ?) 1824, décède le 17 Mars 1907. Il épousa à Blois le 23 Septembre 1850, Adèle Jenny GAIGNAISON, née à Blois le 20 Novembre 1831, décédée le 05 Février 1917, fille de Laurent Félix GAIGNAISON et de Marie Adélaïde BOILEAU.

Adélaïde GAIGNAISON avait un frère dont les descendants furent notaires à Mondoubleau et à Saint-Aignan.

Du mariage FOUCAULT-GAIGNAISON naquirent 4 enfants :

- Marie Thérèse Odile FOUCAULT, née à Vendôme de 25 Décembre 1851 y décédée le 09 Septembre 1856.

- Emile Henry FOUCAULT, né à Vendôme le 21 Août 1855, décédé à Blois le 24 Septembre 1874.

- Philippe Albert FOUCAULT, né à Vendôme le 31 Mars 1859, décédé à Paris en Février 1938.

Il épousa à Paris le 21 Avril 1884, Marie TOURNADE de NOAILLAT, née à Paris le 16 Mars 1863, décédée à Paris le 23 Mars 1919.

- Paul Edouard FOUCAULT, né à Vendôme le 03 Avril 1864 y décédé le 24 Août 1867.

Du mariage FOUCAULT-TOURNADE de NOAILLAT naquirent 5 enfants :

a) Emile Henri, né à Colombes le 15 Septembre 1885 (sans descendance).

b) Adèle Hélène FOUCAULT, née à Paris le 02 Janvier 1887, décédée à Nice en Novembre 1949 : elle épousa le 19 Février 1906, Roger MARTIN DU GARD, romancier, né le 28 Mars 1881, demeurant au Tertre, commune de Béllême (Orne) auteur des "THIBAULT".

Il écrivait à Cécile AUBERT le 25 Septembre 1951 après le décès de Fernand LEMAIGNEN "Je prends bien douloureusement part à votre deuil et je sais qu'Hélène (sa femme) aurait été très émue par la mort de votre père dont le souvenir était lié à tous ceux de sa jeunesse, et dont mon beau père nous parlait souvent en évoquant le temps où il allait chasser à Périgny et festoyer chez ses cousins".

Il relate ensuite le décès de sa femme, décédée brusquement d'une congestion cérébrale alors qu'elle allait prendre le thé et ajoute : "après 40 ans d'intimité quotidienne, ma solitude est grande".

Roger MARTIN DU GARD et Hélène FOUCAULT eurent une fille : Christiane, née le 22 Juillet 1907 qui épousa le 31 Décembre 1929, Marcel de COPPET, né en 1881, ancien gouverneur de Madagascar. Ceux-ci ont deux enfants :

- Daniel de COPPET , né le 20 Mars 1933.

- Anne de COPPET, née le 03 Novembre 1935.

c) André FOUCAULT, né à Paris le 20 Octobre 1892, décédé à Paris le 02 mars 1897.

d) Suzanne FOUCAULT, née à Paris le 07 Décembre 1898, religieuse : "Soeur Marie du Cénacle".

e) Madeleine FOUCAULT, née le 24 Août 1902 qui épousa en 1932 ...... HENROTTE, sans enfant.

 

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, après le décès de sa première femme resta veuf pendant 8 ans et épousa en secondes noces Madeleine Eugénie FERRON.

L'histoire de la famille FERRON et notamment de Claude Joseph FERRON, père de Madeleine Eugénie a été retracée plus haut à l'aide de nombreux documents de famille et titres de propriété.

Nous possédons le contrat de mariage de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avec Madeleine Eugénie FERRON, reçu par Me Philippe Godefroi RENOU, notaire à Vendôme (Etude PARMENTIER-MARTINET) le 24 Janvier 1807.

Le mariage fut célébré le 06 Février 1807 à Vendôme.

Assistaient à la signature du contrat de mariage du côté de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU : son frère Pierre André Michel LEMAIGNEN, propriétaire à Blois et Gervais Auguste LENORMAND-MARTINIERE son beau-frère à cause de Agathe Rose LEMAIGNEN sa femme.

Du côté de Madeleine Eugénie FERRON (qui habitait avec sa mère à Vendôme, rue de la Grève) :

-Sa mère, Madeleine BRETON, veuve de Claude Joseph FERRON, ancien officier des carabiniers.

- Léonard Louis BRETON, greffier au chef au Tribunal Civil de Vendôme, son oncle maternel.

- Francis Nicolas BRETON, marchand à Vendôme, son oncle maternel et Marie PETRONILLE, sa femme.

- Marie Renée MARTELLIERE épouse de Francis Nicolas BRETON.

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU était alors "fermier de l'Octroi Municipal et de bienfaisance de Vendôme".

Il apportait en mariage 17.760 Frs, montant de ce qui lui revenait dans la communauté d'entre lui et sa première épouse conformément à l'Inventaire dressé le jour même du contrat de mariage par Me RENOU.

Madeleine Eugénie FERRON apportait : Deux fermes au Bois aux Moines, commune de Danzé (la Bourdinière et la Foresterie) qui appartenaient à son père, estimées 40.000 Frs. La Closerie de la Béguinière, commune de Naveil, dépendant de la communauté ayant existé entre ses parents, estimée 8.000 Frs.

De ce mariage naissent deux enfants :

1°) Eugénie Madeleine Victoire LEMAIGNEN, née à Vendôme le 24 Janvier 1808, décédée à Luneville le 24 Juillet 1828, qui épousera à Naveil le 11 Septembre 1827 (contrat de mariage Me RENOU du 09 Septembre 1827) Alexandre Auguste MIROIR, né à Laigle le 19 Avril 1787, Chevalier de la Légion d'Honneur, chef d'escadrons à Dôle, décédé à Naveil le 21 Juin 1851.

De ce mariage naîtra une fille unique : Augustine Odile Lucie MIROIR, née à Luneville le 11 Juin 1828 qui épousera à Naveil le 26 Octobre 1846 Ernest Antoine DEMEZIL (voir famille DEMEZIL).

2°) Léon LEMAIGNEN, né à Vendôme le 12 février 1809 qui épousera Emelie Marie Brigitte BEZARD, fille de Pierre Samuel BEZARD (voir famille BEZARD-LEGRAND).

 

Madeleine Eugénie FERRON, deuxième épouse de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, décède peu après la naissance de son fils Léon, le 23 Avril 1809, à Vendôme, rue de la Grève.

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU fait aussitôt dresser inventaire par Me RENOU les 3 et 4 Mai, 30 Juin et 1er Juillet 1809, à cause de la communauté de biens ayant existé entre lui et sa défunte épouse et au nom et comme tuteur naturel et légal de ses deux enfants mineurs, en présence de Léonard Louis BRETON leur subrogé tuteur. Il est intéressant de parcourir l'inventaire du mobilier garnissant la maison de la rue de la Grève et le linge de maison, les bijoux et garde robe de Madame LEMAIGNEN, le tout détaillé avec une minutie scrupuleuse.

Dans une cave, faubourg Saint-Lubin, louée par François LEMAIGNEN, il a été trouvé :

- 35 pièces d'eau de vie de Sologne,

- 23 pièces de vin rouge du cru de la Béguinière,

- 170 bouteilles de vin bouché.

L'inventaire se continua le lendemain 04 Mai à la Closerie de la Béguinière, commune de Naveil, ou l'on trouve encore 30 pièces de vin rouge.

Il résulte de la séance de cet inventaire du 30 Juin 1809 :

Que Madame veuve FERRON-BRETON devait à son gendre le montant de deux reconnaissances de dettes, l'une de 6.000 livres et l'autre de 1.533 livres. Qu'il était encore dû diverses créances dont une de 2.000 livres tournois due par le sieur ROGER-BREROND, demeurant à Avaray (voir famille BEZARD-LEGRAND ROGER = Charles Michel ROGER demandant à BEZARD-LEGRAND, son beau-père vers la même année, de payer une lettre de change qu'il devait).

Il semble qu'il n'y ait jamais eu aucune relation entre ces deux fortes personnalités que furent LEMAIGNEN-VILLORCEAU et BEZARD-LEGRAND, ce qui est assez étonnant étant donné qu'ils vivaient à la même époque et dans la même région et qu'ils étaient l'un et l'autre de riches propriétaires terriens.

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avait acquis au cours de son mariage les 5 sixième de la ferme de Mihaudouin, commune de Villeromain. Sa défunte épouse avait reçu en vertu d'une donation à elle faite par sa mère le 05 Novembre 1808, la Closerie des Saulettes, la Fermes du Bourg, les fermes du Bois aux Moines, le Bois de la Hutte et diverses terres à Danzé, la maison de la rue de la Grève et la Closerie de la Béguinière, commune de Naveil.

Le 12 Janvier 1813, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU fait réunir le conseil de famille de ses enfants mineurs pour leur nommer un nouveau subrogé tuteur par suite du décès de Léonard Louis BRETON, greffier du Tribunal de Vendôme.

Les membres du conseil de famille sont :

Du côté paternel :

- Pierre André LEMAIGNEN, marchand à Blois, leur oncle.

- Dominique César Florentin LEMAIGNEN, huissier impérial à Blois, leur cousin germain (de quel frère de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU était-il le fils ; ce n'est peut être que le fils de Jean Michel Louis LEMAIGNEN ou du 7ème enfant inconnu issu du mariage d'André Michel LEMAIGNEN-POIRIER).

- François AUCHER, marchand à Blois, leur cousin.

Du côté maternel :

- François Nicolas BRETON-MARTELLIERE, ancien marchand, demeurant au Temple à Vendôme, leur grand oncle.

- Denis BRETON, vigneron à Thore, leur grand oncle.

- François LEROY, vigneron à Thore, leur cousin germain à cause de Madeleine BRETON, son épouse.

Le subrogé-tuteur nommé par le conseil de famille fut Armand Sophie Aurélien DELAFORGE, propriétaire à la Creuzerie, commune de Danzé, ami de la mère des mineurs.

La réunion de ce conseil de famille et la nomination d'un subrogé-tuteur aux enfants mineurs issus du mariage de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU et de Madeleine FERRON n'était pas inutile, car leur père avait la lourde charge de la gestion de leur fortune qui comprenait outre les 5/6ème de la ferme de Mihaudouin acquise au cours de sa communauté, les biens propres de sa femme, à savoir :

Les fermes des Bourguinières (67 hectares), du Bois aux Moines (68 hectares), de la Foresterie (66 hectares), des Saulettes (33 hectares), du Bourg (34 hectares), des Brosses (17 hectares), le tout sur la commune de Danzé, la maison de la rue de la Grève à Vendôme, la propriété de la Béguinière, commune de Naveil et la ferme du Château, commune de Selommes. Une belle fortune terrienne !

A la suite de la réunion de ce conseil de famille il fut procédé devant Me RENOU, notaire à Vendôme le 12 Octobre 1817 au partage de la communauté ayant existé entre François LEMAIGNEN-VILLORCEAU et Madeleine FERRON (partage homologué par jugement du Tribunal Civil de Vendôme du 03 Janvier 1818). Les immeubles acquis au cours de la communauté (5/6ème de la ferme de Mihaudouin et 3 hectares 06 ares 20 centiares de terre au Bois aux Moines, commune de Danzé) furent attribués à François LEMAIGNEN-VILLORCEAU.

Quelques mois après son mariage avec Madeleine FERRON, il présentait une requête au Préfet de Loir-et-Cher afin de poursuivre certains cultivateurs du Bois aux Moines, commune de Danzé, qui voulaient s'approprier comme terre communale, les Usages du Bois aux Moines et que Claude Joseph FERRON son beau-père, avait fait défricher, les bénédictins de l'Abbaye de Vendôme les ayant laissés en friche de temps immémorial (soit une superficie de 15 arpents) - (Voir Histoire de Claude Joseph FERRON).

Il résulte un long procès, dont nous avons la volumineuse liasse de pièces de procédure.

Le 20 Février 1808, le Préfet du Loir-et-Cher autorisa les représentants de Madame veuve FERRON à contester les partages de communaux faits pendant "les troubles révolutionnaires" en vertu de la loi du 09 Ventose An XII.

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU obtint gain de cause par arrêté de la cour d'appel d'Orléans, et le 28 Juin 1814 intervint, par acte de Me RENOU, notaire à Vendôme un partage entre lui, agissant en qualité de tuteur de ses deux enfants mineurs et la dame veuve FERRON, habitant alors rue Ferme à Vendôme, assisté de Me MEREAUX, notaire à Vendôme, son conseil judiciaire, ladite dame ayant la jouissance des biens qu'elle avait donné à sa fille (épouse de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU) par acte de BUFFEREAU, notaire à Vendôme du 05 Novembre 1808, ensemble d'une part,

Et Claude François RICHARD, chef de bataillon, commandant d'armes à Vendôme, faubourg Chartrain, d'autre part, propriétaire de la Métairie du Bois aux Moines, du même nom que celle appartenant aux enfants LEMAIGNEN.

Aux termes de cet acte, les consorts LEMAIGNEN-FERRON et le Capitaine RICHARD, se sont partagés en pièce de terre que les cultivateurs des fermes voisines s'étaient appropriés et y avaient même construit des habitations. Il fut attribué aux Consorts LEMAIGNEN la ferme dite des Usages et les bâtiments de cette ferme qui avaient été construits par un sieur RICHER, tels qu'ils furent loués ensuite aux époux CHAUVIN. Un plan est annexé à ce partage.

François LEMAIGNEN-VILLORCEAU fit encore par acte de RENOU du 21 Mai 1808 l'acquisition de 3 hectares 06 ares 20 centiares de terres aux Bois aux Moines. Le 25 Mai 1811, il loue à Pierre GOEVIER la Métairie de la Foresterie, contiguë à celle des Usages.

Le 20 Mars 1813, il loue la ferme de l'Usage à lui attribuée en vertu du partage ci-dessus et le 30 Octobre 1814 Madame veuve FERRON loue pour 9 années aux cultivateurs qui les avaient défrichées les terres qui lui avaient été attribuées en vertu du même partage "pour les dédommager, autant qu'il est possible des coûts et peines que leur ont occasionnés ces défrocs".

Le 24 Décembre 1819, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU qui habitait précédemment à la Béguinière, et alors à Vendôme rue Saint-Jacques, loue la Métairie de la Foresterie (premier bail à fermage de cette métairie) à Louis PASQUIER et Marie Anne ESNAULT, sa femme.

Vers 1828, il établit de sa main une longue copie du relevé du cadastre fait en 1813 de ses propriétés de Danzé, et vers 1828-1830, il échange une correspondance avec la Compagnie d'assurance Mutuel contre l'Incendie de Loir-et-Cher concernant les assurances de ses divers immeubles, au nombre desquels figure, outre ceux que nous connaissons "la Maison du Pensionnat à Vendôme" : de quel pensionnat s'agit)il ? Nous détenons tout le dossier de ces assurances.

Le 06 Janvier 1832, il achète encore 1 hectare 44 ares 76 centiares de terre, dite "Le Parc" à Danzé qui dépendait primitivement de la Ferme du Bourg vendue par lui en 1822 à Julien BONVALET qui lui revend cette pièce de terre. Mais il revend peu après cette pièce de terre à son fils Léon.

 

Il est curieux de constater que parmi ces nombreuses propriétés immobilières ne figure pas la ferme de Villarceau, commune de Selommes, qui appartenait, on l'a vu à la famille AMAURY.

On se demande dès lors, d'où lui venait le surnom de "VILLORCEAU". C'est un mystère qui n'a jamais été éclairci. Il existe entre Beaugency et Josne un ville appelé "VILLORCEAU". Ce village n'étant pas très éloigné de Mer, Marchenoir et Talcy, région d'origine des parents de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, il est possible qu'il y ait possédé une terre.

 

 

Troisième mariage de LEMAIGNEN-VILLORCEAU

 

Madeleine Eugénie FERRON, deuxième épouse de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU était décédée le 23 Avril 1809.

Il se remarie en troisièmes noces le 17 Février 1811 avec Françoise Gabrielle Jeanne DESHAYES de BONNEVAL, née à Saint-Calais le 31 Janvier 1773, décédée le 08 Mai 1825, fille d'Antoine Charles DESHAYES de BONNEVAL et de Charlotte Françoise de ROTROU.

On se sait rien d'autre de cette troisième épouse. Où s'est-elle mariée ? Où est-elle décédée ? Il semble que les époux LEMAIGNEN-DESHAYES de BONNEVAL vivaient à Vendôme, rue Saint-Jacques notamment, peut-être aussi rue de la Grève où François LEMAIGNEN vivait en 1832 après le décès de sa femme.

Il n'est pas surprenant qu'on ne détienne aucun document sur Françoise DESHAYES de BONNEVAL car ils ont dû être conservés par la Famille ALARDET, ses descendants.

LA FAMILLE ALARDET

 

De son mariage avec Françoise DESHAYES de BONNEVAL, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avait eu une fille : Françoise Odile LEMAIGNEN, née à Vendôme le 22 Décembre 1811, décédée à Blois le 08 Avril 1839 (ou 08 Avril 1838). Elle épousa le 06 Septembre 1833, Charles Hippolyte ALARDET, né à Blois le 04 Avril 1802, Juge de Paix à Blois et à Vendôme, fils de Claude ALARDET, chef de Préfecture à Blois et de Madeleine GIGOU, décédé à Blois le 05 Février 1860.

Les époux ALARDET-LEMAIGNEN eurent deux enfants :

1°) Tiburce Paul, né le 02 Avril 1838, décédé le 04 Février 1852.

2°) Hippolyte Gabriel, né à Blois le 21 Février 1835, décédé le 25 Décembre 1913, qui épousa à Orléans le 15 Octobre 1860 Marie Adélaïde SEURRAT de la BOULAYE née le 29 Juillet 1838 (de André Félix SEURRAT de la BOULAYE et de Noémie SAVART), décédée le 1er Septembre 1923.

Ils eurent 5 enfants dont une fille décédée quelques jours après sa naissance et deux filles décédées célibataires (voir tableau généalogique).

Les deux autres enfants furent :

a) François Marie Tiburce ALARDET, né à Blois le 09 Décembre 1861, décédé à Orléans en 1935 qui épousa le 02 Août 1898 Jeanne de GAPANY, née en 1873, décédée le 19 Novembre 1912. De ce mariage sont nés quatre enfants (voir tableau généalogique).

b) Odile Noémie ALARDET, née à Orléans le 11 Mars 1864, décédée en Décembre 1931. Elle épousa le 30 Décembre 1891 Léon MALCOR, né le 19 Novembre 1852, décédé Général le 27 Août 1919.

Ils eurent 4 enfants, dont une fille qui épousa Jean DU PLESSIS DE GREDEDAN (voir tableau généalogique).

 

Les dernières années de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU

 

Nous n'avons pas beaucoup de renseignements sur ce que fut la vie de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU après la mort de sa troisième femme. Il habitait soit à Vendôme, soit à la Béguinière, commune de Naveil, puis à la fin de sa vie à Blois, sans doute avec son fils Léon.

Il semble qu'il ait été quelque peu marchand de biens. On trouve parfois dans de vieilles origines de propriété de terres des environs de Vendôme, la trace d'achats et de reventes faits par lui.

On a vu qu'il avait acquis, par deux acquisitions différentes les 5/6ème de la ferme de Mihaudouin, commune de Villeromain. On ignore quand il a revendit.

Le 12 Novembre 1817, le notaire RENOU lui vendait la moitié indivise avec lui de la Métairie de Françay près d'Herbault achetée par eux des héritiers GILLARD. Il est précisé dans cet acte que François LEMAIGNEN-VILLORCEAU se dispose à revendre cette métairie en détail.

Il vendit en 1822 et 1823, également en détail, la ferme du Bourg, commune de Danzé (actes Me RENOU).

Il résulte d'un compte sous seing privé du 19 Mars 1830 intervenu entre lui et son fils Léon, qu'il avait vendu diverses parcelles de terre sur la commune de Danzé.

Il avait également acheté, à une date indéterminée la ferme du Château à Selommes, qu'il revendit ensuite notamment à un dénommé PARDESSUS.

Enfin, nous avons la grosse d'un jugement d'adjudication rendu par le Tribunal de Vendôme le 19 Mai 1837 du bordage de la Tuilerie aux Bigotteries, commune de Danzé, saisi par un dénommé GALLOYER à qui François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avait consenti un prêt que le débiteur ne put rembourser.

Nous n'avons non plus aucun renseignement sur l'éducation qu'il donna à ses 4 enfants.

Le 1er Mai 1829, par acte de PELTEREAU, notaire à Vendôme il rendit compte de sa tutelle à ses deux enfants nés de son deuxième mariage et nous possédons une longue facture de lingerie achetée par sa fille Eugénie (qui épousera Alexandre MIROIR) de 1826 à 1827 (elle avait 19 ans) sans doute pour lui constituer son trousseau de mariage (mariage du 11 Septembre 1827).

Mais nous ne savons absolument rien de l'adolescence de sa première fille, future épouse FOUCAULT, ni de sa dernière fille, future épouse ALARDET.

Nous avons l'impression que François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avait une forte personnalité. Nous n'avons aucun portrait de lui (peut-être ont-ils été conservés par les FOUCAULT, les MIROIR ou les ALARDET ?). Nous conservons comme seule relique, une paire de bas blancs, de forte pointure.

Il décéda à Blois le 03 mars 1837, peut-être chez son fils Léon qui avait épousé le 29 Juillet 1833 Emilie Marie Brigitte BEZARD. Son fils lui acheta une concession dans le cimetière Saint-Nicolas à Blois.

 

 

Léon LEMAIGNEN

 

Nous avons vu que de son mariage avec Madeleine FERRON, François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avait eut deux enfants :

1°) Léon LEMAIGNEN, né à Vendôme le 12 Février 1809.

2°) Eugénie Madeleine Victoire LEMAIGNEN, née à Vendôme le 24 Janvier 1808 qui épousa à Naveil le 11 Septembre 1827 (contrat de mariage Me RENOU, notaire à Vendôme du 09 Septembre 1827) Alexandre Auguste MIROIR.

Cette dernière est décédée à Luneville, où son mari était en garnison le 24 Juillet 1828 après la naissance de sa fille Augustine Odile Lucie née à Luneville le 11 juin 1828.

Léon LEMAIGNEN fit sans doute ses études au collège de Vendôme dont le directeur était Monsieur DESSAIGNES à qui François LEMAIGNEN-VILLORCEAU avait remboursé le 08 Janvier 1808 le solde du prêt contracté par son beau-père (voir famille FERRON).

Il passait sans doute ses vacances soit à Danzé, soit plutôt à la Closerie des Béguinières, commune de Naveil, puis il fut étudiant en droit à Paris rue Mazarine, hôtel de Danemark n°38.

Désirant faire cesser l'indivision qui existait entre lui et Augustine Odile Lucie MIROIR sa nièce, à raison des biens dépendant de la succession de Madeleine Eugénie FERRON, sa mère, décédée épouse de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU demanda le partage judiciaire de ces biens (Léon LEMAIGNEN était alors mineur émancipé par son père et avait pour curateur à son émancipation François Simon MARTELLIERE, Avoué à Vendôme). Le Tribunal Civil d'arrondissement de Vendôme désignait des experts pour estimer les biens à partager et renvoya les parties devant Me PELTEREAU, notaire à Vendôme pour procéder au tirage au sort des lots. Ce tirage au sort intervint le 13 Janvier 1830.

Le deuxième lot échu à Léon LEMAIGNEN comprenait :

- la maison de la rue de la Grève à Vendôme,

- la métairie de la Foresterie au Bois aux Moines, commune de Danzé,

- une maison au Bourg de Danzé,

- 16 hectares 95 ares 94 centiares de terres à Danzé au Bois aux Moines,

- 175 ares 79 centiares de bois taillis, commune de Danzé,

- 70 ares 54 centiares de terre aux Usages du Bois aux Moines, commune de Danzé sur lesquels avait été construites quatre maisons sans autorisation,

- la métairie des Saulettes, commune de Danzé,

- la métairie du Bourg, commune de Danzé.

A ce procès-verbal est annexé le rapport des experts contenant la désignation très détaillée des biens partagés. C'est pas erreur que ce procès-verbal fait mention de la ferme du Bourg à Danzé qui avait été vendue en 1822 par François LEMAIGNEN-VILLORCEAU ainsi qu'il résulte d'une lettre de Me PELTEREAU du 28 Décembre 1854.

Léon LEMAIGNEN vendit la maison de la rue de la Grève par acte sous signatures privées du 1er Octobre 1835 (voir origine de propriété de cette maison = vente DESVAUX, acte Me AUBERT du 05 Décembre 1972) et il vendit, par divers actes de PELTEREAU, notaire à Vendôme du 07 Mars 1830 au 20 Mars 1830, donc très peu de temps après le tirage au sort du 13 Janvier 1830, la métairie des Saulettes, à 28 acquéreurs moyennant des prix totaux de 17.928,79 Frs mais il racheta le 04 juin 1831 une maison construite sans titre aux Usages du Bois aux Moines et en démolit une autre. Il ne conserva donc que les fermes de la Foresterie et des Usages au Bois aux Moines.

Le 07 Juillet 1838, il acheta à Auguste Charles Hyppolite ALARDET, veuf de Françoise Odile LEMAIGNEN et ses deux enfants mineurs, 86 ares 11 centiares de pré et bois, commune de Danzé dépendant de la ferme du Pré dont Madame ALARDET était propriétaire pour l'avoir recueilli dans la succession de Françoise Gabrielle Jeanne DESHAYE de BONNEVAL, sa mère, 3ème épouse de François LEMAIGNEN-VILLORCEAU, laquelle avait acquis cette ferme de BRETON, ancien greffier du Tribunal Civil de Vendôme.

Léon LEMAIGNEN soutint sa thèse de licence en droit à la faculté de droit de Paris le 10 Mars 1832. Il épousa le 29 Juillet 1833, à Blois, Emelie Marie Brigitte BEZARD, fille de Pierre Samuel BEZARD et petite fille de Pierre BEZARD-LEGRAND. Il devint alors avocat à Blois, où il demeurait rue Fontaine des Elus.

Il fit plusieurs acquisitions de terres à Périgny en 1836, 1837, 1838 et 1845.

De son mariage naquit à Blois le 27 mai 1835 un fils unique : Ernest Léon LEMAIGNEN.

Léon LEMAIGNEN est décédé à Saint-Maurice près de Paris le 29 Juillet 1854, six après avoir été hospitalisé dans une maison de santé, traumatisé par les événements de la révolution de 1848.

Nous avons déjà relaté tout ce que nous savons de la vie de Léon LEMAIGNEN depuis son mariage jusqu'à son décès, dans l'étude de la vie de Pierre Samuel BEZARD-PORCHER, son beau-père.

 

 

 

Ernest LEMAIGNEN-DEMEZIL

 

Avant d'étudier la vie d'Ernest LEMAIGNEN, fils de Léon, il est nécessaire d'analyser de nombreuses lettres de Madame veuve PORCHER-AUCHER (ou adressées à cette dernière) de son fils Jean-Louis PORCHER et de sa petite fille Laure DUTHEIL adressées à Ernest LEMAIGNEN.

Ces lettres nous permettent de retracer la vie d'Ernest LEMAIGNEN jusque vers 1870 et nous apportent des détails intéressants sur la révolution de 1848.

La plupart des lettres écrites par Jean-Louis PORCHER à Ernest LEMAIGNEN ont trait à l'affaire FAIZANT (ou SAINT-LOUP) dont il a déjà été question dans la vie de Jean-Louis PORCHER.

 

 

Vie d'Ernest LEMAIGNEN de 1845 à 1870

Correspondance de Madame veuve PORCHER-AUCHER,

de Jean-Louis PORCHER, de sa fille Laure DUTHEIL

avec Ernest LEMAIGNEN

 

En 18948, Jean-Louis PORCHER écrit une série de lettres à sa mère sur les événements politiques.

Le 16 Mai 1848, il lui écrit pour la remercier d'un don de 2.000 Frs qu'elle lui a fait (elle avait donné pareille somme à sa fille BEZARD) et s'excuse de ne l'avoir pas remerciée plus tôt à cause de :

"la pénible influence de tous les événements qui se déroulent (à Paris) à chaque instant. On commençait depuis une quinzaine à respirer ; les affaires reprenaient un peu ; on savait bien qu'une faction prise dans le peuple de Paris qui est admirable dans sa conduite et sa patience mais dans la populace, s'agitait. Mais elle est si minime qu'on se contentait de la surveiller. Enfin hier, dans son délire inconsidéré et imprudent, elle a fait une démonstration dont les journaux te donneront tous les détails. Tu y verras que tous les chefs ont été arrêtés et sont maintenant enfermés dans la forteresse de Vincennes et qu'en quelques heures la tranquillité a été rétablie. La Garde Nationale dont la très grande majorité est bien pensante, bien disposée. Sur près de 200.000 il y en a 180.000 sur lesquels ont peut compter. Joignez à cela celle de la banlieue de Versailles , de Saint-Germain, de Saint-Denis, etc dont on est sûr et on sera certain qu'il est impossible que la canaille prenne le dessus et qu'une seconde édition de 1793 est ce que nous ne pourrons plus voir. Mon opinion est que la tranquillité va se rétablir et la démonstration d'hier a mis les partis à même de se compter et celui des perturbateurs était en proportion si minime qu'ici personne ne s'en inquiète et on n'a pas l'air de se douter de ce qui s'est passé, on en rit. L'ordre ne put manquer d'arriver maintenant. La saine partie de la classe ouvrière le veut promptement et c'est la plus acharnée contre les émeutiers.....".

Cependant, le 24 Mai 1848 il écrit à son beau-frère :

"bien fin qui pourra dire comment cela finira. Espérons cependant que le bon sens l'emportera..... La Garde Nationale le veut ; elle est en grande majorité bien organisée et sauvera la France j'en suis persuadé. La cessation des travaux a amené au Gouvernement une quantité innombrable d'ouvriers aux besoins desquels il faut pourvoir, ce qui cause une dépense immense, et a occasionné l'impôt sur les créances hypothécaires....

Le 25 Juin 1848, il écrit à sa mère :

"Les journaux te donneront tous les détails des tristes et cruels événements qui se passent ici. Paris est dans la situation d'une ville en guerre. Tous les quartiers sont occupés militairement ; les forces y sont immenses et il en arrive à chaque instant ; il n'y a plus rien à y craindre ; force est restée à la Loi et le hasard préservé cette fois notre arrondissement des horreurs de la guerre civile. Je viens de te quitter un instant pour voir passer sous mes fenêtres plusieurs bataillons des gardes nationales des départements qui s'en retournent escortés d'un escadron de cuirassiers qui leur font une conduite d'honneur, ce qui prouve que la guerre est finie et que les nouvelles qu'on nous avait données ne sont pas fausses. Je t'écris maintenant au son du tambour d'autres gardes nationales des départements qui arrivent au secours de la capitale. C'est indiscutable, le partie de l'anarchie ne peut pas l'emporter, le voilà complètement désarmé et intimidé par la belle et courageuse conduite de la garde nationale de Paris et de notre brave armée. Les malheurs sont incalculables ; quelques gardes nationales de province y ont laissé quelques uns des leurs. Que de familles dans la désolation. Depuis deux jours nous n'avons vécu que l'inquiétudes et de craintes et sous le bruit du canon et de la fusillade la plus nourrie. Enfin, tout va s'appaiser .... La population semble renaître et prendre espoir, cependant tous les magasins sont fermés, aucune voiture ne circule. Ce calme est effrayant .... Les insurgés ont été traités de manière à n'avoir plus envie de recommencer. Communique, je te prie, ma lettre à BEZARD et à toute la famille".

Le 19 Juillet 1848, il écrit à nouveau à sa mère que Paris est toujours en état de siège, et gardé par de nombreuses troupes dans les forts aux alentours. Le commerce n'a pas repris et les étrangers ont déserté la ville. Les honnêtes ouvriers aspirent à la tranquillité, bien qu'un grand nombre de chômeurs fassent aux barrières des rassemblements inquiétants. Laure ajoute un petit mot affectueux à sa grand-mère et dit qu'ils viennent de recevoir une lettre de Léon à laquelle ils vont répondre.

Le 23 Novembre, il écrit à

"Mon cher BEZARD et mon cher Léon pour les remercier de leur invitation. Il embrasse bien tendrement le bon et intéressant Ernest". Il a retrouvé Paris bien tranquille malgré quelques menaces. Mais "le parti de l'ordre grossit tous les jours et celui de l'anarchie tombe complètement dans le discrédit. Un plus heureux avenir semble s'annoncer et nous promettre des jours plus heureux. Le Parti de Louis Napoléon Bonaparte a considérablement grandi depuis mon absence, et Cavaignac fait tout le contraire. Je vous engage à lire les journaux.... J'augure bien de l'avenir ...".

Le même jour il écrit dans le même sans à sa mère.

Le 31 Décembre 1848, Laure écrit à sa grand-mère pour lui souhaiter ses voeux de bonne année et lui confirme que le calme revient à Paris "les factieux sont aussi découragés que possible".

Le même jour elle écrit à sa tante BEZARD pour lui souhaiter que la Divine Providence lui accorde son bonheur et que le Maître de l'Univers accorde le calme et la prospérité à "notre pauvre pays".

"La confiance semble renaître dans les coeurs, la tourmente révolutionnaire vouloir se dissiper. Le commerce reprend un peu de vie. Les étrangers qui avaient fui reviennent dans notre grande cité. Mais hélas ! Paris sera loin d'être cet hiver ce qu'il était dans les temps meilleurs. Toutefois il sera moins triste qu'on ne l'aurait imaginé avant la nomination du Président. L'émeute est maintenant regardée ici comme chose à peu près impossible". Suivent des propos primesautiers "Y a t'il quelques mariages à Blois ? J'espère, ma chère tante, que votre santé et celle de tous les vôtres est bonne...." (Il semble donc que Léon LEMAIGNEN n'était pas encore malade).

La vie normale reprend son cours. Les agitations politiques sont passées. Le 05 Septembre 1849, Jean-Louis PORCHER remercie sa mère de l'envoi d'un "Quarteau" d'eau de vie qu'elle lui a envoyé dans un petit tonneau qui a contenu du vin rouge, ce qui donne à l'eau de vie "une petite couleur rosette qui fait très bien". Suivent des protestations d'amour filial et de ses bons sentiments envers sa soeur qu'il ne jalouse nullement comme sa mère l'a cru.

Le 19 Juillet, Laure écrit à sa grand-mère que son père est installé aux Blanchardières. Le 28 Août elle annonce sa visite à sa grand-mère à Blois avec sa nièce Emelie (LEMAIGNEN) et Ernest "qui sont à Paris depuis mardi. Nous prendrons le chemin de fer à 7 heures et demi du matin et serons à Blois vers 1 heure et demie ou deux heures. Emelie et Ernest repartiront le soir pour aller coucher à Périgny".

 

L'affaire DESAINT-LOUP et FAIZANT préoccupera énormément Jean-Louis PORCHER et sa fille Laure, ainsi qu'Ernest LEMAIGNEN depuis 1860 jusqu'en 1869 ainsi qu'en témoigne une correspondance soigneusement classée et numérotée par Jean-Louis PORCHER. Ces lettres émanent d'Ernest LEMAIGNEN, de sa mère ou de sa femme. Elles sont très intéressantes car elles nous donnent des renseignements précieux sur la vie à Périgny de 1860 à 1869.

Voici l'origine de l'affaire DESAINT-LOUP.

LE 29 Octobre 1843, Me Jacques Charles DENIS, notaire à Martizay, vendait son Etude à Me Jean-Louis DESAINT-LOUP, moyennant 50.000 Frs payable à terme. Cet acte fut déposé au rang des minutes de Me GARNEAU, notaire à Mennetou et Monsieur DESAINT-LOUP hypothèque au profit de Me DENIS sa métairie de Boisgueliet, commune de Vernou, arrondissement de Romorantin et une maison.

Suivant acte de Me MOREAU-ROUX, notaire à Blois du 21 Juillet 1846, Me DENIS céda sa créance à :

- Madame veuve PORCHER-AUCHER, moyennant 40.000 Frs.

- Monsieur Léon LEMAIGNEN, moyennant 10.000 Frs.

Me DESAINT-LOUP fit en 1853 et 1854 deux versements de 10.000 Frs chacun.

Me DESAINT-LOUP céda son Etude de Martizay à Me Jacques FAISANT, le 14 Septembre 1859, moyennant le prix de 50.000 Frs payable moitié 5 ans après sa prestation de serment et moitié 10 ans après, avec intérêts à 5 %.

Par acte sous signatures privées du 14 Janvier 1860, Me FAIZANT n'ayant pas encore été nommé notaire, Me DESAINT-LOUP céda à Monsieur Jean-Louis PORCHER, Madame veuve BEZARD-PORCHER, Madame veuve Léon LEMAIGNEN-BEZARD et Monsieur Ernest LEMAIGNEN la créance qu'il possédait contre Monsieur FAIZANT à concurrence de 30.000 Frs qu'il restait leur devoir, mais les créanciers conservaient tous leurs droits hypothécaires contre Monsieur DESAINT-LOUP.

Le 23 Juillet 1862, Emelie LEMAIGNEN-BEZARD écrit à Jean-Louis PORCHER son oncle :

"Dans ce moment ci il est question pour Ernest d'un mariage. Madame DEMEZIL me parlait depuis longtemps de sa nièce.... Ayant eu l'occasion de la voir, Ernest l'a trouvée bien et nous en avons eu des renseignements favorables. C'est une grande jeune fille de 22 ans, fort douce et qui aime beaucoup la campagne où elle est avec son père qui était autrefois Médecin à Couture près de Montoire mais qui a cessé à cause de sa mauvaise vue. Elle a de 90 à 100.000 Frs de dot et 200.000 à prétendre. Veuillez faire part de cette nouvelle à Laure. Si tout va bien se sera probablement dans le courant de Septembre".

Ernest LEMAIGNEN confirme à son oncle le 03 Août que son mariage va se faire. Il parle déjà du contrat de mariage.

Le 20 Août, il lui annonce que son projet avance et parle de l'affaire DESAINT-LOUP.

Le docteur DEMEZIL remercie Jean-Louis PORCHER, le 19 Octobre 1862 de son invitation et de sa présence au mariage de sa fille qui a été célébré à Couture le 23 Septembre 1862.

On prétend qu'Ernest LEMAIGNEN aurait voulu épouser Marie Georgette BILLAULT qui épousé le 20 Août 1855 Henri René André LEMAIGNEN dont sont issus Louis LEMAIGNEN et son fils Raoul LEMAIGNEN.

Le 18 Novembre 1862, Ernest LEMAIGNEN écrit à son oncle qu'il va exploiter sa ferme de Périgny après le départ de son fermier LEMEME et qu'il a acheté des moutons. Louise aime beaucoup le faire-valoir. "Il m'était bien difficile de rencontrer un personne ayant autant les mêmes goûts que moi, aussi tout est il à merveille. Monsieur DEMEZIL se trouve bien seul à Couture". Quant à FAIZANT, il ne paie pas !

Au début de Janvier 1863, il projette d'aller à Paris chez l'oncle Jean-Louis PORCHE, ainsi que l'annonce à Louise LEMAIGNEN dans une lettre charmante qu'elle signe "Votre petite nièce toute dévouée". Le voyage est d'ailleurs différé à fin Janvier.

Le 19 Mars 1863, c'est Louise LEMAIGNEN qui écrit longuement à Jean-Louis PORCHER pour l'entretenir des derniers versements qu'elle a eu bien du mal à obtenir de M. FAIZANT. Il se confirme que c'est un mauvais débiteur bien qu'Ernest LEMAIGNEN le fasse rappeler à ses obligations par Me DESAINT-LOUP. Louise défend âprement les intérêts de son mari dans cette affaire ainsi qu'en témoigne encore une lettre qu'elle écrit à son oncle le 26 Avril 1863. Elle nous apprend, par cette même lettre que le curé de Périgny est très malade depuis deux mois. C'est la seule lettre que nous possédons de Madame LEMAIGNEN-DEMEZIL. Elle est écrite d'une écriture élégante et d'un style parfait.

Ernest LEMAIGNEN s'adresse ensuite à Jean-Louis PORCHER pour lui demander conseil en sa qualité d'ancien notaire et d'homme avisé en affaires sur les frais qui lui sont réclamés par Me HASON, notaire à Chemille-sur-Deme pour son contrat de mariage et divers autres actes et qu'il trouve bien élevés. J. L. PORCHER échange une correspondance à ce sujet avec Me HASON.

Le 13 Juin, il l'entretient toujours de l'affaire FAIZANT qui écrit maintenant poliment, mais ne paie toujours pas, et il annonce à son oncle qu'"il pourrait bien se faire que dans 5 ou 6 mois notre maison eut un locataire de plus. Dîtes le si vous voulez à ma cousine (Laure) mais je vous confie cela en secret, car ce serait ennuyeux s'il en était autrement après publicité".

La correspondance se poursuit entre Ernest LEMAIGNEN et l'Oncle PORCHER à raison de presque une lettre par quinzaine. Il est impossible de les relater toutes. Dans chacune il est question de M. FAIZANT qui ne paie toujours pas, ou mal. Mais il est fort intéressant de parcourir ces lettres car elles nous retracent presque au jour le jour la vie d'Ernest LEMAIGNEN qui s'occupe de l'exploitation de sa ferme, parle de la moisson, des foins, de ses voyages à Couture chez son beau-père Monsieur DEMEZIL avec qui il a convenu de ne payer à Me HASSON que la moitié de ses honoraires ! Il nous donne des nouvelles de Périgny. Ainsi dans une lettre du 02 Juillet 1863 :

"J'avais oublié dans ma dernière lettre de vous faire part de la mort de Monsieur DUMIAU (le curé de Périgny). Il n'a pas laissé autant de regrets dans la commune qu'on s'attendait. Il a été maladroit au moment de sa mort, il n'a rien laissé pour l'Eglise et au sujet d'une petite quête de dix francs faite à l'occasion d'un mariage, et versée par mégarde dans le tronc, et que le Trésorier s'est entêté à ne pas lui rendre, il a voulu reprendre tout ce qu'il avait donné jusqu'à ce jour, ce qui n'était pas praticable, et s'est fâché avec le curé de Villeromain qui pendant sa maladie lui a rendu les plus grands services".

Ernest LEMAIGNEN présente sa femme à la famille AUCHER à Saint-Dyé et la famille LEMAIGNEN-BARRAULT "qui se sont tous montrés fort aimables".

En Septembre 1863, Périgny est toujours desservi par le curé de Villeromain et on ne sait quand un nouveau curé sera nommé.

Le 16 Novembre 1863, Ernest LEMAIGNEN annonce la naissance le matin même d'un gros garçon qui se porte bien. L'accouchement a été douloureux. "Nous avons décidé de l'appelé Edmond, saint du jour où il est arrivé. Pas de nouvelles de FAIZANT". Malheureusement, le 05 Décembre il contracte une angine striduleuse et le docteur SATIS de Vendôme le considère dans un état désespéré. FAIZANT vient d'envoyer 1.200 Frs. Le 10 Décembre il va un peu mieux. M. SATIS et M. DEMEZIL pensent que les parents en seront quittes pour la peur.

Le 03 Mars 1864, Ernest LEMAIGNEN annonce qu'Edmond a été baptisé, le parrain est M. DEMEZIL, la marraine Madame Léon LEMAIGNEN-BEZARD. Il enverra des dragées à Jean-Louis PORCHER. En Mai, Madame Ernest LEMAIGNEN va passer quinze jours à Couture chez son père avec Edmond qui se porte à merveille. "Notre pauvre commune est bien délabrée, nous n'avons plus de curé ; notre maire a donné sa démission ; on m'a proposé de le remplacer et j'ai refusé".

Le 06 Juillet 1864 il relate un accident survenu à Périgny :

"Nous avons éprouvé un bien grand malheur il y a une quinzaine de jours. Ce pauvre CHAILLOU revenait de Vendôme par le chemin de Biternas avec la grosse voiture à deux chevaux. En voulant sauter de la voiture sans arrêter ses chevaux, ce qui était une imprudence, il est tombé la jambe sous la roue et l'a retiré broyée ; la gangrène malgré les soins de M. SATIS et de M. CHAUTARD s'y est mise et il n'a vécu que 5 jours. Cela nous a fait beaucoup de peine car il nous était bien attaché". (C'était son domestique).

"Nous sommes dans les foins et nous commençons les seigles lundi prochain. Nous avons une année médiocre en blé généralement, mais magnifique en avoine et orge".

En Décembre tout le monde est malade à Périgny y compris la femme de chambre et Monsieur DEMEZIL distribue ses soins de chambre en chambre. Mais en Février 1865 tout le monde est rétabli et l'on joue à l'écarté avec le jeune nouveau curé qui est très gai.

En Mars 1865, Edmond marche tout seul et comprend tout ce que l'on dit.

Bien entendu, dans chacune de ces lettres il est toujours question de la créance de FAIZANT et nous apprenons par une lettre de Madame veuve Léon LEMAIGNEN qu'on a enfin pu prendre une inscription hypothécaire sur les biens de Madame FAIZANT qui vient d'être majeure.

Par une lettre du 31 Décembre 1865, nous apprenons que "le Chemin de Fer de Paris à Vendôme est en activité depuis trois jours. Nous n'aurons plus qu'une seule voiture pour aller de Vendôme à Blois. Il y a plusieurs trains matin et soir de Vendôme à Paris et nous pouvons maintenant nous regarder comme de votre banlieue". Cette lettre est suivie d'une lettre de voeux d'Edmond à son grand oncle ; mais si l'on songe qu'il n'avait que deux ans, il est évident qu'on lui a tenu la main.

Le 26 juin 1866, Ernest LEMAIGNEN annonce à Jean-Louis PORCHER qu'il va cesser son faire-valoir. Il ne garde que 25 arpents et les bâtiments de la bergerie et louera pour le 1er Novembre 1868 au fils GIRARD de TOURAILLES 120 arpents. Cela lui permettra de se promener davantage avec Jean-Louis PORCHER et de bavarder avec lui :

"Vous me dîtes que vous vieillissez, mais c'est une idée que vous vous faites. On ne se connaît pas bien soi-même. Vous êtes plus jeune et plus heureux de caractère que bien des jeunes gens de 20 ans que je connais ; en voulez-vous une preuve ; c'est que je me promènerai avec vous ; nous causerons gaiement et plaisanterons ; pas un moment d'ennui ; au contraire tous les petits jeunes gens d'aujourd'hui croient se donner de l'importance en se promenant méthodiquement sans jamais rire ni desserer les lèvres. Il n'y a rien de plus fort et de plus ennuyeux que tous ces jeunes gandins ; ce sont eux qui sont vieux de bonne heure".

En Mars 1867, il fait construire une grange à la ferme de Louise à Marolles, ce qui lui cause beaucoup d'embarras à cause de l'éloignement. Puis il emmène Louise et Edmond quelques temps à Couture. Il vient d'acheter "la maison d'André BIGUIER" et l'autre maison ainsi que le Clos "Nous voici donc tout à fait chez nous maintenant". (C'est la vieille maison qui se trouve à côté du boissier à Périgny).

Au début d'Octobre 1867, il passe quelques jours à Paris chez l'oncle PORCHER avec sa femme et son beau-père.

Le 23 Novembre 1867, il écrit à Jean-Louis PORCHER :

"Monsieur DEMEZIL et Louise sont revenus ici le Samedi 2 Novembre comme vous vous le rappelez, et le lundi 4 mon beau-père repartait pour Couture quand Edmond s'est plaint le soir de ce même jour du mal de gorge. Le mardi matin j'envoyais chercher M. SATIS et, comme il n'arrivait pas de suite, à son défaut, Mr CEGOGNE un nouveau médecin de Vendôme, lequel nous déclarait que nous avions à faire à une angine couenneuse et que le cas était fort grave. Ce fut aussi l'avis de M. SATIS. J'envoyais le lendemain chercher Monsieur DEMEZIL à Couture et pendant 10 jours notre pauvre petit Edmond a lutté contre la vie et la mort ; il fallait l'opérer matin et soir, environ 17 fois, encore n'avons-nous la conviction d'avoir réussi qui grâce à l'insufflateur du Docteur GUILLON de Paris, ancien médecin du Roi Louis Philippe que j'avais fait demander le Samedi matin par le télégraphe et que nous recevions le soir par le chemin de fer, moyen que mon beau-père avait lu dernièrement dans un journal de médecine, et qui, au moyen de nitrate d'argent a parfaitement réussi à brûler les couennes, mais seulement au bout de quatre ou cinq jours. Pour le moment il est beaucoup mieux, il se nourrit depuis deux jours, mais il est encore faible et ne peut se tenir debout dans son lit ; néanmoins on nous affirme qu'il est hors de danger.

Le 30 Novembre : "Edmond est maintenant hors de danger, mais il lui faudra beaucoup de temps avant d'être remis complètement. Tout ce qu'il boit lui ressort par le nez à cause de la paralysie du palais, ce qui arrive, paraît-il fréquemment à la suite de cette maladie là.

Le 22 Décembre : "Je ne vous ai pas donné de nouvelles plus tôt d'Edmond parce que j'espérai tous les jours que sa santé serait meilleure et qu'il entrerait enfin en convalescence, mais hélas il n'en est rien. L'angine est passée, mais il est d'une faiblesse extraordinaire et qui augmente tous les jours. Il ne peut se tenir debout et pas même soutenir sa tête sur l'oreiller en certains moments ; de plus il a de temps en temps la fièvre et tousse beaucoup toutes les nuits. Le médecin de Vendôme vient le voir tous les deux jours".

Edmond mourut le 26 Décembre 1867 d'angine diphtérique ou croup. On a conservé ses jouets.

Ernest LEMAIGNEN et sa femme en Janvier 1868 vont à Tours pour se changer les idées et poursuivent même leur voyage jusqu'à Bordeaux. Puis la vie reprend son cours à Périgny. Madame Léon LEMAIGNEN écrit le 22 Février qu'on a démoli les 3 maisons qui avaient été achetées l'année précédente et on commence les fondations de la nouvelle ferme (ferme LOISEAU). Elle va à Blois avec Ernest et Louise pour acheter des arbres pour planter le petit clos acheté d'André BIGUIER en 1867.

Pendant toute la maladie d'Edmond, il n'est plus question de Me FAIZANT dans la correspondance. Mais le 22 Mars 1868, Ernest LEMAIGNEN écrit qu'il a vu M. DESAINT-LOUP à Blois qui lui a dit que son Etude ne va pas et qu'il s'enfonce de plus en plus. Il aurait un acquéreur mais ne veut pas vendre son Etude.

Le 15 Août, il écrit à Jean-Louis PORCHER de Couture où il est venu passer quelques jours chez Monsieur DEMEZIL. Il vient d'apprendre que Me FAIZANT a vendu son Etude. Ils vont donc enfin pouvoir être remboursés de leur créance qui date de 1846.

Il est heureux que Jean-Louis PORCHER ait conservé toute cette correspondance relative à l'affaire FAIZANT, car elle nous permet de faire revivre la vie d'Ernest LEMAIGNEN, mois par mois de 1860 à 1868.

Dans presque toutes ces lettres, Ernest LEMAIGNEN transmet ses amitiés à Zéphirine qui était la domestique de Jean-Louis PORCHER et de Laure DUTHEIL qui vivait chez son père depuis la mort de son mari survenue le 08 Juillet 1859. Jean-Louis PORCHER décédera peu après cette correspondance le 05 Janvier 1871 à Vendôme (voir Jean-Louis PORCHER).

A Périgny vivaient toujours "les deux grandes mères", Madame veuve BEZARD-PORCHER et Madame veuve Léon LEMAIGNEN.

Monsieur DEMEZIL y venait assez souvent et le ménage LEMAIGNEN-DEMEZIL faisait de fréquents voyages à Couture et de temps à autre à Paris. Quand Monsieur DEMEZIL venait à Périgny, il se faisait généralement conduire par son domestique Pierre, qui couchait dans la cuisine actuelle qui communiquait alors avec l'écurie aux chevaux (garage actuel).

Ernest LEMAIGNEN après avoir exploité directement sa ferme de Périgny jusqu'en 1868, en loua la majeure partie et ne continua à exploiter que 25 arpents.

Il a agrandi considérablement le domaine de Périgny.

Le 02 Octobre 1860 (voir titres de propriété), il achète environ 25 hectares de terres sur Périgny et Villeromain.

En 1867, il avait acheté la maison d'André BIGUIER (vieille maison et boissier actuels) et diverses maisons démolies ensuite pour construire à la place en 1868 la ferme LOISEAU, et le clos situé devant ce qui permit d'agrandir le parc côté ouest.

Le 25 Janvier 1880, il achètera le Moulin Bézard pour 11.000 Frs, et le 26 Juillet 1886, la ferme de la Chevecière (ferme NOUVELLON) pour 61.000 Frs (20 hectares environ), et fit plusieurs autres acquisitions notamment le pré de l'Etang du Coudray, commune de Périgny et le bois Chaleau (5 hectares 77 ares 30 centiares), sur la même commune. Il avait acquis également le bordage de Beauregard, commune de Chemille-sur-Deme d'une contenance de 3 hectares 35 ares 84 centiares et diverses parcelles de terre sur la même commune pour agrandir la ferme de la Chaise qui appartenait en propre à sa femme.

 

 

 

 

 

Analyse de documents et lettres concernant

Ernest LEMAIGNEN

 

Les détails ci-dessus sur la vie d'Ernest LEMAIGNEN sont tirés de l'analyse de titres de propriété ou de la correspondance de Jean-Louis PORCHER et de Laure DUTHEIL, sa fille.

D'autres documents ou lettres classés sous le dossier "Vie d'Ernest LEMAIGNEN" permettent d'apporter des précisions complémentaires.

 

On sait que Ernest LEMAIGNEN était né à Blois le 27 Mai 1835 du mariage de Léon LEMAIGNEN et de Emelie Marie Brigitte BEZARD. Cela est confirmé par un certificat délivré par le Maire de Blois le 28 Mai 1835 certifiant que "le sieur Léon LEMAIGNEN-VILLORCEAU" avait fait constater la naissance de son fils la veille. Léon LEMAIGNEN avait-il donc conservé alors le surnom de son père François LEMAIGNEN-VILLORCEAU ? Il résulte de ce même certificat qu'Ernest fut baptisé à Saint-Louis de Blois le 04 Juin 1835.

Un "Bulletin de Mariage" délivré par le Maire de Couture atteste qu'il a contracté mariage à Couture le 22 Septembre 1862 avec Louise DEMEZIL, née à Couture le 27 Octobre 1839 et que le contrat de mariage fut reçu par Me DUBOIS, notaire à Couture le jour même du mariage.

César DEMEZIL "le bon docteur" père de Louise, décède à Couture le 03 Novembre 1869, moins de deux ans après le décès de son petit fils Edmond LEMAIGNEN. Le 08 Novembre 1869, Laure DUTHEIL écrit à Emilie LEMAIGNEN une longue lettre pleine d'affection et une autre à Louise LEMAIGNEN, sa belle fille.

"C'est en sortant hier pour me rendre à la messe d'une heure que le concierge m'a appelée, ma chère Amélie, pour me remettre ta lettre. J'étais loin de m'attendre à la triste nouvelle qu'elle renfermait. Le Pauvre Monsieur DEMEZIL que j'ai vu il n'y a pas deux mois au milieu de vous à Périgny paraissait encore si plein de vie et même de forces qu'il y avait tout lieu de croire qu'il avait à parcourir plusieurs années d'existence...... Tout le reste de la messe je n'ai donc pensé qu'à vous tous".

A Louise LEMAIGNEN elle précise :

"Vous trouvez cependant dans la famille de votre mari, une nouvelle famille remplie de sollicitude pour vous ; de bonnes et affectueuses belles mères au coeur dévoué ; un mari vous aimant vivement et excellent. Tout le monde n'est pas aussi bien partagé ici-bas".

Elle évoquait incontestablement sa séparation d'avec son mari Monsieur CAVILLIER.

 

Le ménage LEMAIGNEN-DEMEZIL attendait la naissance de leur second fils, Fernand, qui naîtra le 29 Août 1870. Madame LEMAIGNEN, assez fatiguée par sa grossesse, était venu habiter avec son mari dans une maison qu'ils avaient louée à Vendôme, 53 faubourg Chartrain. Au début de la guerre de 1870, ils avaient invité Jean-Louis PORCHER et Laure DUTHEIL à venir les y rejoindre pour éviter les aléas de la guerre à Paris, ce qu'ils firent d'ailleurs peu après, avant le siège de Paris (voir vie de Jean-Louis PORCHER). Mais le 13 Juillet 1870, Laure DUTHEIL déclinait cette invitation, son père trouvant, écrit-elle, que la capitale était plus sûres dans les événements du moment ; elle propose au contraire aux époux LEMAIGNEN de venir habiter avec eux à Paris, et elle ajoute :

"Oui les événements sont graves et marchent avec une rapidité qui a été aussi surprenantes qu'effrayante. Cependant on n'a point perdu, ici, confiance ni espoir dans l'avenir. Cette levée en masse et volontaire de tant de braves citoyens, cette grande unité du moment qui fait que la France n'a plus qu'un drapeau.... Dans le danger commun. Oui la France marchant tout entière pour refouler l'ennemi avec l'énergie et l'héroïsme dont elle a fait preuve dans nos revers, doit finir par triompher. Le repos pendant plusieurs jours des Prussiens qui auraient dû poursuivre leur marche, n'est-il point le signal, la preuve, qu'ils redoutent que la fortune les trahisse à leur tour ? Tout s'organise avec une grande rapidité ici. Paris et toute la France offriront une défense formidable dans bien peu de jours. Des généraux expérimentés, dignes de toute confiance dans leurs talents comme dans leur patriotisme, conduisent maintenant des héros, car ceux qui restent se battront comme ceux qui ont si glorieusement succombés. Tout cela a dû donner des craintes à l'ennemi ; on croit que son plan était, en nous étonnant par la rapidité de sa marche d'arriver de suite à Paris. Mais les pertes considérables qu'il a subies et qui sont de trois, dit-on contre nous deux, malgré son infériorité en nombre, et cette formidable armée à laquelle il ne pouvait pas s'attendre de notre côté, ne connaissant pas le patriotisme français, ont dû lui faire modifier le plan. Espérons donc que nous ne les verrons pas sous nos murs et que bientôt la France les refoulera au delà de nos frontières...".

Mais la guerre se poursuit. Paris est assiégé. Laure et son père viennent se réfugier à Vendôme et Jean-Louis PORCHER y décédera le 05 Janvier 1871, jour de l'entrée des Allemands dans cette ville.

 

Ernest LEMAIGNEN est allé à son domicile à Tours en Janvier 1871 et le 21 Janvier il lui est délivré un "Ausweiss" par le commandant Allemand de la Place de Tours pour l'autoriser, lui et sa mère, à se rendre à Vendôme.

A la fin de l'année 1870, alors que Fernand LEMAIGNEN avait environ 4 mois, le ménage LEMAIGNEN-DEMEZIL avait fuit avec leur fils devant l'invasion prussienne et resta quelques jours à Beauge, en Maine-et-Loire, à "l'Hôtel du Boeuf Couronné", où, faute d'autre nourriture on faisait manger de la soupe grasse au petit Fernand ; sa mère qui le nourrissait, ramassait des miettes de pain sur la table d'hôte, pour apaiser sa faim.

Lorsque Ernest LEMAIGNEN revint à Périgny il trouva sa maison occupée par des officiers prussiens, leur chien couché dans le berceau de Fernand, et ses barriques de vin en perce sur le billard du vestibule.

Puis la vie reprend son cours normal à Périgny, Ernest LEMAIGNEN est libéré de ses obligations militaires (qu'il n'a d'ailleurs jamais accomplies) le 31 Décembre 1875 ainsi que le constate un certificat du 5ème corps d'armée, subdivision de Blois du 10 Mars 1877.

Il continue à faire valoir lui-même ses fermes de Danzé depuis 1870. il avait loué ces fermes aux époux Simon JUBIN par bail du 24 Janvier 1861 ; mais ceux-ci ayant abandonné ces fermes par suite de leur incapacité, le bail fut résilié par jugement du Tribunal Civil de Vendôme du 16 Septembre 1870.

Il avait exploité en faire valoir direct la ferme des Portes Rouges à Périgny de 1862 à 1868. Il exploitera ensuite directement la Ferme de la Chevecière à Périgny qu'il avait acquise le 26 Juillet 1886 où il fera notamment de l'élevage de moutons. On raconte qu'il aimait rester accoudé de longues heures sur le bas de la porte de la bergerie à contempler ses brebis. Il se déplaçait beaucoup de Tours à Périgny et à ses diverses fermes en cabriolet à cheval.

Il résulte d'une lettre de Me DEHARGNE, notaire à Selommes du 27 Mai 1884 qu'il avait envisagé d'acquérir la propriété du Coudray à Périgny.

Il était particulièrement expert en chevaux et était fréquemment consulté par les cultivateurs à ce sujet. Il fait partie de nombreux jurys de concours de chevaux.

 

C'est un riche propriétaire terrien, ce qui ne va pas sans susciter des jalousies.

Le 17 Avril 1877, il reçoit une lettre postée de Vendôme du 16, à l'adresse suivant "Monsieur LEMEGNEN du MEULE PERIGNI prai SELOME", écrite au crayon et ainsi conçue :

"Nous vous prion sasocier ensemble de déposé 15 cents frant d'ici 3 jours aux monument du temple aux Derguair su la droite nous ferons un trou aux bout du mure et nous meterons un piquer et un papier aux bout. Si vous nen fait pas la somme dite, nous brulons vos ferme et votre chateau et votre vie gare à vous. Nen manque pas si vous voulai vivre".

Il s'agissait du monument commémoratif de la guerre de 1870 au Temple à Vendôme. On ne sait quelle suite fut donnée à cette menace.

 

 

 

Carnets de notes et livres de comptes

 

Ernest LEMAIGNEN tenait au jour le jour des carnets où il inscrivait ses achats et dépenses, ses déplacements à Tours, à Selommes, à Vendôme, à Périgny et dans ses différentes fermes. Il tenait peut-être cet atavisme de son arrière grand-père BEZARD-LEGRAND. Nous possédons ces carnets depuis 1870 jusqu'à son décès.

Leur lecture permettrait, à elle seule de retracer sa vie pendant cette période et nous apporte des indications précieuses, presqu'au jour le jour, sur ses activités et la gestion de ses biens. On y trouve des comptes avec ses fermiers, des ventes de peupliers et de chênes avec leurs cubages, des ventes de moutons, de laine, de vaches, les comptes des travaux aux bâtiments des fermes (par exemple, l'aménagement d'une chambre dans sa ferme de la Foresterie à Danzé, où il venait coucher dans un petit lit directoire en bois peint, qui existe toujours à Périgny), l'enregistrement de ses baux, l'achat de vin, le paiement de ses domestiques, les expertises de chevaux, etc...

Citons, par exemple :

"8 Décembre 1878 - A EPUISAY - Le Maître BRETON (fermier de Mons) m'a remis 600 francs. Le 12 Avril, le Maître BRETON m'a remis 300 francs et il doit me redonner les 300 francs qui restent dans le courant de l'année ; fera faire une porte pour un toit à porcs. Remettre des tuiles dans l'écurie et la maison et racommoder le puits ; une journée de maçonnerie à faire dans l'écurie".

Autres exemples :

"21 Juin 1887 - Reloué Léon pour 26 pistoles jusqu'au premier Novembre ; je lui ai payé aujourd'hui 28 journées pour 85 francs et je lui redevrai 20 francs le 1er Juillet. Donné aujourd'hui 10 francs de pièce ; il m'a débattu 3 jours pour lui ; donné 100 francs ; il me redoit 5 francs"

Ca n'est pas très clair, mais c'est bien pittoresque.

L'embauche des domestiques agricoles se faisait à la Saint Jean d'été et à la Saint Jean d'hiver. C'était la "Louée". Il s'agit de Léon BIGUIER qui était domestique d'Ernest LEMAIGNEN et l'aidait dans on faire-valoir. Il avait deux soeurs : Nathalie et Rachelle qui étaient également femme de ménage et femme de chambre chez les LEMAIGNEN.

Ernest LEMAIGNEN compte encore en "pistoles" , "sols" et "écus". Fernand, son fils, appellera encore la route de Blois à Vendôme : "le chemin pavé", et le carrefour avec la route de Périgny à Crucheray : "les quatre routes". Les vieux usages se maintiennent longtemps à Périgny.

"5 Décembre. Donné à Nathalie 30 francs d'acompte ses gages. Convenu avec Léon de 2 sols par mesure pour les battages de l'avoine, 3 sols pour l'orge et 2 sols par sac de blé battu pour les moutons".

"Trié les brebis le 8 Février 1889. Il y a 39 mères et agneaux dans les grande bergerie, 25 à côté dont 14 qui n'ont pas encore agnelé, et dans l'autre bergerie 29 pas pleines".

"J'ai payé 7 mètres de pierres à LUCAS et 145 francs pour sa taure".

"Assurance Le Phénix : faire un mandat".

"Le piano a été pris chez Monsieur CHENEVIERE le 08 Janvier 1889".

"La petite jument a commencé à manger des carottes".

"Convenu avec Léon qu'il bêchera les asperges et un carré pour les pommes de terre précoces ; je lui donnerai 1 sol et demi par arbre pour bêcher dans le verger et deux sols par peuplier aux sept-quartiers".

"22 Avril = J'ai mené la taure Chandie au taureau".

"Payé le 04 Février 16 francs pour les logements militaires pour l'année 1892, mais convenu seulement 12 francs pour l'année 1893".

"17 Décembre = vendu 2 peupliers à Liverieux au fils Pierre LEVE pour 30 francs".

"20 Décembre 1892 : parti de Périgny. Payé la journée de Léon BIGUIER et laissé 10 francs à Célestine".

"12 Janvier 1893 : bail Emile LAURENT à faire enregistrer avant le 1er Avril".

"A Vendôme, acheter "Le LOIR" (journal local) ; voir Monsieur GILLET et YVON le photographe".

 

 

Les dernières années de

Monsieur et Madame LEMAIGNEN-DEMEZIL

 

Le ménage LEMAIGNEN-DEMEZIL recevait fréquemment des amis et parents à Périgny, notamment à l'occasion de la chasse qui était la grande distraction d'Ernest LEMAIGNEN.

Ils partageaient leur vie entre Périgny et Tours où ils habitaient en 1901, 3 boulevard Béranger et où ils décéderont. Ils avaient habité à Vendôme, 28 rue des Quatres-Huyes vers 1880-1890 pour permettre à leur fils Fernand de faire ses études au lycée.

 

Le 14 Août 1882, Ernest LEMAIGNEN est nommé "Délégué Cantonal, pour faire partie de la commission chargée de surveiller et d'encourager la fréquentation des écoles dans la commune".

Il fut à diverses reprises Maire de Périgny.

Le 29 Avril 1897, Louise LEMAIGNEN écrit à Laure DUTHEIL :

"Qu'Ernest ayant eu froid au mois de Novembre en revenant de la chasse, a été pris dans les deux jambes de douleurs si vives et si aiguës qu'elles ne lui laissaient pas de repos ni de jour ni de nuit .... il marchait péniblement, puis cela à augmenté et lui a donné tellement de faiblesse qu'il tombait à tous coups dans la rue au moment où il y pensait le moins, de sorte qu'il n'osait plus sortir, nous avons passé un bien triste hiver ... Les trois médecins que nous avons consultés m'ont dit qu'ils craignaient une maladie de la moelle épinière et l'ont traité par l'électricité et les bains sulfureux ; puis ils lui ont ordonné les bains des Eaux de Lamalou (Hérault) où nous sommes depuis huit jours. Le Docteur de Lamalou dit que c'est un rhumatisme nerveux ..... Heureusement que j'avais Fernand qui m'a été d'un grand secours ... Il est si gentil et si complaisant.... Ici il emploie son temps à visiter les environs, faire des photographies, pêcher la truite qui est assez abondante dans l'Orb, et aussi à ramasser des plantes qui ne poussent pas chez nous ; la flore de l'Hérault est très jolie et très variée .....".

On remarquera le style alerte et élégant de cette lettre.

Ce séjour à Lamalou-les-Bains a dû durer assez longtemps car Laure DUTHEIL écrit à Madame LEMAIGNEN-DEMEZIL le 28 Juillet 1897, alors à Périgny, qu'elle a bien reçu une lettre qu'elle lui avait envoyée le 21 Juin relatant son voyage à Lamalou.

Le 29 Décembre 1897, Ernest LEMAIGNEN écrit à sa cousine Laure DUTHEIL, à la suite d'une lettre de voeux que lui adresse son filleul Fernand, qu'il pense que l'état de ses jambes lui permettra d'aller la voir à Paris, car il y a une grande amélioration, mais il a toujours les jambes enflées le soir.

Il profita de ce voyage à Lamalou pour acheter du vin du midi ainsi qu'il résulte d'une lettre de l'Abbé COMBES, curé de Lamalou du 29 Octobre 1897 et du fournisseur de ce vin du 12 Décembre 1898.

En 1901, Ernest LEMAIGNEN songe à marier son fils qui a alors 30 ans, un Monsieur de MONTENAY, demeurant à Chémery dans le Loir-et-Cher, lui écrivait en effet le 04 Septembre 1901 pour lui signaler une demoiselle Germaine de VERNEUIL dont les parents habitaient à Blois et au Château de Meusnes :

"Vingt ans, absolument charmante, jolie, fraîche et rose, intelligente, d'un caractère parfait, aimable et gaie, très pieuse, très pratique et simple dans ses goûts, sa nature douce et facile la rendrait très agréable à sa belle mère, elle aurait une dot de 2.000 francs de rente et plus tard 120.000 francs".

Le 06 Septembre 1901, Abel FOUCAULT confirme à son cousin ses bons renseignements sur cette jeune fille.

Malgré toutes ces qualités, le mariage ne se fit pas et Ernest LEMAIGNEN décéda sans avoir vu son fils marié.

Il décéda en effet peu après, à Tours le 17 Janvier 1903 à l'âge de 68 ans, d'une crise d'urémie.

Il ne semble pas avoir eu un caractère très gai. Il présente, sur ses photos, un visage bourru et ferme. Il n'était pas très grand. Il parait avoir toujours été inquiet. Il avait ressenti durement les diverses épreuves de son existence, décès de son père à l'asile de Saint-Maur, décès de son premier fils Edmond à l'âge de 7 ans, décès de son beau-père le docteur DEMEZIL, de son cousin et ami Jean-Louis PORCHER, de sa grand-mère BEZARD-PORCHER survenu à Périgny le 27 Juillet 1877 à l'âge de 84 ans, de sa mère, survenu à Tours le 14 Avril 1895 à l'âge de 82 ans. Sa cure à Lamalou-les-Bains en 1897 et un voyage qu'il fit en Italie avec sa femme et son fils en 1890 ne l'ont pas déridé.

Il se consacrait entièrement à la gestion de ses fermes qu'il gérait avec le plus grand soin et qu'il agrandit considérablement. Outre sa fortune immobilière, il possédait à son décès, d'après sa déclaration de succession, environ 270.000 Frs de valeurs mobilières en obligations de Chemin de Fer et rente 3 % sur l'Etat, outre des fonds Russes.

Il transmit à son fils son bon sens beauceron et l'amour de la terre.

Sa femme, Louise, lui survécu quelques années seulement et décéda à Tours le 28 Novembre 1907, d'un ulcère d'estomac à l'âge de 68 ans comme son mari.

L'un et l'autre sont enterrés à Périgny.

Louise LEMAIGNEN, qui était une très jolie jeune femme, très bonne et distinguée, ayant perdu sa mère 2 mois après sa naissance, fut élevée au Pensionnat des Soeurs de la Providence à Ruille où elle était une très bonne élève ainsi qu'en témoignent ses bulletins de notes de 1847 à 1853.

Le 30 Octobre 1852, Soeur Félicité, supérieure de Ruille s'étonne qu'elle ne soit pas encore rentrée à la pension :

"Cependant je me souviens que lors de votre départ, vous étiez dans l'excellentes résolutions à ce sujet. Vous me disiez, ma Soeur, je serai rentrée une des premières. Mais les premières sont venues, chère enfant, les secondes, les troisièmes ainsi de suite et je n'ai pas encore eu le bonheur de vous voir. Je vous attends tous les jours. Chaque coup de cloche vous présente à moi, je regarde, puis ce n'est point Louise. Pourquoi tardez-vous ainsi, bonne enfant ? Venez donc bien vite, c'est dans votre intérêt, etc....".

Louise a dû rejoindre cependant son pensionnat car on possède son bulletin de note pour 1853, mais le 20 Janvier 1854, la mère Soeur Félicité s'étonne encore de son absence à la rentrée scolaire d'Octobre 1853 :

"Que devenez-vous ma chère Louise. Je ne vous vois ni ne vous entends. Nous comptions sur vous à la Toussaint, puis à Noël. Or, ces deux époques sont passées, et de Louise, point. Vous êtes bien en retard mon enfant, votre instruction en souffrira, votre éducation encore plus. C'est fâcheux, ma petite fille, cela vous fera tort et à nous aussi. On dire : Melle DEMEZIL a été tant d'années au Pensionnat de Ruille et cependant elle n'est que médiocrement instruite .... Je vous avoue ma Louise, que nous ne sommes point satisfaites de vos vacances prolongées.... Ayez donc un peu de courage".

 

Pourquoi Louise tardait elle ainsi à rejoindre son pensionnat ? Elle avait alors 15 ans. Peut-être son père la retenait-il auprès de lui pour consoler son veuvage ?

 

Le 10 Janvier 1855, son oncle Ernest DEMEZIL, avoué à Tours lui écrivait qu'il regrettait que la mauvaise santé du Docteur DEMEZIL l'empêchât de venir avec elle plus souvent à Tours et ajoutait :

"J'apprendrais avec grand plaisir qu'il se déciderait à te placer dans la pension des Dames de Marmoutiers ; tu y serais sous tous rapports parfaitement bien. Tu es d'ailleurs parvenue à un âge où il est nécessaire de s'occuper de ton éducation qui nécessairement, a dû être fort négligée. Tu perds un temps précieux. Je comprends qu'il est toujours pénible pour toi de t'éloigner de ton père, mais quant tu seras à Tours, il viendra te voir, et d'ailleurs ne nous aurais-tu pas près de toi. Insiste donc, ma bonne petite nièce, auprès de lui pour qu'il prenne une résolution. Sa santé n'est pas assez bonne pour qu'il puisse s'établir assez longtemps à Paris, pour que tu puisses y terminer tes études et il est préférable que tu viennes ici .....".

Le docteur DEMEZIL a suivi le conseil de son frère et Louise a pris pension au Pensionnat des Dames du Sacré Coeur de Jésus à Marmoutiers de 1856 à 1857. Nous avons ses bulletins de notes : elle était très brillante en instruction religieuse et faible en histoire. Elle fit un poème sur la naissance de Jésus.

Le 03 Janvier 1860, Me Ernest DEMEZIL écrit encore à sa nièce pour déplorer que le Docteur DEMEZIL ayant loué un appartement à Tours, ne se décide pas à venir y habiter.

Louise DEMEZIL avait épousé Ernest LEMAIGNEN le 23 Septembre 1862.

Elle a toujours été traumatisée par la mort de son premier enfant Edmond.

Elle souffrait, à la fin de sa vie, d'une maladie de coeur, et son fils, Fernand, fit aménager à Périgny un "ascenseur" pour la monter du rez-de-chaussée au premier étage. Il s'agissait d'une cabine actionnée par un système de poulies installée dans une cage qui existe toujours dans le bureau de Périgny et qui aboutissait sur le palier du premier étage.

Elle a laissé un "testament" daté de Tours du 29 Mai 1906 où elle exprime son souci de ne pas avoir encore son fils marié :

"Connaissant la délicatesse de mon fils Fernand LEMAIGNEN et sachant combien il serait tourmenté s'il craignait de n'avoir pas rempli mes dernières volontés je me bornerai aujourd'hui à lui exprimer de nouveau mon désir de le voir marier à son goût, pourvu que la jeune fille qu'il choisira soit pieuse, bien élevée, ayant de l'éducation ; si elle n'a pas de fortune cela m'est indifférent. Il sera libre de faire ce qu'il voudra à cet égard. Mais ce à quoi je tiens essentiellement c'est qu'il ne se mésallie pas en prenant une personne sans éducation, une ancienne cuisinière ou domestique et dont le caractère et les sentiments ne pourraient être compatibles avec ceux que nous nous sommes efforcés son père et moi de lui inculquer dès son enfance. Quant à moi, je désire que mon corps soit mis dans une cercueil de fer blanc ou zinc et un de chêne, comme on l'a fait pour mon époux bien aimé et si vivement regretté. Si cette clause souffrait quelque difficulté, vu les mauvais temps que nous traversons, mon cher fils fera ce qu'il voudra .... Je désire être enterrée dans le cimetière de Périgny à côté de mon cher Ernest ayant à mes pieds la petite tombe de mon cher petit Edmond, ravi bien trop tôt à l'amour de ses malheureux parents et dont la mort a empoisonné leur existence"....

 

 

Ces lignes retracent de façon bien émouvante la vie de Louise DEMEZIL qui ne put jamais surmonter la peine que lui causa la mort de son premier enfant.

 

 

Fernand LEMAIGNEN

 

I - Jeunesse et adolescence jusqu'au décès de sa mère

Fernand Ernest LEMAIGNEN est né à Vendôme le 29 Août 1870, dans une maison, 53 faubourg Chartrain louée par Monsieur et Madame LEMAIGNEN-DEMEZIL.

Nous ne savons pas grand chose de ces premières années de jeunesse qu'il a dû passer à Périgny puis à Vendôme dans une maison, 28 rue des Quatre-Huyes que ses parents avaient louée pour lui permettre de faire ses études au lycée.

Son cousin, Albert FOUCAULT, qui habitait alors 2 Boulevard Raspail à Paris lui écrivait le 05 Janvier 1936 :

"Comme tous les vieillards j'aime à remonter le cours du passé et c'est avec plaisir et reconnaissance que j'évoque, de temps à autre, le souvenir, déjà lointain, de mes séjours de jeune homme à Périgny. Je te vois encore, adolescent, allant chaque jour tuer avec ta carabine, le moineau qui servait de repas quotidien à ton arrière grand-mère, Madame BEZARD, dont je revois, très nettes, la silhouette ridée et la petite taille. C'est un retour en arrière de 55 ans au moins. Mes souvenirs sont d'autant plus précis que l'affectueux accueil de ta grand-mère, ma marraine, et de tes parents faisaient pour moi de Périgny un paradis où j'échappais pendant quelques jours, à tous les ennuis qui faisaient un enfer du foyer familial où je grandissais".

Plus loin, dans cette même lettre qu'il faudrait citer intégralement, Albert FOUCAULT ajoute :

"Vous voilà déménagés ... Je connais bien le rue Traversière (à Tours) pour y avoir logé il y a quelques 65 ans chez mon oncle et ma tante GAIGNAISON, les parents de Marie BLONDEL et d'Edouard".

Les ennuis familiaux auxquels Albert FOUCAULT fait allusion étaient la mésentente entre ses parents. Madame Laure DUTHEIL avait écrit le 23 Avril 1892 que "le ménage FOUCAULT ne va pas bien".

Si les souvenirs d'Albert FOUCAULT remontent comme il le dit à 55 ans en 1936, cela les situe vers 1880. Or cette année là, Fernand LEMAIGNEN avait seulement 10 ans. Il est douteux qu'à cet âge il tuait des moineaux avec une carabine ; d'autre part, sa grand-mère BEZARD était décédée en 1877. Mais on sait que Fernand LEMAIGNEN, tout jeune tuait des moineaux avec un lance-pierres, ce qui fait qu'Albert FOUCAULT a pu commettre une certaine confusion.

En 1882, Fernand LEMAIGNEN est élève au Lycée de Vendôme. Il a conservé un carnet de notes "commencé le 24 Avril 1882" sur lequel on relève les passages suivants :

"Notes. Il n'y en a pas. Devoir : pour demain matin apprendre dans la Fontaine le Faucon et le Chapon jusqu'à "Tous les gens lui criaient". Pour version latine depuis : 'UT PRIMO" jusqu'à "JAM SINGULI".

Chaque jour ce carnet était signé par le professeur et par Ernest ou Louise LEMAIGNEN.

Et un autre jour :

"Copier 10 fois la Fable "L'ours et l'amateur des jardins".

"En géographie : la Mer Caspienne.

"Demain matin de 8 à 9 : Mathématiques ; de 9 à 10 : Latin.

"Jeudi matin ce sera fête ; il n'y aura pas de classes parce que ce sera l'ascension. La composition d'histoire sera remise au mercredi matin".

Presque chaque jour il y avait une version latine (DE VIRIS), de la grammaire française et des fables de La Fontaine.

"Sera puni s'il ne tient pas mieux son cahier" qui, effectivement était bien mal écrit.

"Il faut, à partir de maintenant mettre les dates en Allemand sur les devoirs d'Allemand".

En juin 1882 : "Ne sait pas un mot de ses verbes : n'apprend jamais ses leçons de grammaire latine".

"200 lignes mot à mot dans le devoir dont 100 d'hier soir et 100 de ce matin, tout cela pour vendredi pour avoir toussé à chaque fois et que si je recommencais on m'envoierait à la porte".

 

Fernand LEMAIGNEN manifestait déjà son caractère moqueur qu'il aura toute sa vie.

Vers l'âge de 16 ans il fut atteint d'une sorte de dépression et ses parents consultèrent le Docteur CHARCOT à Paris, qui conseilla des calmants, la vie à la campagne, et la cessation des études. En fait il cessa ses études en première et ses parents lui firent donner des leçons par un Abbé NOURISSON avec lequel Fernand LEMAIGNEN resta toujours en relation. Il poursuivit ses études au collège des Jésuites Saint-Grégoire à Tours où il était élève en 4ème en 1883-1884 ainsi que l'atteste son bulletin scolaire (devoirs religieux : presque très bien, conduite : presque très bien, application : bien, langue allemande : presque très bien, thème latin : 9, thème grec : 12, version grecque : 10, orthographe : 11 et 14, histoire : 12, arithmétique : 15. Vacances le 1er Août 1884 (rentrée le 2 Octobre). Ses parents avaient loué une maison, 3 boulevard Béranger à Tours.

La même année, il rédige un journal : "L'indépendant de Périgny" qui n'eut semble-t-il qu'un seul numéro en date du 1er Décembre 1884, relatant sur un ton humoristique des nouvelles de Périgny, et contenant de nombreuses plaisanteries, réclames et annonces facétieuses, qui méritent d'être entièrement lues.

Pour lui changer les idées, ses parents l'emmenèrent en voyage en Italie en 1886 et il a tenu une relation de ce voyage dans un carnet :

"5 heures départ de Périgny. Arrivée à Blois 7 heures. Départ de Blois le lendemain. Romorantin ; on voit plusieurs étangs. A Romorantin on change de voiture pour Vierzon. A Vierzon visite d'un fabrique de pointes, d'une verrerie et d'une manufacture de porcelaines. Départ pour BOURGES. On suit tout le temps le canal du Berry. Visite de la Cathédrale de BOURGES .... CLERMONT-FERRANT. Ascension du Puy de Dôme ..... NÎMES .... les Arènes .... Aigues Mortes. Plage sur la Méditerranée .... MARSEILLE .... TOULON .... CANNES .... MENTION. VINTIMILLE .... GENES .... PISE .... CIVITA VEECHIA .... Arrivée à ROME à midi 1/2. Visite de ROME ... NAPLES ... Fin du voyage".

Ils durent rentrer rapidement à Périgny, Madame LEMAIGNEN ayant eu de violentes hémorragies dues au retour d'âge.

A la fin du mois d'Avril 1887, il accompagne ses parents à Lamalou-les-Bains où son père est allé se faire soigner (voir vie d'Ernest LEMAIGNEN). Il consigne également dans un carnet quelques notes de ce voyage. Il va à la pêche et fait des photos.

Le 17 Mars 1887, il écrit à sa marraine Laure DUTHEIL, en lui envoyant sa photo en chasseur :

"La chasse est une de mes passions favorites. Je m'entends toujours très bien avec le professeur qui me fait travailler et j'apprends ainsi sans me fatiguer. Je m'occupe beaucoup de photographie ; j'ai depuis peu un appareil très joli et dont je suis très content. Je me propose de photographier Tours et ses environs et, une fois à Périgny, ce n'est pas les points de vue ni les personnes qui me manqueront. Papa et ma grand-mère sont à Périgny et nous les attendons pour dîner. J'ai été dimanche à une soirée chez un ami ; j'y ai dansé pour la première fois de ma vie cela m'a bien amusé....".

Le 29 Décembre 1894, autre lettre à sa marraine :

"J'ai fait comme vous le savez déjà un joli voyage ne Suisse qui m'a bien intéressé. Etant allé à GENEVE pour suivre un traitement hydrothérapeutique, je n'ai pas fait autant d'escursions que je l'avais désiré ; mais malgré cela je suis allé à CHAMONIX voir le Mont Blanc et sa charmante vallée jusqu'à ARGENTIERES. J'ai pris plusieurs photographies charmantes ; puis en revenant, nous avons visité BALE, BERNE, FRIBOURG, BELFORT et ORLEANS, m'arrêtant quelques instants quand je trouvais une vue à prendre..."

Le 21 Novembre 1897, il est chez son ami TAILLARDA, à La Noue, en Sologne et relate à "Mon Cher Petit Papa" ses exploits de chasse et signe "Ton petit gars qui t'embrasse".

 

Mais tous ces voyages et distractions ne semblent pas calmer complètement ses préoccupations métaphysiques et ses tourments religieux, car on trouve dans ses papiers une note écrite par lui au crayon le 29 Juin 1899 :

"Je prie mes parents de vouloir bien faire dire beaucoup de messes pour moi si je venais à mourir". Il avait alors 29 ans.

Depuis l'âge de 15 ans il accompagnait son père dans les visites qu'il faisait à ses fermes et s'intéressait vivement à la gestion des propriétés de son père et à l'aménagement du Parc de Périgny.

Il chassait presque tous les jours pendant les périodes de chasse ainsi qu'en font foi ses carnets de chasse (1895 - 1896 - 1913 - 1922). Il note qu'en 1895/1896 : il a tué 88 perdreaux, 4 lièvres, 19 lapins, 13 cailles, 1 râle, 32 grives, 1 merle de Corse, 32 sansonnettes, 1 corbeau et 333 alouettes.

Le 31 Décembre 1902, son ami TAILLARDA, demeurant à la Noue lui demande de venir au baptême de sa nouvelle petite fille dont Germaine PERRIER sera la marraine et lui relate longuement ses exploits de chasse au sanglier.

 

Monsieur Léonce TAILLARDA était un vieil ami de la famille LEMAIGNEN. Il avait été notaire à Saint-Dyé (où avait été notaire autrefois Charles ROGER. Voir famille ROGER) et était souvent consulté par les LEMAIGNEN. (Succession de Léon LEMAIGNEN, de Madame DUTHEIL, etc...). Il avait épousé Fany BERTIN qui était la soeur de Cécile EDMOND-PERRIER. Il eut 2 enfants : Alice épouse DEMONBYNE et Adrienne qui épousa Rémy PERRIER, frère d'Edmond. Ces derniers eurent 3 enfants dont Jeanne épouse PICOLI qui n'eut pas d'enfant.

Cécile PERRIER née BERTIN eut deux enfants : Germaine, décédée célibataire en 1907 et André PERRIER, Docteur en Médecine époux de Jeanne DUVERNE qui eurent pour enfant Jeannine PERRIER épouse d'Etienne PETIT.

Edmond PERRIER état veuf en premières noces de.... dont il eut deux enfants : Henri, décédé à 25 ans, célibataire et Louis, Conseiller d'Etat, qui eut deux enfants : Jocelyne et Gilberte épouse de Georges DERRAS (3 enfants : Guy, Yveline et Max).

Edmond PERRIER acheta la propriété de Dotton de la famille GRANDIN de l'EPREVIER sur les conseils de Fernand LEMAIGNEN.

Les familles LEMAIGNEN et PERRIER eurent des relations très intimes depuis lors (voir discours de Fernand LEMAIGNEN au mariage de Jeannine PERRIER).

 

Le 05 Janvier 1903, Fernand LEMAIGNEN reçoit une lettre de son cousin Albert FOUCAULT qui lui souhaite une meilleure santé pour son père.

Mais celui-ci décède le 17 Janvier à Tours, en son nouveau domicile, rue Bernard Pallisy. Après son décès Fernand LEMAIGNEN continue à vivre avec sa mère à Tours et à Périgny et à gérer ses propriétés.

Avant le décès de son mari, Madame Ernest LEMAIGNEN-DEMEZIL avait écrit le 23 Janvier 1902 une lettre à son fils qui était alors chez Monsieur TAILLARDA et qu'il est amusant de reproduire. Elle lui rappelle tout d'abord qu'il doit aller le lendemain :

"à un diner chez Robert ROUX. Joseph ROUX est venu hier soir faire un Wisth. C'est ton père qui, contre l'ordinaire, nous a gagné 94 sous. Henri MARTIN est allé mardi à la messe pour Louis XVI et le soir à la réunion royaliste où Monsieur SABRAND de PONTEVES avait invité presque tout le monde, même les dames. C'était au théâtre français ; la salle a été remplie et même bondée en un rien de temps ; on dit qu'il y avait 2 ou 3000 personnes. Il n'y a qu'un malheur c'est que Monsieur SABRAN n'a pas pu parler ni ses amis non plus ; leur voix était couverte par les cris "Vive la Sociale etc....". On imitait les cris de tous les animaux possible. Le résultat c'est qu'ils n'ont pu rien dire et qu'ils se sont retiré en criant : "Vive la France". Plusieurs dames ont eu grand peur. Ta petite mère qui pense continuellement à son petit gars".

 

Madame Ernest LEMAIGNEN-DEMEZIL décède le 28 Novembre 1907 et son fils Fernand se trouve désormais bien seul.

Il est à la tête d'une importante fortune immobilière.

Il résulte en effet de la déclaration de succession de son père et de sa mère (dossier Ernest LEMAIGNEN) qu'il possédait :

- Le bordage de Beauregard à Chemille-sur-Deme (4 Ha 03 ares 44 ca).

- La ferme de la Chevecière à Périgny (37 hectares).

- Le Moulin de Bezard (4 Ha 50 ca).

- 82 ares 72 ca de pré à l'Etang du Coudray.

- 2 hectares 29 ares 40 centiares de bois et terre à l'Enclos à Périgny.

- 5 hectares 77 ares 30 centiares de bois à Chaleau à Périgny.

Le tout acquis par les époux LEMAIGNEN-DEMEZIL.

 

- La propriété de Périgny (3 hectares).

- Environ 12 hectares de terre et bois à Périgny en diverses parcelles.

- La ferme des Portes Rouges à Périgny (80 hectares).

- La ferme de la Foresterie à Danzé (55 hectares).

- La ferme de l'Usage à Danzé (34 hectares).

- 93 ares 06 centiares de bois à Danzé.

Le tout propre à Monsieur Ernest LEMAIGNEN.

 

- La ferme de Mons, commune de Marolles-les-Saint-Calais (44 hectares).

- La ferme de la Chaise à Chemille-sur-Deme (68 hectares).

- Une maison à Couture.

- Diverses parcelles de terre, de prés et une cave à Couture (environ 3 hectares).

Le tout propre à Madame LEMAIGNEN-DEMEZIL.

 

La fortune mobilière comprenait un important portefeuille de valeurs de bourse (rente sur l'état, obligations de chemin de fer français. Chemin de fer autrichiens, etc....) d'une valeur alors d'environ 300.000 Frs d'après les déclarations d'une succession et en outre un grand nombre de valeurs Russes.

Après le décès de sa mère, Fernand LEMAIGNEN fit un voyage en Espagne dont nous n'avons aucune trace.

Ses passe-temps favoris étaient toujours la chasse et la photographie. Il avait des appareils de photographie très perfectionnés pour l'époque, que nous possédons encore et faisait même de remarquables photos en couleur (voir dossier correspondance : lettre du 23 Mars 1914 pour un nouveau procédé de photographie en couleur). Il obtint une médaille de bronze au club "Photo-Touraine" dont il était le fondateur avec l'imprimeur DELIS et le photographe LEFEVRE, le 1er Mars 1909 (dossier correspondance). Il développait lui-même ses photos dans un laboratoire qu'il avait installé dans le petit pavillon situé à côté de l'ancienne cuisine de Périgny.

Il organisait des "Rallies-photo" (déjà) en Vendômois et en Touraine (voir carnet de photos à prendre au cours d'un rallye, commentaires sur les sites à photographier et menu du déjeuner dossier "Photos"), et itinéraire d'une promenade de la Société Photographique dans Vendôme (correspondance 11 Octobre 1903).

Il continua pendant toute sa vie à apporter le plus grand soin à la gestion de ses propriétés dont il tenait des comptes réguliers, et il mit tout son amour propre à aménager le parc de Périgny dont il tailla avec art les allées jusqu'à son décès. En 1912, il avait fait enclore ce parc de treillage. En 1930, il fit poser des volets de fer à la maison d'habitation (facture LELEU serrurier à Vendôme : 6.500 Frs).

Il tenait journellement des carnets de comptes, comme son père, des agendas annuels de ses dépenses et des petits carnets de poches où il notait, au jour le jour, ses différentes activités, ses déplacements, ses achats, etc...

Le dépouillement de ces différents carnets qui commencent en 1903 (prenant la suite de ceux de son père) constitue une source de renseignements précieux pour retracer sa vie presque au jour le jour. Ces renseignements sont complétés par la nombreuse correspondance qui a été conservée de 1887 à son décès et par les nombreux documents de toute nature reclassés dans un fort dossier (chiens, chasse, autos, journaux, discours, oeuvres de bienfaisance, affaires municipales, etc...).

 

 

II - Projets et mariages

 

On a vu (vie d'Ernest LEMAIGNEN) que son père avait songé en 1901 à faire épouser par Fernand LEMAIGNEN une Demoiselle de VERNEUIL.

Le 06 Janvier 1904 son cousin ALARDET demeurant à Orléans, rue Drufin écrit à Madame LEMAIGNEN-DEMEZIL pour lui proposer "une jeune fille de notre parenté, pieuse, très bien élevée, très simple et naturelle de goût et de manières, intelligente et débrouillarde ; elle a fait son éducation au Sacré Coeur ; mais sa fortune n'approche pas celle de Fernand....".

Le 21 Avril 1904, Monsieur ALARDET précise que la jeune fille est de taille moyenne, d'un physique agréable et sympathique et qu'elle est musicienne. C'est une nièce de sa femme dont les parents habitent au Mans, 52 rue Bollée.

Le 19 Juin 1905, Fernand LEMAIGNEN reçoit deux lettres d'une jeune fille qui parait bien exaltée et dont le nom a été soigneusement effacé sur les deux lettres.

...."J'ose vous avouer que j'avais fait un rêve à votre sujet ; ceci je l'ai gardé pour moi ; je n'en ai parlé à personne si ce n'est à un Saint religieux pour demander des prières, mais sans vous nommer. J'ai cru un instant que ma sympathie était partagée, que Dieu nous avait destinés l'un à l'autre. Pour vous dire toute ma pensée, j'ai la conviction étrange mais profonde que votre bonheur est entre mes mains.... Si Dieu m'impose une autre vocation, j'emporterai mes regrets jusque dans le coeur de Dieu".

On comprend aisément que Fernand LEMAIGNEN n'ait jamais répondu à cette exaltée.

Le 09 Février 1908, Madame Alice DEMONBYNES, fille de Léonce TAILLARDA, propose à Fernand de lui faire rencontrer une de ses amies prénommée Yvonne.

Le 13 Avril 1904, une dame GARNIER propose à Fernand de lui faire rencontrer aussi sa nièce, Mademoiselle Cécile DASSARIS.

Le 05 Août 1909, Marie DEMEZIL propose à Fernand à la fois une jeune fille dont elle ne dit pas le nom, un chien et un cheval.

Le 19 Juillet 1910, une dame PERILLEAU, de Tours, transmet à Fernand LEMAIGNEN une lettre de son amie, une dame J. COLLIN demeurant au Mans :

"Etant donné tant de qualités chez ce jeune homme, le point faible ne sera jamais un obstacle au projet. Il est possible d'ailleurs que sa réalisation dissipe la petite tendance à la neurasthénie en faisant cesser le sujet d'une de ses plus pénibles indécisions et en plaçant près de lui la compagne révée, affectueuse et dévouée qui saura toujours le comprendre et lui remonter le moral aux heures difficiles. Mademoiselle Henriette rentre Samedi à Nantes. Monsieur LEMAIGNEN ne pourrait-il pas l'aller voir incognito mardi prochain 26 Juillet. Ce sera la Sainte-Anne, fête tout à fait de circonstance et Mlle Henriette ira à la messe de 7 heures et communiera à Notre Dame de Toutes Joies. Les places de Madame FOUQUERAY sont vers la moitié de la Chapelle, etc...".

 

Le 13 Juillet 1911, un dénommé CHAUVIN demeurant rue Rabelais à Amboise écrit :

"Les Dames GILLES vont à la messe à l'Eglise Saint Aignan. Elles se mettent à droite à l'Eglise et au dernier rang de la grande nef. Les deux soeurs ont généralement des costumes tailleurs en toile rayée bleu et blanc et de grands chapeaux de paille d'Italie blanche. Celui de l'ainée est garni de mousseline blanche sur la calotte et formant éventail derrière. Madame GILLES est plus petite que ses deux filles et toute mince. Elles partent Lundi pour Ault. Marchez de l'avant. 25.000 Frs de dot.

Le 13 Août 1911, Madame DEMEZIL incite Fernand LEMAIGNEN a épouser Mademoiselle Pauline MADAMET :

"Si tu te présentais, tu ne serais pas refusé, Mademoiselle Pauline te conviendrait sous tous rapports, pieuse, aimant la campagne, d'une bonne famille ; je ne puis que t'y engager".

Fernand LEMAIGNEN consulte l'Abbé MONTAGNE, vicaire général à Blois, qui lui dit que la différence d'âge n'a pas une grande importance (s'agit-il de Mademoiselle MADAMET ?). Nouvelle lettre de l'Abbé MONTAGNE du 29 Septembre 1911 : il ne comprend pas les hésitations de Fernand.

Le 28 Février 1912 et le 1er Mars suivant, Monsieur HENISSART, demeurant au Château de MAUGUE écrit :

Avez-vous l'intention de vous mariez. Acceptez-vous en principe une jeune fille très intelligente, brune, élevée en province ayant pour le moment 150.000 de dot et devant avoir un jour 400.000 Frs. Une soeur mariée à un notaire et 3 frères".

Dans la seconde lettre : "On ne peut pas dire que la jeune fille en question soit jolie ; mais elle est grande et a un certain chic et paraît très intelligente .... Elle est très pieuse, musicienne, elle a 25 ans mais l'esprit très mûr. Elle a un coeur excellent. Nous sommes parents et très liés".

On se demande pourquoi Monsieur HENISSARD qui était lui-même vieux garçon ne l'a pas épousée ?

Le 04 Avril 1912, un certain DELAS, demeurant à Amboise transmet à Fernand LEMAIGNEN une lettre d'un F. DELAS (son frère ?), lui indiquant que la Baronne de la Pagegie, demeurant à Candat-Bersac (Dordogne) à un soeur, Mademoiselle de CEZAC qui aurait une dot de 30.000 Frs. Elle a 29 ans et toutes les qualités.

Comme on le voit, les propositions de mariage ne manquaient pas pour Fernand LEMAIGNEN. Encore ne les connaissons-nous peut-être pas toutes. Mais Fernand LEMAIGNEN a toujours été un homme indécis et scrupuleux. Il n'arrivait pas à prendre une décision. Il avait cependant, à la veille de la guerre de 1914, 43 ans.

C'est sans doute à cette époque qu'il résume sur une feuille de papier les qualités comparées de deux candidates, entre lesquelles il n'a d'ailleurs pas choisi :

 

G (Mlle GILLES)

D (Mlle DESTENAY)

Santé : bonne - Père rhumatisant, brave homme, sérieusement élevée. Pieuse, intelligente. Douce de caractère. Fera ce qui lui plaira avec son mari. Verra la bourgeoisie. Jolie, âgée de 28 ans. Petite fortune. Bonne famille. Peint.

Santé : bonne - Père original, brave homme. Sérieusement élevée. Très pieuse. Intelligence supérieure. Bon caractère. Conduira son mari mais le conduira très bien. Chercherait plutôt à voir la Noblesse. Du charme, mais vilaine bouche. Agée de 34 ans. Petite fortune. Bonne famille. Relations plus élevées. Très bonne musicienne.

 

 

III - Activités diverses jusqu'en 1914

Ainsi que nous l'avons vu plus haut, les carnets que tenait Fernand LEMAIGNEN sont une source précieuse pour retracer presque au jour le jour ses différentes activités. Ils comment en 1903, faisant suite à ceux tenus par son père.

"4 Février 1903 : Voyage à PERIGNY. Payé à Monsieur le Curé messes de l'annuel et donné 5 Frs en plus pour tentures qu'il remettra au Sacristain. Payé Théophile ; on ne lui doit plus rien. Vu Désirée. Auguste HUET doit commencer le bois prochainement et fera comme à l'ordinaire. Valentin doit labourer pour l'avoine et dans quelques temps pour les betteraves. Il faudra fumer et je devrai voir, ou écrire à Léon BIGUIER pour charger le fumier. Pour l'avoine il faudra prendre à SELOMMES, chez PERRET, environ pour 20 Frs d'engrais. Valentin pourra le prendre ne même temps que le sien. TROUILLEBOUT doit réparer le trou du plancher du grenier chez le Me PETIT et replatrer par dans la chambre le trou du plancher. Il doit tirer des pierres derrières la charrue de Valentin mais sans faire aucun trou, pierres qui doivent servi' à faire le hangar chez le Me GIRARD. Le Me GIRARD a dû retirer aujourd'hui le sous seing privé enregistré. Je dois la moitié des frais. Sosthène doit remettre l'entourage au cimetière. Payé la note de Raoul à VENDOME (il s'agit des obsèques de Monsieur Ernest LEMAIGNEN).

Maman a payé les GREGOIRE jusqu'au 1er Janvier. Donné leurs étrennes aujourd'hui 5 Février. Reçu trois actes de notoriété de Me DEHARGNE".

Plus loin : "A mon dernier voyage à Paris en Février 1903, convenu avec le médecin d'une visite à Madame Du THEIL tous les 15 jours".

"En bon bois l'ormeau vaut 65 Frs le mètre cube, le chêne 70 Frs, le peuplier 30 Frs".

 

25 Avril 1903 : "Estimé le gros chêne de la Chaise 100 Frs et l'ormeau 40 Frs".

"Vendu 2 porcs à RETIF pour 205 Frs".

 

Suivent des notes pour le cubage d'un chêne.

 

30 Juin 1903 : "Voyage à DANZE. Il faudra émousser dans un an ou deux une partie de la couverture du côté de CHAUVIN. Le plancher de l'étable aux vaches a besoin d'être réparé. Me PILON demande à ce qu'on lui fasse deux petites écuries au pignon de la bergerie (6m x 2,50 et 2m de haut)".

 

19 Août 1903 : "J'ai battu ma récolte : 16 sacs 1/2 de blé 22 hectolitres 1/2 d'avoine ; j'ai donné 40 Frs au Me HERSANT pour nourir les hommes. Pour le repas de midi 1 Fr par homme et 2 Frs pour faire la cuisine, café compris. Pour le goûter 18 Frs.

 

5 Octobre 1903 : "Voyage à COUTURE. Ma mère a touché 311 Frs de Victor HERVE ; il ne doit plus rien. Le Me DUGUE n'a pas payé le fermage de l'année dernière pour la cave (25 Frs). J'ai estimé des peupliers, il y en a 27 en tout. Je crois que les gros sont bien vendus à 40 Frs".

 

30 Octobre 1903 : "Payé les gages de Rachel : 30 Frs".

 

3 Novembre 1903 : "Voyage à Mons : Ma mère a reçu de Me BRAULT 1.450 Frs. Il devra donc maintenant à partir du 1er Avril 1904.

Le billet de banque avec lequel j'ai payé Gustave LEBEL porte le n° 309 J 356".

 

10 Novembre 1903 : "Mis dans l'Etang du Coudray 500 carpes achetées 50 Frs".

 

12 Novembre 1903 : "Foire de Saint-Martin à VENDOME. J'ai payé la note de CHERAMY maçon à DANZE et celle de TRAVERS serrurier à VENDOME.

"Le hangar et les portes de la grange de Me GIRARD m'ont coûté 2.240 Frs.

"J'ai payé cette année pour réparation sur toutes mes propriétés 2.575 Frs.

"Léon BIGUIER : à partir de la Saint-Martin, les journées sont à 2F50".

 

23 Novembre 1903 : "Voyage à DANZE".

 

11 Décembre 1903 : "J'ai payé 40 Frs pour la location du coffre-fort à la Société Générale et 1 Fr pour l'assurance contre la non vérification des tirages des russes consolidés".

 

21 Décembre 1903 : "Payé 19 Frs une paire de bottines chez BOURDAIS".

 

24 Décembre 1903 : "Touché à VENDOME 600 Frs de Me PILON pour le fermage qui sera échu demain".

 

12 Avril 1904 : "Voyage à PERIGNY. J'ai accepté la présidence de la fabrique".

 

17 Avril 1904 : "Voyage à PARIS. Deux personnes s'intéressent encore à Madame du THEIL : Monsieur le Docteur de NOAILLES 3 Bld de Courcelles et la Comtesse FERRON à CELLES-SAINT-CLOUD".

 

9 Août 1904 : "Voyage à COUTURE. Ma mère a touché de Victor Hervé 200 Frs pour fermage des près échu au 1er Mars 1904 et 50 Frs pour 2 années de fermage de la cave. Convenu avec Victor HERVE de travaux à faire à la Maison de COUTURE".

 

26 Août 1904 : "Madame CAVILLIER DUTHEIL est décédée le 19 Août 1904. Sépulture le Dimanche 21. Le mardi inventaire sommaire en présence de Me DELAFON et de Me TAILLARDA. On a trouvé un testament léguant 40.000 Frs et différents objets à Henriette JANSKEN, daté de 1901, plus deux projets de testaments. Me DELAFON a emporté en son Etude les lettres, testaments, projets, valeurs, 2.000 Frs en billets de banque, etc... On a remis les bijoux et autres objets de valeur dans l'armoire à glace et la clef a été remise chez Me DELAFON. Henriette restera encore jusqu'à ce que je sois envoyé en possession par le Tribunal. Difficultés pour les bagues avec elle".

 

19 Octobre 1904 : "Voyage à PARIS. Fait l'inventaire avec le commissaire priseur et le Clerc de Me DELAFON. J'ai rapporté les bijoux et argenterie. Henriette m'a donné un reçu constatant qu'il ne lui était plus rien dû. Je lui ai donné 200 Frs pour gages depuis le 19 Août et averti qu'elle n'était plus à mon service à partir de ce jour".

 

13 Février 1905 : "Voyage à PARIS. Exhumation convenue pour le Jeudi 23. Versé à Me DELAFON notaire 2.500 Frs en compte pour droits de succession".

 

17 Février 1905 : "Démarches à VENDOME avec Monsieur le Curé, le Gardien du Cimetière, le Commissaire de Police pour l'inhumation de Madame CAVILLIER DUTHEIL et pour l'exhumation et l'inhumation dans la même tombe de Monsieur PORCHER, son père. Donné 200 Frs à Monsieur le Curé de la Madeleine pour être distribués à ses pauvres suivant le désir exprimé par Madame CAVILLIER dans son projet de testament".

 

6 Avril 1905 : "Voyage à PARIS. Toute la succession CAVILLIER-DUTHEIL est définitivement réglée. J'ai touché de Me DELAFON un chèque sur la Banque de France de 34.735,75 Frs dont j'ai été payé le même jour à ladite Banque".

 

7 Avril 1905 : "Déposé 30.000 Frs à la Société Générale. Intérêts 1 1/2 %. Ecrire 2 jours à l'avance pour les retirer".

"Il faudra procéder ainsi pour la pêche de l'Etang du Coudray loué par LAURANT. La veille à 4 heures du soir, lever la bonde d'un trou. Le lendemain matin à 6 H de deux trous et lever en grand à partir de 10 H 1/2 pour commencer la pêche à 1 heure du soir. Etre sur place de midi, car il pourrait passer des anguilles".

"Vaches au taureau : la petite le 15 Août 1903. La grosse le 15 Août 1904, à nouveau le 24 Août 1904, le 09 Septembre 1904 et le 29 Septembre 1904. La Petite le 2 Août 1905".

 

4 Novembre 1905 : "Voyage à COUTURE et à la Chaise.

Ma mère a fait remise à Victor HERVE de 200 Frs sur son fermage comme récompense de sa complaisance pour toutes nos affaires".

Victor HERVE était le frère de lait de Madame LEMAIGNEN qui était toujours restée en excellents termes avec lui. Il s'occupait de la gestion de leurs immeubles de Couture.

 

16 Décembre 1905 : "Voyage à MAROLLES. Reçu pour ma mère de Me BRAULT la somme de 1.200 Frs pour fermage échu à Pâques 1905. Vu le même jour le couvreur RENOU de SAINT-CALAIS".

C'est son fils qui était encore couvreur pour la ferme de Mons en 1970. Longues précisions sur les travaux à effectuer. Il est déjà question d'acquérir le ravin constituant l'ancien chemin de Mondoubleau, qui fut acquis en 1974.

 

23 Décembre 1905 : "Voyage à PERIGNY. retrait de 30.000 Frs déposés à la Société Générale sur succession DUTHEIL et achat de 30 titres" (il n'est précisé la nature de ces titres).

 

Mardi 23 Janvier 1906 : "Il y a 6.000 Frs en billets de banque dans le coffre de la Société Générale".

 

12 Mars 1906 : "Mis mille tanches dans l'Etang et 1000 carpes".

 

9 Juin 1906 : Liste de l'Argenterie possédée par Fernand LEMAIGNEN.

 

2 Décembre 1907 : Paiement de diverses factures consécutives au décès de sa mère.

 

26 Octobre 1908 : "Passé Bail avec BONVALET pour la ferme de la Chevecière. Il entrera en Mai 1909".

 

20 Avril 1909 : "J'ai été chercher la jument. Arrivée à Tours le 21".

 

13 Juillet 1910 : "Acheté à M. YVON une jument roanne pour 1.750 Frs et ma jument".

 

4 Avril 1911 : "Payé la cuisson de 4 pains au boulanger de SELOMMES".

 

21 Février 1912 : "Payé une langouste à Monsieur POITEVIN : 10,50 Frs".

 

1er Mars 1912 : "Versé à Monsieur le Curé de SAINT-GATIEN la somme de 200 Frs (160 Frs pour le denier du culte et 40 Frs comme aumone de carème)".

 

1er Juillet 1912 : "Le ménage GUILLON est entré à mon service : 95 Frs par mois".

"A partir du 1er Août 1912, MATIGNON, boulanger à SELOMMES me donnera 10 pains pour les 100 livres de farine et je lui donnerai 0 Frs 15 de cuisson par pain".

 

21 Février 1913 : "Touché à la Société Générale 3.356 Frs pour coupons Octobre et Janvier" (le portefeuille de Fernand LEMAIGNEN consistait principalement en obligation de Chemin de Fer).

 

1er Avril 1913 : "Payé à François et Joséphine le mois de Mars 1913" (il s'agit du ménage GUILLON engagé le 1er Juillet 1912).

 

25 Juin 1913 : "J'ai payé le reste de mes impôts au Percepteur de SELOMMES: 472 Frs 79 (sauf les prestations en nature)". Il avait été versé un acompte de 500 Frs le 4 Février 1913.

 

1er Août 1913 : "Payé les gages de Ludovic et Marguerite" (ce sont des jardiniers de Périgny qui resteront à son service jusqu'au décès du mari vers 1936 : la femme continuera à être employée beaucoup plus longtemps).

 

20 Juillet 1914 : "J'ai acheté un caleçon d'hiver tout neuf".

 

Bien entendu il ne s'agit là que de quelques extraits de ces carnets. Les annotations sont presque quotidiennes. Nous ne les avons analysés ici que jusqu'à la guerre de 1914, mais Fernand LEMAIGNEN continuera à les tenir jusqu'à son décès.

Comme on vient de le voir ces carnets nous donnent des indications précieuses et parfois amusantes sur sa vie.

Il est cependant nécessaire de compléter ces renseignements par ceux puisés dans sa correspondance ou dans différents documents.

Il résulte des registres où Fernand LEMAIGNEN tenait également au jour le jour, le compte-rendu de ses activités à la mairie de Périgny, qu'il avait été élu Conseiller Municipal le 1er mai 1904. Il le resta sans interruption jusqu'en 1944. Il a été maire de Périgny, sans interruption du 10 Décembre 1919 jusqu'en 1944 (registres à la date du 18 mai 1925).

Le 16 novembre 1905, un dénommé BAILLY, demeurant 47 rue Laffite à Paris demande à Fernand LEMAIGNEN "de venir voir ses quatre beaux Pastels". Fernand LEMAIGNEN lui répond : "Ces pastels ne sont nullement à vendre ; à aucun prix je ne consentirai à m'en dessaisir, tenant à les conserver comme souvenir de famille".

En réalité ce ne sont pas des portraits de famille et Fernand LEMAIGNEN n'a jamais pu savoir, malgré ses recherches quel membre de sa famille les avait achetés.

Un conservateur des Musées de Versailles lui écrit le 09 Avril 1907 : "J'ai montré à Monsieur de NOLHAC les photographie de vos pastels. Ils n'ont jamais fait partie des collections de Versailles. Ils ont le caractère d'Oeuvres de DROUAIS ou de Madame VIGEE-LEBRUN. Ils représentent peut-être des habitants du Château de Ménars vers 1780".

Le 29 Novembre 1906, il reçoit en sa qualité de Président de la fabrique de Périgny, une circulaire du Préfet de Loir-et-Cher adressée à "M. le Président du Bureau des Marguilliers de la Fabrique de Périgny" concernant la remise des fonds de la paroisse au Receveur des Finances, en conséquent de la séparation des Eglises et de l'Etat (voir dossier documents divers).

25 Août 1907 : Décès de Germaine PERRIER à Dotton, à l'âge de 21 ans.

Le 23 Septembre 1907, Héloïse HERVE (femme de Victor) écrivait à Louise LEMAIGNEN-DEMEZIL donnant des nouvelles de Couture avec de nombreux détails très pittoresques sur les habitants de Couture qu'avait connus Madame LEMAIGNEN.

Le 22 Décembre 1907 Fernand LEMAIGNEN reçoit une lettre de son ami le Docteur COMPAIN d'Amboise l'invitant à chasser en forêt d'Amboise.

Le 07 Janvier 1909, l'Evêque de Blois l'autorise à louer le Presbytère de Périgny sans encourir les fondres de l'excommunication.

Le 29 Juin 1909, Me DELAGRANGE, notaire à Blois lui indique que M. Pierre LAURAND achète la ferme du Coudray et qu'il n'acceptera pas de renoncer à cette acquisition même avec une différence considérable sur le prix d'ensemble de la propriété du Coudray que Fernand LEMAIGNEN aurait désiré acquérir.

Le 27 Décembre 1910, Me BREJON, notaire à Couture lui donne congé pour le 1er Novembre 1911 de la maison de Couture dont il était locataire.

Le 23 Juillet 1912, son ami Me TAILLARDA, notaire honoraire demeurant à la Noue en Sologne lui annonce qu'il lui doit 3.000 Frs et que cette somme doit lui être remise après sa mort. Fernand LEMAIGNEN a cherché à savoir de quoi il s'agissait mais il semble qu'il ne l'ait jamais su et n'ait jamais encaissé cette somme.

Le 06 Février 1914, Fernand LEMAIGNEN reçoit une lettre circulaire d'un héraldiste de Paris offrant de lui fournir un fac-similé du brevet armorié délivré par Louis XIV à un ancêtre LEMAIGNEN, enregistré à l'Armorial Général de France.

Le 04 Juin 1914, Fernand LEMAIGNEN loue sa maison de Couture aux P.T.T. qui en resteront locataires jusqu'en 1972.

 

Fernand LEMAIGNEN, comme on le sait, partageait l'année entre Périgny et Tours où il habitait, 78 rue Bernard Palissy, après la mort de son père, puis à partir de la fin de l'année 1913 ou début 1914, 28 rue Jules Simon.

Il venait généralement à Périgny à partir de Pâques et y restait tout l'automne pendant la saison de chasse.

Il avait continué à faire valoir la ferme de la Chevessière comme son père, mais il la loua en 1909 à Optat BONVALLET qui en demeura fermier jusqu'en 1952.

 

IV - La guerre de 1914

Fernand LEMAIGNEN est mobilisé le 10 Août 1914 à la 5ème section d'Infirmiers et affecté à l'hôpital militaire aménagé dans le lycée de Vendôme.

Le 04 Août 1914, sa jument avait été réquisitionnée par l'autorité militaire pour 1.050 Frs (carnets). Il ne lui restait plus que sa bicyclette pour se déplacer et il n'achètera une auto qu'en 1916. Il devait utiliser aussi, pour ses déplacements pendant cette période, les tramway de Loir-et-Cher, aujourd'hui disparus; qui lui permettaient de se rendre à Couture, à Danzé et à Saint-Calais.

Dès le jour de sa mobilisation il est autorisé à "coucher en ville". Le 22 Août il lui est accordé une permission de 2 jours pour se rendre à Périgny "le militaire devra être rentré le lundi 24 Août 1914 à 8 H 1/2".

Il résulte de ses carnets que le 05 Août il avait compté "ses réserves : 330 pièces de 20 francs + 640 pièces de 40 Frs + 1 rouleau de 500 pièces et un rouleau de 1000 pièces = 2470 + 1000 Frs dans le portefeuille par billet n° Z 740-514". C'était un magot confortable !

Au début de la guerre il note sur un de ses carnets :

"A notre aile gauche, l'ennemi parait négliger Paris pour poursuivre sa tentative de mouvement débordant. Il a atteint la Ferté sous Jouarre, dépassé Reims et descend le long et à l'ouest de l'Argonne. Cette manoeuvre n'a pas plus atteint son but que les jours précédents. Maubeuge, violemment bombardé, résiste toujours".

"Le Tzar s'entend avec la Pologne. Les Russes bousculent les Autrichiens. 1000 prisonniers hier, 500 avant hier ; nous avons pris des canons de gros calibre, des canons de campagne, un convoi de 10 camions, plusieurs centaines de chevaux. Les français ont remporté un gros succès à DINANT. Ils ont forcé les allemands à repasser la Meuse. Des allemands se sont noyés et un régiment de chasseur les a poursuivis".

C'est à peu près la seule annotation que nous trouvons sur les opérations de la guerre dans ces carnets.

Le 21 Septembre 1914, son ami de chasse le Docteur COMPAIN, d'Amboise, affecté à une ambulance d'une division marocaine lui écrit qu'il est heureux "d'avoir pu le caser à Maugué, où Fernand LEMAIGNEN a été affecté à l'hôpital militaire auxiliaire, auprès de Madame HENNISSART et de Madame Jean-Pierre". Le Docteur COMPAIN ajoute : "Beaucoup de perdreaux et de lièvres par ici ; malheureusement beaucoup de Prussiens aussi".

Du château de Maugué il venait souvent coucher à Périgny où il se rendait à bicyclette. Ses activités militaires ne l'empêchaient pas de se rendre dans ses différentes fermes ou à Tours où il séjourne de Noël 1914 au 1er Janvier 1915. Il en profite pour "payer sa chaise à la cathédrale pour 1915".

Le 09 Janvier 1915 :"Touché de la maitresse BONVALLET la somme de 1.000 Frs pour fermage échu à Noël 1914". "Son mari était mobilisé et enverra plusieurs cartes à Fernand LEMAIGNEN durant la guerre).

Le 27 Juillet 1915 : "Voyage à Danzé - Reçu de Me Pilon la somme de 400 Frs à valoir sur son fermage échu au 24 Juin 1915".

Le 14 Août 1915 : "Voyage à Tours. Achat d'un bon de la Défense Nationale de 10.000 Francs". Dans le dossier concernant des pièces diverses on trouve un certificat ainsi conçu : "Banque de France - Versement d'Or pour la Défense Nationale. La Banque de France constate que M. LEMAIGNEN Fernand à Périgny a versé ce jour, en or, la somme de mille francs en échange de billet de banque. Le 28 Août 1915".

Le 20 Novembre 1915 il fait un voyage à Couture.

En 1914 et 1915 il reçoit de nombreuses cartes postales ou cartes des armées, écrites au crayon, de son fermier BONVALLET, de son domestique CHEVALLIER (Ludovic) et de blessés qu'il avait soigné à l'hôpital de Maugué qui lui expriment leur reconnaissance ainsi qu'à Mesdames HENNISSART et JEANPIERRE.

Jusqu'à quand fut-il affecté à l'hôpital de Maugué ?

Dans ses carnets il note à la date du 06 Janvier 1917 : "Dernière journée passée à l'hopital de Maugué pour moi" ; mais dans une lettre adressée à son beau-père le 16 Septembre 1919 (dossier lettres Madame LEMAIGNEN-MESCHIN) il écrit : "J'ai été mobilisé du 10 Août 1914 au 11 Juin 1915 à la 5ème section d'Infirmiers".

En fait il résulte de son livret militaire qu'il avait été classé dans le service auxiliaire ; qu'il avait été affecté dans les fonctions de comptable, administrateur adjoint à l'hôpital auxiliaire n° 33 au Château de Maugué du 14 Septembre 1914 au 11 Juin 1915, après avoir été affecté à l'hôpital du lycée de Vendôme ; et qu'il avait continué à titre gracieux les mêmes fonctions du 11 Juin 1915 au 07 Décembre 1916....

 

C'est à cette époque (Janvier 1916), qu'il achète sa première voiture automobile, une "Unic" (lettre d'un garagiste de Tours du 10 Janvier 1916) qu'il conservera jusqu'en 1929. Il en paie l'assurance le 02 Janvier 1916.

Le 20 Juin 1917, il note sur son carnet : "Pris une caisse d'essence de 50 litres chez Madame VERDIER". Il n'y avait pas alors de stations service.

 

Son ami COMPAIN, qui lui avait écrit le 17 Juin 1916, qu'il était désespéré de ne pouvoir reprendre la chasse, lui annonce le 22 Septembre 1916 qu'il vient de recevoir une citation à l'ordre du Corps d'Armée et ajoute :

"Tout ça voyez-vous, c'est très joli, mais ça ne vaut pas notre bel Hallali de sanglier dans les bois du père GABEAU. Quand pourrons-nous recommencer tout ça ? En ce moment, comme toujours, on ne voit pas la fin. Ca fait tout de même trois ouverture de chasse que ces sales boches me barbotent. Je voudrais, rien que pour ça, que le Diable les étouffe".

 

Le 27 Octobre 1916, Fernand LEMAIGNEN se rend à Tours et le 29 Décembre à la foire de Noël à Vendôme (car il y avait alors une foire à Noël à Vendôme).

Le 08 Novembre, il paie pour la première fois l'impôt sur le revenu : 141 Francs 73. Heureux temps ! (Le 09 Mars 1917 il note qu'il a envoyé sa déclaration d'impôt sur le revenu s'élevant à 21.594 Frs 54.

 

Ayant définitivement quitté l'hôpital de Maugué le 06 Janvier 1917, Fernand LEMAIGNEN va maintenant songer enfin à se marier, car il va avoir 47 ans.

 

 

V - Mariage

 

C'est Madame Henri DEMEZIL, née Marie FOUCAULT, grand-mère de Jean MARTIN-DEMEZIL qui fit rencontrer Fernand LEMAIGNEN, son cousin, et Marie Suzanne Eugénie MESCHIN née à Chinon le 25 Mai 1888 du mariage d'Eugène MESCHIN avocat à Chinon avec Suzanne MEUNIER. Marie MESCHIN était d'ailleurs lointainement apparentée avec la famille DEMEZIL par les familles BRUNEAU et MAURICE (Voir famille DEMEZIL). Elle habitait avec ses parents, depuis 1914, à Tours, 11 rue de l'Alma (actuellement rue Roger Salengro), Monsieur MESCHIN étant mobilisé à l'Etat Major de Tours.

Madame DEMEZIL, on l'a vu, avait déjà essayé à diverses reprises de marier son cousin.

 

Fernand LEMAIGNEN hésite beaucoup, comme toujours, à prendre une décision et consulte son ancien professeur et directeur de conscience l'Abbé NOURISSON. Le 20 juin l'Abbé NOURISSON lui écrit :

"Lundi soir j'ai vu M. et Madame MESCHAIN et nous avons causé très longuement .... Le plus difficile à avaler, c'est l'âge. On doit voir M. VERGER (confesseur de Fernand LEMAIGNEN).... En somme pour le moment vous n'avez qu'à vous tenir tranquille ; tous les renseignements pris sont à votre louange et je vois bien que vous êtes très sympathique...."

Au dos de cette lettre Fernand LEMAIGNEN note : "ce qu'il faudrait : jeune fille pauvre, enchantée de se faire situation ; âgée pour cause enfant. Conscience dit non cause enfant. Musicienne. Intelligente. Tristesse depuis cette année".

Le 27 Juin 1917, l'Abbé NOURISSON écrit à Fernand LEMAIGNEN que l'affaire est en bonne voie mais qu'il devrait voir son médecin le docteur HERMARY pour qu'il apaise ses doutes. En effet il était toujours préoccupé par les troubles psycho-religieux qu'il avait eu étant adolescent et la consultation du docteur CHARCOT dont l'athéisme l'avait profondément choqué. Malgré son bon sens et sa vie très active, sa conscience l'empêchait de prendre des décisions rapides.

Enfin les fiançailles interviennent le 18 Août 1917 et sont scellées par l'engagement suivant (dossier correspondance) :

"Ce dix huit du mois d'Août mil neuf cent dix sept, un samedi et le quatrième jour de l'octave de l'Assomption en la crypte du tombeau de Saint-Martin, après la célébration du Saint Sacrifice, Nous Fernand LEMAIGNEN et Marie MECHIN nous sommes engagés vis-à-vis l'un de l'autre par les liens des fiançailles tels que les entend l'Eglise, par la promesse écrite vraie et sincère d'un futur et légitime mariage. En foi de quoi nous avons signé ainsi que Monsieur l'Abbé RUTARD, chapelain de Saint-Martin et Marguerite DEMEZIL". (Suivent leurs signatures et celles de M. et Madame MESCHIN, de l'Abbé RUTARD et de Marguerite DEMEZIL).

Le carnet de poche de 1917 contient de nombreux détails sur les préparatifs du mariage : pièces à fournir, certificat de baptême, acte de naissance, certificat de contrat de mariage, liste des vêtements à prendre pour le mariage (gants, alliance, chapeau haut de forme, diamant, etc...), projet de faire-part : "Fernand LEMAIGNEN a l'honneur de vous faire part de son mariage avec Mlle Marie MESCHIN et vous prie d'assister à la bénédiction nuptiale en l'église Saint-Etienne à Tours le Jeudi 4 Octobre à 11 H précises". Liste des témoins (Albert FOUCAULT, Mlle Marie Françoise Lucie MAURICE et Madame DEMEZIL), cadeaux à emporter, sauf conduit à demander pour voyage à Lourdes, ordre de cortège (M. Albert FOUCAULT. Madame GODET, M. de la PERRIERE. Mlle GODET, Colonel VAD........, Madame MESCHIN, Monsieur MESCHIN, Madame DEMEZIL, M. BODIN, Madame MARTIN, Monsieur. FOUCAULT, Madame BODIN, M. ALARDET, Mlle CHIVERT, M. CHARRON, Madame CHARRON. Mlle MESGRE, Mlle ALARDET), projet de testament au profit du survivant des époux, notes sur contrat de mariage, etc.....

 

Fin Août et en Septembre, Marie MESCHIN écrit quelques lettres à son fiancé.

Le contrat de mariage est reçu par Me NEVEU, notaire à Selommes le 20 Septembre 1917 en présence de Me JANVIER, notaire à Chinon. Il contient adoption du régime de la communauté d'acquêts, la liste des meubles apportés par Fernand LEMAIGNEN tant à tours qu'à Périgny, le liste des valeurs de bourses lui appartenant (obligations de chemin de fer et rente sur l'Etat 227.885 Frs). (Outre divers titres Russes, Suisses, Argentins et Autrichiens d'une valeur de 71.790 Frs) et la liste de ses propriétés immobilières.

Mlle MESCHIN apportait divers meubles non décrits, et en dot, une maison à Tours, 52 rue Origet appartenant en propre à sa mère, diverses créances hypothécaires propres à sa mère, d'un montant de 12.000 Frs et la somme de 3.000 Frs en espèces.

Il était stipulé, à titre de donation par le futur époux à la future épouse, une rente annuelle et viagère de 7.000 Frs à compter du décès du futur époux, réductible à 5.000 Frs en cas d'existence d'enfant, et qui serait annulée en cas de remariage de la future épouse.

Le mariage fut célébré à l'église Saint Etienne à Tours le 04 Octobre 1917, et les époux partirent en voyage de noces à Lourdes.

Le 25 Septembre 1917 Fernand LEMAIGNEN avait versé à Me NEVEU un acompte de 3.000 Frs sur les frais du contrat de mariage.

Après le mariage les époux LEMAIGNEN-MESCHIN habitent à Tours, 28 rue Jules Simon et à Périgny pendant l'été.

Fernand LEMAIGNEN continue à gérer ses propriétés, à chasser tant en forêt d'Amboise avec son ami COMPAIN qu'à Périgny, à recevoir ses amis à des déjeuners de chasse, à s'occuper de la Mairie de Périgny.

Il continue à tenir ses carnets de comptes: encaissements de fermages, ventes de récoltes, de bois, de bourrées, de peupliers, paiement des gages aux domestiques (Ludovic et Marguerite CHEVALLIER notamment) paiement des impôts, des places à l'église, denier du culte, comptes sur les gestion de son portefeuille de valeurs de bourse et avec la Société Générale, etc....

Cependant, à partir de son mariage ses carnets contiennent moins de détails qu'auparavant (3 premiers carnets). D'ailleurs, à partir de 1918 il tient des petits carnets noirs pour les comptes de chacune de ses fermes.

 

 

VI - De 1918 à 1939

 

Le 1er Août 1918, Albert FOUCAULT invite Fernand LEMAIGNEN et sa femme à venir lui rendre visite à son château du Tertre à Belleme (Sarthe). Cette lettre est écrite dans un style remarquable. Rappelons qu'Albert FOUCAULT était le beau père de l'écrivain Roger MARTIN DU GARD.

Le 06 Mars 1918, Cécile Edmond PERRIER apprenait aux époux LEMAIGNEN le décès de sa soeur "Victime du bombardement de Paris".

Le 09 Avril, Madame MESCHIN déplore un accident de bicyclette survenu à Fernand.

Le 26 Juillet 1918, Madame DEMEZIL remercie Madame LEMAIGNEN de l'agréable séjour qu'elle vient de faire à Périgny.

Le 19 Septembre 1918, l'Abbé NOURISSON remercie de l'envoi de gibier.

Le 12 Novembre 1918, Madame MESCHIN, qui écrivait presque chaque jour à sa fille quand elle était à Périgny lui annonce l'Armistice :

"Deo gratias ! On les a ! C'est enfin fini ; quel poids de moins sur les épaules. J'ai pensé que Fernand sonnait lui même la cloche à toute volée. Ici enthousiasme indescriptible. La ville très bien pavoisée. Hier soir retraite aux flambeaux, musique, etc.... Ayant en tête le général, le maire, le préfet ; mais console toi ; ma fille, je n'en ai rien vu. Le défilé était dans la rue Nationale et ton père accompagnait le Général.... C'est à n'y pas croire. Vive Saint-Martin qui nous a donné cette joie le jour même de sa fête. P.S. : Bien des précautions pour le voyage : maintenant le bas-ventre ". (Madame LEMAIGNEN était enceinte).

Du dossier des lettres reçues par Madame LEMAIGNEN en 1918 nous citerons :

Du 04 Juillet 1918, une lettre de son oncle Dom Gabriel MEUNIER, alors à Southampton (Angleterre) où il évoque Chinon, la propriété de Croix Marie et la Touraine et une autre lettre du 09 Août, envoyant à sa nièce des cartes postales de l'abbaye d'Alton-Castle où il séjourne. Le 31 Août, il écrit qu'il est tout heureux d'apprendre qu'il va avoir un "petit neveu" et il demande à Madame LEMAIGNEN de mettre un cierge à Saint-Martin parce qu'il vient d'échapper à un accident de voiture à cheval qu'il relate longuement.

Le 19 Juillet Madame MESCHIN annonce à sa fille la mort de "la petite BARDOU" (Geneviève BARDOU).

Le 21 Octobre, elle lui explique dans une lettre de 4 pages qu'elle a engagé une femme de ménage.

Le 1er Décembre, Mlle Louise MARGANNE remercie d'une invitation à Périgny et annonce que son frère Robert est entré victorieusement en Belgique et qu'il a fait à lui seul 3 prisonniers et qu'il va occuper l'Allemagne vers Cologne.

Le 30 Mars 1919 naît à Tours Cécile Marie Louise LEMAIGNEN.

Le 09 Juillet 1919, Dom Gabriel, alors à l'abbaye de Farnborough, se réjouit d'avoir 60 ans.

"Cette paix préparée et signée sans aucun appel à Dieu et aux Lumières du Saint-Esprit nous réserve sans doute des désappointements. Nous avons toutefois chanté le TE DEUM de tout notre coeur ; et c'est moi qui ai eu la satisfaction de chanter le grand messe d'action de grâce devant S.M. l'Impératrice ; le Prince et la Princesse Napoléon se trouvaient également près d'elle dans le sanctuaire". Il envoie des photos de la procession de la fête dieu.

Le 11 Août, il écrit que le Prince et la Princesse Napoléon sont repartis en Belgique. On peut enfin se promener tranquillement dans le parc du château sans craindre de les rencontrer. Il fait très chaud.

Dom Gabriel, bénédictin, avait quitté Solemmes après l'expulsion des congrégations religieuses. Il était à l'abbaye de Farnborough où résidait l'Impératrice Eugénie qu'il a très bien connue.

Le 08 Septembre, il manifeste encore sa joie d'avoir reçu des photos de "sa petite Cilette aux yeux bleus".

Plusieurs lettres des 7 Juillet, 10 Juillet et 17 Juillet 1919 émanent de Louise PAYS, domestique de Madame LEMAIGNEN. Elle est tombée malade à Périgny et a dû être hospitalisée à l'hôpital de Vendôme, puis s'est retirée dans sa famille à Luynes pour se reposer.

Le 31 Août 1919, Madame PAYS mère informe Madame LEMAIGNEN que Madame la Comtesse de la FONCHAIS demande que Louise devienne sa femme de ménage : "Cela nous ennuie beaucoup de la retirer de chez Madame, mais nous ne pouvons faire autrement ; voila 45 ans que mes parents sont à leur service tant fermiers que domestiques ..... C'est Monsieur le Comte qui a fait instruire mon frère qui est prêtre ..... Nous voudrions bien que Madame nous envoie Louise pour le 15 Septembre".

Le 17 Août Madame MESCHIN informe sa fille que M. MESCHIN a encore repris l'uniforme et travaille à son bureau à la caserne Maresco à Tours.

Cependant le ménage MESCHIN vient de passer 15 jours à Périgny à la fin d'Août.

Le 14 Septembre, elle écrit une longue lettre à sa fille :

"Je veux causer longuement avec toi n'ayant l'intention de sortir que pour les vêpres. Je suis bien loin de vouloir te donner des regrets de n'avoir pu voir le défilé du 66e régiment mais, néanmoins je t'en parlerai, te sachant avant tout femme de devoir et ne te faisant pas l'injure de ne pas te croire à la hauteur de ton nouveau rôle de mère de famille et d'épouse.... Le grand rôle de l'épouse et de la maman est de toujours se sacrifier pour les siens et c'est à la bonheur et la paix de la famille. Tes bons principes chrétiens te le disent assez, et je me félicite, ma chère fille de ne point t'avoir inculqué les idées modernes qui sont bien loin de mettre le bonheur au foyer".

Suit la description du défilé : "Le drapeau mutilé, officiers et soldats tout couverts de fleurs ; suivaient les mitrailleuses enrubannées de tricolore et fleuries, puis les tanks ; c'était beau. Le sermon d'hier soir par l'Abbé MORCAY était bien dit, bien pensé et enlevant. J'était bien placée et ton père figurait au nombre des officiers.... Les morceaux de musique et les chants étaient très réussis et le Te Deum a été cette fois chanté avec âme, faisant suite au De Profundis. Le matin nous sommes allés à la messe militaire à Saint-Martin dite en plus grande pompe, avec sermon d'un aumonier militaire du 66e. La basilique était pleine ; mais hélas ! plus de civils que de soldats qui avaient cependant l'exemple du général de la garnison accompagné du Général BAILLOU et d'officiers supérieurs. Ce soir illumination et embrasement des tours de la Cathédrale.... La Municipalité et le Préfet brillaient par leur absence. Que va devenir l'Union Sacrée ?....

Tu ne doute pas, ma chère fille, qu'hier nous avons vu de très près le Maréchal JOFFRE et la Maréchale.....

Ta petite, quoique fille d'un papa très pieux, et d'une maman de même, n'a rien de bénit sur elle. Il me semble que tu pourrais acheter ou coudre à son petit corset une médaille de Sainte Vierge. De ton temps on faisait porter aux enfants le cordon de la Sainte Vierge, mais les temps ont changés"........

 

Le 03 Septembre, la cousine DEMEZIL accuse réception de la photo de la petite Cécile "qui a les yeux et la bouche de sa grand-mère MESCHIN".

Le 04 Septembre, BRETON-BERGEOT, cultivateur à Marolles-les-Saint Calais annonce qu'il va être démobilisé et demande à louer la ferme de Mons "dès que vous aurez l'intention de changer de fermier". Il devint effectivement fermier de Mons en remplacement de son oncle

Cette même année 1919, Jeanne, cuisinière à Périgny est atteinte de la grippe espagnole et décède peu après.

Au mois d'Août Fernand LEMAIGNEN avait calculé que le ménage CHEVALLIER (Ludovic, Marguerite et Jeanne leur fille) lui coûtait environ 1.000 Frs par mois nourriture comprise.

Comme on le sait le ménage LEMAIGNEN passait ses hivers à Tours. Le 10 Février 1920 (lettre datée par erreur de 1919), Marguerite CHEVALLIER, la jardinière de Périgny donne des nouvelles de Périgny à Madame LEMAIGNEN.

Le 26 Avril 1920, Madame MESCHIN informe sa fille qu'elle vient de déménager sa propriété de la Croix Marie près de Chinon qui est vendue. Il y avait beaucoup plus de bouteilles de vin dans la cave qu'on ne pensait.

Le 07 Juin, Fernand LEMAIGNEN note sur son carnet qu'il a convenu avec ses domestiques Théophile et Jeanne qui sont entrés à son service le 06 Juin, d'un salaire de 180 Frs par mois pour le ménage et de 70 Frs par mois pour Madeleine.

En juin 1920 plusieurs lettres de Madame MESCHIN ont trait à la santé de Cécile qui ne pousse pas bien. En Septembre et Octobre, Monsieur et Madame LEMAIGNEN louent une villa à la Baule, Villa des Fleurs, allée des Mélèzes, pour permettre à la petite Cécile de profiter de l'air de la mer.

Le 21 Octobre, Marguerite CHEVALLIER donne des nouvelles des habitants de Périgny à Madame LEMAIGNEN à la Baule et se félicite d'apprendre que Cécile va mieux depuis qu'elle est au bord de la mer. Toutes les nouvelles du pays sont relatées. Les chiens se portent bien. Depuis 2 ou 3 jours, il passe des corbeaux en assez grand nombre. Le 12 Octobre, elle avait envoyé le miroir à alouettes réclamé par Monsieur LEMAIGNEN pour aller à la chasse, elle ajoute : "Le bruit court à Périgny que Cécile va avoir un petit frère ou une petite soeur". La fille de Marguerite, Madeleine, commence à jaser. Marguerite demande qu'on apporte des coquillages pour ses filles.

Le 28 Septembre, déjà Madame LEMAIGNEN écrivait à son mari retourné à Périgny que Cécile avait meilleur appétit et profitait de son séjour au bord de la mer. C'était la première séparation du ménage;

Le 24 Novembre, Madame MESCHIN se réjouit du rétablissement de la santé de sa petite fille qui commence à causer et à dire "Maman".

Madame LEMAIGNEN attend bien un nouveau bébé, comme l'avait prévu Marguerite CHEVALLIER. Le 17 Septembre 1920, la Supérieure des Franciscaines, gardes malades de Blois qui lui avait déjà fourni une religieuse pour la naissance de Cécile, lui exprime ses regrets de ne pouvoir lui en promettre une autre pour la prochaine naissance, attendu le nombre de plus en plus restreint des religieuses.

Le juillet, Albert FOUCAULT invitait à nouveau le ménage LEMAIGNEN à venir à sa propriété du Tertre : ce n'est qu'à 100 kilomètre de Périgny. A 25 Kms à l'heure, cela ne fait que quatre heures !

Le ménage LEMAIGNEN continuait à recevoir des amis à Périgny, notamment le ménage COMPAIN, le ménage HENNISSART et Monsieur et Madame Pierre ROLLAND de RENEVILLE qui étaient des amis intimes de Fernand LEMAIGNEN (Pierre ROLLAND était le frère de Jean ROLLAND fils du notaire de Vendôme).

 

Le 02 Mars 1921, apparaît sur les carnets de Fernand LEMAIGNEN, le nom d'une nouvelle domestique "Albertine", qui demeurait à Noizay près de Vouvray et qui restera à son service jusqu'à son décès en 1951.

 

Le 31 Mars 1921 naît à Tours Marie Thérèse Suzanne LEMAIGNEN

Le 18 Juin 1921, Fernand LEMAIGNEN paye à Marie du Croissant, des bouchées à la reine pour le baptême, les glaces chez POTIN et les gages de Mlle BILLARD (150 Frs) ainsi que la Soeur Saint François d'Assise.

Le 03 Juin, Marguerite CHEVALLIER se félicite de la convalescence de Madame LEMAIGNEN et lui donne des nouvelles de la propriété de Périgny.

Le 28 Juillet, Cécile Edmond PERRIER relate longuement la maladie de son mari, directeur du Muséum d'histoire naturelle de Paris, membre de l'Institut. Le ménage André PERRIER va venir à Dotton avec la petite Jeannine qui supportera mieux les grandes chaleurs de ce mois de Juillet. André PERRIER annonce le 1er Août : "Nous avons perdu notre cher père d'une crise d'urémie". (Voir faire part de son décès avec tous ses titres).

Le 11 Août, Dom Gabriel écrit du Mont Saint Michel où il est maintenant chargé de la paroisse. Le 07 Septembre, il se plaint de l'afflux des touristes. Même le Roi de Roumanie, la Reine et leurs filles sont venus visiter le Mont. Il a fallu à cause de la grande marée transporter la Reine et ses filles à bras d'homme.

Madame MESCHIN continue à écrire à peu près quotidiennement à sa fille. Le 03 Octobre, elle a engagé une nouvelle bonne : "Marie", qui lui donne entière satisfaction ; elle est très pieuse et elle l'a emmenée à l'Adoration du Saint Sacrement. Elle se réjouit de pouvoir maintenant utiliser le téléphone nouvellement installé à Périgny. Le 08 Octobre : "Marie est vraiment une excellente fille ; de plus elle est intelligente et fait bien ce qu'elle fait ; aussi je la soigne de mon mieux".

Au cours de cette année 1921, Fernand LEMAIGNEN échange plusieurs lettres au sujet de la location d'un lot de chasse dans la forêt d'Amboise.

 

1922

Le 21 Mars 1922, Fernand LEMAIGNEN signe un bon de commission à l'agence DESTREGUIL à Tours pour vendre la maison 52 rue Origet qui avait été donnée en dot à sa femme, afin de subvenir aux dépenses du ménage MESCHIN, en raison de la maladie de Monsieur MESCHIN. Monsieur MESCHIN avait eu un commencement de congestion cérébrale alors qu'il assistait à des manoeuvres militaires, dans l'Est, étant officier de réserve, en Juillet 1914. Il refusa de se faire réformer et fit la guerre à l'Etat Major de Tours. Mais sa santé continua à empirer lentement. Il a toujours gardé toute sa lucidité, mais il devenait très irascible et sa femme était souvent l'objet de crises de colère.

En 1922 sa santé empira encore. Il se déplaçait difficilement et mangeait beaucoup, malgré les conseils de son médecin.

Madame MESCHIN relate dans toutes ses lettres à partir de 1922 son état de santé. Elle lui faisait faire le tour de leur jardin en lui donnant le bras, Monsieur MESCHIN s'appuyant sur sa canne de l'autre main. Quand la maladie lui laissait quelque répit, sa femme le promenait dans les rues à Tours.

Les soins que nécessitait la maladie de Monsieur MESCHIN posèrent de graves problèmes financiers et Fernand LEMAIGNEN les aida financièrement, la vente des biens du ménage MESCHIN ne suffisant pas à palier les difficultés financières. (Vente de la Croix Marie, de terres à Lerné, de la propriété de Restigné).

Le 09 Juin 1922, Fernand LEMAIGNEN note sur ses carnets :

"J'ai emprunté 3.000 Frs à la Société Générale. Fait un contrat pour me donner le droit d'emprunter jusqu'à 6.000 Frs. Il est convenu que je ne paierai les intérêts que des sommes qu'on m'aura versées et qu'à partir du jour du versement".

La belle situation de fortune de Fernand LEMAIGNEN antérieure à 1914 s'était bien dégradée. Que sont devenus les rouleaux d'or soigneusement comptés le 05 Août 1914 ? La dépréciation monétaire a aussi amenuisé singulièrement les revenus de son portefeuille d'obligations de chemin de fer. Quand aux emprunts russes, ils ne sont plus qu'un souvenir. (Voir dossier "Divers"), un prospectus de l'Association Nationale des porteurs français de valeurs mobilières : Appel aux porteurs de fonds russes du 07 Décembre 1924 en "vue d'assurer la représentation de leurs intérêts dans les prochaines négociations avec le gouvernement des Soviets" qui venait d'être reconnu par l'état français. Aussi Fernand LEMAIGNEN prend-il la décision de vendre la ferme de la Chaise à Chemille-sur-Deme qui lui venait de sa mère.

Le 07 Novembre 1922, il note :

"J'ai vendu par acte signé ce jour chez Me ROY, notaire à Chemille-sur-Deme la Chaise et le Bordage de Beauregard au Me CHEREAU pour la somme de 118.000 Frs. Le Me CHEREAU m'a versé ce jour la somme de 98.000 Frs et me redevra 20.000 Frs payable le 25 Décembre 1923 et dont il me fera les intérêts à 6 % à partir du 1er Novembre 1922". Il ne dit pas que son fermier CHEREAU avait proposé de la payer en Louis d'Or et qu'il avait refusé.

"Sur cette somme de 98.000 Frs, j'ai gardé 10.000 Frs pour moi avec le fermage (3.500 Frs) et j'ai déposé chez Me ROY 88.000 Frs pour acheter 14 coupures de 5.000 Frs de Bons du Trésor 6 % ainsi que des bons de la Défense à 6 mois à 4 %. Il m'apportera ces bons à Tours à Noël".

Fernand LEMAIGNEN avait déjà songé à vendre cette ferme avant 1914, puisqu'il écrivait sur la dernière page de son carnet de 1905 à 1914 :

"A Me GAIGNAISON" (son cousin) "Bien entendu que si ma ferme de la Chaise était vendue grâce à toi, à BIGNON, l'acte de vente serait passé dans ton Etude".

On remarquera que déjà en 1922, le placement à 6 % du prix de vente de cette ferme rapportait 3 fois plus que le fermage brut.

Le compromis de la vente de la ferme de la Chaise avait été signé en Juin 1922. Voir correspondance avec Me ROY à ce sujet. La ferme de la Chaise et la Bordage de Beauregard étaient d'une contenance de 68 hectares.

Le 26 Août 1922, Pierre ROLLAND propose un expert pour estimer les Pastels de Périgny que Fernand LEMAIGNEN avait envisagé de vendre, et le 07 Septembre un dénommé GOURBIN donne des indications sur le choix d'un expert.

Les réceptions continuent néanmoins à Périgny. Le 07 Septembre, Albert FOUCAULT remercie de son séjour à Périgny.

Le 10 Novembre, Dom Gabriel annonce qu'il va sans doute vernir en Touraine le 29 ou le 30 Novembre.

 

1923

Une bonne partie des lettres de l'année 1923 concernent l'achat d'un chien (voir chapitre spécial à ce sujet).

Les lettres de Madame MESCHIN, au cours de cette année ont toujours trait à la santé de son mari qui se détériore. Le médecin vient le voir presque chaque jour et tente de la rassurer. Elle écrit chaque jour à sa fille que son père va mieux. Même Fernand LEMAIGNEN, dans une lettre du 13 Août écrit : "J'ai trouvé ton père relativement mieux que je ne supposais. Il est très lucide". Cependant, Fernand LEMAIGNEN va écrire cette lettre au café pour être plus au calme.

Le 23 Août, Monsieur MACHART écrit à Fernand LEMAIGNEN en vue de la réunion du conseil de famille des enfants ROGER qu'il va adopter et dont Fernand LEMAIGNEN est membre (voir famille ROGER).

Le 03 Octobre, il note qu'il a déposé à la Société Générale ses coupons Autrichiens de 1914 à 1918. "On doit, m'a t'on dit, me donner en échange de ces 45 coupons, représentant avant guerre la somme de 2.700 Frs, des bons du Trésor Autrichien à 5 % représentant un capital de 648 Frs".

On consultera, sur ce même carnet (3ème carnet) le relevé de ses dépenses concernant son automobile en 1919 et 1920.

Le 23 Septembre, Madame MESCHIN écrit que Madame DEMEZIL est très malade. Elle a été administrée (elle décédera le 1er Octobre 1923).

Madame MESCHIN ajoute qu'elle regrette de ne pouvoir participer à un repas de chasse à Périgny : "J'ai senti de loin la bonne odeur du fumet des perdreaux d'ouverture. Vous avez sans doute avec ce bon rôti, le civet traditionnel et les écrevisses de Dotton et les cèpes de Périgny".

Cependant, le ménage MESCHIN fait un séjour à Périgny en Octobre.

 

1924

Les lettres reçues par Madame LEMAIGNEN de sa mère en 1924 ont a peu prés uniquement trait à la maladie de Monsieur MESCHIN qui s'aggrave.

Le ménage LEMAIGNEN a quitté Tours pour Périgny le 04 Avril et Madame MESCHIN écrit le 8 qu'elle n'a pu décider son mari à sortir ; il est resté dans son fauteuil, à sa fenêtre, au soleil.

Le 04 Juin, elle se plaint du triste état de santé de son mari qui la tourmente pour manger beaucoup plus qu'il ne lui est permis. Il s'embrouille et se surexcite. Elle attend une nouvelle bonne. Il faut croire que la perle engagée en 1921 "Marie" n'était pas si parfaite qu'on le croyait.

Dom Gabriel est venu en Touraine en Juin. Il a été navré de constater l'état de santé de Monsieur MESCHIN.

Le 10 Juillet, Madame MESCHIN annonce qu'elle envisage de vendre quelques meubles notamment un secrétaire empire pour se procurer un peu d'argent et le 16 Juillet elle parle de la vente du jardin de la Cure à Lerné.

Elle fait un cadeau à Paul JANVIER, fils du notaire de Chinon, qui va se marier et Madame JANVIER mère l'en remercie le 04 Août.

Le 03 Août, elle écrit à sa fille que l'état de santé de son mari s'aggrave de plus en plus : "Ce qui est terrible, c'est le cerveau. Depuis 15 jours il a beaucoup baissé ; il déménage à tout moment. Je n'ai plus actuellement devant moi que le billet de 100 Frs que vous m'avez laissé. Ma croix devient de plus en plus pesante".

Le 28 Août, elle écrit que son mari exige qu'elle lui remette le produit de la vente des terres de Lerné en la menaçant dans un accès de colère ; elle n'a plus d'argent.

Madame LEMAIGNEN se rend auprès de sa mère notamment le 10 Août et le 30 Septembre.

Par lettre du 16 Septembre, Madame MESCHIN informe sa fille que "Monsieur BOUSEREZ ne trouve pas facilement à vendre "Le Rochoir" (clos de vigne réputé à Bourgueil).

Cependant le 14 Novembre, Monsieur MESCHIN écrit à sa fille et à ses petites filles pour les remercier des roses qu'elles lui ont données "C'est la première fois que j'essaye de tenir la plume depuis que je suis malade....". L'écriture est très irrégulière, mais le style traduit une pensée parfaitement saine.

Le 15 Novembre, de Madame MESCHIN : "Nous signerons la semaine prochaine l'acte de vente du Rochoir".

Enfin au début de Décembre le ménage LEMAIGNEN revient à Tours. Le 2 Décembre, Madame MESCHIN écrit à sa fille : "Voilà la clôture de notre correspondance et votre retour que nous entrevoyons avec tant de bonheur. Je n'ai donc rien à te dire puisque nous serons à même de causer de vive voix après demain".

Le 28 Novembre, Madame Cécile Edmond PERRIER écrivait à Madame LEMAIGNEN une longue lettre à propos notamment des événements politiques: HERRIOT, MILLERAND, etc.... Le Général de CASTELNEAU va fonder un grand journal catholique (ce sera la "France Catholique") et un mouvement d'opinion.

"Les Cendres de Jaurès n'ont pas eu grand succès, mais les soldats ont fait la haie devant le défilé des drapeaux rouges. Madame JAURES n'était pas dans le cortège, car elle est d'une piété ; elle a assisté dans le Pentièvre à la mise au tombeau de son unique fils qui a été tué à la guerre en 1915".

Jeanne (PERRIER) a quitté sa maison, le traité terminé et organise une grande affaire (maison de Couture Jeanne DUVERNE) où elle aura sa liberté ; mais une grande responsabilité. Le directeur de son ancienne maison est dans une telle colère de son départ, car ses dessins étaient en grande partie le succès de son affaire, que, loin de l'aider, il lui fera bien des ennuis, je crains".

 

Le 21 Mars 1924, l'Abbé DEMEE annonçait qu'il allait quitter la paroisse de Périgny et le 03 Avril le Vicaire Général de Blois annonçait la nomination de l'Abbé LESEUR.

 

1925

Les lettres reçues par Monsieur et Madame LEMAIGNEN en 1925 ne nous apportent pas de renseignements notables sur leur existence. Ils cherchent à acheter une maison à Tours (offre de l'agence MARTIN du 09 Février 1925) sans doute parce que les voisins de la rue Jules Simon se plaignaient à différentes reprises du bruit que faisaient leurs chiens. Plusieurs lettres ont d'ailleurs trait à l'achat d'un chien ZAZA (20 Mai 1925) et PIRAM (Août 1925).

Le 14 Août, Dom Gabriel annonce sa visite à Périgny. Il a vu le nouvel Evêque de Blois et lui a chaudement recommandé Fernand LEMAIGNEN.

Du 9 Mai, lettre de Madame Cécile Edmond PERRIER toujours préoccupée des événements politiques après l'accession d'Edouard HERRIOT au pouvoir.

Quant à Madame MESCHIN elle écrit le 17 Mai 1925 :

"Il semble difficile que je reste seule avec ton père. J'ai bien peur d'être obligée de m'ajoindre une soeur ; mais quels frais ! Il a encore de très bons moments, très lucides ; mais dans d'autres c'est terrible et tout ce que j'ai dû endurer et entendre depuis votre départ était pire que tout ce que j'ai dû subir l'année dernière".

Dom Gabriel avait déjà écrit à sa nièce le 24 Mars au sujet des difficultés de sa soeur vis-à-vis de Monsieur MESCHIN.

Le 29 Octobre, après son retour de son voyage en Touraine il écrit combien il est accablé par l'état dans lequel il a trouvé Madame MESCHIN qui est très affaiblie.

 

1926

Fernand LEMAIGNEN porte les gages de Ludovic et Marguerite CHEVALLIER à 350 Frs par mois (carnets 03 Mai 1926) et à nouveau à 400 Frs par mois pour la période du 1er Janvier au 1er Juillet et 450 Frs par mois pour la période du 1er Juillet au 1er Janvier (carnets 02 Août 1926).

Par lettre du 17 Janvier 1926, le Vicaire Général de Blois annonce à Fernand LEMAIGNEN que l'Abbé TREMEAU est nommé curé de Périgny en remplacement de l'Abbé LESEUR. Mais l'Abbé TREMEAU a des difficultés avec Fernand LEMAIGNEN ; il ne semble d'ailleurs pas qu'il ait été très équilibré ; le 07 Décembre 1926 il retourne à Monsieur LEMAIGNEN de l'argent qu'il lui avait donné par la paroisse et Fernand LEMAIGNEN lui répond de façon aigre-douce. Le 28 Janvier 1927, l'Abbé PILLEBOUT, doyen de Selommes accusera d'ailleurs réception de la plainte de Fernand LEMAIGNEN et stigmatisera les procédés peu corrects de l'Abbé TREMEAU. Enfin, le 13 Mai 1927, l'Abbé PILLEBOUT annonce le départ de l'Abbé TREMEAU qui est malade.

Nous n'avons plus de correspondance de Madame MESCHIN avec sa fille à partir de l'année 1926. La volumineuse correspondance échangée de 1918 à 1925, du moins pendant le période où le ménage LEMAIGNEN est à Périgny, cesse complètement.

Nous n'avons qu'une dernière lettre de Madame MESCHIN du 10 Août 1926 disant que son mari a maintenant beaucoup de peine à se lever. Il a une religieuse auprès de lui le nuit.

Monsieur MESCHIN décédera le 18 Septembre 1926 et Fernand LEMAIGNEN s'occupera de tous les préparatifs de l'enterrement à Chinon (voir carnets).

Madame MESCHIN viendra peu après habiter définitivement avec sa fille tant à Périgny qu'à Tours. Elle décédera à Périgny le 10 Janvier 1949.

 

1927

Les rares lettres de l'année 1927 concernant l'achat éventuel d'une nouvelle auto en remplacement de l"Unic" (voir chapitre "Autos").

 

1928

Une seule lettre concernant la location de la maison de Madame MESCHIN, 5 rue Marceau à Chinon à Monsieur DELAUNAY.

 

1929

Une seule pièce : engagement de vente de la propriété de Madame MESCHIN à Restigné.

Achat de la voiture Citroën C 4 (voir chapitre "Autos").

 

1930

Lettre de Louis PERRIER se réjouissant d'apprendre la sortie de clinique de Cécile après son opération de l'appendicite (Louis PERRIER écrit par erreur "Mathé" - 12 Janvier).

En témoignage de la guérison de Cécile qui avait eu une péritonite consécutive à son opération de l'appendicite, Monsieur et Madame LEMAIGNEN, Madame MESCHIN, Dom Gabriel, Cécile et Mathé font un voyage à Lourdes avec excursion à Biarritz (Mai 1930).

 

1931

En Mai et Juin 1931, la famille LEMAIGNEN fait une saison à la Bourboule pour rétablir la santé de Mathé affaiblie par une grippe ; Mathé et Cécile y contractent la rougeole! 24 Mai 1931 lettre relative à la location du 1er étage de la villa "La Plage" du 24 Mai au 30 Juin (1.800 Frs) - (Voir carnets).

Le 06 Juillet 1931, lettre d'Albert FOUCAULT s'invitant à déjeuner à Périgny le 13 Juillet.

Le 26 Septembre 1931, Louis PERRIER, conseiller d'état donne longuement et sententieusement son avis sur un différend avec Monsieur LAURANT du Coudray, a propos de l'étang du Coudray.

Le 07 Octobre 1931, le Vicaire Général annonce la nomination de l'Abbé BOULAY comme curé de Périgny et lettre de l'Abbé BOULAY.

 

1932

Du 04 au 08 Juillet 1932, la famille LEMAIGNEN fait un voyage au Mont Saint Michel où elle retrouve Dom Gabriel (celui-ci décède le 20 Février 1934. Il est enterré à l'abbaye de Solemmes).

D'après les carnets de Fernand LEMAIGNEN, ce voyage coûte 245 Frs d'essence, 1.009 Frs pour l'hôtel et 335 Frs divers.

Le 10 Août, Fernand LEMAIGNEN reçoit une réclame pour un ouvrage érotique, et la détruit avec l'annotation "c'est dégoûtant".

Les 08 et 25 Juin, une agence de Tours et Me JANVIER, notaire à Chinon, proposent à Fernand LEMAIGNEN des maisons à acheter à Tours.

Le 09 Octobre 1932, Pierre LAURAND demande un rendez-vous pour poser des bornes au Loup Pendu. Il eut souvent des difficultés de bornage avec Fernand LEMAIGNEN.

 

1933

Les 09, 10 et 21 Juin, échange de lettres entre Fernand LEMAIGNEN et ses fermiers de Danzé, PILON et CHAUVIN, concernant une réduction de leurs fermages.

Le 11 Octobre 1933, le docteur André PERRIER donne une consultation à Fernand LEMAIGNEN au sujet d'un petit mal qu'il avait à la langue, dû au tabac.

Le 11 Novembre 1933, Monsieur et Madame LEMAIGNEN invitaient au traditionnel déjeuner du 11 Novembre à Périgny leurs amis HAMAR et recevaient leur fils Jean et sa jeune fille. Fernand LEMAIGNEN rédigea le petit discours suivant :

"Au fils de mon Cher Ami d'enfance. Mon Cher Jean. Le 11 Novembre de l'an dernier, au moment où les cloches de France remplissaient les airs de leur joyeux carillon, et pendant que nous dégustions ensembles les traditionnelles allouettes, je me souviens de vous voir exprimé un souhait : celui de vous recevoir cette année, accompagné de l'épouse entrevue dans vos rêves.

Une de ces petites alouettes, curieuse et coquette, m'avait entendu ; aussitôt la gentille messagère s'envola en chantant ; elle s'éleva bien haut, bien haut dans le ciel bleu, emportant mon souhait sur ses ailes, pour le déposer aux pieds du trône de Dieu.

Aujourd'hui ce sont des actions de grâce que nous devons rendre à la divine providence pour avoir mis sur votre chemin la compagne charmante que nous avons tant de plaisir à recevoir pour la première fois.

Permettrez-moi Madame et vous mon cher ami de vous offir les voeux que, du fonds de mon coeur, je forme pour le bonheur de votre gentil ménage".

Ce petit discours constitue un bel exemple du style aisé et poétique et de la sensibilité de Fernand LEMAIGNEN.

Le 23 Novembre 1933, le Vicaire Général annonce la nomination, comme curé de Périgny, de l'Abbé HOUDIARD, en remplacement de l'Abbé BOULAY qui ne pouvait plus assurer son service pour raison de santé. Malheureusement l'Abbé HOUDIARD devait abandonner le ministère peu après, devenu complètement fou.

 

1934

Presque toutes les lettres de l'année ont trait à l'achat d'un cocker ou d'un Bleu d'Auvergne (voir chapitre Chiens).

 

1935

Le 1er Août 1935, l'Abbé PLAT, président de la Société Archéologique de Vendôme demande à Fernand LEMAIGNEN s'il lui est possible de retrouver la trace de chemins antiques de Blois à Areines et d'Amboise à Chartres qui devaient se recouper à Mezière et passer la Houzée à Bezard. Effectivement, en 1972 lors de la canalisation de la Houzée, il a été retrouvé un pavage à gué près du pont actuel de Bezard.

Le 26 Octobre 1935, Louis PERRIER donne des conseils juridiques à propos d'un chemin de Dotton à Périgny, traversant les bois du Coudray et revendiqué par Pierre LAURAND.

 

1936

Le 09 Avril et 21 Mai, lettres de Marguerite CHEVALLIER donnant des nouvelles de Périgny à Monsieur et Madame LEMAIGNEN alors à Tours.

En Juillet et Août 1936, la famille LEMAIGNEN fait une excursion en Bretagne (La Baule, Carnac, Quimper, Pointe du Raz) dont l'itinéraire est resté dans la correspondance de cette année là.

Marguerite CHEVALLIER quitte son emploi de jardinière, étant veuve, (son mari s'étant pendu) au début de Septembre 1936.

 

1937

Le 07 Février : lettre de louis PERRIER au sujet de la mort du docteur COMPAIN.

Le 23 Mars, André PERRIER annonce qu'il va réaménager Dotton et demande des conseils à ce sujet.

Le 09 Avril 1937, Fernand LEMAIGNEN reçoit une lettre de plainte de COLIN cultivateur à la Poterne, pour une raison peu claire. Copie d'un article du "Travailleur" sur l'évacuation du purin des "gros fermiers de Monsieur LEMAIGNEN" dans les caniveaux de Périgny.

 

1938

Lettre du 17 Mars de la jardinière Marie LEGAULT, dont le mari avait les esprits dérangés par suite de la guerre de 1914.

 

 

Tels sont les faits marquants de la vie de Fernand LEMAIGNEN qui a pu être reconstituée grâce à ses carnets (le quatrième prend fin en Mars 1939) et sa correspondance ou à la correspondance reçue par Madame LEMAIGNEN pour la période de 1918 à 1939.

Bien entendu tous les faits et notations contenus dans ces carnets et toutes les lettres n'ont pas été analysés, tant s'en faut. Il n'a été mentionné que ceux présentant un certain intérêt. D'autres détails seront relatés dans les chapitres suivants.

Avant de poursuivre l'étude de la vie de Fernand LEMAIGNEN à partir de 1939, nous allons analyser divers documents concernant :

1°) Ses deux voitures automobiles.

2°) Ses chiens

3°) La chasse.

4°) La location de la maison rue Traversière à Tours.

5°) Sa comédie "Marraine de Guerre".

6°) Ses acquisitions immobilières.

7°) Son activité à la Mairie de Périgny.

 

 

VII - Autos

 

Fernand LEMAIGNEN avait acheté une jument en Avril 1909 ; il la changea le 13 Juillet 1910, et cette dernière fut réquisitionnée par l'armée le 04 Août 1914.

Au début de 1916, il achète une auto marque Unic (lettre de Monsieur VILLENEUVE garagiste, 3 avenue de Grammont à Tours du 10 Janvier 1916). Elle est immatriculée 32 K 8 (police d'assurance du 07 août 1919). On verra sous ce dossier des "Notices aux Nouveaux Automobilistes" sur le code de la route.

En 1927, il envisage de la changer et s'entoure de nombreux conseils pour en choisir une autre.

Son ami André PERRIER lui écrit le 09 Avril 1927 ; il déconseille la Donnet et la Mathis et préconise la Citroën ou la Peugeot. Pour avoir une bonne Citroën 10CV il faut mettre au moins 50.000 Frs. Il conseille une conduite intérieure. La IICV Renault consomme trop d'essence. Peut-être pourrait-on envisager une AO CV Unic mais elle fait déjà un peu grosse voiture.

Pour acheter cette nouvelle auto, Fernand LEMAIGNEN envisage de vendre une petite table-secrétaire Louis XVI. Il consulte André PERRIER à ce sujet et Louis BONE ébéniste à Vendôme. Ce dernier aurait bien un amateur qui en offre 13.000 Frs au lieu de 20.000 Frs demandés par Fernand LEMAIGNEN (lettre du 25 Avril 1927). Le même jour, André PERRIER écrit que son ami, Monsieur ROBERTET serait intéressé par cette acquisition. Celui-ci écrit à Fernand LEMAIGNEN le 27 Août 1927 : il enverra un ami voir "le petit bureau d'acajou Louis XVI", qui lui plaît beaucoup.

Le 11 Mai 1928, Monsieur BONE parle d'un autre amateur Monsieur POULET qui offrirait 15.000 Frs au lieu de 18.000 Frs demandés.

Le 20 Octobre 1928, André PERRIER écrit :

"Ma mère m'a dit votre incertitude pour l'achat d'une nouvelle voiture ; ne craignez pas d'acheter la Citroën C 4 ; c'est ce que l'on fait de mieux actuellement comme voiture de série. Elle est facile à manier, son moteur est souple, elle dépense peu ; les réparations ne sont pas couteuses et il y a des petits accessoires utiles que n'ont pas d'autres marques. N'ayez pas peur de l'allumage par Delco, Renault le monte maintenant sur ses voitures".

Mais Fernand LEMAIGNEN ne se décidera que le 08 Février 1929, date à laquelle il commande au garage GRANGER à Vendôme une voiture 10 CV Citroën conduite intérieure, peinture bleue, au prix de 25.600 Frs livrable vers le 15 Avril 1929, contre reprise de la voiture Unic 32 K 8 pour 5.000 Frs. Elle sera immatriculée 1493 HX.

Fernand LEMAIGNEN avait vendu sa petite table Louis XVI à Monsieur POULET.

La voiture Unic fut vendue à Monsieur TOURNOIS, entrepreneur de peinture à Oucques (lettre du 10 Septembre 1929).

En 1945 et 1946 il est délivré plusieurs autorisations de circuler dans le Loir-et-Cher et les départements limitrophes conformément à la réglementation de la périodes de guerre.

Cette voiture Citroën fut vendue, après le décès de Fernand LEMAIGNEN à son fermier PILON de Danzé en 1951.

On trouvera en fin de ses carnets des notes sur l'entretien et les graissages de ses autos.

 

 

VIII - Les chiens

 

Fernand LEMAIGNEN, en raison de sa passion de la chasse, a toujours recherché d'excellents chiens de chasse. Il était très difficile dans ses choix et ne voulait que des chiens d'excellente race.

Il a échangé une importante correspondance à ce sujet et il faisait de nombreux déplacements pour aller visiter des propriétaires de chiens à vendre.

Par exemple, on trouve pas moins de 17 lettres pour l'achat d'un pointer "DERR" né le 18 Mai 1907, dont nous avons la photo et le pedigree, appartenant à un éleveur, Monsieur THIBAULT, (lettre du 15 Juin 1909) qu'il a acheté 450 Frs en Août 1909. Fernand LEMAIGNEN écrit le 15 Septembre 1909 qu'il reproche à ce chien :

"Sa trop longue quête. Vous me dites de lui laisser prendre 50 mètres ; il en prend 300 et n'a plus de rappel dès qu'il commence à ouvrir un peu trop sa quête. En le rappelant continuellement je fais partir le gibier et je rentre le soir avec mal de gorge. J'aime à croire que si le chien s'était comporté de cette façon vous ne me l'auriez pas vendu.... Connaissez-vous un autre moyen de lui racoucir sa quête... cependant il a du nez .... il quête dans un galop beaucoup trop actif...."

Monsieur THIBAULT propose le 17 Septembre de reprendre le chien pendant 15 jours pour vérifier les assertions de Monsieur LEMAIGNEN dont il est très surpris. Il le reprend effectivement en 1910 et le renvoie à Fernand LEMAIGNEN le 19 Août 1910, parfaitement dressé.

Cependant DERR n'a pas dû donner satisfaction, car Fernand LEMAIGNEN achète en Avril 1913 moyennant 350 Frs un chien Braque d'Auvergne JIMM à Me SURICAUD, notaire à Saint Bris (Yonne) nous en avons le pedigree.

En Juin 1923, il achète un braque bleu d'Auvergne "Bleuet de Verlac" moyennant 600 Frs après encore un long échange de correspondance avec une amie de Madame LEMAIGNEN, échange de correspondance avec une amie de Madame LEMAIGNEN, Marguerite CHASSAIGNE demeurant à Chinon. Il s'assure que le chien n'a pas de maladie contagieuse. Le 04 Juin 1923, il en accuse réception :

"Bleuet est bien le chien que vous m'aviez dépeint, et que je cherchais ; je vous remercie et suis très satisfait. La gomme qu'il a eue ne m'inquiète nullement. Il est déjà très habitué avec moi et paraît très gai. J'aime beaucoup mes chiens qui sont gâtés, choyés, dressés et traités avec beaucoup de douceur ; ils ne me quittent guère. Je vais d'autant plus m'attacher à Bleuet que mon pauvre Jimm qui était déjà âgé est mort la semaine dernière emporté par une maladie de coeur".

Le 20 Mai 1925, Monsieur CHASSAIGNE demeurant au Lac de Thiers (Puy-de-Dôme) lui annonce l'envoi d'une chienne ZAZA avec son pedigree.

Le 22 Juin 1925, il annonce qu'il n'a aucun chien disponible pour remplacer "Bleuet" qui venait de mourir.

Suivent plusieurs autres lettres de divers propriétaires de chiens et le 31 Août 1925 un Monsieur RINGUET de VATAN annonce l'envoi d'un chien Pyrame, épagneul Breton avec son pedigree.

Après encore plusieurs lettres, notamment avec Monsieur CHASSAIGNE, Fernand LEMAIGNEN achète au début de 1928 au Vicomte de MAUSSABRE, château de Boisrenault par Buzançay un Basset d'Artois ATOUT.

Fernand LEMAIGNEN fait partie de la Société Canine de Maine-Anjou-Touraine et nous trouvons au dossier un bulletin de cette société de Décembre 1929.

A la fin de 1933 il recherche un cocker et correspond avec plusieurs éleveurs en 1934 en vue de l'achat d'un cocker "blanc et orange".

C'est sans doute cette année là qu'il acheta le cocker IRIS, mais nous n'en trouvons aucune trace dans la correspondance.

En Octobre ou Novembre 1936 il achète un Basset Artésien JLLICO, et en reçoit le pedigree le 13 Janvier 1937. Ce chien est mort de vieillesse vers 1950.

Le 29 Décembre 1946, un cultivateur de Rahart lui propose encore un autre chien à essayer. Fernand LEMAIGNEN ne l'acheta pas et n'eut pas d'autre chien.

 

 

IX - La chasse

La chasse fut la grande passion de Fernand LEMAIGNEN. On sait que tout jeune il tuait déjà des moineaux à la carabine pour sa grand mère et qu'il écrivait à Madame DUTHEIL le 17 Mars 1887 (il avait donc 17 ans) : "La chasse est une de mes passions favorites". Il était d'ailleurs excellent chasseur, ne manquant jamais un coup de fusil, et mettait tout son amour propre à tirer le gibier à la distance et sous l'angle le plus favorable pour ne pas l'abîmer.

Il écrivit un court récit "La Môde aux Bécasses" avec son chien Jimm où il relate de façon poétique une après-midi de chasse solitaire au printemps.

Nous avons vu aussi qu'il tenait des carnets de ses chasses presque quotidiennes pendant les périodes d'ouverture où il relevait le nombre et la nature du gibier qu'il avait tué.

Il chassait bien sûr sur ses terres de Périgny, et à Danzé, mais aussi en Sologne chez son ami TAILLARDA et en différents autres endroits ainsi que nous allons le voir.

Le 08 Août 1909, le Docteur COMPAIN, demeurant à Amboise lui cède pour 3 ans à compter du 1er Juillet 1909 une action de chasse à tir dans la forêt d'Amboise appartenant à Madame HIRSCH, sur une contenance de 2356 hectares moyennant le prix de 500 Frs par an (en annexe le règlement de la chasse sur le 2ème lot de la forêt d'Amboise).

(On trouvera à cette date la liste des sonneries de chasse).

Le 25 Novembre 1909, il loue à Monsieur Joseph LEMAIRE, demeurant à Orléans, 12 Faubourg Madeleine le droit de chasse sur ses fermes de Danzé, contiguës à celles de Monsieur LEMAIRE.

Le 13 Mai 1910, il achète un fusil C 16 à éjecteurs automatiques ; platines système Holland pour 1.350 Frs à CHOBERT, armurier, 27 rue Taitbout à Paris.

Le 30 Septembre 1910, DIDIER armurier à Saint-Etienne lui confirme qu'il est possible d'adjoindre un deuxième canon à un autre fusil qu'il possède déjà et lui conseille le calibre 24 ou 20 au prix de 250 Frs.

Le 21 Août 1911, Monsieur Pierre LAURAND propriétaire au Coudray à Périgny loue à Fernand LEMAIGNEN le droit de chasser sur les bois du Coudray pour 6 ans à compter du 1er Août 1911 moyennant 250 Frs par an.

Le 15 Août 1913, le propriétaire de la ferme de Migneray lui donne l'autorisation de chasser sur ses terres.

Le 21 Juillet 1913, le Comte de SARRAZIN demeurant à La Croix (Indre-et-Loire) loue à Fernand LEMAIGNEN et à Me PINEAU, notaire à Nice (frère du Juge de Vendôme qui demeurait rue Guesnault, parent des DATTIN) le droit de chasse sur la ferme de Frileuse, commune de Tourailles moyennant 1 franc par an.

Le 29 Juillet 1913, Louis LEMAIGNEN, son cousin, demeurant à Veillène, lui loue, ainsi qu'à Me PINEAU le droit de chasse sur sa ferme de Libois, commune de Tourailles moyennant 1 franc par an.

Le 30 Juillet 1913, Monsieur Guillaume de la COTARDIERE, demeurant à Blois, 32 Quai Saint Jean, loue à Fernand LEMAIGNEN et à Me PINEAU le droit de chasse sur sa ferme de Villebazin à Villeromain moyennant 1 franc.

Bien entendu, Fernand LEMAIGNEN fait partie du Saint Hubert Club de France.

Le 17 Septembre 1917, il renouvelle pour 6 ans la chasse du Coudray.

Lors de son séjour à la Baule, en Octobre 1920 il prend un permis de chasse pour pouvoir chasser dans la région et notamment dans la Grande Brière (c'est à cette occasion, on l'a vu, que sa jardinière Marguerite CHEVALLIER lui envoie son miroir aux alouettes).

En Octobre 1921, il échange une correspondance avec Me PINEAU demeurant alors à Chambon-sur-Cisse pour apurer leurs comptes de chasse de Frileuse.

En 1921 et 1922, il échange une longue correspondance avec le Docteur COMPAIN et un Monsieur de WALDNER demeurant à Saint-Avertin au sujet du renouvellement du droit de chasse sur le 2ème lot de la forêt d'Amboise dont il trouve le loyer excessif.

Dans ses carnets, à la date du 18 Avril 1922 nous trouvons la mention suivantes : "Convenu avec Monsieur GUERIN naturaliste qu'il me fera ma peau de sanglier en tapis doublé le tout pour 50 Frs".

Le 25 Juillet 1923, le Docteur COMPAIN lui écrit :

"Merci de votre Louis pour ce pauvre Constant. Nous allons arriver à 350 Frs environ. Evidemment, ça ne lui paiera pas une vache, mais enfin il verra qu'on a voulu l'aider. WALDNER, de son côté part en collecte du côté des chasseurs à courre". Que s'était-il passé : accident de chasse, ou les chasseurs ont-ils tué une vache de ce pauvre Constant ?

Le 11 Juillet 1924, Fernand LEMAIGNEN écrivait à Me PINEAU que Monsieur de SACHE, propriétaire de la ferme de Frileuse en avait loué la chasse à son fermier Monsieur THIERCELIN et qu'il ne pouvait donc plus chasser que sur la ferme de Villebazin.

Par acte de Me AUBERT, notaire à Vendôme du 10 Octobre 1930, il loue à Monsieur Ernest WATREMEZ la chasse sur ses fermes de Danzé.

Le 18 Juillet 1930, il loue pour 9 ans une partie de la chasse de la forêt d'Amboise, moyennant 650 Frs par an.

Le 10 Juillet 1939, un Monsieur GRIGNON d'Amboise lui demande s'il veut s'adjoindre à un groupe de chasseur qu'il a constitué pour reprendre la chasse au sanglier en forêt d'Amboise.

 

Fernand LEMAIGNEN avait fait naturaliser plusieurs têtes de sangliers ou de chevreuils qu'il avait tués et qui garnissent encore le vestibule de Périgny.

Il possédait six ou sept fusils, dont le magnifique fusil à platine Holland acquis en 1910. Il dut déposer ces fusils aux autorités militaires allemandes pendant l'occupation et ils ne lui furent jamais rendus. Après la guerre il chassait avec un fusil qui lui avait été prêté par la famille PERRIER.

Fernand LEMAIGNEN aimait aussi la pêche qu'il pratiquait dans le Loir, la Houzée ou le Cher. Il pêchait souvent les écrevisses dans la Houzée avec ses filles.

Il confectionnait lui même ses cartouches, du moins après la guerre de 1939.

Comme il soufrait de rhumatismes et arthrose à la fin de sa vie, il ne pouvait plus faire de grand parcours de chasse. Il emportait un pliant et attendait le passage des perdreaux ou des alouettes. Il avait confectionné des "cachets" dans le parc de Périgny, d'où il tirait les grives ou les pigeons.

Il chassa jusqu'à la fin de sa vie et c'est en rentrant d'une ultime après midi de chasse dans les champs de Piterna qu'il fut pris par les douleurs d'un ulcère d'estomac dont il mourut quelques jours plus tard, après avoir tué son dernier perdreau.

 

 

X - Location de la maison, 14 rue Traversière à Tours

 

Fernand LEMAIGNEN habitait, on le sait 28 rue Jules Simon à Tours, après avoir habité rue Bernard Palissy dans la maison de ses parents. En 1930, les propriétaires de la maison, 28 rue Jules Simon voulurent la vendre et donnèrent congé.

La loi accordait alors une prorogation de 5 ans aux locataires. C'est pourquoi Fernand LEMAIGNEN chercha alors à acheter une maison.

Le 29 Mars 1935, il loue pour 3, 6 ou 9 années à compter du 25 Juin 1935 une maison à Tours, 14 rue Traversière appartenant à Madame la Générale BAILLOUD moyennant un loyer annuel de 7.000 Frs, la propriétaire prenant en charge l'installation de chauffage central à charge par Monsieur LEMAIGNEN de payer un intérêt de 4 % l'an du montant des travaux (660 Frs d'intérêts).

La Générale BAILLOUD accuse régulièrement réception des loyers. Le 30 Décembre 1936 elle écrit : "Votre exactitude m'est bien précieuse et je vous en remercie sincèrement". En lui envoyant son loyer, Fernand LEMAIGNEN lui écrivait le 22 Décembre 1938 qu'il avait été assez gravement malade il y a un mois ayant eu une congestion pulmonaire ce qui l'obligeait à prendre encore des précautions.

En 1942, il fait effectuer diverses réparations à un plafond effondré et au chauffage central, alors que cette maison était en partie occupée par des réfugiés. La famille LEMAIGNEN depuis le début de la guerre habitait toute l'année à Périgny et ne revint jamais à Tours sauf quelques rares séjours de courte durée de Madame LEMAIGNEN et des ses filles. Puis la maison fut occupé par les Allemands depuis Septembre 1943.

Puis la maison est réquisitionnée après la libération et Fernand LEMAIGNEN ne peut en reprendre possession ainsi qu'il l'écrit à la Générale BAILLOUD le 02 Décembre 1945, ajoutant : "Je tiens aussi, Madame, à vous faire part du prochain mariage de ma fille aînée (Cécile) avec Monsieur Jacques AUBERT, prisonnier de guerre libéré. Il prend l'Etude de son père, notaire à Vendôme, décédé pendant sa captivité. Inutile de vous dire que vous sommes heureux d'avoir notre fille près de nous".

Le dernier reçu de loyer est du 25 Juin 1946.

Madame LEMAIGNEN va pouvoir enfin aller à Tours procéder au déménagement de son mobilier et le ramener à Périgny.

 

 

XI - La comédie "MARRAINE de GUERRE"

 

Vers 1933, Fernand LEMAIGNEN écrit une petite comédie en 1 acte "Marraine de Guerre" écrite d'un style alerte, plein d'humour mais très marquée par la mentalité cocardière de l'après guerre et dont le sujet est assez mièvre.

Il s'agit d'une jeune fille, Simone de la JAUDRAIE, orpheline vivant avec sa tante, vieille fille, au château de la Jaudraie en Sologne en 1918. Elle est marraine de guerre d'un soldat Robert DALANOUE, qu'elle n'a jamais vu mais à qui elle écrit et envoie des colis. Robert DELANOUE lui adresse des lettres fort joliment tournées qui ne laissent pas sa marraine indifférente. La pièce commence alors qu'il arrive en permission et Simone de la JAUDRAIE est tout émue à l'idée de cette première rencontre. Mais il s'avère que Robert DELANOUE, excellent garçon est un ouvrier agricole illettré et que les lettres ont été écrites par son lieutenant, à qui il a sauvé la vie à la guerre, Guy de la FOUCARDIERE, que Simone de la JAUDRAIE avait d'ailleurs entrevu avant la guerre. Ce dernier arrive d'ailleurs à l'improviste au château et dévoile que c'était bien lui qui répondait aux lettres de Simone de la JAUDRAIE. Tout s'arrange pour le mieux : Simone et Guy de la FOUCARDIERE vont se fiancer et Robert DELANOUE, à qui son Lieutenant achète incontinent une ferme pour le récompenser de lui avoir sauvé la vie, épousera Mélanie la domestique. La pièce se termine sur les dernières répliques de Guy et de Simone :

Guy : "Ce petit clocher que j'aperçois là bas au milieu de la verdure, à l'abri duquel nous aimerons à prier, par son joyeux carillon annoncera bientôt la victoire ; nous pourrons alors devant le Saint Autel échanger nos serments. Mais dès aujourd'hui faisons la promesse de ne jamais oublier ceux qui pour la Patrie son tombés".

Simone : "Puis nous apprendrons à nos enfants, n'est-ce pas chère Mélanie, à aimer Dieu de tout leur coeur et à bien servir la France". Rideau.

Cette petite comédie fut jouée à Tours en 1938 (le 27 Mars) au profit des Ecoles Libres, par une troupe d'amateur et Cécile LEMAIGNEN y tenait le rôle de Simone de la JAUDRAIE.

 

Le 21 Décembre 1937 Me René JUPIN, avocat à Tours dont la femme animait cette troupe d'amateurs écrivait "Dans l'ensemble votre bleuette est excellente et mérite d'être jouée. Je crois qu'elle plaira ; mais elle a besoin d'être rendue par d'excellents acteurs. Le genre bleuette ne supporte pas la médiocrité", et il conseille quelques retouches de détail.

 

Madame LEMAIGNEN essaye de faire éditer la comédie de son mari. Elle écrit aux éditions "Mon Théâtre", 78 avenue Saint-Jean à Niort, mais le directeur Monsieur BOULORD lui répond le 08 Février 1939 qu'il ne peut publier cette comédie parce qu'elle comporte des rôles mixtes !

Fernand LEMAIGNEN s'adresse aussi à la librairie ENAULT à Mamers qui accepte de recevoir le manuscrit le 15 Février 1939 mais annonce le 08 Mars qu'il ne peut l'éditer, sans indiquer le motif.

Fernand LEMAIGNEN fait une dernière tentative auprès "Des Livres Nouveaux", 56 rue de l'Université à Paris.

Par lettres des 16 Mai et 22 Mai, cette maison d'édition accepte de recevoir le manuscrit et en accuse réception le 31 Mai. Mais nous n'avons aucune trace de la réponse.

 

XII - Les acquisitions immobilières

 

Fernand LEMAIGNEN conserva toutes les propriétés immobilières dont il avait hérité de ses parents, à l'exception de la ferme de la Chaise à Chemille-sur-Deme qu'il vendit, on le sait en 1922 pour subvenir aux dépenses occasionnées par la maladie de son beau-père.

Il vendit cependant le 11 Août 1939, 62 ares 40 centiares de terre aux Cartes commune de Villemardy pour 4.000 Frs, un pré à Veteuil commune de Périgny le 07 Décembre 1948 pour 3.000 Frs et diverses parcelles de terres et prés à Couture le 09 Février 1951 pour 200.000 Frs.

En revanche il acheta :

- Le 07 Décembre 1908, 20 ares 68 centiares de terre à Villerat commune de Périgny.

- Le 04 Février 1909, 7 ares 75 centiares au même lieu.

- Le 08 Août 1928, 7 ares 30 centiares à la Fosse à l'Ormeau.

- Le 22 Août 1939, la pâture "Gourdet" devant la ferme LOISEAU à l'angle du chemin de Piterna.

- Le 20 Juillet 1942, le verger dit "du père GABLIER" le long de la rivière Saint-Martin et une petite maison démolie depuis.

- Le 08 Janvier 1947, une petite parcelle qui faisait hache dans ses terres le long de la route de Blois.

En outre il fit plusieurs échanges en 1930 et 1931.

 

 

XIII - Mairie de Périgny

1 décembre 2018

Saga Bezard-Lemaignen 4/4

 

 

XIII - Mairie de Périgny

Fernand LEMAIGNEN a été conseiller municipal de Périgny du 1er Mai 1904 au 30 Août 1944 sans interruption et Maire de Périgny, également sans interruption du 10 Décembre 1919 jusqu'au 30 Août 1944.

 

Il a soigneusement noté sur trois registres depuis le 1er Juillet 1921 jusqu'au 30 Août 1944, toutes les activités à la mairie (délivrance de pièce administratives, travaux communaux, réunion du conseil municipal etc....). Il se rendait à la mairie presque chaque jour.

Quand il n'était pas à Périgny, il se faisait remplacer par son adjoint (Aurèle GIRARD, puis Rémy LOISEAU).

Pendant l'occupation allemande de Juin 1940 à la fin d'Août 1944, il dut faire face à de nombreuses demandes de renseignements de la part des autorités allemandes et de l'administration française, sur les réfugiés dans la commune, les prisonniers de guerre, les réquisitions de denrées alimentaires etc... Il dut, à plusieurs reprises se porter personnellement garant, sous peine d'arrestation, de l'ordre vis-à-vis des troupes d'occupation.

Le 14 Juin 1940, il reçoit de la Préfecture le télégramme suivant :

"Autorité Militaire prescrit évacuation enfants au-dessus de 13 ans et hommes mobilisables en exclusion de tout autre. Prière d'inviter d'urgence les intéressés à se rassembler chef lieu de canton le plus voisin où ils seront ramasser par camion dans la nuit du 14 au 15 à partir de 5 heures du matin".

 

Le 10 Août 1942, il écrit à "Monsieur l'Officier de Chasse de la Feldkommandantur à Blois", pour demander l'autorisation de remettre son fusil de chasse à son garde champêtre, nouvellement nommé pour assurer le maintien de l'ordre public. Par télégramme du 14 Août le Préfet de Loir-et-Cher lui répond :

"Prière remettre extrême urgence à la Préfecture votre arme et autorisation correspondante. Autorités d'occupation rejettent votre demande".

Ainsi disparut son beau fusil auquel il tenait tant.

Après le départ des troupes d'occupation dans la région en Août 1944, les comités locaux de libération mirent fin à l'activité des municipalités qui relevaient de l'administration du gouvernement de Vichy. Vers le 31 Août (ou, au plus tard, les tous premiers jours de Septembre), Fernand LEMAIGNEN reçu la visite de Marcel COLIN, cultivateur à la Poterne, et de quelques autres habitants de Périgny qui lui signifièrent qu'il n'était plus Maire de la commune, sans autres explications. Ses opinions politiques ne correspondaient plus à celles du moment. Ainsi prirent fin brutalement les fonctions de Maire que Fernand LEMAIGNEN avait exercées avec dévouement, sans interruption pendant 35 ans.

Il demeure cependant membre du conseil municipal puisqu'il est convoqué à une séance du conseil le 29 Avril 1945 en vue de la formation du bureau pour les futures élections municipales.

 

En sa qualité de Maire il présida plusieurs fois aux fêtes de la Saint Vincent, patron des vignerons et cultivateurs de Périgny, et nous avons conservé deux petits discours, plein d'humour, qu'il fit au cours du banquet de ces fêtes.

On trouve aussi, dans ce dossier, le texte d'une allocution qu'il prononça lors de l'enterrement à Périgny de l'Abbé BOULAY qui en avait été curé et le programme d'une fête patronale de la paroisse de Saint-Lubin à Périgny, à l'occasion de la bénédiction d'une statue de Sainte Jeanne d'Arc par Monseigneur MELISSON, évêque de Blois, le 17 Septembre 1922.

Une séance récréative avait déjà été donnée à Périgny le 30 Avril 1922 par les enfants et jeunes gens de la commune pour l'érection de cette statue.

 

 

XIV - Les dernière années

 

Le cinquième et dernier carnet de Fernand LEMAIGNEN commence en 1940. Il contient peu de renseignements de 1940 à 1944. A partir de cette date des détails plus complets sont mentionnés, comme dans les carnets précédents sur les ventes de récoltes, de bois, paiement des impôts, encaissements des coupons des valeurs de bourse, comptes de la Société Générale, comptes avec les domestiques etc... comme ils l'étaient sur les 4 carnets précédents.

On peut relever les annotations suivantes :

"8 Octobre 1946. Le ménage SEVRE a quitté mon service (Huguette et Henri). Le 4 Février 1946 j'avais convenu avec eux du prix de 3.000 Frs par mois".

"1er Mars 1947 : convenu avec Roger MARTIN et Jacqueline qu'à partir d'aujourd'hui je les paierai 4.000 Frs par mois".

"Marguerite CHEVALLIER née GREGOIRE est entrée chez moi le 15 Mars 1947".

"Lucienne HUET a été engagée début 1947".

"19 Juillet 1947 : prévenu Jules Roger MARTIN et Jacqueline CLEMENT sa femme, devant CURET garde champêtre, qu'il ne restent pas à mon service".

"2 Août 1948 : engagé le ménage GAULUPEAU le 1er Juillet 1948. 6.000 Frs par mois".

"18 Août 1948 : nous avons vendu les 7 et 9 Août la maison rue Marceau à Chinon à RIOU pour 575.000 Frs".

"4 Avril 1950 : engagé le ménage René FRAIN et Marie LUBINEAU".

"9 Février 1951 : j'ai vendu à Pierre HERVE les prés de Couture et deux morceaux de terre pour 200.000 Frs".

 

Comme on le voit, Fernand LEMAIGNEN eut bien du mal à retenir un ménage de jardinier après le départ du ménage SEVRE qui avait remplacé le ménage CHEVALLIER après que Ludovic CHEVALLIER se soit pendu dans l'étable en 1936. Le ménage CHEVALLIER étaient employé à Périgny depuis 1913.

Ces jardiniers s'occupaient de l'entretien de la propriété de Périgny et de ce que Fernand LEMAIGNEN appelait son "petit élevage" ; jusqu'à son décès il avait conservé deux vaches et une bique, ce qui lui permettait d'avoir lait, beurre et fromage.

 

 

XV - La période de la guerre de 1939 - 1945

 

Le 17 Août 1939, Fernand LEMAIGNEN reçoit une lettre de son ami HENNISSART qui le félicite de l'annonce des fiançailles de sa fille Cécile avec un cousin des JUPIN de Tours, le docteur Michel BONVALLET.

Le 17 Septembre 1939, l'adjoint au Maire de Périgny délivre à Fernand LEMAIGNEN un sauf conduit pour lui permettre de se rendre avec sa famille, en automobile à Bourges dans la famille du fiancé de Cécile.

En Janvier 1940, Fernand LEMAIGNEN réunit les pièces militaires et administratives nécessaires en vue de la publication du mariage de l'adjudant médecin Pierre BONVALLET.

Le 15 Janvier, il intervient auprès du Sénateur PICHERY pour faire obtenir à son futur gendre les galons de sous-lieutenant.

Mais Michel BONVALLET rompit les fiançailles qu'il avait contractées avec Cécile LEMAIGNEN. Fernand LEMAIGNEN lui écrivit une lettre dont nous avons le brouillon en 2 exemplaires pour le faire revenir sur sa décision, mais en vains.

Au début de la guerre de 1939, une unité d'artillerie est en formation dans la région de Périgny, et la famille LEMAIGNEN reçoit plusieurs officiers à sa maison, notamment l'Abbé COMMAILLES, alors capitaine d'artillerie qui remercie par lettre du 27 Novembre 1939 de l'hospitalité qui lui a été donnée. Il devint ensuite professeur à Notre Dame des Aydes à Blois.

Le 13 Novembre, le Vicaire Général BOULLIAUD annonce le départ du curé HOUDIARD nommé à Fossé. C'est l'Abbé DELORD, curé de Selommes qui desservira Périgny, mais il faudrait que les paroissiens contribuent à l'achat d'une voiture neuve pour assurer les dessertes. Cette auto fut achetée, mais les allemands l'ont réquisitionnée dès leur arrivée dans la région.

Le 1er Décembre, l'aumônier divisionnaire ROBIN (devenu depuis Evêque de Blois) informe Fernand LEMAIGNEN qu'il ne pourra plus le confesser, en raison de son service aux armées.

 

On trouve à la date du 28 Mai 1940, dans la correspondance une lettre adressée à un lieutenant Pierre LAVOIX, par sa mère qui relate la capitulation de la Belgique et l'entrée en guerre imminente de l'Italie. Qui est ce lieutenant LAVOIX ? Peut-être était il de passage à Périgny après la débâcle militaire ?

 

Le 15 Juin 1940, Fernand LEMAIGNEN se rend à Vendôme pour obtenir des renseignements à la sous-préfecture sur les ordres d'évacuation de la population. Mais Vendôme vient d'être évacué et sera bombardé dès le retour de Fernand LEMAIGNEN à Périgny. La famille LEMAIGNEN quitte alors elle même Périgny et se rend à Lussac-le-Château (Vienne) du 20 Juin au 25 Juin ainsi que l'atteste un certificat du Maire de cette commune (chez Madame Renée DUPONT de LIVARDIERE, cousine éloignée de Madame LEMAIGNEN).

Pendant cette période de débâcle et d'exode, Fernand LEMAIGNEN reçoit plusieurs lettres de diverses personnes demandant des nouvelles de leur famille égarée sur les routes.

Le 11 Juillet 1940, une dame PIGOREAU, réfugiée en Dordogne lui demande des nouvelles de ses parents restés à Périgny.

Le 26 Juin, Louis PERRIER demande si sa fille Jocelyne est à Dotton. Si oui, qu'elle rejoigne son beau frère DAYRAS qui est attaché au Président du Conseil à Bordeaux.

Le 16 Juillet, c'est André PERRIER qui demande des nouvelles de sa famille et relate son odyssée pendant l'exode. Il s'inquiète de savoir ce qu'est devenue sa propriété de Dotton. Il est intéressant de relire cette lettre qui retrace tout l'affolement de l'exode et les impressions d'André PERRIER sur la triste situation du pays.

Le 18 Juillet, Louis PERRIER, réfugié près de Tulle accuse réception de la réponse de Fernand LEMAIGNEN à sa lettre du 26 Juin. Il ne croyait pas la recevoir si tôt. Sa fille Jocelyne avait tenté de rejoindre Dotton mais elle a gagné Bordeaux pour rejoindre le cabinet du Maréchal PETAIN. Il dépeint son voyage de Vendôme à Tulle sous les bombardements. André est rentré à Paris et sa femme Jane est arrivée à Tulle mais va rejoindre Paris.

Le 10 Décembre 1940, les Maires de Périgny et de Villeromain adressent une pétition au sous préfet de Vendôme pour qu'il soit remédié au manque total de communication de ces communes avec Blois et Vendôme par suite de la pénurie d'essence.

Cependant la vie reprend peu à peu son cours. Le 20 Décembre 1940, Henri MARTIN demande à Fernand LEMAIGNEN de lui envoyer des photos (troupeaux de moutons, effets de nuages sur le Loir) pour illustrer la thèse de son fils Jean. Le 12 Juillet 1941, il lui annonce les fiançailles de Jean avec Mademoiselle Jacqueline DUVAL qu'il connaît depuis plusieurs années et qui est élève à l'Ecole des Chartes. Elle n'a plus sa mère qu'elle a perdu à l'âge de 6 ans. Son éducation a été faite dans un couvent. Son père et son frère aîné dirigent une importante concession en Indochine. Le second sort de Polytechnique et le troisième de Navale.

Le 14 Septembre 1942, André PERRIER invite Monsieur et Madame LEMAIGNEN et leurs filles au mariage de Janine le 03 Octobre. Monsieur et Madame LEMAIGNEN pourront ainsi fêter avec eux leurs noces d'argent qui tombent le 04 Octobre. Fernand LEMAIGNEN prononça au cours de ce mariage une charmante allocution dont nous avons le texte, où il évoque les relations amicales entre les familles PERRIER et LEMAIGNEN, par l'intermédiaire des TAILLARDA, depuis "5 générations".

Le 02 Août 1943, Fernand LEMAIGNEN signale que la foudre est tombée sur le clocher de Périgny.

Son jardinier Louis SEVRE, alors prisonnier de guerre lui écrit le 22 Août 1943 ayant entendu dire que sa femme n'était pas heureuse à Périgny et que Fernand LEMAIGNEN ne respectait pas les conditions de travail convenues. Fernand LEMAIGNEN le rassure et Louis SEVRE l'en remercie le 26 Septembre 1943.

Le 21 Février 1944, Victor HERVE lui signale des réparations à faire à sa maison de Couture et l'informe que le bail avec les PTT doit être renouvelé.

En Août 1944, Cécile et Mathé se rendent à bicyclette à Veillène chez leur cousin Robert LEMAIGNEN où elles font un court séjour, et Fernand LEMAIGNEN remercie du bon accueil qui leur a été réservé.

Le 07 Novembre 1944, son ami Maurice HAMAR, alors détenu au camp de Pithiviers pour faits de collaboration, regrette de ne pouvoir participer au traditionnel déjeuner d'alouettes du 11 Novembre.

 

 

XVI - Le mariage de Cécile LEMAIGNEN

 

Après la rupture de ses fiançailles, Cécile LEMAIGNEN était allée faire ses études d'infirmière à Paris. Elle y rencontrait fréquemment Monsieur et Madame André PERRIER et leur fille Janine qui avait épousé Etienne PETIT. Celui-ci s'était réfugié pendant une partie de la guerre à Dotton pour échapper au service du travail obligatoire (SOT) en Allemagne. Ayant obtenu son diplôme d'infirmière, elle se destinait à l'assistance sociale.

Durant l'été 1945, elle rencontra Jacques AUBERT qui était rentré de captivité le 15 Juin 1945 et dont les parents connaissaient bien la famille LEMAIGNEN. Me Edmond AUBERT, son père, était le notaire de Fernand LEMAIGNEN pour ses biens de Danzé, et il était fréquemment invité à Périgny. Cécile avait été invitée au mariage de son amie Monique AUBERT avec Jean PAPIN en Février 1941.

Un ami des deux familles, Jean ROLLAND, qui demeurait à Vendôme, 16 Place Saint-Martin, fils du prédécesseur de Me Edmond AUBERT, fait part dans 3 lettres datées des 24 Août, 29 Août et 04 Septembre 1945 du projet de mariage entre Jacques AUBERT et Cécile LEMAIGNEN qui se fiancent le 21 Octobre (lettre de Jean ROLLAND du 23 Octobre).

Fernand LEMAIGNEN fait part de ces fiançailles à Victor HERVE le 15 Novembre, en réponse à une lettre de ce dernier à propos du loyer de la maison de Couture.

Le 15 Novembre, Fernand LEMAIGNEN remercie Monsieur André ROLLAND (frère de Jean) de ses félicitations pour les fiançailles de sa fille :

"D'après tout le bien que j'entends dire du jeune homme, j'espère que Cécile sera heureuse et nous sommes enchantés de l'avoir près de nous. Nos remerciements doivent s'adresser aussi à votre cher frère Jean qui aura contribué pour une grande part à ce mariage".

Le mariage est célébré à la mairie de Vendôme le 08 Janvier 1946, Fernand LEMAIGNEN n'ayant pas voulu que sa fille soit mariée par son successeur à la mairie de Périgny, et le mariage religieux à l'église de Périgny le 09 Janvier.

 

 

XVII - De 1946 à 1951

 

Après le mariage de sa fille, Fernand LEMAIGNEN continue à vivre à Périgny.

Il a déménagé la maison qu'il louait, 14 rue Traversière à Tours en Mars ou Avril 1946 (lettre de Monsieur MARCONNET, Architecte à Tours du 29 Avril 1946 lui disant qu'il serait candidat à la location de cette maison qu'il vient de quitter).

Le 24 Juin 1946, son cousin Robert LEMAIGNEN le remercie des condoléances qu'il vient de lui adresser à l'occasion de la mort, à la guerre d'Indochine de son fils Henry.

Il emploie toujours le ménage SEVRE comme jardinier, mais celui-ci se plaint de n'être pas assez payé (29 Septembre 1946) et le quitte le 08 Octobre. Il fut remplacé par divers autres ménages de jardiniers jusqu'au décès de Fernand LEMAIGNEN, ainsi qu'on l'a vu plus haut.

Madame MESCHIN avait toujours continué à habiter avec sa fille et son gendre tant à Tours qu'à Périgny où elle décéda le 10 Janvier 1949.

Fernand LEMAIGNEN a continué jusqu'à son décès à entretenir sa propriété de Périgny et à tailler soigneusement les allées du parc, ce qu'il appelait "faire les voutes", bien que ses rhumatismes l'empêchaient de monter aux échelles avec la même agilité que par le passé.

Il ne faisait plus de photos depuis le début de la guerre mais il aimait toujours faire des travaux de menuiserie utilisant des planches de chênes, peupliers ou merisiers de ses bois qu'il faisait débiter.

Jusqu'à ses derniers jours, il continua la gestion de ses fermes, mais ses revenus s'étant encore amenuisés en raison de la dévaluation de la monnaie, les réparations à faire aux bâtiments lui occasionnaient de graves soucis financiers.

Bien entendu il chassait toujours, mais le temps des grandes chasses au sanglier en forêt d'Amboise ou ailleurs avait pris fin avec le début de la guerre. On a vu que c'était en rentrant d'une dernière chasse aux perdreaux dans la plaine de Piterna qu'il fut atteint d'un ulcère d'estomac. Il fut transporté aussitôt à la clinique du Docteur CHEVALLIER à Vendôme où il décéda d'une crise d'urémie 3 jours plus tard, le 12 Septembre 1951.

Il eut la joie de connaître ses trois premiers petits enfants avec qui il aimait jouer à Périgny.

Tours les soirs, après le dîner, il s'asseyait dans un fauteuil de la salle à manger et récitait son chapelet. Il avait une foi profonde et solide.

Il était grand et mince, avec des yeux bleus et des cheveux châtain clair. Il était un peu voûté à la fin de sa vie et marchait difficilement, appuyé sur une canne en raison de son arthrose et de ses rhumatismes.

Il a laissé le souvenir d'un homme de grand bon sens, parfaitement intégré et même scrupuleux, souvent indécis par excès de scrupule, aux réparties fines et vives, aimant plaisanter, très bon et très sensible.

 

 

Madame LEMAIGNEN, née Marie MESCHIN

 

Mademoiselle Marie-Thérèse LEMAIGNEN

 

Après le décès de son mari, Madame Marie MESCHIN, épouse de Monsieur Fernand LEMAIGNEN, continua à habiter à Périgny et à entretenir la propriété avec sa fille Marie-Thérèse.

Elle conserva le ménage de jardiniers (RINGEVAL remplacé par le ménage FRAIN, puis par le ménage SAUVET et le ménage LAISEMENT) pour entretenir la propriété et la "Petite Culture" exploitée par Fernand LEMAIGNEN, et elle conserva également pendant quelques temps sa domestique Berthe LUBINEAU. Elle cessa cette culture et vendit la vache en 1965.

Pour faire face au paiement des droits de succession à sa charge (519.275 A.F.) (le paiement de ceux à la charge de ses filles ayant été différé à son décès, en qualité d'usufruitière) et de plusieurs dépenses courantes, elle dû vendre certains meubles à Monsieur BACHELIER, antiquaire à Tours et à Monsieur JUHEL, antiquaire à Blois (environ 150.000 A.F.).

Les fermages, après paiement des impôts et des réparations, ne lui laissaient qu'un maigre revenu.

Dès l'année 1952, elle aménagea la cuisine actuelle près de la salle à manger, à la place de l'ancienne cuisine, inconfortable, à l'autre extrémité de la maison.

En Décembre 1952, la vieille Citroën est remplacée par une 4 CV Renault (437.622 A.F.).

En 1953, elle vendit la coupe des sapins du "Bois de Sapins" aux Houillères du Nord et du Pas de Calais (1.200.000 A.F.) et replanta ce bois ; mais une partie seulement des sapins survécurent.

Une partie du mur de la vieille cuisine de la maison de Périgny menaçant de s'écrouler a été reconstruite en 1958 et il y a été aménagé une fenêtre au-dessus de l'ancien "potager" qui a été supprimé.

Monsieur Jacques PETIT, meunier du Moulin de Bezard ayant cessé son activité de meunier, la roue en fer du moulin fut vendue le 03 Mars 1959.

Madame LEMAIGNEN possédait une maison à Chinon, 5 rue Marceau (voir dossier MESCHIN). Par suite du départ de la locataire, Madame DELANNOY, cette maison fut vendue à Monsieur AUDEBERT, par acte de Maître JANVIER, notaire à Chinon, du 1er Juillet 1959, moyennant le prix de 5.000.000 A.F., ce qui permit à Madame LEMAIGNEN de faire divers travaux d'amélioration à la maison de Périgny, notamment l'installation du chauffage central et les peintures extérieures.

En 1962, la commune de Couture acheta une parcelle de terre de 841 M2 située au sud de la maison qui appartenait à Monsieur Fernand LEMAIGNEN. Cette vente fut régularisée le 30 Mars 1963, moyennant le prix de 5.000 Frs.

Par suite de cette vente, Madame LEMAIGNEN et ses filles vendirent deux autres parcelle de ce terrain (913 M2 et 1.449 M2) moyennant les prix de 3.652 Frs et 6.500 Frs, les 30 Mars 1963 et 21 Mars 1964.

Ces terrains étaient loués à Monsieur Victor HERVE de Couture.

Les bâtiments de la ferme de la Chevecière à Périgny, loués à Monsieur Henri NOUVELLON ayant besoin d'importantes réparations, lui furent vendus le 30 Septembre 1966 pour 30.000 Frs.

La 4 CV Renault fut remplacée par une 4 L Renault, le 08 Novembre 1967.

 

Monsieur Lucien PILON, locataire de la ferme de la Foresterie à Danzé ayant cessé sa culture, fut remplacé par Monsieur Marcel CHAUVIN qui était déjà locataire de la ferme de l'Usage, contiguë, et il occupa les bâtiments de la ferme de la Foresterie.

Les bâtiments de la ferme de l'Usage furent vendus comme résidence secondaire à un parisien, Monsieur LENOIR, le 20 Février 1971, moyennant 35.000 Frs.

La maison de Couture ayant été libérée par le Bureau de Poste qui l'occupait depuis de nombreuses années, fut vendue à Monsieur et Madame SAUNIER-LAFAILLE, le 20 Novembre 1973, moyennant le prix de 200.000 Frs.

En 1974 et 1975, il fut apporté diverses améliorations à la maison de Périgny, notamment la réfection du carrelage du vestibule, l'aménagement d'une salle d'eau et d'un cabinet de toilette et la réfection des chambres.

François AUBERT devant acheter une pharmacie à Vendoeuvres, il fut pris la décision de vendre la ferme de Mons à Marolles-les-Saint-Calais (72) qui appartenait à la famille LEMAIGNEN depuis 1573.

Les bâtiments et environ la moitié des terres furent vendus au fils du fermier, Monsieur Alain BRETON, et l'autre moitié des terres à Monsieur DURAND MOLLIERE, le 26 Août 1975, moyennant le prix de 635.000 Frs. (En 1965, il avait été construit deux chambres et une salle d'eau dans cette ferme ce qui avait entraîné une dépense d'environ 26.000 Frs).

Il fut convenu avec François AUBERT et Catherine MANSION, sa femme, le 25 Décembre 1975 qu'ils paieraient à Madame LEMAIGNEN, usufruitière, les intérêts à 4 % des 635.000 Frs qui leur avaient été remis en vue de l'achat de leur pharmacie.

La moitié de cette somme revenant à sa fille Marie-Thérèse, après le décès de Madame LEMAIGNEN, étant après révision, de 387.390 Frs fut stipulée remboursable à Mademoiselle LEMAIGNEN en 80 trimestrialités avec intérêts à 4%.

Madame LEMAIGNEN eut une grave crise cardiaque en Février 1977, mais elle s'en rétablit parfaitement et demeura toujours aussi lucide, quoique peut-être un peu moins active.

Elle décéda d'une congestion cérébrale à l'hôpital de Vendôme le 09 Septembre 1978, à l'âge de 91 ans.

Comme on vient de le voir, elle a toujours été harcelée au cours de son veuvage par des problèmes financiers, les revenus des ses fermes, après paiement des impôts et des réparations et l'entretien de la propriété de Périgny, ne lui laissant que de maigres revenus.

Elle eut la joie de voir le mariage de son petit fils François, de faire la connaissance de la fiancée de son petit fils Marc (Véronique MODOT) et d'apprendre la vocation de son petit fils Pierre qui n'était pas encore ordonné prêtre à son décès.

Elle était appelée familièrement "NININ" par son petit fils Jean et ce surnom fut adopté par sa famille.

Elle a laissé le souvenir à ses enfants et petits enfants d'une grande dame, très bonne et distinguée, cherchant toujours à leur faire plaisir et les accueillant avec joie dans sa propriété de Périgny, racontant ses nombreux souvenirs tant sur sa famille que sur celle de son mari, ce qui contribua à en écrire l'histoire.

 

 

Mademoiselle Marie-Thérèse LEMAIGNEN

 

Après le décès de sa mère, Mademoiselle Marie-Thérèse LEMAIGNEN appelée familièrement MATHE, continua à habiter seule à Périgny et à entretenir la propriété comme elle l'avait fait depuis le décès de son père. Elle se donnait beaucoup de mal, avec l'aide d'un jardinier occasionnel, à cultiver des fleurs et des légumes, notamment dans le jardin potager appelé "Jardin du Père Gablier", et elle en vendait une partie.

Elle faisait des tricots à façon et élevait des poules.

Elle vivait entourée de nombreux chats.

Comme du vivant de sa mère, elle venait à Vendôme, au moins tous les vendredis et continua à recevoir sa soeur et ses neveux (et petites nièces) chaque week-end à Périgny ou pendant les vacances.

Elle fit le catéchisme pendant un certain temps.

Elle participait de façon très active à la vie du secteur paroissial et recevait fréquemment à déjeuner le curé de Selommes.

Sa vie de célibataire dans la grande propriété de Périgny ne fut pas toujours gaie, mais elle aimait son indépendance.

Elle était de constitution robuste et menait une vie très active.

Elle décéda brusquement après une courte maladie qui n'a jamais été expliquée (empoisonnement, atteinte d'un virus ?) le 20 Août 1981 à l'hôpital de Tours, où elle était transportée après un séjour de huit jours à la clinique Saint-Coeur de Vendôme, à l'âge de 61 ans.

Ce décès brutal fut vivement ressenti par sa famille.

Cécile LEMAIGNEN, sa soeur, se retrouvait seule survivante de sa famille et il était pénible de ne pouvoir plus être accueilli à Périgny dans une maison habitée.

Elle continua cependant à y venir avec son mari et ses enfants, lors de chaque week-end et à y habiter en permanence pendant les vacances.

D'important travaux de remise en état furent entrepris dans le parc qui était envahi par la végétation, et il fut procédé au nettoyage et au débarras des greniers, vieille cuisine et armoires où s'étaient accumulés les reliefs de plusieurs générations.

Cette remise en état fut d'ailleurs accélérée pour préparer la réception qui fut donnée lors de l'Ordination de Pierre AUBERT, le 20 Juin 1982.

La maison de Périgny étant devenue inoccupée après le décès de Mathé, deux vols importants y furent commis, l'un le 23 ou 24 Avril 1982 (notamment des garnitures de cheminée, vases de Daum, plat de porcelaine de la Compagnie des Indes, argenterie, éventail, rouets, nécessaire d'ouvrage de dame et nécessaire de voyage provenant de Madame DUTHEIL) et l'autre le 03 Novembre 1982 (commode rustique Louis XV, fontaine et bassin en cuivre, service en étain du vestibule). Une installation d'alarme fut posée par la Société ALPEC après le premier vol. Elle fonctionna lors du deuxième vol, mais les voleurs eurent le temps d'emporter rapidement les objets ci-dessus.

A la suite du décès de Mademoiselle Marie-Thérèse LEMAIGNEN, il fallut payer les droits de succession à la charge de sa soeur (45 %) qui s'élevèrent à 947.652 Frs.

Un premier acompte de 447.652 Frs fut payé le 15 Février 1982 à l'aide notamment du produit de la vente du Moulin de Bezard (vendu à Monsieur BRIANCHON - acte Me FORRER du 26 Janvier 1982), moyennant 200.000 Frs et de la vente d'une pièce de terre Z.H 20 sur Danzé, de 12 hectares 61 ares 50 ca (acte de Me FORRER du 04 Février 1982), moyennant 230.000 Frs.

Le surplus des droits fut fractionné en dix versements semestriels de 50.000 Frs avec intérêts à 9,50 %.

La propriété de Périgny devint le centre de rassemblement des enfants de Cécile AUBERT et ils y demeurent très attachés, tant en raison de son agrément, que pour les souvenirs familiaux dont elle est chargée depuis plusieurs générations.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Familles

 

Chivert - Meschin - Meunier

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille Chivert

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Marie Suzanne Eugénie MESCHIN épouse de Fernand LEMAIGNEN était la fille d'Eugène Joseph Marcelin MESCHIN et de Marie Suzanne MEUNIER.

Eugène Joseph Marcelin MESCHIN était lui-même le fils unique d'Eugène MESCHIN et de Marceline Anne CHIVERT.

La famille CHIVERT était originaire de Restigné et de Bourgueil en Indre-et-Loire.

Le premier document en notre possession concernant cette famille est du 28 Mars 1726, et, depuis cette date, les titres de propriétés qui nous sont parvenus permettent de reconstituer avec précision la généalogie de cette famille.

 

 

I - Jacques CHIVERT et Marie Anne MESCHINE

 

Le plus ancien membre connu de la famille CHIVERT est Jacques CHIVERT né en 1775. Fils de Claude CHIVERT et d'Enriette Rosalie CHAUFFETEAU, demeurant à Benais (Indre-et-Loire). Madame veuve CHIVERT-CHAUFFETEAU est décédée après 1813.

Il avait cinq frères et soeurs (transaction du 08 Décembre 1813 après le décès de CHIVERT-CHAUFFETEAU) :

1°) Marie CHIVERT épouse de Pierre GARDET, boulanger à Restigné, puis demeurant ensuite à Luynes.

2°) Claude CHIVERT, époux HARDY demeurant à Benais.

3°) René CHIVERT, boulanger à Restigné.

4°) Joseph CHIVERT.

5°) Anne CHIVERT épouse de Joseph GERBERON.

 

Jacques CHIVERT, alors âgé de 22 ans, épousa à Restigné le 08 Pluviose An VI (28 Janvier 1798), Marie Anne MESCHINE âgée de 18 ans (elle était née le 02 Septembre 1779), fille de défunt René MESCHINE et de Marie BOUREAU, demeurant à Restigné.

Le 18 Thermidor An VII (07 Août 1799), Jacques CHIVERT alors boulanger à Benais, et sa femme "voulant se prouver efficacement le tendre attachement qu'ils ont l'un pour l'autre et qu'ils espèrent conserver le reste de leurs jours, et craignant que la mort dont les coups sont toujours au-dessus de notre prévoyance, ne les surprenne et ne leur ôte le moyen de réaliser leurs intentions en profitant de la faculté que les Lois leur donnent, et sans cependant entendre en user au préjudice total de leur famille", se sont fait donation mutuelle et réciproque de tous leurs biens meubles et de l'usufruit de leurs immeubles avec dispense d'inventaire.

 

Les époux CHIVERT-MESCHINE sont encore boulangers à Benais en 1806, mais en 1809 ils sont établis boulangers à Restigné où la femme décède le 21 Mai 1819. L'inventaire fut alors dressé après son décès, malgré la dispense contenue dans la donation mutuelle ci-dessus, le 10 Novembre 1819. Les enfants des époux CHIVERT-MESCHINE avaient pour subrogé-tuteur François Henry MESCHINE, boulanger à Ingrandes dont on ignore la parenté. Les droits de succession furent payés le 17 Novembre 1819 (182 Francs 05). Dans cet inventaire il n'est pas fait mention de Marie Marceline CHIVERT, 3ème enfant de Jacques CHIVERT, alors qu'il est bien fait mention dans la quittance des droits de succession.

 

LA FAMILLE MESCHINE

 

Le premier document que nous possédons concernant la famille MESCHINE est une reconnaissance de dette du 21 Mars 1726 par Jeanne BOUJU veuve de Louis MESCHINE demeurant paroisse d'Allonne, tant en son nom que comme mère et tutrice de ses enfants.

Cette reconnaissance de dette fut confirmée par "un titre nouvel" du 30 Octobre 1751 par les héritiers et enfants de la veuve MESCHIN-BOUJU : Louis MESCHINE et Joseph MESCHINE demeurant à Allonne.

Nous trouvons ensuite un contrat d'acquisition par René Henri Pierre MESCHINE-DESGRAVIERES, serrurier, alors mineur, demeurant à Restigné en date du 22 Mars 1769, aux termes duquel il achète de Pierre MATHIEU, serrurier à Restigné, la nue-propriété d'une maison et d'une pièce de vigne dans le bourg de Restigné au lieu appelé le Carroi des Forges proche le Champ de Foire, dont il fait dresser l'état des lieux le 25 Mars 1769.

Il semble qu'il ait ainsi pris la suite du commerce de serrurier de ce Pierre MATHIEU.

Il n'a pas été possible d'établir la parenté entre ce Henri Pierre MESCHINE et les enfants de Louis MESCHINE- BOUJU.

Il décède après le 1er Décembre 1786, date à laquelle il signe un titre nouvel à Pierre MATHIEU, mais avant 1790.

Ce titre nouvel concernait une rente foncière de dix livres due à René SALMON notaire, en vertu d'un contrat de vente du 19 Octobre 1751 de 4 boisselées de vignes au Clos Galinet, paroisse de Restigné à Pierre MATHIEU, maître serrurier et Catherine DESNOYERS, sa femme, demeurant à Restigné, en présence d'Henri MESCHINE demeurant à Restigné et de Nicolas COURANT, chirurgien à Ingrandes, témoins.

Sa veuve née François Madeleine DEMUZEAU, se remarie à un dénommé MATHIEU (est ce le fils de Pierre MATHIEU ?) et un partage (dont il manque la première et la dernière page, ce qui empêche d'en connaître la date, mais antérieur à la Révolution) intervient entre elle et ses quatre enfants qui sont :

1°) François Jean Théodore MESCHINE, boulanger à Restigné époux d'Agathe Adélaïde ROGER.

2°) Louis Jean MESCHINE.

3°) Marie Anne MESCHINE qui épousera un PHELIPPART, puis après le décès de ce dernier, Louis ALLAIN, et décédera sans enfants avant 1835 laissant ses petits neveux : Urbain Constant CHIVERT et Marie Marcelline CHIVERT. Louis ALLAIN est décédé le 08 Mars 1835 (voir ci-après vente Jacques CHIVERT du 19 Juillet 1835).

4°) Henri Pierre, dit René Charles MECHINE, serrurier à Restigné, décédé en Juillet 1796 après avoir épousé le 25 Novembre 1771, Marie Josèphe BOURREAU (ou MOUREAU).

L'actif partagé comprenait divers immeubles à Restigné, Benais et Bourgueil.

 

Il résulte de l'inventaire dressé après le décès de René Charles MECHINE le 09 Germinal An VI (1er Avril 1798) à la requête de sa veuve, qu'il laissait deux enfants:

1°) René MESCHINE, alors majeur, serrurier à Restigné, célibataire dont on ignore la date du décès.

2°) Marie Anne MESCHINE née à Restigné le 02 Septembre 1779 épouse de Jacques CHIVERT boulanger à Benais (voir acte de Baptême).

 

Cet inventaire contient la description très détaillée du mobilier meublant, de l'outillage de serrurier et l'analyse de nombreuses acquisitions de communauté notamment en biens nationaux.

Parmi ces acquisitions figure une maison à Restigné, dite "L'Ecole" contiguë à celle acquise de Pierre MATHIEU le 22 Mars 1769. Cette maison avait été acquise par René Charles MESCHINE et Marthe FERME, veuve de Patrice BOURDAIS, conjointement, le 04 Messidor An IV des administrateurs du département d'Indre-et-Loire. Elle fut partagée le 09 Fructidor An IV entre les héritiers de la veuve BOURDAIS d'une part et René Charles MESCHINE (ainsi d'ailleurs que la veuve BOURDAIS) étaient donc décédés entre le 04 Messidor et le 09 Fructidor An IV (26 Août 1796). Ce qui paraît surprenant.

Il est curieux de constater que ce partage commence par la formule traditionnelle: "Louis, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre" qui était mort depuis 4 ans !

Cet inventaire est suivi d'un "avis de Parents" du 14 Germinal An VI pour autoriser la mineure Marie MESCHINE épouse de Jacques CHIVERT à procéder au partage de la succession de son père. Le conseil de famille est composé de :

- François Jean Théodore MESCHIN, son oncle, demeurant alors à Ingrandes.

- Louis ALLAIN, tonnelier.

- André JOURGEON, propriétaire, époux de Félicité TACHERE, demeurant à Restigné, son cousin maternel.

- René VILLERONDE époux BAUGE, marchand à Benais, cousin maternel.

Et le 15 Germinal An VI intervient le partage de la succession de René MESCHINE.

 

 

Acquisitions par Jacques CHIVERT

 

Le commerce de boulangerie des époux CHIVERT-MESCHINE devait être prospère car Jacques CHIVERT fit durant sa vie de nombreuses acquisitions.

 

Le 08 Messidor An VIII (27 Juin 1800), il achète à son beau-frère René MESCHINE "une chambre de maison et écurie sous comble couvert en bruyère, cour et jardin situés canton du Peu Mulot" commune de Restigné, ayant appartenu antérieurement à René DROUIN, cultivateur, et Anne FOUCHER, son épouse, et à Feu René MESCHINE et Marie BOUREAU sa femme. L'Etat hypothécaire révèle 13 inscriptions !

 

Le 05 Ventose An VII (24 Février 1800), il achète également à son beau-frère 14 boisselées de vigne à la Closerie des Comtes commune de Restigné avec une cave en roc avec pressoir dont la jouissance est réservée par René DROUIN précédant propriétaire, moyennant 1.500 Francs quittancés par acte du 03 Floréal An VIII. Mais une contre-lettre indique que le prix réel est de 2.000 Francs et qu'en compensation des 500 Francs de différence René MESCHINE, vendeur, jouira pendant 5 ans à compter du 22 Brumaire précédant d'un corps de bâtiment de 4 chambres.

 

Le 22 Brumaire An IX (15 Novembre 1800), il achète toujours de son beau-frère 4 boisselées de terre au Peu Mulot et 2 boisselées et demi de terre "partie affiée de vigne en rangée" au même, ayant appartenu aux époux DROUIN-FOUCHER, à René MESCHINE et Marie BOUREAU, son épouse.

 

Le 20 Prairial An IX (18 Mai 1801), il achète à son beau-frère 2 boisselées et demi de vigne au lieu appelé "Les comptants" ayant la même origine.

 

Le 03 Ventose An XI (23 Février 1803), François DROUIN, tisserand et Jeanne FOUCHER son épouse demeurant à Benais vendent à Jacques CHIVERT un petit morceau de terre "affié en vigne" contenant 4 ares 12 centiares ou 3/4 de boisselées dans la Closerie de Marolles commune de Benais moyennant 100 Francs payés en partie par compensation d'une obligation de 60 Francs souscrite par les vendeurs au profit de l'acquéreurs. L'acte se termine par la vieille formule notariée : "De ce que dessus, jugeant respectivement les parties, nous en avons dressé acte". (Le notaire, dans l'ancien droit, était un juge amiable).

 

Le 14 Nivose An XIII (06 Janvier 1805), Jacques CHIVERT et Marie MESCHINE, son épouse, établissent une convention avec les héritiers de René DROUIN d'Anne FOUCHER. Ils exposent que par acte des 24 Novembre 1785 et 16 Juillet 1787, René DROUIN et Anne FOUCHER avaient vendu aux époux René MESCHINE DESGRAVIERES-BOUREAU, avec réserve d'usufruit, tous leurs biens, meubles et immeubles situés à Restigné.

René DROUIN étant venu à décédé le 10 Nivose An XIII à Peu Mulot commune de Restigné dans une maison vendue, dont il s'était réservé la jouissance, ses héritiers reconnaissent que Jacques CHIVERT et Marie MESCHINE sont légitimement propriétaires des biens acquis par les époux MESCHINE-BOUREAU (et sans doute à la suite des licitations ci-dessus consenties par René MESCHINE à Jacques CHIVERT) à charge par eux de payer les dettes de René DROUIN.

Toutefois les héritiers de René DROUIN conserveront son mobilier.

Les époux DROUIN-FOUCHER devaient être les descendants d'Elisabeth Anne DROUIN veuve de Charles DROUIN, écuyer, conseiller du Roy, contrôleur ordinaire des guerres, qui, au nom et comme mère et tutrice de ses enfants mineurs et se portant fort pour ceux majeurs, demeurant à l'Isle Bouchard rendit le 05 Janvier 1775 un compte d'usufruit dont l'acte est joint à la vente du 14 Nivose An XIII ci-dessus analysée.

Il est expliqué dans cette acte que :

"Charles DROUIN et le sieur François SENARD ayant demeuré plusieurs années ensemble dans l'Isle de Saint-Domingue avec une union si parfaite que tous leurs biens étaient communs. Ledit SENARD se vit forcé en 1744 de repasser, en France pour sa santé ; qu'alors ils voulurent assurer par un acte authentique leur société qui n'avait alors eu pour base que leur amitié et leur confiance mutuelle. Alors ils passèrent acte devant AURIOL, notaire royal au Cap François par lequel ils confirmèrent leur société verbale et en établir une générale de tous leurs biens présents et futurs tant en Amérique qu'en France pendant leur vie".... Par son testament le sieur SENARD légua l'usufruit de ses biens à Charles DROUIN qui décéda le 27 Septembre 1774.

 

Le 17 Nivose An XIII (09 Janvier 1805) Jacques CHIVERT, achète à Etienne FERME et Marie MOREAU, son épouse demeurant à Restigné une maison à Restigné, place de l'Eglise moyennant "4.500 Frs tournois numéraire métallique".

 

Le 10 Frimaire An XIV (02 Décembre 1805), il loue pour 9 ans à Pierre PETIT, cultivateur à Restigné diverses pièces de terre à Restigné moyennant 40 Frs et deux poulets.

 

Les 1er Mai 1806, 14 Septembre 1809, 30 Décembre 1811 et 04 Mars 1813, il fait de nouvelles acquisitions de divers vendeurs, de terres, vignes et bois à Benais, Restigné et Ingrandes.

 

Le 17 Novembre 1815, Jacques CHIVERT et René CHIVERT son frère, tous deux boulangers, l'un à Restigné, l'autre à Renais, achètent à Pierre GARDET, boulanger et Marie CHIVERT, son épouse, demeurant à Luynes, leur soeur, tous les droits de Madame GARDET dans la succession de leur père et mère, Claude CHIVERT et Anne Rosalie CHAUFFETEAU, consistant en différentes pièces de terre, moyennant "4.000 livres tournois ou 3.950 Frs 37 centimes".

Le 15 Mai 1816, les frères Jacques et René CHIVERT se partagent ces immeubles.

 

Le 10 Mai 1818, Jacques CHIVERT achète encore un bois à Restigné.

Après le décès de sa femme survenu le 21 Mai 1819, Jacques CHIVERT continue ses acquisitions (21 Avril 1822, 09 Mai 1824, 1er Août 1827, 30 Septembre 1827, 10 Juin 1828, 10 Juillet 1830, 22 Août 1830, 10 Juin 1832, 31 Juillet 1883).

 

Le 19 Juillet 1835, il achète les 8/24 de divers immeubles à Restigné, notamment une maison près le Cimetière, (appelée depuis "La Motterie") pour 6.666 Frs 67 de:

1 - Brice BUSSON, marchand tanneur à Langeais, et Eugénie MESCHINE, son épouse.

2 - Jean BUSSON, maître des postes à Langeais et Caroline MESCHINE, son épouse.

3 - Urbain MAHE, percepteur et Agathe Louise MESCHINE, son épouse, demeurant ensemble à Chouze-sur-Loire.

4 - Abel MESCHINE, percepteur à Chamay.

Héritiers pour 4/24.

 

5 - Jacques Constant BOUNINEAU, marchand à Beaulieu-sous-Bourbon.

6 - Jean MARCHANDEAU, cultivateur et Virginie VILLENOT, son épouse, demeurant au château d'Olonne.

7 - Rosalie VILLENOT, domestique au château d'Olonne.

8 - Céleste VILLENOT, domestique à Olonne.

9 - Jacques Louis NICOLLAIZEAU, mineur, issu du mariage de Véronique MESCHINE avec Joseph NICOLLAIZEAU.

 

Les biens vendus provenaient de la succession de Louis ALLAIN, tonnelier, décédé le 08 Mars 1835 à Restigné, donataire de sa femme, Marie Anne MESCHINE.

Jacques Constant BOUNINEAU était héritier de Louis ALLAIN par représentation de Marie MESCHINE, sa mère, et du sieur Jacques MESCHINE, chirurgien, son aïeul.

Les filles VILLENOT et le mineur NICOLLAIZEAU, par représentation de Véronique MESCHINE, leur mère, veuve en premières noces de Pierre VILLENOT, et épouse en secondes noces de Joseph NICOLLAIZEAU (Jacques MESCHINE chirurgien, étant leur aïeul).

Qui était ce Jacques MESCHINE qui eut pour filles Marie MESCHINE et Véronique MESCHINE ? Quelle parenté y avait-il avec Marie Anne MESCHINE épouse ALLAIN ? Etait-ce un frère de René Henri Pierre MESCHINE DESGRAVIERES ?

Par acte du 27 Août 1835, les frères BUSSON susnommés avaient acquis les 2/24 appartenant à Agathe MESCHINE et à Abel MESCHINE dans lesdits biens, et par un autre acte du même jour il fut procédé entre Jacques CHIVERT acquéreur des 8/24, ses enfants (Marie Marceline et Urbain Constant) propriétaires des 4/8 comme héritiers de Marie Anne MESCHINE épouse ALLAIN, leur grand tante, et les frères BRICE et Jean BUSSON, propriétaire des 4/28 de surplus, aux partages desdits biens.

 

Enfin le 25 novembre 1843, Jacques CHIVERT achète encore une pièce de terre et de vigne à Restigné.

 

 

Enfants des époux CHIVERT-MESCHINE

 

Les époux CHIVERT-MESCHINE eurent trois enfants :

1°) François Henry CHIVERT qui décéda mineur le 31 Octobre 1826 à Restigné (droits de succession payés le 27 Avril 1827 : 150 Frs 31)

2°) Urbain Constant CHIVERT né entre 1814 et 1819, boulanger à Restigné, épouse Marie Eléonore GIRARD (projet de contrat de mariage du 05 Octobre 1845 avec la liste des immeubles apportés par le futur époux). Il décède sans enfant à Benais le 12 Mai 1864 laissant sa nièce Madame MESCHIN-CHIVERT pour seule héritière.

3°) Marie Marceline CHIVERT née entre 1814 et 1819 épousera son cousin Joseph Pierre CHIVERT.

Il est curieux de remarquer que les deux enfants survivants de Jacques sont nés entre 1814 et 1819, c'est à dire lorsque leur mère était âgée de 35 à 40 ans. En effet, ces enfants étaient mineurs en 1835 ( voir partage du 27 Août 1835), ils sont donc nés après 1814.

 

 

Donation-partage par Jacques CHIVERT à ses parents

 

Par acte du 17 Février 1841, Jacques CHIVERT fait donation à titre de partage anticipé à ses deux enfants survivants.

Son fils, Urbain Constant lui succède comme boulanger à Restigné. Les biens donnés et partagés comprennent environ 9 hectares de terres, vignes et bois, une maison "où pend l'enseigne A L'ECU DE FRANCE" sur la route de Tours à Bourgueil, à Restigné, une autre maison à Restigné à la Closerie des Chevalliers et une troisième dans la même commune.

 

 

Décès de Jacques CHIVERT

 

Jacques CHIVERT, veuf depuis 1819, décéda à Restigné le 21 Février 1847.

Son fils et sa fille procédèrent au partage de ses biens le 18 Mars 1847 et leurs droits indivis dans la succession de Madame ALLAIN-MESCHINE, leur grand tante, qui comprenaient la maison à Restigné près de Cimetière, acquise à titre de licitation par les actes sus-énoncés des 19 Juillet et 27 Août 1835, et la pièce de terre et vigne acquise par Jacques CHIVERT le 25 Novembre 1843, après la donation-partage.

Les droits de succession (90 Frs 55) sont payés le 26 Juin 1847.

 

 

II - Joseph Pierre CHIVERT et Marie Marceline CHIVERT

 

Rappelons tout d'abord, pour la bonne intelligence de ce qui va suivre :

1°) Que les époux MESCHINE-DESGRAVIERES-DEMUZEAU eurent quatre enfants :

- François Théodore MESCHINE, boulanger à Restigné dont on ignore la descendance. On sait seulement de lui qu'il vendit le 27 Nivose An XII à Louis ALLAIN et Marie MESCHINE son épouse, une maison à Restigné qui avait appartenu à René Henry Pierre MESCHINE, son père.

- Louis Jean MESCHINE dont on ignore également la descendance.

- Marie Anne MESCHINE épouse ALLAIN en secondes noces décédée le 08 Mars 1835 sans enfants laissant ses petits neveux pour héritiers (Urbain Constant CHIVERT et Marie Marceline CHIVERT).

- René Charles MESCHINE époux BOUREAU, décédé en Juillet 1796 laissant 2 enfants : René MESCHINE serrurier à Restigné dont on ignore la date du décès et la descendance et Marie Anne MESCHINE née le 02 Septembre 1779 (acte de baptême) épouse de Jacques CHIVERT.

2°) Que les époux CHIVERT-MESCHINE eurent 3 enfants dont un (François Henry) décédé célibataire mineur ; les deux survivants étant : Urbain Constant CHIVERT boulanger à Restigné époux de Marie Eléonore GIRARD, et Marie Marceline CHIVERT qui épousera son cousin Joseph Pierre CHIVERT.

3°) Que Jacques CHIVERT avait 5 frères et soeurs :

- Anne CHIVERT épouse GERBERON dont on ignore la descendance.

- Claude CHIVERT époux HARDY dont on ignore la descendance.

- Marie CHIVERT épouse de Pierre GARDET boulanger à Restigné dont on sait seulement qu'ils eurent un fils : Pierre Joseph CHIVERT, aubergiste à Cheille.

- Joseph CHIVERT dont on ignore la descendance.

- René CHIVERT, boulanger à Restigné dont on ignore le nom de la femme, qui eut un fils : Joseph CHIVERT époux de Louise DARCOURT décédée après 1855.

 

Comme on le voit la famille CHIVERT était une famille de boulangers, alors que les MESCHINE étaient serruriers de père en fils.

 

(Louise DARCOURT épouse de Joseph CHIVERT était la fille de Pierre DACOURT et de Marie PRUNIER décédés avant 1818. Elle avait un oncle : Pierre PRUNIER et une soeur Anne DARCOURT épouse de Léonard LASSERRE, huissier (partage du 27 Décembre 1855).

 

Joseph CHIVERT-DARCOURT, fils de René CHIVERT eut cinq enfants :

1°) Marie Louise CHIVERT épouse de Joseph DESAUNAY receveur buraliste à Bourgueil;

2°) Louis Léonard CHIVERT, négociant à Saumur, décédé en 1886 qui épouse en premières noces Honorine CHEVALIER et en deuxièmes noces sa belle-soeur Rosa CHEVALIER née en 1832, décédée à Saumur le 04 Août 1904.

3°) Henriette Anne CHIVERT décédée célibataire à Bourgueil

4°) Joséphine CHIVERT épouse de Benjamin TAILLEBUIS demeurant à Bourgueil, qui eut une fille : Joséphine TAILBUIS épouse POIRIER.

5°) Joseph Pierre CHIVERT serrurier et marchand de fer à Bourgueil, né, semble-t-il en 1811 (voir permis de chasse de 1867 et 1862), qui épouse sa cousine Marie Marceline CHIVERT fille de Jacques CHIVERT-MESCHINE.

 

Aux termes de son contrat de mariage du 13 Septembre 1836, Joseph Pierre CHIVERT apportait en mariage "la boutique de serrurerie" que son père faisait valoir à Bourgueil, estimée outils et clientèle compris à 1.500 Francs et qu'il constituait en dot à son fils, et Jacques CHIVERT constituait en dot à sa fille la somme de 2.000 Francs en avancement sur ses droits dans la succession de sa mère.

Le 23 Janvier 1837, Joseph Pierre CHIVERT louait une maison à Bourgueil pour s'y loger.

Le 08 Décembre 1837, Marie Marceline CHIVERT léguait par testament authentique à son mari l'usufruit des biens de sa succession.

Le 09 Décembre 1842, Joseph Pierre CHIVERT, marchand de fer (et non plus serrurier) et Marie Marceline CHIVERT demeurant à Bourgueil achetaient une maison à Bourgueil rue du Commerce et rue du Pot, moyennant le prix de 8.000 Francs, et le 24 Mai 1847, ils achetaient un jardin à Bourgueil rue de l'Ormeau, clos de murs moyennant le prix de 1.900 Francs.

Les époux CHIVERT-CHIVERT eurent 2 enfants :

1°) Marie Alphonsine CHIVERT décédée le 25 Février 1853 (concession au cimetière de Bourgueil du 22 Février 1854).

2°) Marceline Anne CHIVERT née à Bourgueil le 13 Novembre 1840 qui épousa Eugène MESCHIN et décédera à Chinon le 31 Mai 1893.

 

Joseph Pierre CHIVERT semble avoir exploité avec succès son commerce de marchand de fer à Bourgueil. Peut-être fut-il aidé par l'oncle de sa femme, René MESCHINE qui était serrurier à Restigné. Lors du mariage de sa fille, en 1860, il avait déjà cessé l'exploitation de son commerce.

Le 15 Juillet 1855, il se fait délivrer un passeport par le Maire de Bourgueil pour se rendre à Bordeaux avec sa fille Marceline Anne alors âgée de 15 ans

Le 26 Janvier 1856, il achète un bois à Benais.

Sa femme, Marie Marceline CHIVERT, décède le 16 Décembre 1856 à Bourgueil à l'âge d'environ 40 ans.

L'inventaire est dressé le 12 Février 1857 par Me DURAND notaire à Bourgueil.

Par suite de ce décès, Urbain Constant CHIVERT est nommé subrogé tuteur de sa fille Marceline Anne, par délibération du conseil de famille du 26 Janvier 1857 dont les membres étaient :

- Joseph CHIVERT-DARCOURT, son aïeul maternel.

- Louis Léonard CHIVERT, son oncle paternel.

- Marie CHIVERT épouse DEZAUNAY sa tante paternelle.

- Urbain Constant CHIVERT son grand père maternelle.

- Pierre Joseph GARDET, cousin germain de la mère de la mineure.

- Félix CHIVERT-BARBIN demeurant à Saint-Patrice, cousin germain de la mère de la mineure. (Sans doute fils de Claude ou de Joseph CHIVERT).

 

Les droits de succession après le décès de Madame CHIVERT-CHIVERT sont payés les 11 et 12 Juin 1857 (920,75 Francs et 19 Francs 79).

Après le décès de sa femme, Pierre Joseph CHIVERT vend le 1er Septembre 1859, une maison à Bourgueil rue de l'Isle (Place Hublin) et le 23 Janvier 1860 des terres à Ingrandes, mais il achète le 05 Décembre 1860 une maison rue du Pot à Bourgueil et le 13 Novembre 1876 un bois à Restigné (il demeurait alors à Chinon).

En 1862 et 1867 il lui est délivré un permis de chasse par le sous-préfet de Chinon (en 1862 il demeurait à Bourgueil et en 1867 à Chinon).

D'après ces permis de chasse, il mesurait un mètre soixante cinq ou un mètre soixante neuf, il avait les yeux bruns, le nez gros et portait la barbe.

Joseph Pierre CHIVERT décéda à Chinon d'une crise cardiaque le 03 Décembre 1884 laissant sa fille, Marceline Anne pour seule héritières

D'après sa déclaration de succession, il possédait un jardin à Chinon rue Porte de la Barre, une maison à Bourgueil rue du Pot, 66 ares de terre et vigne et 30 ares de pré à Bourgueil.

C'était un bon vivant, très gai, qui aimait bien faire des farces à ses amis, sans doute pour se distraire de son précoce veuvage. Sa fille avait exigé qu'il vint habiter chez elle à Chinon car elle redoutait un peu ses frasques de veuf joyeux.

Il s'est toujours intéressé à l'exploitation de ses vignes de Bourgueil et de Restigné et en vendait le vin.

 

 

III - Marceline Anne CHIVERT épouse Eugène MESCHIN et Urbain Constant CHIVERT, son oncle

 

Marceline Anne CHIVERT est née à Bourgueil le 13 Novembre 1840. Elle épousa Eugène MESCHIN, caissier de banque à Chinon le 02 Septembre 1860. Elle eut un fils unique : Eugène Joseph Marcelin MESCHIN né à Chinon le 31 Octobre 1861. Elle décéda à Chinon le 31 Mai 1893.

Nous retracerons sa vie dans l'étude de la famille MESCHIN.

Elle était très liée avec son oncle Urbain Constant CHIVERT qui fut boulanger à Restigné qui avait épousé Marie Eléonore GIRARD. Aux termes de son contrat de mariage du 05 Octobre 1845, il possédait alors environ 5 hectares en diverses parcelles de terre, vigne et bois à Restigné et à Benais et une maison à Restigné.

Le 18 Mars 1847, il partage avec sa nièce divers immeubles dont une maison à la Motterie près le Cimetière commune de Restigné. qui dépendaient de la succession de Madame ALLAIN-MESCHINE.

En vertu de ce partage, il reçoit une partie de la maison et 22 ares 56 centiares de vigne à la Motterie.

Le 09 Mai 1847, il achète une vigne et une pièce de terre à Benais et le 04 Septembre 1847 un bois à Benais.

Le 24 Juin 1851, il achète une ancienne auberge nommée "La Chapelle" à Saint-Michel-sur-Loire et deux morceaux de terre à Pont Boutard, même commune, moyennant 2.200 Francs.

Le 25 Juin 1854, il achète un marais, pré et aulnaie à Pont Boutard commune de Saint-Michel-sur-Loire.

Il cesse son commerce de boulanger vers 1855, car dans un acte du 04 Février 1856, il est qualifié "ancien boulanger".

Le 27 Juillet 1856, il loue la maison et diverses pièces de terre à Pont Boutard.

Le 04 Février 1860, il achète la nue-propriété d'un grange et de terre commune de Continvoir.

Urbain Constant CHIVERT qui habitait encore à Restigné en 1861, décède à Benais le 12 Mai 1864, sans enfant, laissant pour seule héritière sa nièce Madame MESCHIN-CHIVERT.

Par acte reçu par Me CHIVERT (ce n'était pas un parent), notaire à Restigné le 27 Septembre 1864, Madame veuve Constant CHIVERT à abandonné l'usufruit auquel elle avait droit sur la succession de son mari, sauf sur une maison au bourg de Restigné et diverses parcelles de terre à Restigné et Saint-Michel-sur-Loire, mais à charge d'une rente viagère de 600 Frs par Madame MESCHIN-CHIVERT qui fut payée jusqu'à son décès.

Le 17 Décembre 1864, il est dressé un état des lieux de la maison de Restigné dont Madame veuve CHIVERT s'était réservée l'usufruit.

Le 14 Février 1865, Madame MESCHIN-CHIVERT échange une pièce de terre à Restigné dépendant de la succession de son oncle. C'est par cet acte qu'on connaît la date de décès d'Urbain Constant CHIVERT (12 Mai 1864 à Benais) et la date de l'inventaire dressé par Me CHIVERT après son décès (25 Mai 1864).

Peu après le décès de son mari, Madame CHIVERT-GIRARD perdit la maison et fut interdite ; elle avait pour tuteur Jean GIRARD-HUBERT, propriétaire à Benais (réclamation du Bureau de l'Enregistrement de Langeais par omission dans la déclaration de succession du 31 Octobre 1861).

Elle décéda dans la maison de Pont Boutard le 15 Janvier 1903 (réclamation du Bureau de l'Enregistrement de Bourgueil demandant le dépôt de la déclaration de succession).

 

 

IV - Quelques lettres

 

Nous n'avons que quelques rares lettres concernant la famille CHIVERT.

Une lettre de voeux, à l'orthographe fantaisiste, d'un ami adressée à Joseph Pierre CHIVERT le 1er Janvier 1858.

Une lettre d'un client, du 10 Avril 1858 à propos d'une commande de fer.

Le 02 Juin 1859, un de ses amis de Tours lui offre son appartement pour qu'il y séjourne avec sa fille pendant la session des Assises.

Une lettre du 21 Juillet 1861, demandant à Joseph Pierre CHIVERT de lui envoyer de son "bon vin de Bourgueil".

Une lettre du 31 Mars 1863 demandant un délai pour régler un billet.

Une lettre de Madame MESCHIN-CHIVERT à son père du 27 Octobre 1863, "le petit Eugène se porte à merveille ; il a très bon apétit". elle demande des nouvelles de son oncle Constant CHIVERT et désire savoir combien il a récolte de vin. "Il y a dans le coffre de la voiture un paquet pour ma tante Joséphine". (Joséphine CHIVERT épouse TAILBUIS).

Le 26 Novembre 1866, un client lui demande un délai pour le payer. Même lettre du 07 Décembre 1866.

Les 21 Mars 1869, 23 Mars 1869 et 21 Novembre 1869, un dénommé RONCE, entrepreneur de serrurerie à Périgueux écrit à propos de la succession de son oncle VINCELOT décédé à Chinon, demandant à Joseph Pierre CHIVERT de s'en occuper.

Le 28 Décembre 1878, Marie Louise CHIVERT lui adresse ses voeux et le 30 Décembre 1878, son autre nièce Madeleine CHIVERT lui adresse également ses voeux à peu près dans les mêmes termes. Il s'agit de ses nièces, filles de son frère Louis Léonard CHIVERT et de Rose CHEVALIER.

Parmi ces lettres on trouve :

- un petit billet écrit par Marcelline CHIVERT à sa maîtresse qu'elle appelle "Chère petite maman" se plaignant qu'elle ne soit pas encore venue la voir. Il s'agit de Marceline Anne CHIVERT qui avait perdu sa mère à 16 ans.

- un autre petit billet adressé à "Mademoiselle Marcelline CHIVERT à Saumur" par son amie de classe Marie PATURAL ainsi rédigé :

 

"Ma chère amie,

Je n'osais pas vous écrire mais puisque vous voulez bien je vous écrirez toujours et si vous le voulez bien nous continuerons et vous apporterai un bouquet vendredi ; ne soyez point fachée si je ne vous en ai pas donné un aujoud'hui, c'est parce qu'ils étaient promis. Adieu. Je suis pour la vie votre amie, vous le voulez bien. Réponse de suite."

 

 

V - Les descendants de Louis Léonard CHIVERT

 

On a vu que Joseph Pierre CHIVERT avait trois soeurs (Marie Louise épouse DESAUNAY, Henriette Anne décédée célibataire et Joséphine épouse TAILLEBUIS) et un frère : Louis Léonard CHIVERT qui était négociant à Saumur et qui décéda en 1886.

Il épousa en premières noces Honorine CHEVALIER et en deuxième noces sa belle soeur Rose CHEVALIER qui était née en 1832 et qui décéda à Saumur le 04 Août 1904.

 

De son premier mariage, il eut une fille :

Marthe CHIVERT qui épousa Victor BODIN, négociant en cuirs à Thouars, décédé à Saint-Gilles (Vendée), le 06 Janvier 1941, à 85 ou 90 ans.

Elle décéda elle-même à Saint-Gilles le 17 Janvier 1927.

Les époux BODIN-CHIVERT eurent quatre enfants :

1°) Hermine BODIN née le 11 Novembre 1873 qui épousa André LEROY, elle n'eut pas d'enfants. Elle habita à Paris, 10 rue Oudinot puis dans une maison de retraite à Malmaison. Son mari décédé avant 1939 était substitut du procureur de la Seine. Elle est décédée le 05 Janvier 1977 (obsèques à Saint-François-Xavier à Paris le 11 Janvier 1977).

 

2°) Marthe BODIN qui décéda célibataire vers 1870 ou 1880 .

 

3°) Germaine BODIN née le Novembre 1879 qui épousa René LEROY (décédé à Nantes le 02 Janvier 1942) (frère d'André LEROY) colonel à Nantes. Elle décéda à Nantes le 10 Septembre 1975 à 95 ans.

Les époux LEROY-BODIN eurent 3 enfants :

a) Germaine LEROY qui épousa Joseph PERRAULT industriel à Nantes et qui eut 7 enfants : Michel, Hélène, Yvonne, Jacques, Maurice, Cécile, François et Georges.

b) Jacques LEROY qui épousa Marie Louise WEIL-BOUVET. Ils adoptèrent un enfant : André.

c) Marie Cécile LEROY née en Juillet 1921 à Bonn (Allemagne) qui épousa Michel RENAULT industriel à Paris et qui eut 5 enfants : Micheline née le 1er Janvier 1944, Dominique (décédé), Jean François, Brigitte et Patrick.

 

4°) Victor BODIN né à Thouars le 02 Janvier 1887, ingénieur à Paris qui épousa en premières noces Mathilde KELLER juive, fille d'un rabbin ce qui provoqua le refus des parents BODIN pour consentir au mariage. Victor BODIN l'épousa cependant alors qu'elle était enceinte et elle fut baptisée pour pouvoir se marier (Hermine et André LEROY furent ses parrain et marraine). A la suite de ce baptême la famille KELLER rompit avec sa fille. Son fils, Victor fut tué à la guerre de 1939-1945 en Italie. Puis Victor BODIN père, épousa en deuxièmes noces, Françoise LALESQUE fille d'un chirurgien d'Arcachon, dont il eut 4 enfants : Yves, Jacques, François, et Jean Paul. Victor BODIN-LALESQUE décéda à Arcachon vers 1970.

 

 

 

De son deuxième mariage avec sa belle-soeur, Rose CHEVALIER, Louis Léonard CHIVERT eut cinq enfants :

1°) Marie Léonie CHIVERT décédée célibataire en bas âge.

 

2°) Maurice CHIVERT décédé célibataire en bas âge, né vers 1860.

 

3°) Madeleine CHIVERT née en 1866, religieuse à Saint-Mandé, décédée le 11 Août 1949.

 

4°) Marie Louise CHIVERT née le 23 Avril 1868 décédée célibataire à Saumur le 03 Mai 1942. (On a cité plus haut les lettres de voeux qu'écrivaient Madeleine et Marie Louise CHIVERT les 28 et 30 Décembre 1878 à leur oncle Joseph Pierre CHIVERT).

 

5°) Renée CHIVERT née le 22 Septembre 1864 qui épousa Paul GODET, imprimeur à Saumur (décédé le 23 Mai 1946). Elle décéda le 28 Décembre 1946 laissant cinq enfants :

a) Paul GODET né le 06 Novembre 1885, décédé le Janvier 1972, Lieutenant Colonel, qui épousa Gabrielle GERARD veuve en premières noces de Monsieur SAROLA dont elle avait eu un fils. De son mariage avec Gabrielle GERARD, Paul GODET eut un fils : Henri GODET né le 16 Juillet 1920, industriel à Paris, époux de Françoise DUBOIS dont il eut deux enfants : Alain et Chantal.

b) Marie Anne GODET née le 11 Juillet 1887, célibataire, demeurant à Saumur, décédée le 25 Novembre 1950 à Angers.

c) Louis GODET né le 28 Janvier 1894, décédé à la guerre, célibataire le 1er Octobre 1914. (Bataille de la Marne).

d) Geneviève GODET née le 11 Août 1899, religieuse des Soeurs de Saint Vincent de Paul à Athée (37) et précédemment à l'Haye-les-Roses.

e) Madeleine GODET née le 27 Février 1889 qui épousa le 25 Septembre 1913 Fernand CHARRON, Doyen de la Faculté Catholique des Sciences d'Angers. Les époux CHARRON-GODET sont décédés, la femme à Angers le Décembre 1960 et le mari à Angers le Février 1963.

Ils eurent quatre enfants :

1°) Noël CHARRON né le 11 Décembre 1921 à Angers, contremaître, qui épousa Susy OPICCI, originaire de Corse, dont il eut deux filles, Claude et

 

2°) Odile CHARRON née le 25 Mars 1917 à Angers, licenciée Es Sciences, épouse de Georges LINDEMANN (mariage à la Garenne Colombe du 1er Février 1946), ingénieur à Paris. Demeurant depuis à Gap (05000), 37 avenue d'Embrun.

Ils eurent 3 enfants :

a) Jean Noël LINDEMANN né à la Garenne Colombe le 22 Décembre 1946, diplomé HEC, époux de Renée .

b) Myriam LINDEMANN née à la Garenne Colombe le 20 Septembre 1948, professeur de mathématiques, épouse de Jean Marie THOMAS.

c) Dominique LINDEMANN né à la Garenne Colombe le 20 Janvier 1950, époux de Josette SAGNARD.

 

3°) François CHARRON né le 17 Juillet 1919 à Angers qui épousa Jacqueline CHARTIER, fille du notaire de Saint-Jean de la Motte (72). Il est ingénieur dans l'aviation à Paris et il a 4 enfants :

a) Mireille CHARRON née à le agrégée de Sciences, épouse de .

b) Béatrice CHARRON née à le , épouse de SANDRE ayant 4 enfants.

c) Elisabeth CHARRON née à le .

d) Marie Christine CHARRON née le 30 Décembre 1950.

 

4°) Paul CHARRON né le 28 Juillet 1914, ingénieur à Nantes qui épousa Jacqueline PEROT dont il eut 4 enfants :

a) Hubert CHARRON époux de .

b) Bertrand CHARRON.

c) Jacques CHARRON.

d) Patrick CHARRON.

 

Comme on vient de le voir les descendants de Louis Léonard CHIVERT sont particulièrement nombreux puisqu'en 1976 on ne compte pas moins de trente arrière-arrières petits enfants.

 

 

Résumé de la famille CHIVERT

 

Le plus ancien ancêtre connu de la famille CHIVERT est Claude CHIVERT qui décéda avant 1813. Il eut six enfants dont 3 étaient boulangers à Restigné. L'un d'eux épousa Marie Anne CHIVERT le 08 Pluviose An VI, fille d'une famille de boulangers et de serruriers à Restigné.

Les époux CHIVERT-MESCHINE eurent 3 enfants, dont l'une, Marie Marceline CHIVERT épousa son cousin Joseph Pierre CHIVERT le 13 Septembre 1836. Joseph Pierre CHIVERT fut serrurier à Bourgueil puis marchand de fer à Chinon. Il décéda à Chinon le 03 Décembre 1884.

De l'un de ses frères (Louis Léonard CHIVERT) sont issues les familles BODIN, LEROY, GODET et CHARRON.

Joseph Pierre CHIVERT eut deux filles dont l'une décédée en bas âge. L'autre, Marceline Anne épousa Eugène MESCHIN le 25 Septembre 1860 . Elle décéda à 53 ans à Chinon le 31 Mai 1893. Les époux MESCHIN-CHIVERT n'eurent qu'un fils : Eugène Joseph Marcelin MESCHIN décédé le 18 septembre 1926, père de Madame LEMAIGNEN.

Les biens immobiliers de la famille CHIVERT étaient situés sur les communes de Restigné, de Bourgueil et les communes environnantes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille Meschin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous avons vu en étudiant la famille CHIVERT que Marceline Anne CHIVERT avait épousé Eugène MESCHIN.

Eugène MESCHIN était le fils de Jean MESCHIN et d'Anne VAZEREAU.

Jean MESCHIN était lui-même le fils unique de Jean MESCHIN et Louise MESCHIN.

Il n'est pas possible de dire si les époux Jean et Louise MESCHIN étaient apparentés. Peut-être étaient-ils cousins ?

Notre étude de la famille MESCHIN sera divisée en deux chapitres :

- Le premier concernant le famille de Louise MESCHIN (branche MESCHIN-GATTET) qui s'éteint rapidement.

- Le second concernant le famille de Jean MESCHIN (branche MESCHIN-DAVID) qui s'éteint avec le décès d'Eugène Joseph Marcelin MESCHIN en 1926).

 

 

I - Branche MESCHIN-GATTET

 

Extrait des registres de baptêmes, mariages et sépultures de la Paroisse de Lerné, district de Chinon, département d'Indre-et-Loire, pour l'année 1768, délivré par le Secrétaire Greffier de la Municipalité de Lerné le 1er Mars 1793 An deuxième de la République :

"Le 29 Janvier 1768 a été baptisée Louise fille de Pierre MESCHIN, garde de la terre de Chavigny et de Marie GATTET sa légitime épouse. Le parrain a été Etienne PROUTEAU garçon et la marraine Louise MAUREAU, fille qui a dit ne savoir signer ; le père absent ; minute signée Etienne PROUTEAU et P.GUILLAU, vicaire".

Pierre MESCHIN est qualifié "garde de chasse de la Seigneurie de Chavigny, y demeurant paroisse de Lerné" dans un acte du 07 Mars 1779 et dans un acte de la veille (06 Mars 1779) "garde des chasses et bois de la terre de Chavigny". En vertu de ces actes il achète conjointement avec un sieur Louis BRECHOTTE, jardinier au château de Chavigny 6 boisselées de vignes aux Plantes, paroisse de Lerné, qu'il partage avec BRECHOTTE le 15 Mai 1780.

Il est décédé entre le 16 Floreal An VI, date à laquelle il achetait conjointement avec Jean MESCHIN son gendre, de Pierre MESCHIN cultivateur à Cinais, son neveu, des terres et vignes à Lerné, et le 27 Pluviose An IX, date à laquelle il est procédé à une expertise d'un bois lui ayant appartenu.

Marie GATTET sa femme est elle-même décédée avant le 26 Pluviose An X date à laquelle il est procédé au partage des biens des époux MESCHIN-GATTET entre:

- Pierre MESCHIN, leur fils, menuisier à Lerné époux de Marie PARFAIT.

- Marie MESCHIN, leur fille, épouse de François Barthélémy PERROTEAU (ou PROUTEAU).

Et le mineur Jean MESCHIN, leur petit fils par représentation de Louise MESCHIN leur fille décédée le 22 Thermidor An VIII épouse de Jean MESCHIN (ce dernier avait été nommé tuteur de son fils le 11 Pluviose précédent).

Les époux MESCHIN-GATTET possédaient de nombreuses terres, vignes et caves à Lerné et à Thizay désignées dans ce partage.

Nous retrouverons Jean MESCHIN dans l'étude de la branche MESCHIN-DAVID.

Marie MESCHIN de son premier mariage avec François Barthélémy PROUTEAU (ou PERROTEAU, ainsi dénommé dans une assignation du 21 Août 1809) cultivateur à Lerné, eut un fils : Louis PROUTEAU, sabotier à Lerné. Elle épousa en secondes noces Antoine MEIGNAN, cultivateur à Lerné, on ne sait rien de leurs descendants.

Quant à Pierre MESCHIN, il était né en 1765. Il était menuisier et fut maire de Lerné vers 1830. Il épousa à Seuilly le 15 Février 1798, Marie PARFAIT ainsi qu'il résulte de son acte de mariage inscrit sur les registres des actes de l'Etat Civil de la commune de Lerné (voir un extrait de ce registre, dossier CHIVERT). Marie PARFAIT était alors âgée de 26 ans, elle était fille de Charles PARFAIT, alors décédé et de Marguerite LEBLOIS demeurant à Seuilly.

Il décéda à Lerné le 26 Octobre 1848, après avoir institué son neveu Jean MESCHIN légataire universel par testament du 02 Juillet 1845.

Ce testament, déposé au rang des minutes de Me MORICET, notaire à Lerné le 08 Novembre 1848, est ainsi conçu :

"Moi Pierre MESCHIN, sain d'esprit quoique courbé sous le poids de 80 ans, assis en présence de Dieu en ma Chambre à coucher devant la seule croisée levant, fais ainsi mon testament. En témoignage de mon amitié et de ma confiance, je nomme mon légataire universel Jean MESCHIN, mon neveu demeurant à Chinon à charge par lui de pouvoir consciensieusement à assurer à Romain TAROT mon petit fils dont il est le curateur la portion de biens, meubles et immeubles que la loi lui réserve et je veux que, après la dite portion réservée par la loi audit TAROT, et les legs ci-dessous, la portion de biens ou argent soit employée aux frais de son apprentissage et de son entretien, et dans le cas ou ledit TAROT n'apprendrait rien ou se conduirait mal au grè de son tuteur, la somme qui resterait soit donné à un établissement d'orphelin, au choix de mondit légataire".

Suivent divers legs particuliers : 80 Francs pour ses frais funéraires, savoir 31 Francs pour sa sépulture et 13 Francs pour 36 messes à son intention et celle de sa femme, laquelle somme doit être remise à Monsieur PAIMPARE curé à Lerné, deux boisselées de terre au Champ Bacher à Jean MESCHIN, et 40 Francs à Anne PICOU, servante du curé de Lerné pour les soins qu'elle lui a donnés.

Pierre MESCHIN, de son mariage avec Marie PARFAIT avait eu une fille, Justine MESCHIN née vers 1805 qui épousa Romain TAROT, menuisier à Loudun fils de Jean TAROT demeurant à Loudun et de Marguerite HAYE, prédécédée.

Aux termes de leur contrat de mariage du 19 Novembre 1829, Romain TAROT apportait une maison à Loudun et une vigne même commune et 400 Francs en argent et meubles et Justine MESCHIN apportait du mobilier pour 1089 Francs.

Justine TAROT-MESCHIN décéda le 26 Avril 1833, laissant pour seul héritier son fils Romain TAROT, né en 1833, sous la tutelle légale de son père.

Le 27 Novembre 1842, Pierre MESCHIN, grand-père de Romain TAROT réunit le conseil de famille, attendu que son gendre "a dissipé par incapacité non seulement son propre patrimoine mais encore celui de son fils" pour lui retirer la tutelle.

Le conseil de famille comprend :

Du coté paternel :

- François TAROT, menuisier à Loudun, oncle du mineur.

- Auguste NASSON, menuisier à Loudun, oncle du mineur à cause de Marguerite TAROT sa femme.

- Pierre GUERINET, cordonnier à Lerné, oncle du mineur, à cause de Madeleine TAROT, sa femme.

Du coté maternel :

- Jean MESCHIN, cordonnier à Chinon, cousin du mineur.

- Louis PROUTEAU, sabotier à Lerné, cousin du mineur (c'était le fils de Marie MESCHIN et de François Barthélémy PROUTEAU ou PERROTEAU).

- Antoine MEIGNAN, cultivateur à Lerné, cousin du mineur à cause de Marie MESCHIN sa femme (remariée audit Antoine MEIGNAN).

Le conseil de famille nomme comme tuteur datif du mineur Romain TAROT, son cousin Jean MESCHIN qui lui rendra compte de sa tutelle le 26 Novembre 1857.

Romain TAROT était alors sabotier à Monts-sur-Indre.

Le 19 Mai 1834, Pierre MESCHIN avait établi une longue liste des questions à poser à un notaire, relatives à la mauvaise administration de Romain TAROT des biens de son fils mineur, sous l'influence de sa seconde femme qui maltraitait son beau-fils.

Le notaire répond point par point et écrit le 05 Octobre 1839 une autre note sur le même sujet.

Romain TAROT père, s'est établi à Saint Germain où il court à la misère. Il a dilapidé la dot de sa première femme, il a deux enfants de son deuxième mariage.

En juin 1852, il avait été établi une transaction entre Jean MESCHIN, cordonnier à Chinon agissant en qualité de tuteur de Romain TAROT, et Madame DUMOUSTIER-BRUNEAU demeurant à Lerné, propriétaire l'un et l'autre, de parcelle de terre à Lerné en vertu d'un partage passé devant Me RICHARD, notaire à Loudun le 05 Septembre 1735 entre les héritiers DEMEZIL, à propos d'un chemin mitoyen. Il résulte d'un extrait de ce partage de 1735 qu'il avait été composé 5 lots :

- L'un attribué à veuve MARRE-MESCHIN.

- Un autre à veuve GALLAIS-MESCHIN.

- Un autre à veuve ESNAULT-MESCHIN.

- Un quatrième à Monsieur BRUNEAU.

 

Madame DUMOUSTIER-BRUNEAU était Marie Célina BRUNEAU épouse de Ferdinand DUMOUSTIER dont sont issus les MAURICE (voir famille BRUNEAU et MEUNIER) apparentée à la famille DEMEZIL.

 

Le 19 Octobre 1787 (dossier MESCHIN), Gabriel DEMEZIL, tonnelier à Saumur Paroisse de Nantilly et Marguerite ROUSSELLE, sa femme avaient vendu à Jean MESCHIN, garçon mineur "demeurant par service domestique au château de Chavigny, paroisse de Lerné", des terres à Lerné.

 

On ignore la descendance de Romain TAROT et de ses oncles et tantes (François TAROT, Marguerite NASSON et Madeleine GUERINET).

 

II - Branche MESCHIN-DAVID

 

Jean MESCHIN-MESCHIN

 

Jean MESCHIN est né en 1765 du mariage d'Antoine MESCHIN et de Jeanne DAVID, laboureur à Lerné.

Il avait un frère, Antoine MESCHIN, né en 1761 décédé après 1817, cultivateur à Lerné.

Jean MESCHIN était lui-même cultivateur à Lerné et garde de la terre de Chavigny.

Il épousa Louise MESCHIN, née le 29 Janvier 1768, fille de Pierre MESCHIN également garde de la terre de Chavigny et de Marie GATTET.

Nous venons de voir qu'il avait acheté le 19 Octobre 1787 des terres à Lerné de Gabriel DEMEZIL et Marguerite ROUSSELLE.

Il fit de nombreuses autres acquisitions :

Le 16 Mars 1790 et le 08 Avril 1790 il achète des vignes et des terres à Lerné et Seuilly. Comme il est encore mineur, ces deux actes sont accompagnés de "lettres et ratifications" délivrées au nom de "Louis par la grâce de Dieu et par la loi constitutionnelle de l'Etat, roi des Français".

Le 16 Juillet 1790 et 18 Novembre 1790, nouvelles acquisitions de terre et vigne à Lerné, de Pierre ANGEVIN et Françoise THIBAULT son épouse, journaliers à Lerné, dont il achètera encore de nombreuses terres. Il est encore mineur.

Le 08 Mars 1792 il fait un échange avec Thomas PROUTEAU, sabotier à Lerné (peut-être un frère de son beau-frère). Il est alors majeur, et demeure toujours "par service domestique" chez "M. DESME" à Lerné. Il s'agit de M. DESME de Chavigny dont la deuxième partie du nom patronymique a disparu avec la Révolution.

Le 28 Prairial An II, il achète des époux THIBAULT une cave et des terres. Il est alors boulanger à Lerné, mais le 16 Prairial An VI lors d'une acquisition d'un quart de boisselée de terre à Lerné appartenant à Marie CHARTON veuve de René THIBAULT, il est à nouveau cultivateur.

Nouvelles acquisitions le 189 Fructidor An VI et le 26 Ventose An VI où il est toujours qualifié de cultivateur, alors que dans la vente du 16 Floréal An VI par Pierre MESCHIN dont nous avons parlé dans le premier chapitre, il est dit : "domestique du citoyen DESME".

Il accumulait donc ses fonctions de garde de la terre de Chavigny, de petit cultivateur et de boulanger ce qui devait lui permettre de faire quelques économies qu'il employait en achats de petites parcelles de terres et vignes. Cependant il payait rarement comptant les prix de ces acquisitions ainsi qu'en témoignent diverses quittances s'échelonnant jusqu'en l'An XI.

Louise MESCHIN, sa femme décède à Lerné le 22 Thermidor An VIII (12 Août 1800) laissant pour seul héritier son fils, Jean MESCHIN né le 02 Frimaire An VI (23 Novembre 1797) ainsi que l'atteste son acte de naissance inscrit sur les registres de la commune de Lerné :

"Est comparu le citoyen Jean MESCHIN, domestique du citoyen DESME en cette commune, lequel, assisté du citoyen Pierre MESCHIN garçon menuisier, âgé de trente deux ans, son beau-frère, et de la citoyenne Marguerite GUILBEAULT, femme du citoyen RUBEAULT, âgée de soixante six ans ou environ, domiciliée en cette même commune, m'a déclaré que la citoyenne Louise MESCHIN sa femme et épouse en légitime mariage est accouchée ce matin à quatre heures en son domicile à Chavigny dans cette commune, d'un enfant mâle qu'il m'a présenté et auquel il a donné le prénom de Jean ....".

Jean MESCHIN père, "étant sur le point de passer en second mariage" fit dresser inventaire de ses biens, après le décès de Louise MESCHIN, le 15 Messidor An IX, en présence de Pierre MESCHIN, menuisier, oncle maternel du mineur "son tuteur spécial et légitime contradicteur" nommé à cette fonction par l'Assemblée des parents du 14 Messidor An IX. Suit la prisée détaillée du mobilier et des garde-robes des époux sans qu'il soit omis un seul mouchoir, jupon de droguet, "corps balenné couvert d'étamine", bonnets de coton, culottes ou "cornets de nuit", futailles, outils de jardinage, sacs de blé et de farine. Puis le citoyen Jean MESCHIN "a affirmé par sermet qu'il n'avait un sol d'argent monnayé". Le pauvre homme ! Après l'énumération des créances actives et passives, sont analysés les titres d'acquisition parmi lesquels on retrouve toutes celles ci-dessus mentionnées.

L'inventaire à peine clos, Jean MESCHIN épouse Rozalie OUVRE. Le contrat de mariage est passé le 19 Messidor An IX, 4 jours après l'inventaire.

"Le future épouse est prise avec ses droits paternels et maternels à échoir et la somme de neuf cent francs provenant de ses gains et épargnes".

L'extrait de son acte de naissance de la paroisse Saint-Honoré de Blois est ainsi rédigé :

"L'an mil sept cent soixante dix sept, le vingt neuvième jour de mai, par moi Vicaire soussigné a été baptisée Rose née d'aujourd'hui du légitime mariage de René OUVRAY et de Jeanne OLIVIER, maître cordonnier demeurant dans la Rue Beauvoir"...

On verra que le jeune Jean MESCHIN fils deviendra cordonnier ; est-ce sous l'influence du père de sa belle-mère ?

 

Après ce deuxième mariage, Jean MESCHIN continue à acquérir de nombreuses petites parcelles de terres et vignes par acte du 25 Pluviose An IX, 24 Brumaire An X, 17 Frimaire An XI (vente par Antoine MESCHIN, cultivateur à Lerné, frère de Jean MESCHIN), 16 Frimaire An XI, 25 Frimaire An XI, 18 Nivose An XI, 28 Prairial An XI, 27 Floréal An XII, 20 Prairial An XIII (Jean MESCHIN est alors qualifié Boulanger), 26 Nivose An XIII, 10 Avril 1808, 11 Octobre 1808, 14 Novembre 1809 (Jean MESCHIN cultivateur à Clos Pamprou commune de Lerné), 02 Décembre 1809, 03 Décembre 1810, 03 Mars 1811. A plusieurs de ces contrats d'acquisition sont joints des états hypothécaires. Dans ces actes, Jean MESCHIN est généralement qualifié de cultivateur, mais parfois aussi de gérant des terres du sieur DESME (ex Monsieur de CHAVIGNY).

Jean MESCHIN décède à Lerné le 12 Juin 1811 peu après minuit en son domicile au Clos Pamprou à 46 ans ainsi qu'en fait foi son acte de décès dressé sur la comparution de Pierre MESCHIN, menuisier, adjoint de Lerné, âgé de 46 ans et Antoine MESCHIN, cultivateur, âgé de 50 ans, demeurant à Lerné ; ses frère et beau-frère.

Dès le lendemain, 13 Juin 1811 Pierre MESCHIN, agissant en qualité de tuteur du mineur Jean MESCHIN, nommé à cette fonction par délibération du Conseil de Famille du 12 Juin (jour même du décès) en présence d'Antoine MESCHIN, subrogé tuteur, et Rozalie OUVRE, sa veuve, fait dresser inventaire au Clos Pamprou, au Côteau de Lerné. Le mobilier est inventorié sur les estimations de deux "Froupissières" dont Marie MORAIN femme de Jean FERME. Détail minutieux du mobilier, des garde-robes, fûts de vin, matériel de boulanger, bestiaux, etc .... Analyse des créances actives et passives et des nombreux actes d'acquisitions faites par Jean MESCHIN.

Le 07 Juillet 1811, il est procédé à la vente par adjudication du mobilier prisé en cet inventaire dont une partie est rachetée par la veuve MESCHIN. Il est intéressant de parcourir la longue liste des objets vendus, y compris la garde-robes et les prix d'adjudication.

Le 29 Août 1811, HERPAIN, chirurgien donne quittance de la somme de 80 livres 10 sols pour visites et médicaments donnés à Jean MESCHIN "lors de son facheux accident".

On ne peut réprimer une certaine émotion en lisant ces documents. A travers leur sécheresse, se révèle tout un drame familial.

Jean MESCHIN, fils d'un laboureur de Lerné, arrive à une certaine aisance grâce à son travail de la terre de Chavigny, de cultivateur et vigneron et de boulanger. Il perd sa première femme (peut-être sa cousine) alors qu'il avait 35 ans mais se remarie un an après. Ses affaires continuaient à prospérer si l'on en juge par les nombreuses acquisitions qu'il fit, et brusquement il meurt "d'un facheux accident" à 46 ans laissant un fils mineur de 14 ans.

La famille MESCHIN fait immédiatement bloc pour défendre le jeune orphelin contre sa belle mère, se réunit en conseil de famille le jour même du décès et fait dresser inventaire dès le lendemain. Pierre MESCHIN va prendre soin de son pupille et va gérer sa petite fortune. Il continue à habiter au Clos Pamprou avec sa belle mère jusqu'à son entrée en apprentissage ; on peut se demander pourquoi il n'a pas continué la culture des terres de son père.

 

 

Jean MESCHIN Fils

 

Pierre MESCHIN a conservé soigneusement les divers papiers concernant la tutelle de son neveu.

Le 1er Août 1811, il signe conjointement avec Rosalie OUVRE, veuve MESCHIN, un bail de terres à Lerné, précédemment exploitées par Jean MESCHIN.

Le 29 Août 1811, il paie le coût de la délibération du conseil de famille.

Le 17 Novembre 1811, il reçoit des fermages dus à son pupille.

Le 25 Décembre 1811, il paie le coût de l'estimation des immeubles de Jean MESCHIN, à laquelle il a fait procéder.

Le 16 Février 1812, il loue par adjudication les terres de Thizay.

Le même jour, il signe un titre nouvel du paiement d'une rente foncière d'une terre acquise par Jean MESCHIN, son beau frère, le 10 Germinal An VI (30 Mars 1798) joignant du couchant "veuve DESME de Chavigny".

Le jeune Jean MESCHIN ne semblait pas jouir d'une très bonne santé. Le 24 Mai 1812, Gille LABOURETTE reçoit de Pierre MESCHIN 3 francs pour une purgation donnée à Jean MESCHIN et le 30 Mai 1812 le chirurgien HERPAIN donne quittance à Pierre MESCHIN "de la somme de 24 sols pour remèdes fournis au jeune Jean MESCHIN pour les vers".

D'autres reçus concernent les arrérages de rentes, de fermages, de contributions des portes et fenêtres (55 centimes) pour "deux aulnes de coutil fournies à Jean MESCHIN pour une culotte ou pantalon", pour fourniture d'une croisée à petit bois "dans la chambre de demeure située au midi de la maison du Clos de Pamprou".

Le 25 Juillet 1812 :

"Reçu de Monsieur Pierre MESCHIN comme tuteur de Jean MESCHIN son neveu, la somme de 8 livres 5 sols pour 5 mois et demi d'instruction qu'on lui a donné tant en lecture qu'écriture" et le 16 Juin 1813 : "Reçu de Monsieur Pierre MESCHIN de cette commune la somme de quatre livres dix sols pour l'enseignement de son neveu Jean MESCHIN, et duquel il est tuteur".

Jean MESCHIN a donc reçu une certaine instruction jusqu'à l'âge de 16 ans. On s'étonne que son tuteur le mette alors en apprentissage chez un cordonnier. Peut-être n'était-il pas très doué pour les études ?

La dernière quittance pour frais d'enseignement est du 16 Juin 1813. Le 17 Juin Pierre MESCHIN, en présence et du consentement d'Antoine MESCHIN subrogé tuteur, contracte un contrat d'apprentissage avec Martin Etienne MEXME cordonnier à Chinon aux termes duquel :

"ledit MEXME s'oblige de montrer "et enseigner audit Jean MESCHIN l'état et métier de cordonnier sans rien lui sceller ni cacher et du mieux qu'il sera possible pendant le terme de dix huit mois qui ont commencé à courir à partir du 16 Mai dernier, pendant lequel terme ledit sieur MEXME promet et s'oblige de loger et nourir, coucher, blanchir et habiller ledit apprenti. Pour le rabiller sera fourni de morceux et pièces par ledit tuteur ; et enfin lui fera le même traitement qu'à lui-même. Ledit MEXME fournira audit apprenti une paire de soulliers neufs et lui accordera une heure et demi par jour pour apprendre à lire et à écrire. Pendant ledit apprentissage et pour indemniser ledit sieur MEXME tant de ses peines et soins pour enseigner audit Jean MESCHIN ledit état de cordonnier, que pour la nourriture à fournir audit apprenti, le marché fait et accepté entre les parties pour et moyennant le prix et somme de deux cent soixante seize francs, de laquelle somme ledit MESCHIN en a payé audit MEXME celle de quatre vingt francs à compte. Dont quittance, etc.....".

"Ledit Pierre MESCHIN promet faire tenir ledit apprenti assidu au travail dudit sieur MEXME et lui porter honneur et respect en tout ce qu'il lui commandera d'honnête. Dans le cas où ledit apprenti viendrait à perdre du temps pendant le cours dudit apprentissage, soit par maladie ou autrement, ledit Pierre MESCHIN promet faire remplacer par ledit apprenti autant de temps qu'il en aurait perdu et ce à la fin de son apprentissage".

"Et pour pot de vin du présent marché ledit Pierre MESCHIN a payé comptant audit MEXME qui l'a reçue, la somme de six francs".

Le 22 Septembre 1814, MEXME donne quittance à Pierre MESCHIN de la somme de 38 Frs pour "restant du prix de l'apprentissage".

Le même jour Pierre MESCHIN et Rose OUVRAY, veuve de Jean MESCHIN donnent quittance à un dénommé Joseph BLANDIN de la somme de 450 Frs qui lui avait été prêtée sur le produit de la vente des meubles de la communauté MESCHIN-OUVRAY.

On trouve encore divers autres reçus délivrés à Pierre MESCHIN pour le compte de son pupille pour paiement de différentes petites dettes de 1813 à 1816.

Le 28 Décembre 1816, il est procédé entre Pierre MESCHIN agissant en qualité de tuteur, Antoine MESCHIN agissant en qualité de subrogé tuteur de Jean MESCHIN et Rosalie OUVRAY, veuve de feu Jean MESCHIN, en son vivant, cultivateur, demeurant par service commune de Tureau, au partage de la communauté ayant existé entre elle et son mari, et de la succession de ce dernier.

Il est rappelé qu'il n'existe pas d'enfant de ce mariage et que la veuve est donataire de moitié en usufruit en vertu de son contrat de mariage. Il est procédé à la liquidation des reprises et récompenses en rappelant la vente du mobilier dont partie a été rachetée par le fils et la veuve. Puis il est procédé au partage des immeubles afin de déterminer ceux sur lesquels portera l'usufruit de la veuve. Les immeubles de la première communauté comprennent une cave en roc et environ 1 hectare de terres et vignes, ceux de la deuxième communauté cinq caves en roc et environ 2 hectares 30 de terres et vignes et les immeubles propres de feu Jean MESCHIN deux caves en roc, une petite boulangerie et cave, petite maison et environ un hectare de terres et vignes.

 

Plusieurs reçus sont encore délivrés à Pierre MESCHIN en sa qualité de tuteur de 1816 à 1820 pour diverses causes dont un, le 19 Mars 1818 pour fourniture de onze aulnes et demi de toile (36 livres), un autre du 07 Janvier 1819 délivré par Monsieur GENDRE, chirurgien "pour soins et remèdes administrés au jeune MESCHIN, cordonnier depuis le 03 Septembre 1818 jusqu'au 11 Décembre même année" (30 livres 12 sols), un troisième par la veuve CHARTIER pour avoir soigné dans sa maladie qui l'a affligé, étant chez Monsieur MEXME concierge de la maison d'arrêt de Chinon (10 Octobre 1819), un autre pour soins donnés à Jean MESCHIN, à la prison jusqu'à ce jour 23 Octobre 1820 et un dernier du 23 Novembre 1820 pour une demie bouteille d'aporême stomachique, une prise de poudre fébrifuge et une potion purgative (23 Novembre 1820).

Le jeune MESCHIN ne semblait vraiment pas jouir d'une bonne santé. Son apprentissage terminé il était resté ouvrier cordonnier chez Monsieur MEXME qui était en même temps concierge de la prison de Chinon. On remarquera qu'il était majeur depuis le 23 Novembre 1818 mais que Pierre MESCHIN, son tuteur, continuait à payer certaines dépenses pour son compte.

Le 25 Avril 1821, Jean MESCHIN, cordonnier demeurant en qualité d'ouvrier chez le sieur MEXME, ville de Chinon paroisse de Saint Etienne, ratifie le partage du 28 Décembre 1816, et le même jour Pierre MESCHIN, toujours menuisier à Lerné lui rend compte de sa tutelle et lui a remis toutes les quittances, titres et papiers de concernant, ainsi que les meubles qu'il avait achetés pour son compte.

Déjà le 08 Mai 1819, étant devenu majeur, Jean MESCHIN avait loué une bonne partie des terres et vignes lui appartenant.

Jean MESCHIN avait dû s'attacher à Martin Etienne MEXME, car il épouse en 1821 Anne VAZEREAU, soeur de la femme de son patron née en 1801 (inscription de sa tombe cimetière Chinon).

On sait peu de chose d'Anne VAZEREAU.

Elle avait deux soeurs :

1°) Françoise VAZEREAU, décédée en 1861 à Chinon, épouse de Martin Etienne MEXME qui décéda avant sa femme.

2°) Héloïse VAZEREAU, qui tenait un magasin de bonneterie à Chinon où elle décéda célibataire, vers 1895.

Elles étaient issues du mariage d'Urbain VAZEREAU, aubergiste à Chinon et de Françoise BARANGER, (voir jugement du 13 Thermidor An XIII à propos du paiement d'un billet à ordre dû par Urbain VAZEREAU et jugement du 16 Brumaire An XIV le condamnant à la restitution de fûts de vin).

Il semble que Jean MESCHIN se soit établi cordonnier à son compte peu après son mariage, prenant sans doute la suite de Martin MEXME.

Le 26 Juin 1823 Jean MESCHIN VAZEREAU, cordonnier demeurant à Saint Etienne commune de Chinon, achète de Françoise THIBAULT veuve de Pierre LANGEVIN une cave en roc avec cheminée et four, au Clos Pamprou commune de Lerné (il les collectionnait !).

En 1825, il va hériter de Rosalie OUVRAY, sa belle-mère.

On a vu que cette dernière, après le décès de son mari, était placée en service domestique commune de Tureau (partage du 28 Décembre 1816). En 1817, elle avait payé le coût d'une procuration pour la vente d'une maison à Blois qui devait appartenir à ses parents qui étaient, on le sait, cordonniers à Blois.

Le 22 Décembre 1824, elle demeurait à la Vaubelle, commune de Lerné et louait à "Meignant MESCHIN", cultivateur audit lieu, les immeubles qui lui avaient été attribués en vertu du partage du 28 Décembre 1816.

Le 07 Janvier 1825, elle faisait son testament authentique "étant malade de corps et couchée, mais saine d'esprit". Elle léguait à Jean MESCHIN, son beau fils, tous ses biens immeubles et plusieurs créances. Elle léguait à Anne VAZEREAU, sa femme, "une douzaine de chemises neuves et qui n'ont été portées qu'une fois". Elle léguait encore à "Jeanne OUVRAY femme Marie et Honorine OUVRAY ses soeurs" tout son mobilier.

"Je veux être enterrée à la dernière classe ; il sera employé cent cinquante francs tant audit enterrement qu'aux messes qui seront dites pour moi".

Le 09 Janvier 1825, elle rédige un codicille olographe stipulant que la réserve légale de sa mère soit prise sur ses meubles afin que le legs fait à son beau-fils ne soit pas entamé par cette réserve.

Elle décède le 30 Janvier 1825 à Lerné.

L'inventaire est dressé les 1er et 10 Mars 1825 à la requête de Jean MESCHIN, agissant en qualité de légataire à titre universel, de Jeanne OLLIVIER veuve de René OUVRE demeurant à Blois, Place Saint-Louis, sa mère, de Jeanne Catherine OUVRE épouse de Charles MARIE, ancien greffier de la justice de paix de Blois et d'Honorine OUVRE, couturière, demeurant à Blois.

La prisée du mobilier est faite par une "Foupicière".

Parmi la garde robes longuement détaillée, relevons : un déshabillé d'indienne vert, un d'indienne rouge, un de siamoise, un de siamoise rayé violet et un de coton gorge de pigeon et un déshabillé de coton noir, trente six chemises, vingt six paires de bas de laine, quatre autres mauvais déshabillés de coton et d'indienne, douze autres chemises, etc...

Cet inventaire contient l'analyse très complète des titres de propriétés conservés par la veuve MESCHIN, en sa qualité d'usufruitière, des immeubles de son mari, et l'analyse de 8 lettres émanant de sa soeur Honorine relatives à la vente de la maison de Blois pour payer les dettes de Monsieur OUVRE, père.

Les droits de succession sont payés le 09 Juin 1825 (235 Frs 29 cts).

Le 05 Mai 1825, il est procédé au partage de sa succession qui comprend quelques immeubles à Lerné (plusieurs caves, un jardin et un hectare 14 ares 03 centiares de terres) quelques créances et le mobilier.

Après le décès de sa belle mère, Jean MESCHIN achète le 24 Mars 1836 deux boisselées de friche à Lerné et procède le 21 Juin 1841 à un bornage avec "Charles Jean Pierre DEMEE de Chavigny, propriétaire de Lerné".

En 1848, Jean MESCHIN recueille la succession de son oncle et ancien tuteur Pierre MESCHIN décédé à Lerné le 26 Octobre 1848 qui l'avait institué légataire universel ainsi qu'on l'a vu sous le chapitre concernant Pierre MESCHIN.

On a vu également que Jean MESCHIN avait été nommé tuteur datif de Romain TAROT, petit fils de Pierre MESCHIN, le 27 Novembre 1842.

 

Le 28 Juillet 1864, Jean MESCHIN, qui n'est plus cordonnier achète de :

1°) Mademoiselle Joséphine MEXME, célibataire majeure demeurant à Chinon,

2°) Madame Sophie Adélaïde OUVRARD, veuve de Jules MEXME, horloger bijoutier, demeurant à Saumur, rue d'Orléans,

3°) Monsieur Victor MEXME, marchand chemisier, demeurant à Paris, 15 Boulevard Saint-Denis,

(madame veuve OUVRARD s'étant portée fort de ses deux fils Jules MEXME âgé de 11 ans et Eugène MEXME âge de 10 ans)

une portion de maison à Chinon, derrière la Cure Saint-Etienne appartenant aux vendeurs pour moitié (l'autre moitié appartenant à Madame MESCHIN VAZEREAU) pour l'avoir recueillie dans la succession de Françoise VAZEREAU leur mère, veuve de Martin Etienne MEXME, décédée à Chinon en 1861. Cette dernière possédait cette maison indivisément avec Madame MESCHIN VAZEREAU en vertu d'une donation partage du 24 Avril 1828 par les époux VAZEREAU-BARANGER.

 

Victor MEXME eut un fils : Etienne qui demeurait à Lille, décédé sans enfant vers 1910.

Jules MEXME eut deux enfants : Jeanne, décédée célibataire et Germaine née en Janvier 1885 qui épousa à plus de 40 ans Jules LORRAIN et décéda sans enfant.

Quant à Eugène, il épousa la bonne de sa mère et eut trois enfants établis épiciers et boulangers à Tours à et Saumur.

 

Le 26 Novembre 1864, le maire de Chinon autorise "M. MESCHIN-MEXME" (il s'agit sans doute de MESCHIN-VAZEREAU), marchand de noix rue Rabelais à avoir un entrepôt de noix rue Rabelais. Jean MESCHIN-VAZEREAU aurait-il alors fait, du moins momentanément ce commerce ?

 

Jean MESCHIN est décédé à Chinon le 21 mai 1868 et sa femme, née Anne VAZEREAU, le 14 Juillet 1881.

 

 

Eugène MESCHIN-CHIVERT

 

Les époux MESCHIN-VAZEREAU n'eurent qu'un fils : Eugène MESCHIN.

On ignore tout de son enfance.

Il était devenu "Caissier à la Maison de banque BLANCHET" à Chinon.

Il épousa Marceline Anne CHIVERT (voir famille CHIVERT) à Chinon.

Aux termes de son contrat de mariage du 25 Septembre 1860 il apportait en mariage, outre sa garde robe "et tous les objets servant à l'usage et à l'ornement de sa personne", une somme de quarante mille francs lui provenant de ses gains et économies. Il avait alors environ 38 ou 39 ans.

Ce contrat de mariage était signé en présence de :

- Urbain VAZEREAU, propriétaire à Chinon, oncle du futur.

- Charles ALLARD, propriétaire, capitaine retraité demeurant à Chinon, grand oncle du futur.

- Joseph CHIVERT, propriétaire à Bourgueil, grand père de la future.

- Urbain Constant CHIVERT, propriétaire à Restigné oncle maternel de la future.

- Louis CHIVERT, négociant à Saumur, oncle paternel de la future.

 

Le 21 Novembre 1865, Eugène MESCHIN, demeurant rue Rabelais à Chinon achète une maison à Chinon rue de la Réale (devenue depuis 5 rue Marceau) dont il fit son domicile.

On trouvera dans cette vente, les anciens titres de propriété de cette maison (Etude de Me FERME, notaire à Chinon), la purge des hypothèques inscrites, et une correspondance relative au paiement du solde du prix aux créanciers inscrits.

Le 30 Avril 1878, Monsieur et Madame MESCHIN-CHIVERT vendent des terres et vignes situées à Benais appartenant en propre à sa femme.

Le 22 Avril 1892, Monsieur Eugène MESCHIN-CHIVERT, propriétaire, demeurant à Chinon, rue de la Réale achète une maison rue de la Réale contiguë à la sienne, qu'il fait démolir, et qui devient le jardin de la maison 5 rue Marceau. Il y construisit aussi un nouveau corps de bâtiments dont Madame LEMAIGNEN, sa petite fille, alors âgée de 4 ans posa la première pierre.

Les époux MESCHIN-CHIVERT eurent un seul fils : Eugène Joseph Marcelin MESCHIN né à Chinon le 31 Octobre 1861. Monsieur MESCHIN faisait faire ses vendanges à façon et nous en avons plusieurs comptes.

Madame MESCHIN-CHIVERT est décédée à Chinon le 31 Mai 1893 et son mari le 24 Décembre 1895 (voir concession au cimetière de Chinon) à l'âge de 74 ans, d'une attaque de paralysie. C'était la troisième attaque. Il s'était bien remis des deux premières. Il tomba mort en venant ouvrir sa porte à son fils, qui s'inquiétait de ne l'avoir pas encore vu, la veille de Noël.

Après avoir été caissier de la Banque Bertrand à Chinon, il en était devenu fondé de pouvoir jusque vers 1891. Cette banque ayant fait faillite en 1893, Monsieur Eugène MESCHIN y perdit quarante mille francs.

C'était un homme intègre et très bon.

Il n'était pas très grand et portait des favoris.

 

Lors de leur décès, Monsieur et Madame MESCHIN-CHIVERT possédaient, outre les maisons 3 et 5 rue Marceau à Chinon, les terres et vignes propres à Monsieur MESCHIN sur les communes de Lerné, Seuilly et Thizay d'une contenance d'environ 6 hectares en 60 parcelles et les immeubles propres à Madame MESCHIN-CHIVERT comprenant une maison à la Motterie, près du cimetière, commune de Restigné, une autre maison à Restigné (l'usufruit à Madame veuve Urbain Constant CHIVERT) et environ 6 hectares de terres et vignes à Restigné, 2 hectares de terres et vignes à Benais, une maison rue du Pot et 66 ares de terres et vignes à Bourgueil, 30 ares de terres et vignes à Benais et 30 ares à Saint-Michel-sur-Loire, et enfin un hectare 30 de près et terres à Continvoir.

 

 

Eugène Joseph Marcelin MESCHIN

 

Eugène Joseph Marcelin MESCHIN est né à Chinon le 31 Octobre 1861.

Il fit ses études au collège Saint Grégoire à Tours, où il était élève au "Cours Supérieur de Grammaire" pendant le 4ème trimestre 1875. A cours de ce trimestre, il eut les mentions "très bien" en devoirs religieux, conduite, application, ordre et tenue et politesse ; et il obtint les notes de 19 en doctrine chrétienne, 1 en vers latins, 19 en thème latin, 7 en thème grec, 13, 19 et 20 en version latine et 21 en version grecque. Pendant l'année 1876-1877, se terminant le 1er Août, il était en "Cours d'Humanité", toujours avec d'excellentes notes ; il était en rhétorique en 1877-1878 et en 1878-1879 en cours de philosophie, toujours avec d'excellentes notes.

Il obtint son diplôme de bachelier le 11 Août 1879 et fit aussitôt son service militaire au 135ème régiment d'infanterie à Chollet du 08 Novembre 1879 et fut libéré en Novembre 1880 avec le grade de Sergent. Ayant satisfait aux "Examens prescrits" avec la mention très bien, il fut jugé susceptible de remplir un emploi d'officier de réserve.

Après sa libération, il fit sa licence en droit à la faculté de Poitiers où il obtint son diplôme de bachelier en droit le 25 Juillet 1883 et de Licencié en droit le 28 Juillet 1884. Il s'était inscrit le 19 Décembre 1883 à la "Société Dikazologique" à Poitiers.

Après avoir obtenu sa licence il devint avocat à Chinon et il épousa le 05 Juillet 1887, Marie Suzanne MEUNIER (voir famille MEUNIER).

De ce mariage est née le 25 mai 1888 une seule fille : Marie Suzanne Eugénie MESCHIN qui épousera Fernand LEMAIGNEN.

Eugène MESCHIN avait alors les cheveux et sourcils noirs, les yeux gris, le front haut, le nez gros, la bouche moyenne, le menton rond, le visage ovale ; il mesurait 1 mètre 73 (certificat d'aptitude à devenir officier de réserve - Voir également ses photos).

Il était ami intime de Gabriel MEUNIER, avec qui il passe son enfance à Chinon et qu'il retrouvera à la faculté de droit de Poitiers, ce qui explique son mariage avec sa soeur.

Il aurait voulu préparer Saint-Cyr, mais sa mère s'y opposa ; il conserva cependant toute sa vie un penchant pour l'armée ; officier de réserve, il faisait tous les deux ans des périodes militaires.

Après sa licence, il devint avocat à Chinon, d'abord dans une maison louée par lui, 12 rue Marceau qui avait appartenu à la famille MEUNIER et où était né Gabriel MEUNIER. Marie MESCHIN (Madame LEMAIGNEN) sa fille, naquit dans cette maison, dans la même chambre où était né son oncle Gabriel MEUNIER. Puis, après le décès de son père, il vint habiter sa maison 5 rue Marceau où il demeura jusqu'à la guerre de 1914. Sa profession d'avocat l'avait rapproché de Me JANVIER, notaire, et de Me ERLEVINT, avoué à Chinon, ils formaient un trio d'amis intimes.

Il faisait partie de nombreuses sociétés notamment la société des amis du vieux Chinon, la société Colombophile et surtout la société de Tir qu'il fonda.

L'été, il passait ses vacances avec sa famille et sa fille aux Sables d'Olonne.

Il s'occupait également de la gestion de ses terres et vignes à Lerné, Restigné et à Bourgueil et s'y rendait pendant les vendanges, mais sa femme l'accompagnait rarement à Restigné parce que la maison donnait sur le cimetière. Il était très adroit de ses mains et faisait de la menuiserie et de la maçonnerie.

En 1864, à l'âge de 33 ans, il fut atteint d'artériosclérose qui lui occasionnait de graves maux de tête et le rendait nerveux. Il se fit soigner pendant 3 mois à Paris où il loua avec sa femme et sa fille, pendant son traitement, un appartement 23 (ou 24) rue de Naples. Cette maladie était occasionnée par un excès de travail et le chagrin de la mort de sa mère. Le bruit de sa mort avait même couru à Chinon en 1895 et un de ses amis (Monsieur TESSIER) venu à son domicile pour présenter ses condoléances à sa famille, fut fort surpris de se faire ouvrir la porte par lui.

C'est à cause de son état de santé qu'il échangea le 16 Octobre 1902 avec Pierre GALAIS, notaire et Honorine MALECOT, son épouse demeurant à Lerné et Eugénie GALLAIS, épouse de Jean BOURREE, demeurant à Chinon, 16 parcelles de terres et vignes à Lerné provenant de la succession de Jean MESCHIN (partage du 26 Pluviose An X). En contre échange il reçoit la propriété de la Croix Marie, commune de Rivière, à trois kilomètres de Chinon, comprenant maison de maîtres, maison de basse cour, dépendances et 4 hectares 48 ares, le tout clos de murs. Eugène MESCHIN allait fréquemment se détendre dans cette propriété avec sa famille.

Vers 1902 ou 1903, il achète une maison, 7 rue Marceau à Chinon, contiguë à la sienne, parce qu'elle le joignait et espérant plus tard y loger sa fille si elle se mariait à Chinon.

Le 1er Septembre 1911, il loua pour 3, 6 ou 9 années cette maison à Monsieur Henri de PORTZAMPARC, employé principal à la Société Générale.

Le 1er Janvier 1912, il louait à Monsieur René Georges Le NORMAND, receveur des finances de Chinon, la maison située à Chinon, 1 rue Voltaire qui provenait de la succession de Madame FERME-PARE (ex rue Haute Saint-Maurice).

Il avait acheté en 1910 une automobile De Dion Bouton qu'il vendit pendant la guerre de 1914.

A la fin du mois de Juillet 1914, il participa à une visite des champs de batailles de la guerre de 1870, dans l'Est de la France, et fut pris d'une nouvelle attaque de sa maladie ; il dut rentrer en hâte à Paris puis à Chinon dans un état grave. Ayant été mobilisé quelques jours après, il rejoignit son unité à Niort mais en raison de sa maladie, il fut affecté à l'état major à Tours où il fit toute la guerre. A la fin de la guerre, il était Commandant et Chevalier de la Légion d'Honneur. Il habitait alors dans une maison qu'il avait louée, 11 rue de l'Alma à Tours (depuis rue Roger Salengro) à partir d'Octobre 1915 où il continua à habiter jusqu'à son décès. Il ne revint jamais à Chinon.

Sa maladie empira après la guerre ; il ne put pas reprendre sa profession d'avocat. Il était devenu irascible et Madame MESCHIN se plaignit fréquemment de son caractère dans les lettres qu'elle échangeait presque quotidiennement avec sa fille de 1918 à 1926 (voir vie Ernest LEMAIGNEN).

Il fit cependant plusieurs séjours à Périgny, chez son gendre, mais il marchait de plus en plus difficilement. Puis à partir de 1924 il devient encore plus irascible. Le 03 Août 1924, Madame MESCHIN écrit à sa fille "ce qui est terrible, c'est le cerveau ; depuis 15 jours il a beaucoup baissé ; il déménage à tout moment".

Cependant, le 14 Novembre il écrit une charmante lettre à sa fille et ses petites filles pour les remercier des roses qu'elles lui ont envoyées.

Cette longue maladie amenuisa considérablement les ressources du ménage, puisque Eugène MESCHIN avait cessé de travailler depuis la guerre. Il dut vendre presque tous ses biens, les uns après les autres, notamment la propriété de la Croix Marie le 09 Février 1920, et même la maison qu'il avait constitué en dot à sa fille, 52 rue Origet à Tours et qui appartenait à sa femme. On trouvera dans sa déclaration de succession l'énumération des immeubles qui lui étaient propres et qu'il vendit de 1920 à son décès notamment un hangar et un jardin à Chinon, rue Jules Roulleau, (ce dernier fut donné au presbytère de Chinon dont il était contigu), le clos Pamprou et 23 parcelles de terres, vignes, prés et bois à Lerné, Seuilly et Thizay, la maison de la rue de Pot à Bourgueil, le clos du Rochoir ou la Rivière à Bourgueil, une maison, jardin et terre à Pont Boutard, commune de Saint-Michel-sur-Loire, une maison, terres et bois à Restigné et à Benais, bref, la quasi totalité de ses biens propres. Les lettres de Madame MESCHIN à sa fille se font l'écho de ces diverses ventes.

On trouvera au dossier, une liasse de lettres et de factures concernant la propriété de Restigné, de 1905 à 1923 et une autre liasse des comptes d'Eugène MESCHIN concernant la façon des vignes de Restigné et Bourgueil et sa correspondance avec ses tacherons et fermiers de 1895 à 1924 (taille, soufrage, sulfatage, entretien des fûts, etc...).

Sa maladie s'étant encore aggravée, Eugène MESCHIN donna une procuration générale à sa femme par acte de Me GALICHON, notaire à Tours du 10 Juin 1925.

Il décéda à Tours 11 rue de l'Alma, le 18 Septembre 1926 (notoriété Me JANVIER, notaire à Chinon du 10 Janvier 1927) et fut inhumé au cimetière de Chinon (concession du 24 Septembre 1926). Il avait 64 ans et était malade depuis 32 ans.

 

Il résulte de la déclaration de succession que :

- Madame MESCHIN possédait encore, lors du décès de son mari, diverses valeurs de bourse, une maison à Chinon, 1 rue Voltaire et un pré aux Epinettes, commune de Chinon, le tout à elle propre.

- Monsieur Eugène MESCHIN possédait en propre la maison 5 rue Marceau à Chinon et la propriété de Restigné (sauf ce qui en avait été vendu ainsi qu'on l'a dit plus haut) c'est-à-dire : un chalet avec bâtiment d'habitation et d'exploitation, cour, jardin, terres et vignes d'une superficie de 83 ares au lieu-dit la Motterie, près le cimetière.

- La communauté comprenait la maison à Chinon, 7 rue Marceau, une maison à Chinon 9 rue Marceau et quelques valeurs de bourse.

 

Après le décès de son mari, Madame MESCHIN alla habiter à Tours et à Périgny avec sa fille et son gendre. C'était une personne distinguée, cultivée et très pieuse. Elle parlait parfaitement l'anglais et correspondait parfois dans cette langue avec son frère Dom Gabriel MEUNIER.

Elle supporta avec une grande résignation la maladie de son mari, et ses revers de fortune.

Elle avait une grande affection pour ses petites filles et son gendre.

Elle décéda à Périgny le 10 Janvier 1949.

 

Durant son veuvage, elle vendit la maison 1 rue Voltaire à Chinon en 1927, et le pré des Epinettes à Chinon ; les maisons 7 et 9 rue Marceau furent vendues (par acte de Me JANVIER, notaire à Chinon du 18 Août 1948) et la propriété de Restigné (par acte de Me THIBAULT, notaire à Restigné du 31 Décembre 1929). La maison 5 rue Marceau fut vendue après son décès par sa fille, Madame LEMAIGNEN en 1959.

Ainsi, en 1959, il ne restait plus aucun des immeubles acquis par les MESCHIN à Lerné et dans les communes environnantes, et par les CHIVERT à Restigné, Benais et Bourgueil, ni les maisons de Chinon, dont l'ensemble s'était trouvé réuni sur la tête d'Eugène MESCHIN-MEUNIER, du fait que ses ascendantes furent presque toujours des enfants uniques. Il est bien regrettable que quelques vignes du Chinonais ou de Bourgeuil n'aient pu être conservées. La maison de la Motterie à Restigné est aujourd'hui à peu près en ruines (1976).

 

 

Résumé sur la famille MESCHIN

 

La famille MESCHIN était originaire de Lerné où le premier ancêtre connu (Antoine MESCHIN-DAVID) était cultivateur au XVIIIe siècle.

L'un de ses fils, Jean MESCHIN était à la fois cultivateur à Lerné, garde de la terre de Chavigny et boulanger. Il épousa en premières noces Louise MESCHIN, vraisemblablement sa cousine dont il eut un fils également prénommé Jean et se remaria avec Rose OUVRAY dont il n'eut pas d'enfant. Il décéda d'un accident le 12 Juin 1811 laissant son fils mineur.

Il avait fait de nombreuses acquisitions de petites parcelles de terres, vignes et bois à Lerné, Seuilly et Thizay.

Jean MESCHIN, son fils, qui eut pour tuteur datif Pierre MESCHIN son oncle, fit son apprentissage de cordonnier chez Martin MEXME à Chinon et épousa la soeur de la femme de son patron. Il s'établit cordonnier à Chinon et y décéda le 21 Mai 1868 laissant un fils unique Eugène.

Eugène MESCHIN fut d'abord caissier à la banque Blanchet à Chinon puis fondé de pouvoir à la banque Bertrand (c'était vraisemblablement la même banque). Il épousa Marceline Anne CHIVERT et eut un fils unique : Eugène Joseph Marcelin. Il décéda le 31 Mai 1893.

Eugène Joseph Marcelin MESCHIN, avocat à Chinon, épousa Marie Suzanne MEUNIER dont il eut un seul enfant : Marie Suzanne Eugénie qui épousa Fernand LEMAIGNEN.

Il décéda le 18 Septembre 1926.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Famille Meunier

 

et

 

Les Familles

Carbonnier - Maurice -

Ferme-Pare

Bruneau - De Litardiere

Delage

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La famille CHIVERT était originaire de Restigné et la famille MESCHIN de Lerné.

Quant à la famille MEUNIER, elle était originaire de Loudun.

Dès la première moitié du XIXe siècle ces trois familles étaient établies à Chinon.

 

La présente étude comprendra trois chapitres :

- Le premier concernant la famille MEUNIER dont sont issus :

1° - La famille de LITARDIERE

2° - La famille DELAGE

3° - Célestin Charles MEUNIER qui épousa Albertine Suzanne MAURICE, grand-père de Madame LEMAIGNEN.

 

- Le deuxième concernant la famille MAURICE avec ses alliances avec les familles BRUNEAU et DEMEZIL.

 

- Le troisième concernant la famille FERME-PARE, dont une fille, Caroline FERME épousa Louis Etienne MAURICE.

 

 

I - LA FAMILLE MEUNIER

 

Michel Célestin MEUNIER

 

Le plus ancien ancêtre connu de cette famille est Michel Célestin MEUNIER, né à Poitiers le 20 Août 1802, fils de François MEUNIER propriétaire à Loudun où il décéda le 08 Avril 1831 et de Louise BARBAT (ou BARBOT) qui habitait en Décembre 1832 à Poitiers.

Il avait un frère et quatre soeurs et possédait indivisément avec eux "un domaine situé au Grand Pont, commune de Chasneuil près Poitiers, et dont les dépendances, s'étendent tant sur ladite commune que dans celles de Migne, consistant en maison d'habitation, bâtiments d'exploitation, jardins, terres labourables, prés, chènevières et vignes dépendant de la succession de son père" (contrat de mariage MEUNIER-CELSE).

Le 08 Août 1827, il achète de Dame Modeste Zéline AUMAISTRE veuve de Louis Olivier MOLANT, demeurant à Loudun et de ses 3 enfants mineurs, avec promesse de ratification à leur majorité, une pharmacie à Loudun, rue du Puits Saint Gilles comprenant :

"Comptoirs, balances, poids, vases, pots, mortiers, pilons, boites, alambics, poëlettes, deux poëlons, une presse scellée dans le mur de la maison, toutes espèces d'onguents, sirops, gommes, sels, élixirs, en un mot tout ce qui est réputé ustensiles et pharmacie et drogues".

"Sous l'expresse réserve de la part de ladite dame veuve MOLANT, du vin de Seguin, des eaux magnésiennes, du sirop de Harembure, du sucre, du miel de première qualité, du chocolat au lichen, de tous les objets qu'elle a à titre de dépôt, de plusieurs bandages et de toutes les créances".

Cette vente est consentie moyennant le prix de quinze mille francs payé comptant à concurrence de cinq mille francs, les dix mille francs de surplus étant payables au plus tard le 24 Juin 1847 avec intérêt à 5 %.

A cette vente interviennent les père et mère de l'acquéreur qui hypothèquent au profit de la venderesse "la maison, ferme et dépendances de Signy située communes de Vendoeuvre et circonvoisines dans l'étendue du bureau des hypothèques de Poitiers".

Ce solde de prix de vente fut payé le 13 Janvier 1828 par Marie Jean Baptiste CARBONNIER et Marie FRICOT, sa femme demeurant à Loudun, dont Michel Célestin MEUNIER avait épousé la fille, Marie Hélène, (contrat de mariage du 25 Novembre 1827) à l'aide des fonds qu'ils avaient constitué en dot à leur fille.

Marie Hélène CARBONNIER était née le 22 Juillet 1809 à Loudun, où son père demeurait encore en 1844.

Du mariage des époux MEUNIER-CARBONNIER est né à Loudun le 26 Septembre 1828 un fils : Célestin Charles MEUNIER dont la vie sera étudiée plus loin.

 

Marie Hélène CARBONNIER décéda 3 ans après cette naissance, à Loudun le 14 Novembre 1831 et Michel Célestin MEUNIER se remaria un an après (contrat de mariage du 15 Décembre 1832) avec Marie Anne Joséphine Elisa CELSE, née à Alezunne (Aube), le 26 Novembre 1811, du mariage de Jean Basile CELSE, garde magasin et contrôleur de timbre extraordinaire et de Joséphine Jeanne COUTURE, demeurant à Tours, rue Colbert.

 

Il n'est constaté aucun apport en mariage de la future épouse ; par contre Michel Célestin MEUNIER apportait ses droits non liquidés dans sa première communauté, notamment la pharmacie de Loudun et les biens propres suivants :

1°) Une borderie appelée Le Liseau, commune de Seneche, canton de Neuville, arrondissement de Poitiers.

2°) 33 pièces de terres, prés, bois et vignes dépendant du Domaine de la Blaiserie, commune de Seneche.

3°) Le tiers d'une créance hypothécaire de 247 Frs 50 (250 livres tournois).

4°) Une rente perpétuelle et foncière de 21 Frs 83 (22 livres tournois).

On ignore comment il était propriétaire de ces biens.

5°) Le sixième indivis avec ses frère, soeurs et neveux dans le Domaine de Grand Pont, commune de Chasneuil dépendant de la succession de son père.

Au cours de sa première communauté, il avait acquis un clos de vigne au Clos Gourdet, commune de Venier, une vigne aux Caves, commune de Loudun et une petite maison aux Quatre Croix même commune avec une vigne (compte de tutelle du 09 Avril 1844).

 

Ses relations avec son fils Célestin Charles semblent avoir été assez tendues, car sa seconde femme n'avait aucune sympathie pour son beau fils qui, en fait, avait été élevé par sa grand-mère, Madame CARBONNIER-FRICOT.

Il le fit d'ailleurs émanciper le 23 Mars 1844 (il avait alors pour subrogé tuteur son grand-père Marie Jean Baptiste CARBONNIER) et lui rendit compte de sa tutelle le 09 Avril suivant.

 

Cependant, il venait voir de temps à autre son fils à Chinon, après son mariage. On raconte qu'il faisait parfois le voyage à pieds de Loudun à Chinon (25 kms) et qu'à peine arrivé il allait à Port-Boulet, toujours à pieds (12 kms) pour voir construire le pont du chemin de fer sur la Loire.

Nous n'avons aucun document permettant de retracer la vie de Michel Célestin MEUNIER au cours de son deuxième mariage.

Il était encore pharmacien à Loudun lors du mariage de son fils en 1858.

Il est décédé en 1884, à l'âge de 82 ans et sa femme quelques années après.

 

De son deuxième mariage, il eut 2 enfants :

1°) Marie Blanche Elisa MEUNIER, qui était majeure en 1859 et qui épousa Jean Horace Adolphe ACQUARRON, médecin à Mont-sur-Guesnes près de Loudun (contrat de mariage du 11 Septembre 1859). La descendance des époux ACQUARRON-MEUNIER est inconnue.

2°) Blanche MEUNIER qui épousa Monsieur JAMET, médecin à Loudun. De ce mariage est issue une fille, Blanche JAMET décédée célibataire après 1920, cousine germaine de Madame MESCHIN-MEUNIER qu'elle deshérite.

 

 

FAMILLE CARBONNIER

 

On a vu que Michel Célestin MEUNIER avait épousé en premières noces Marie Hélène CARBONNIER, fille de Marie Jean Baptiste CARBONNIER qui vivait encore à Loudun en 1844 et de Marie Anne FRICOT qui décéda après 1858.

La famille CARBONNIER était originaire de l'Eure.

Il résulte en effet d'une donation-partage reçue par Me Louis Alexandre COMMECY, notaire royal à Chaumont (Oise) le 03 Août 1814, que Marie Frédéric ROUTIER veuve en premières noces de François CARBONNIER en son vivant menuisier à Gisors et veuve en secondes noces de Jean Baptiste GOBERT, alors âgée de 58 ans, avait fait donation à ses quatre enfants, savoir :

1°) Marie Jean Baptiste CARBONNER, son fils issu de son premier mariage, alors homme de confiance à Loudun.

2°) Jean Baptiste GOBERT, charretier à Delincourt (Oise).

3°) Marie Frédéric GOBERT épouse de Jacques Maurice MORAND, garde-moulin à Delincourt.

4°) Marie Françoise GOBERT épouse de Frédéric SEDILLE, maçon à Delincourt.

Ces trois derniers issus de son deuxième mariage.

Le troisième lot échu à Marie Jean Baptiste CARBONNIER comprenait des terres à Delincourt.

Marie Jean Baptiste CARBONNIER vivait encore à Loudun en 1844 et sa veuve vint habiter chez son petit fils Célestin Charles MEUNIER à Chinon, après son mariage. Elle y décéda vers 1864 au 12 de la rue de la Réale.

Marie Jean Baptiste CARBONNIER était d'origine modeste. On ignore quelle fut sa profession, si ce n'est en 1814, la vague qualité d'homme de confiance. Pourquoi vint-il à Loudun épouser Marie Anne FRICOT ? Celle-ci paraît avoir eu une certaine fortune. Ses parents possédaient la propriété du Pin à Angers et dans cette ville deux maisons, 124 et 126 Faubourg de Pressigny. On a vu que les époux CARBONNIER-FRICOT avaient constitué une dot de 10.000 Frs à leur fille, ce qui permit à leur gendre d'acheter sa pharmacie.

Il résulte d'un bordereau d'inscription hypothécaire du 10 Janvier 1840 prise à la garantie du paiement du solde des prix de vente des immeubles d'Angers que les père et mère de Madame CARBONNIER-FRICOT étaient : Etienne FRICOT, décédé le 11 Juin 1839 et Delphine COURTOIS qui lui survécut.

Ils avaient 3 autres enfants :

1°) Rose FRICOT, célibataire,

2°) François FRICOT, sabotier à Quelaines (Mayenne) décédé avant 1839 laissant lui-même 3 enfants : François FRICOT, demeurant à Quelaines, Renée FRICOT, épouse de François ANGOT, demeurant à Quelaines et Alexandre FRICOT, menuisier à Quelaines.

3°) Une autre fille, décédée avant 1839, épouse de René Edouard VALLERAY dont elle avait eut une fille.

Les époux CARBONNIER- FRICOT devaient être propriétaire de certains biens immobiliers à Loudun.

Ils avaient acquis notamment une maison à Loudun, 5 rue du Bourg Joly le 29 Février 1836, et le 28 Février 1831, la maison et le Moulin de Ripaille, commune de Bournan (contrat de mariage MEUNIER-MAURICE du 05 Septembre 1858).

 

 

LE MOULIN DE RIPAILLE

 

"Le Moulin de Ripaille, en la paroisse de Bournan, pays de Loudunois, consistant en une maison composée d'une chambre basse, chambre haulte, granges, deux écuries, cour, jardin, joignant d'un côté au chemin tendant de la Commanderie de Moullene à aller au Moulin de Ripaille, d'autre côté le chemin du Moulin de Lhommeau à aller au bourg de Bournan un bois taillis contenant deux septrées"..... et diverses pièces de terres et prés (vente du 20 Août 1700) avait été acquis par les époux CARBONNER-FRICOT, de Mademoiselle Charlotte Gilbert de FAROUILLE des FORGES le 28 Février 1831.

Nous possédons une importante liasse de titres de propriété, baux et aveux et pièces de procédure concernant ce Moulin qu'il est très intéressant de consulter.

Le plus vieux document est la copie établie au XVIe ou XVIIe siècle d'un bail du 04 Juin 1405. On trouve ensuite les titres suivants :

04 Avril 1494 - Vente à Abel du Marconnay.

02 Janvier 1559 - Echange avec le Seigneur de Marconnay.

08 Janvier 1586 - Un très beau parchemin de 14 pages concernant une transaction avec un Seigneur de Nazelles, baron de Saint-Médard.

09 Avril 1647 - Arpentage et désignation détaillée des terres avec énonciation des titres de propriété.

18 Avril 1691 - Bail par Marc Antoine ACERE, escuyer, Seigneur des Forges, Vézières, Ripaille et autres lieux, à Urbanne DUBIN veuve de Jacques BABOUARD, marchand meunier des Moulins de Ripaille avec tournants et virants, moulin frumentier et moulin mouturier et ustensiles d'iceux, moyennant 120 livres en argent et le paiement des rentes consistant en nombreux boisseaux de froment, gâteaux, chapons, beurre, etc...

1679 - Visite du Moulin de Ripaille (état estimatif).

22 Novembre 1690 - Transaction entre Marc Antoine ACERE, Seigneur des Forges, Vézières et Ripaille demeurant à Paris, rue Neuve des Petits Champs, paroisse Saint-Roch, et Salomon GUERIN qui avait lui vendu une partie du Moulin de Ripaille, l'acquéreur lui en ayant laissé la jouissance en usufruit "à cause de sa pauvreté".

20 Mars 1699 - Vente par Marc Antoine ACERE, alors en son château des Forges, paroisse de Saint-Cittroine, à Vital ROCAS, escuyer, Seigneur de Lanou, demeurant paroisse de Venez "de six septiers de bled seigle de rente noble foncière et féodale faisant partie des sept septiers de blé seigle de rente appellé la rente des maîtres due chacun an au jour et feste de Saint Michel à la recette ordinaire de la Seigneurerie de Vézières....... à raison de la maison des Maîtres de Ripaille..... mouvant du fief et Seigneurie de Berrie".

20 Août 1700 - Vente par Vital ROCAS, sieur de la Noue demeurant à Angers à François JAMINAU, marchand tanneur à Loudun.

13 Septembre 1720 - Aveu de foi et hommage lige à Monseigneur François DREUX, chevalier baron de Brevic, Seigneur de la Varanne et autres places à cause de sa baronnerie de Bevric par Augustin de FERRIOL, conseiller du Roi en sa cour et parlement de Metz, Seigneur des Forges pour le fief maison seigneurie Moulin appartenances et dépendances de Ripaille (suit la désignation). Voir aussi la copie, non datée, d'un très bel aveu au Duc de la Tremouille, baron de Bevric.

23 Mai 1727 - Vente par Augustin de FERRIOL à Nicolas de FAROUÏL, escuyer, Seigneur du Plein, paroisse de Chalois, de la terre et seigneurie des Forges en la paroisse de Saint Cytroine, pays Loudunois, de la maison terre et seigneurie de Vézières et du Moulin de Ripaille, moyennant 43.000 livres.

05 Décembre 1733 - Foy et hommage par Dame Marie Gilberte Le RICHE veuve de Messire Nicolas de FAROUÏL, en sa qualité de dame garde noble de ses enfants mineurs, au baron de Berrie.

Suivent une trentaine de baux, visites, reçus de fermages ou de rentes, aveux, ventes, transactions, apurement de comptes avec les meuniers, etc, concernant le Moulin de Ripaille, qu'il serait trop long d'énumérer ici.

En 1814 commence un long procès entre Mademoiselle Marie Gilberte Charlotte de FAROUÏL des Forges demeurant en son hôtel particulier, 7 rue Michaudière à Paris et son voisin le Général François Fournier de Verrières, maréchal de Camp, propriétaire du Moulin d'Humeau distant de 500 mètres en amont de celui de Ripaille, relatif à un détournement du cours d'eau.

Il est très amusant de lire ces nombreuses pièces de ce procès qui dure jusqu'en 1828.

De semblables litiges à propos de l'eau du Moulin de Ripaille auront encore lieu en 1842, 1854 et 1876.

C'est peut-être parce qu'elle était excédée par ce litige que Mademoiselle des Forges vendit le Moulin à Marie Jean Baptiste CARBONNIER le 28 Février 1831.

Le 02 Octobre 1849, Madame veuve CARBONNIER-FRICOT et son petit fils Célestin Charles MEUNIER louent le Moulin de Ripaille à Parfait SAULNIER et Madeleine MOREAU, sa femme.

 

On ignore jusqu'à quelle date le Moulin de Ripaille est resté dans la famille MEUNIER. Il à été vendu par Célestin Charles MEUNIER à une date qu'il a été impossible de préciser, mais après 1876 sans doute vers 1880.

 

Le Moulin de Ripaille s'appelle aujourd'hui Moulin de Freval, en face de la ferme de Ripaille. La roue existe toujours, mais le canal d'eau est asséché depuis longtemps. Le bâtiment d'habitation a été restauré et forme dépendance d'une assez importante propriété contiguë construite depuis.

Le Moulin de l'Humeau est détruit.

Ripaille se trouve sur un petit chemin à l'ouest de la route de Fontevrault à Loudun, environ à 2 Kms au sud du croisement de cette route avec celle de Bournand aux Trois Moutiers.

 

 

Frère et soeurs de Michel Célestin MEUNIER

 

Familles VERRIET DE LITARDIERE ET DELAGE

 

Michel Célestin MEUNIER avait cinq frère et soeurs :

1°) Michel MEUNIER dit "l'ainé" qui était propriétaire rue Sainte Opportune à Poitiers en 1844 et dont la descendance est inconnue.

 

2°)..........MEUNIER, descendance inconnue.

 

3°) Jeanne Joséphine MEUNIER, épouse d'Etienne THIBAULT décédée sans enfants le 06 Décembre 1834, laissant pour héritiers ses frères et soeurs. Le 02 Février 1844, Michel Célestin MEUNIER et Michel MEUNIER aîné, cédèrent aux époux DELACROIX-FRADIN ci-après nommés, tous leurs droits successifs dans la succession de leur soeur Jeanne Joséphine.

 

4°) Françoise Placide MEUNIER qui épousa Jean DELACROIX-FRADIN, propriétaire, demeurant à Poitiers, rue de l'Hôpital Général. Il eurent deux enfants :

a)............ FRADIN père rédemptoriste à Poitiers.

b)........... FRADIN épouse de............ DELAGE. Ils eurent un fils : Gabriel DELAGE, décédé après 1934, qui épousa Elise BOUDET, propriétaire à Plantadis (Vienne). (Elise BOUDET avait une soeur épouse ARDENT). Du mariage DELAGE-BOUDET naquirent 8 enfants :

- Paul DELAGE décédé célibataire vers 1908.

- Marie DELAGE épouse SEJOURNET qui demeurait à Gençais en 1944.

- Genny DELAGE épouse JOUANNEAU lequel fut tué à la guerre 1914-1918, (ces deux dernières soeurs jumelles) demeurant à Limoges.

- Madeleine DELAGE religieuse à Lourdes, décédée vers 1960.

- Louise DELAGE épouse PRADELLE.

- Lucie DELAGE épouse CAMBON.

- Jean DELAGE, curé de Boisseuil (Haute Vienne), décédé en 1943.

- et Geneviève DELAGE.

5°) Sophie (?) MEUNIER qui épousa un SAVARD et qui eut deux enfants :

 

A) Pauline SAVARD née en 1820 épouse de Delphin ETEVE décédée sans enfant à Lussac le 22 Septembre 1898 (voir son faire-part de décès).

 

B) Et une autre fille qui épousa VERRIET de LITARDIERE. Ils eurent quatre enfants :

a) Le Docteur Arthur VERRIET de LITARDIERE, décédé avant 1907 qui eut 2 enfants :

- Jacques décédé célibataire à la bataille de la Marne en 1914.

- Hélène qui épousa Yannick DES ROSEAUX décédée en Avril 1945 à la Trimouille (Vienne).

b) Le Docteur Louis VERRIET de LITARDIERE qui eut trois enfants :

- Augustin décédé célibataire après 1907.

- Marcel décédé célibataire.

- Renée épouse de Gaston DUPONT, médecin à Lussac (Vienne) vivait en 1945 (voir lettre à sa cousine Madame MESCHIN-MEUNIER du 05 Septembre 1945 donnant des nouvelles de sa famille).

Ils eurent 3 enfants :

- Pierre DUPONT.

- Odette DUPONT.

- Geneviève DUPONT qui épousa un russe et demeurait boulevard Henri IV à Paris en 1945.

c) Une fille qui épousa Philippe de la BICHE dont elle eut deux enfants :

- Henri de la BICHE qui eut lui-même 3 enfants : Hilaire, François et Marie Madeleine.

- Une fille qui épousa Pierre de GOUTTE PAGNON dont elle eut 6 enfants : Louis-Charles, Anne, Marie, Henriette, Marguerite et Colette.

d) Une autre fille qui épousa un MAUXION (décédée avant 1898) dont elle eut un Fils : J. MAUXION qui eut lui-même deux enfants : Eugène et Marie.

 

 

Célestin Charles MEUNIER

 

Célestin Charles MEUNIER est né à Loudun le 26 Septembre 1828 du premier mariage de Michel Célestin MEUNEIR avec Marie Hélène CARBONNIER. Il perdit sa mère à l'âge de 3 ans et on a vu que son père l'émancipa et lui rendit compte de sa tutelle en 1844. Il fut élevé par sa grand-mère CARBONNIER.

Il épousa le 06 Septembre 1858, Albertine Suzanne MAURICE (voir famille MAURICE ci-après) à Chinon.

Il résulte de son contrat de mariage reçu par Me FERME, notaire à Chinon, le 05 Septembre 1858, qu'il était alors greffier à Chinon et qu'il apportait en mariage divers meubles, une somme de 8.350 Frs, diverses valeurs de bourse et créances pour un montant de 28.426 Frs, et en outre, ainsi qu'on l'a vu plus haut, ses droits étant de moitié avec Madame CARBONNIER, sa grand-mère dans le Moulin de Ripaille et une maison, 5 rue du bourg Joly, à Loudun.

Sa femme apportait une dot de 21.800 Frs en créances diverses et le pré des Epinettes à Chinon que son père avait loué aux époux PLOUZEAU le 14 Mai 1857.

Le 16 Avril 1863, il achète une petite parcelle de terre à Chinon.

Le 04 Septembre 1863, il loue à la Communauté des Dames Augustines à Saint-Louan, commune de Chinon, le pré des Epinettes, commune de Chinon, qui appartenait à sa femme.

Le 02 Janvier 1865, il achète le Greffe du Tribunal Civil de Chinon moyennant le prix de 30.000 Frs.

Le 21 Novembre 1865, il vend au département de la Vienne, la maison située à Loudun, 5 rue du bourg Joly qui dépendait de la succession de Madame CARBONNIER sa grand-mère, décédée vraisemblablement quelques mois auparavant (on sait qu'elle était venue habiter chez son petit fils depuis son mariage).

Il habitait alors à Chinon, rue de la Réale n°12, dans une maison dont il était locataire et où est née Madame LEMAIGNEN.

Il eut deux enfants :

1°) Gabriel Charles MEUNIER, né à Chinon le 05 Juillet 1859 qui fut bénédictin à Solemmes et décéda au Mont Saint-Michel le 20 Février 1934 (voir famille MESCHIN et correspondances avec Madame LEMAIGNEN sa nièce) dont la biographie va être retracée ci-après.

2°) Marie Suzanne MEUNIER, née à Chinon, le 22 Avril 1868 qui épousa Eugène Joseph Marcellin MESCHIN et décéda à Périgny le 10 Janvier 1949, mère de Madame LEMAIGNEN.

Il dut vendre son greffe vers 1892 et acheta le 06 Février 1893, une maison à Tours, rue Origet n°8 (depuis n°52) récemment construite, à titre de placement pour 18.000 Frs.

Il habitait alors 1 rue Saint Maurice à Chinon (rue Voltaire n°1) où il est décédé.

En 1895, il achète dans la prairie de Saint-Mexme à Chinon, le pré de la Prévoté qu'il loue le 28 Mai 1895.

Le 21 Juillet 1899, intervient entre lui et divers autres propriétaires des Caves Peintes à Chinon, un procès contre un sieur MAUNY qui encombrait la cour commune des Caves Peintes avec sa charrette. Cette cave avait été acquise par lui le 30 Avril 1878.

Une inscription à l'entrée de la rue des Caves Peintes précise :

"Je scay où est la cave peinte à Chinon. J'y ai bus maints verres de vin frais". RABELAIS.

 

Célestin Charles MEUNIER décède à Chinon le 22 Septembre 1907 d'une crise d'urémie, 1 rue Voltaire à Chinon.

Madame MEUNIER-MAURICE décède à Chinon le 03 Mai 1909 d'un cancer de l'estomac.

Leurs successions confondues comprenaient :

- Diverses valeurs de bourse et créances hypothécaires pour un montant de 118.403 Frs.

- Une maison à Chinon rue Voltaire qui était propre à Madame MEUNIER-MAURICE.

- La maison rue Origet à Tours.

- Une cave aux Caves Peintes à Chinon.

- Le pré de la Prévoté (71 ares 09) à Chinon.

- Le pré des Epinettes à Chinon 1 Hectare 16 ares) propre à Madame.

Ces biens sont partagés entre leurs deux enfants, Madame MESCHIN et Dom Gabriel MEUNIER, par acte de Me JANVIER, notaire à Chinon du 25 Mars 1914, à l'avantage de Madame MESCHIN.

 

Célestin Charles MEUNIER était d'un caractère jovial et bon vivant. Il portait des favoris (voir photos), sa femme était très musicienne et aimait les réunions de la société bourgeoise de Chinon.

 

 

Dom Gabriel MEUNIER

(Voir dossier le concernant)

 

Ainsi qu'on vient de la voir, Gabriel Charles MEUNIER est né à Chinon le 05 Juillet 1859. Il fut élevé au collège Saint Grégoire à Tours, tenu par des Jésuites. Il passa son bachot à la faculté des Lettres de Poitiers en Avril 1878 (diplôme du 27 Octobre 1878) et commença à préparer son droit à Poitiers avec son ami et compatriote Eugène MESCHIN qui épousera sa soeur.

Mais il songe déjà à entrer dans les ordres et fait de nombreux séjours à l'abbaye de Liguge.

Par une lettre du 25 Septembre 1878, il informe ses parents qu'il s'est ouvert de ses intentions à Monsieur le curé de Saint Etienne de Chinon ; il indique qu'il fera ses adieux à sa famille de Sainte-Maure (les MAURICE) et demande à ses parents d'accepter généreusement le sacrifice de la séparation.

Le 29 Septembre 1878, il écrit à sa mère :

"Je comprends le chagrin que ce sacrifice peut te causer, mais, tu le sais, il est impossible de passer encore l'hiver dans cette situation.... Ce n'est pas pour la vie que nous nous disons Adieu ; c'est pour trois mois, pour six mois, et crois-tu que cet adieu ne te serait pas plus pénible dans six mois. Quant à réfléchir, je ne fais que cela depuis un an. Je sais ce que je perds et ce à quoi je m'engage.... Viens si tu veux à Tours ou à Poitiers avec papa..... Il faudra m'apporter ma malle avec de l'argent......"

 

Le 07 Octobre 1878, il écrit à nouveau à ses parents :

"Moi non plus je n'oublierai jamais le moment où nous nous sommes dit Adieu. Mais papa va beaucoup trop loin en disant que c'est pour toujours..... Je vous avoue que je n'ai jamais été si mal à mon aise que vendredi matin en quittant Chinon et en prenant la ligne de Tours. A Sainte-Maure je me suis arrêté et j'ai causé avec ma tante Louise (Louise MAURICE). Dans la soirée je suis allé dire Adieu à ma bonne tante "Marie Etienne" (Caroline MAURICE qui était religieuse)".

Il arrive le lendemain à Solemmes :

"Encore une fois mes chers parents vous savez que je n'ai point quitté la maison paternelle sans regrets ; mais j'ai été content de vous savoir consentir et accepter généreusement le sacrifice..... J'aurai une charmante petite cellule..... mon diplôme de Poitiers n'est pas encore signé". (Il s'agit de son diplôme de bachelier qui, on l'a vu sera en effet délivré sur le 27 Octobre 1878).

 

Après son noviciat à Solemmes, il prononce ses voeux le 29 Juin 1880, peu avant l'expulsion des Bénédictins en vertu de la Loi sur la dissolution des congrégations.

 

Le 07 Novembre 1880, sa tante Caroline MAURICE (Soeur Marie Etienne) écrit à sa soeur Albertine MAURICE épouse de Célestin Charles MEUNIER (père et mère de Dom Gabriel MEUNIER) pour leur relater en détail cette expulsion :

"Cet acte barbare a duré onze heures et a commencé à trois heures du matin.... quatre cent hommes de troupe assiègent l'Abbaye avec le sous-préfet de la Flèche.... On a enfoncé les portes de l'église où les Pères priaient, puis celles des cellules.... Il fallut quatre gendarmes par moine pour les expulser à la grande indignation de la population de Solemmes. A cinq heures du soir tout était fini....."

Le lendemain de cette expulsion, Dom Gabriel relate à ses parents les événements de la veille dans une longue lettre dont les détails confirment ceux de Soeur Marie Etienne :

"Consummatus Est ! Les vandales nous ont chassé hier de la maison de Dieu, mais ça n'a pas été chose facile. Le siège à duré près de onze heures.... une ou deux compagnies d'artillerie se rangèrent tout autour de la place et jusque sur les bords de la Sarthe.... Pendant ce temps nous nous barricadâmes comme il faut..... La petite porte d'entrée tint bon environ une heure et demi. La porte du cloître ne dura pas longtemps.... Ils crochetèrent toutes les portes fermées des cellules au nombre d'au moins 60 à 80. Mais ils ne trouvèrent qu'une dizaine de frères âgés barricadés ; tous les autres étaient au Choeur... L'infâme sous-préfet faisait les cent pas dans la cour... Nous chantions les psaumes dans le choeur avec les laïques, hommes et femmes... On fit une nouvelle barricade avec les chaises... Enfin parut un crocheteur, un voyou de Paris et probablement de Nouméa... Enfin un affreux diable à écharpe tricolore entre et crie d'abord qu'il ordonnait au peuple de sortir. Toutes les dames crièrent qu'elles ne sortiraient pas. Un de nos père lança contre eux l'excommunication.... Alors on fit entrer au milieu du choeur une compagnie d'artillerie ; nous chantions encore plus fort.... Alors au moins 20 gendarmes brisèrent la table de communion et enportèrent les dames.

Plusieurs eurent besoin de 3 ou 4 gendarmes pour les trainer, puis on fit de même pour tous les laïcs. Alors cet affreux sous-préfet entra et alla jusqu'à la Stalle du Père Abbé qui l'excommunia... Alors les gendarmes nous ont emporté un à un. Ils se sont mis au moins à cinq pour m'emporter etc..."

Il faudrait citer cette lettre intégralement.

 

Le 11 Novembre, Dom Gabriel relate également cette expulsion dans une lettre à sa mère. Les moines se sont dirigés vers Sable en coule et tête nue et ont été dirigés vers une petite propriété aux environ de Bouère (Mayenne). Dom Gabriel est retourné à Solemmes chercher quelques menus objets. Dans les corridors ce ne sont que des débris de portes arrachées de leurs gonds.

Son père est venu le voir pendant qu'il était retourné à Solemmes pour l'aider à faire quelques paquets, ainsi qu'il résulte d'une autre lettre envoyée en Novembre à sa mère.

Il ne semble pas que les Bénédictins aient été longtemps absents de Solemmes, ils y revinrent discrètement. Le couvent resta occupé par un détachement de gendarmerie pendant 14 ans (voir le journal "Le Matin" du 21 Août 1901). Les Bénédictins furent à nouveau expulsés de Solemmes le 14 Septembre 1901 et de l'abbaye de Saint-Maur le 23 Septembre 1901 après la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat mais cette fois-ci sans violence (voir photos et articles de journaux).

Dom Gabriel était à Solemmes vers 1885 et il est nommé peu après sous-prieur à l'abbaye de Saint-Maur de Glanfeuil (Maine-et-Loire) où il resta jusqu'en Novembre 1895 date à laquelle il est envoyé à l'abbaye de Farnborough, près de Londres, pour en prendre la direction.

Dans l'église de cette abbaye, alors nouvellement construite se trouvaient les tombeaux de Napoléon III et du Prince Impérial. L'Impératrice Eugénie résidait à proximité, à Farnborough-Hill dans une somptueuse résidence, et y avait appelé les Bénédictins.

Le 21 Novembre 1895, Dom Gabriel fait une retraite à Solemmes et invite son père et Eugène MESCHIN son beau-frère à venir le voir à l'abbaye de Saint-Maur ; il annonce qu'il va partir le 09 Décembre pour Farnborough où deux Pères se sont déjà rendus. "S.M. L'Impératrice a voulu les conduire elle-même à pied de son château au Prieuré, au grand ébahissement de la population. En ce moment on fait les réparations aux frais de sa majesté, bien entendu".

Le 05 Décembre 1895, le père Edouard du Coetlosquet, Abbé de Saint-Maur de Glanfeuil écrit à Madame MEUNIER qu'il vient de conduire à la gare Dom Gabriel "En traversant la Loire et en jetant un dernier regard sur l'abbaye de Saint-Maur, il n'a pu retenir ses larmes, mais cela n'a duré qu'un moment".

Le 07 Décembre il est à Solemmes et annonce son départ pour l'Angleterre à Saint Michael's Priory à Farnborough, espérant que la traversée en mer sera calme (il a toujours eu la frayeur des traversée de la Manche).

Le 22 Novembre 1895 et le 08 Janvier 1896, Madame Sophie de LITARDIERE, née SAVARD, sa cousine, lui adresse ses félicitations pour sa nomination à Farnborough.

On trouvera dans le dossier plusieurs photos et articles de journaux sur Farnborough, la copie d'une prière du Prince Impérial "trouvée dans son missel" et des lettres à sa mère.

Le 18 Janvier 1907, il lui écrit :

"S.M. L'Impératrice est repartie hier pour la France. Cette année je ne l'ai pas vue en dehors du confessional ; quant je suis allé lui faire visite, la semaine dernière, elle venait de sortir en voiture".

Il était en effet son confesseur attitré.

Nous avons de nombreuses cartes ou lettres datées de 1905,1906 et 1907 donnant des nouvelles de sa santé, du temps, de ses retraites.

Il a assisté à une séance de la Chambre des Lords. Il voyage beaucoup en Angleterre, notamment en Cornouaille, ou à l'Ile de Wight où il est quelque temps aumônier des Bénédictines du couvent de Wentor à Cowes. Il vint en France plusieurs fois notamment en 1901, puis en 1907 et en 1919 à la mort de son père et de sa mère, en 1905 pour ses 25 ans de profession et enfin en 1921, date à partir de laquelle il y demeura, ayant été nommé Chapelain du Mont Saint-Michel après le décès du père Bénédictin qui remplissait cette fonction, et survenu pendant son séjour en France. (L'Impératrice Eugénie était décédée en 1919).

Ses parents vinrent le voir en Angleterre vers 1900 ; ils eurent un accident de voiture.

A partir de 1921, il fit plusieurs séjours à Tours ou à Périgny (voir correspondance de Madame MESCHIN et de Madame LEMAIGNEN).

Nous n'avons pas d'autres lettres de lui, car les Allemands s'en emparèrent au domiciles de Madame LEMAIGNEN à Tours durant la guerres 1939-1945, croyant y trouver de précieux renseignements sur l'Angleterre.

Il écrivit plusieurs ouvrages religieux :

- En 1907, une traduction en 2 volumes des oeuvres du Père Faber prédicateur jésuite en Angleterre (1506-1546). (Voir au dossier une reproduction de son portrait, une notice publicitaire sur cette traduction, un article dans la Semaine Religieuse de Tours du 24 Mai 1907 et un autre article dans "l'Univers" du 28 Mars 1907)

- En 1924, un petit opuscale sur le Mont Saint-Michel.

- En 1929, "La vie de M. BOURAY, le Vincent de Paul de la Touraine (1594-1651)".

- En 1929, également "Sous la Garde des Anges" où il retrace les expériences mystiques de plusieurs Saints avec les Anges, pour lesquels il avait une grande vénération.

Enfin nous conservons de lui deux carnets de dessins assez remarquables, au crayon et allocution qu'il prononça au mariage de sa soeur le 06 Juillet 1887 (imprimée chez son parent Paul GODET, à Saumur)

Il décéda au Mont Saint-Michel le 20 Février 1934.

Il est enterré dans le petit cimetière de l'abbaye de Solemmes.

 

 

II - LA FAMILLE MAURICE

 

 

On a vu que Célestin Charles MEUNIER avait épousé à Chinon, le 06 Septembre 1858, Albertine Suzanne MAURICE (livret de famille et contrat de mariage du 05 Septembre 1858).

Albertine Suzanne MAURICE était la fille de Louis Etienne MAURICE, négociant à Chinon et de Caroline FERME (voir famille PARE-FERME plus loin).

En vertu de leur contrat de mariage du 25 Novembre 1837, il avait été constitué au futur époux par ses parents une dot de 22.000 Frs, et à la future épouse par ses parents une dot de 21.000 Frs.

 

Louis Etienne MAURICE était adjoint au maire de Chinon et décéda du tétanos le 13 Septembre 1866 à la suite d'un accident qui lui était survenu alors qu'il surveillait, en qualité d'adjoint, les travaux de construction de l'usine à gaz de Chinon. (Concession au cimetière de Chinon du 23 Octobre 1866). (Nous possédons son écharpe d'adjoint).

Sa femme décéda à Chinon le 13 Avril 1882 (concession du 28 Avril 1882).

 

Louis Etienne MAURICE était issu du mariage de Nicolas André MAURICE, né à Sainte-Catherine de Fierbois, demeurant à Sainte-Maure de Touraine, et de Sophie HUET.

Il avait un frère Jules MAURICE, huissier à Sainte-Maure, époux de Marie Louise BARANGER.

Par acte du 05 Août 1842, Madame veuve MAURICE-HUET avait fait donation partage à ses deux enfants. Le lot échu à Louis Etienne MAURICE comprenait uniquement des créances hypothécaires.

On ignore la date du décès de Madame MAURICE-HUET.

 

 

I - Descendance des époux MAURICE-FERME :

Du mariage des époux MAURICE-FERME étaient nés cinq enfants :

1°) Albertine Suzanne MAURICE épouse de Célestin Charles MEUNIER.

 

2°) Caroline MAURICE, religieuse au Ursulines à Tours (Soeur Marie Etienne), décédée vers 1882 à 42 ans.

 

3°) Ludovic MAURICE, négociant en fer à Chinon, né en 1845, décédé à Chinon en 1912, époux de Valentine ARCHAMBAULT qui eurent une fille, Antoinette décédée célibataire en 1920 à Chinon (née en 1876).

Ludovic MAURICE et Antoine dit Aimé ARCHAMBAULT-BRARD, son beau-père demeurant à Langeais, louaient le 19 Août 1883 deux pièces de terre aux Marais commune de Varennes, plantées en osiers.

Le 02 Mai 1894, Célestin Charles MEUNIER cautionnait une reconnaissance de dette souscrite par Ludovic MAURICE, son beau-frère, envers les liquidateurs et contrôleurs de la banque de Chinonet du Poitou pour une somme de 28.000 Frs après réduction de sa dette envers cette banque de 47.667,40 Frs, garantie hypothécairement sur une maison quai Jeanne d'Arc à Chinon appartenant à Ludovic MAURICE.

Cette dette dut être payée, au moins en partie par Célestin Charles MEUNIER (certificat de radiation à lui délivré le 20 Octobre 1899).

 

4°) Marie Stéphane MAURICE qui fut notaire à Lerné où il décéda le 13 Octobre 1913, époux de Marie Françoise DUMOUSTIER décédée à Lerné le 13 Juillet 1911 dans sa 60e année (inscription sur sa tombe au cimetière de Lerné).

Cette dernière était la fille de Ferdinant DUMOUSTIER, notaire à Lerné qui épousa entre 1849 et 1852, (voir transaction de Juin 1852 au dossier MESCHIN), sa cousine Marie Célina BRUNEAU. Il est décédé à Lerné le 31 Janvier 1873 dans sa 48e année (inscription de la tombe au cimetière de Lerné).

Marie Célina BRUNEAU (ou Marie Françoise d'après l'inscription de sa tombe à Lerné, décédée à Lerné dans sa 76e année le 26 Avril 1895), était la fille de Pierre Louis BRUNEAU, receveur des Contributions à Lerné, décédé le 07 Mai 1843, époux de Françoise Marie TEXIER-DUPARC.

Ce Pierre Louis BRUNEAU était le fils de Pierre Osvald BRUNEAU, notaire Royal à Lerné, décédé en Mars 1811, époux de Victoire De La PORTE, fille de Gabrielle Françoise DEMEZIL, décédée le 31 Juillet 1780 et de Eléonore René De La PORTE, décédé le 03 Avril 1770.

Le frère de Gabrielle Françoise DEMEZIL était Pierre Jean DEMEZIL, Grand Juge à Tours dont les descendants furent César DEMEZIL, médecin à Couture et Jean MARTIN-DEMEZIL.

Voir tableau généalogique de la famille DEMEZIL et tableau généalogique de la famille BRUNEAU, ce dernier établi par Lucie MAURICE.

Les époux MAURICE-DUMOUSTIER eurent deux enfants :

a) Ferdinand MAURICE, né le 13 Mai 1873, capitaine, décédé sans enfant le 30 Juin 1915.

b) Lucie MAURICE, née le 12 Mai 1875, décédée célibataire à Tours le 15 Janvier 1949 (tombe au cimetière de Lerné).

 

5°) Marie Stéphanie MAURICE, épouse de Paul HUARD, décédé à Paris le 15 Février 1907 (Monsieur HUARD était négociant à Saint Cyr-Saint Symphorien en 1876). Du mariage des époux HUARD-MAURICE naquirent deux enfants :

a) Thérèse HUARD née le 25 Mai 1871, décédée en 1946, qui épousa en premières noces Homer HINAULT, administrateur des Colonies et en secondes noces, après 1920, MOZER DE MATEI. Elle n'eut qu'un enfant : André HINAULT décédé à l'âge d'un an.

b) Alice HUARD née le 1878, décédée à Marseille le 24 Février 1949 qui épousa le Décembre 1917 Henri DURIF, banquier à Lyon, décédé en 1940. Elle eut deux enfants :

- Marie Thérèse DURIF, née en 1919, épouse ROSECHI, décédée sans enfant à Marseille.

- Paule DURIF, née en 1920, épouse BEYENS, qui eut un enfant.

 

 

II - Descendants des époux MAURICE-BARANGER :

Jules MAURICE, huissier à Sainte-Maure et Marie Louise BARANGER son épouse, eurent deux enfants :

1°) Louise MAURICE, née vers 1850, décédée célibataire à Tours en 1924.

2°) Jules MAURICE, juge au tribunal de Chinon qui épousa Mélanie GILLET, né le 02 Juillet 1866, décédé à Chinon le 10 Octobre 1897. Les époux MAURICE-GILLET eurent 2 enfants :

a) Paul MAURICE décédé célibataire.

b) Louise MAURICE, épouse d'Albert HERPIN, demeurant à Chinon.

Les époux HERPIN-MAURICE eurent 2 enfants :

- Hubert HERPIN décédé célibataire.

- Odette HERPIN décédé à Tours, épouse de Emile VRIGNONNEAU demeurant à Huismes (37). Ils eurent deux enfants : Yvonne et Ghislaine.

 

 

III - LA FAMILLE FERME-PARE

 

 

On a vu que Louis Etienne MAURICE avait épousé Caroline FERME, (dont nous avons le portrait peint en 1831. Il est indiqué au bas de ce portrait qu'elle avait alors 12 ans).

Elle était issue du mariage de Urbain Auguste FERME, négociant en mercerie et bonneterie, rue Haute Saint-Maurice à Chinon, décédé à Chinon le 19 Juin 1841 (concession au cimetière) et de Suzanne PARE décédée à Chinon le 14 Août 1852 (concession au cimetière).

 

Une tradition familiale veut que Suzanne PARE soit une descendante du célèbre chirurgien Ambroise PARE (1517-1590). Nous avons les portraits des père et mère de Suzanne PARE, qui vivaient au XVIIIe siècle. (Au dos du portrait de la femme se trouve cette inscription mystérieuse "A Monsieur, Monsieur ARNAULT, visiteur à l'Hautel des Fermes à Amiens").

 

De ce mariage était également issue Marie Laure FERME, épouse de Maurice DELEGARDE, notaire à Azay-le-Rideau, décédé à Chinon en 1864.

Les époux DELAGARDE-FERME eurent trois enfants :

1°) Albertine DELAGARDE, épouse BRETHOUSE, dont la descendance est inconnue.

2°) George DELAGARDE, décédé célibataire vers 1890

3°) Auguste DELAGARDE, qui fut notaire, après son père, à Azay-le-Rideau, il fut destitué et vécut en Algérie. Il décéda après 1885 laissant un fils.

 

Le 20 Mai 1885, étant clerc de notaire chez Me VIDAL à Soukahras (Algérie), il écrivait à son cousin par alliance, Charles MEUNIER, greffier à Chinon, une longue lettre demandant des nouvelles de sa famille qu'il a quittée en 1873 après sa destitution. Il avait appris en son temps la mort de sa tante Madame MAURICE-FERME. Mais il n'a pas reçu de faire part du décès de sa cousine Caroline.

Il se félicite d'apprendre que les HUARD ont su faire fortune en peu de temps et pense que Ludovic MAURICE exerce toujours son commerce de fers. Il a appris la retraite de Stéphane MAURICE, notaire à Lerné et souhaite à Charles MEUNIER de vendre son greffe pour prendre un repos bien mérité. Il est heureux d'apprendre que Suzanne, sa fille, est bien mariée.

Il demande des nouvelles d'un ami, Monsieur CESVET, qui pourrait l'aider à le faire nommer à nouveau notaire, car il ne désespère pas d'y parvenir ; il a fait faire une pétition dans ce sens par "tout Ain-Beida", y compris la "population indigène" que le député JOUBERT avait transmise au Ministre de la Justice ; il s'est même adressé au Président de la République WILSON, mais celui-ci lui a répondu qu'il fallait attendre un changement de ministère. Puis il ajoute :

"Pour ce qui est de mes malheurs conjugaux, je n'ai ni le temps ni le coeur de vous entretenir ; et comme j'ai l'estomac peut être encore plus mauvais que celui de ma pauvre mère, je craindrais de rendre la bonne bouillabaise que ma femme vient de me servir à déjeuner.

Deux mots donc seulement sur ce tristre sujet.

Le 2 Octobre 1880, Madame, de mon consentement, partait pour passer un mois à Alger dans sa famille. Elle n'était pas revenue au bout de trois mois. Et un beau jour, j'apprends par l'un de ses frères qu'elle s'était envolée avec le capitaine du Bureau Arabe d'Aïn-Beida même, qui nous avait annoncé à tous son absence momentanée, pour prendre un congé de six mois en France.

Vers le 15 Janvier 1881, une affaire importante m'appelle à Constantine, où, en descendant de voiture je me trouve nez à nez avec le capitaine qui se met vite à jouer des pieds. Arrivé à l'hotel, la maitresse, sans que je lui demande rien, me vite au courant de la situation. Je m'habille, vais au Parquet et donne l'ordre écrit au Procureur de faire arrêter la donzelle.

Mais la justice étant devenue top boiteuse, Madame eut le temps de prendre le train pour Philippe-Ville. Je fis alors jouer le télégraphe ; en descendant de voiture, elle fut arrêtée. Le lendemain elle était à Constantine entre deux gendarmes et conduite à la prison. Une lettre d'elle m'inspira de la pitié et au bout de trois jours je la fis relaxer. Je ne l'ai plus revue, mais je sais qu'elle vit toujours avec son capitaine qui commande actuellement le Bureau Arabe de Batna et qu'elle a fait deux ou trois enfants qui ont été déclarés son le nom du père seul.

Elle et son marlou ont tout mis eu oeuvre pour me nuire et leurs agissements ont le plus, pour ne pas dire tout à fait, contribué à ma révocation. Mais en voila assez, ça m'écoeure.

En me relisant je vois qu'il m'a échappé de vous dire que ma femme m'avait fait une bonne bouillabaise. Eh oui, je me suis remarié à la mode d'Afrique. Je ne puis me passer de femme, surtout au point de vue de la nourriture. J'ai l'estomac si délabré, qu'il a besoin d'être soigné d'une façon toute particulière. Et puis je suis bien tombé, bien mieux que la première fois. Ma petite femme a 23 ans. Elle est pleine de prévenances pour son vieux et entre nous deux règne un magnifique bébé de 16 mois qui fait toute ma joie. Je n'ai jamais vu d'enfant aimer autant son père. C'est toujours grande fête quand je rentre à la maison, mais quand il faut que je sorte, c'est un déluge de larmes.

......dites moi donc le nom de celui de mes créanciers qui a exercé mes droits pour arriver à la vente par licitation de nos immeubles.

Lundi, quand vous recevrez cette lettre je serais en mer depuis 2 heures du matin ; grande partie de pêche aux palangles en famille. Et quelle bouillabaise. Je dis bien "pêche en famille", car quoique marié irrégulièrement cela n'empêche pas ici qu'une femme qui se conduit bien soit reçue dans les ménages réguliers. Aussi vais-je partout avec la mienne et mon bébé".

"Jeudi 21 - Pas de chance ! En rentrant diner hier soir je trouve le docteur en train de remettre l'épaule gauche de mon bébé, venant de faire une forte chute. Adieu ma partie de pêche !".

 

Après le décès d'Urbain Auguste FERME, intervint un partage entre sa veuve et ses filles le 13 Octobre 1841.

Il fut attribué à Madame veuve FERME :

- 62.100 Frs à prendre sur la valeur de la maison de commerce exploitée à Chinon, rue Haute, ce qui était une somme importante à l'époque.

- Diverses créances hypothécaires pour 37.455 Frs.

- Le mobilier.

- Une voiture à quatre roues, une carriole, un Tilbury, une charrette, un tombereau et un cheval.

- Du vin et de l'argenterie.

- Une maison à Chinon, rue Haute Saint-Maurice, dite la maison neuve (20.000) comprenant au rez-de-chaussée, deux salons et une chambre à coucher ; au premier étage, un salon de compagnie avec balcon sur la rue, chambre à coucher avec terrasse, différents cabinets de toilette et chambres de domestiques ; au second étage, deux chambres à coucher avec alcôves et cabinet de toilette ; grenier, cave voûtée, cellier, buanderie, cuisine, salle à manger ; hangar, écurie. Entrée avec porte cochère (près le tribunal).

- Clos à Sainte-Radegonde avec caves et pressoir à Chinon.

- Un pré Saint-Jacques à Chinon (84 ares).

- Le pré des Epinettes à Chinon (1 hectare 16 ares).

Il fut attribué à Madame MAURICE-FERME :

- Diverses créances hypothécaires pour 23.334 Frs.

- Du mobilier.

- Une maison rue Haute Saint-Maurice à Chinon (20.000) et cul de sac Negron qui servait alors à l'exploitation du commerce de Monsieur et Madame MAURICE-FERME.

- La Closerie des Roches (1 hectare 3 ares 69 centiares).

 

Les époux FERME-PARE possédaient aussi une maison rue des Caves Peintes à Chinon (reconnaissance de tolérance d'ouverture d'une porte sur la cour de cette maison du 1er Février 1821).

Le 04 Février 1828, ils avaient acquis une portion de maison rue de l'Impasse à Chinon joignant une autre maison qui leur appartenait déjà, et le 20 Février 1828, une autre portion de maison appartenant au même vendeur, rue du Negrou à Chinon, joignant la maison appartenant déjà aux acquéreurs.

Le pré des Epinettes avait été acquis par les époux FERME-PARE le 08 Avril 1827, moyennant 6.350, en remploi par la femme d'un immeuble qui lui était propre situé commune de Souzé près de Saumur.

Le 15 Juillet 1838, les époux FERME-PARE se rendent adjudicataires d'une maison à Chinon rue Haute Saint-Maurice, joignant sans doute celles dont ils étaient déjà propriétaires et la reconstruisent entièrement.

En 1839 et 1840 intervient un procès avec un voisin de cette maison à propos d'un mur mitoyen.

Le 19 Septembre 1849, Madame veuve FERME-PARE loue le pré des Epinettes aux époux PLOUZEAU.

Le 24 Novembre 1842, elle verse à la paroisse de Chinon un capital de 420 Francs 88 centimes pour faire dire, à perpétuité 13 messes.

Le 18 Février 1851, elle fait une donation partage à ses deux filles.

Madame MAURICE-FERME reçoit :

La maison à Chinon rue Haute Saint-Maurice (maison neuve du partage du 13 Octobre 1841, entièrement reconstruite peu après son acquisition du 15 Juillet 1838) évaluée 20.000 Frs.

Quant à Madame DELAGARDE, elle recevait seulement une somme de 10.000 Frs, mais Madame MAURICE payait à sa mère une somme de 10.000 Frs.

En outre la donatrice stipulait une rente viagère à son profit de 500 Frs par an à la charge de chacune de ses filles.

Madame FERME-PARE décéda le 14 Août 1852 à Chinon.

Le 21 Octobre 1852, ses filles firent donation à la fabrique de l'église Saint-Etienne à Chinon, de la somme de 480 Francs pour faire dire à perpétuité 14 messes basses par an.

Le 14 Février 1853, ses filles procédèrent au partage de sa succession. Le lot échu à Madame MAURICE-FERME comprenait :

- Le pré des Epinettes, commune de Chinon.

- Le Clos Sainte-Radegonde, commune de Chinon.

- Diverses créances hypothécaires et mobilier pour 49.542 Frs.

Restaient dans l'indivision :

- Une maison à Chinon, rue Haute Saint-Maurice contiguë à la maison neuve.

- 22 ares de pré, commune de Rivarennes.

- Un petit Clos et quelques parcelles de terre, commune de Rigny acquis par Madame veuve FERME-PARE durant son veuvage.

 

Madame Caroline FERME, fille des époux FERME-PARE, avait perdu son mari, mort du tétanos, négociant à Chinon rue Haute, le 13 Septembre 1866.

Le 30 Décembre 1876, elle fit une donation partage à ses cinq enfants (voir plus haut famille MAURICE) au nombre desquels était Madame MEUNIER (Albertine Suzanne), grand-mère de Madame LEMAIGNEN.

Madame MEUNIER-MAURICE recevait en vertu de cet acte :

- La maison de Chinon, rue Haute Saint-Maurice occupée en partie par les époux MEUNIER-MAURICE.

- Le pré des Epinettes a elle constitué en dot.

Madame Caroline FERME veuve de Louis Etienne MAURICE, décéda à Chinon le 13 Avril 1882.

 

 

 

Résumé sur la famille MEUNIER

 

La famille MEUNIER était originaire de Loudun ou des environs au XVIIIe siècle.

 

Michel Célestin MEUNIER né le 20 Août 1802, à Poitiers, s'établit pharmacien à Loudun et épousa Marie Hélène CARBONNIER dont la famille était originaire de l'Eure, puis s'installa à Loudun. Cette famille avait également des attaches en Mayenne et à Angers.

Michel Célestin MEUNIER eut 5 frère et soeurs dont sont issues les familles DELAGE et VERRIET de LITARDIERE.

De son premier mariage avec Marie Hélène CARBONNIER, il eut un fils Célestin Charles MEUNIER, greffier au Tribunal de Chinon qui épousa Albertine Suzanne MAURICE le 6 Septembre 1858.

 

La famille MAURICE était originaire de Sainte-Catherine de Fierbois.

Un des membres de cette famille, Nicolas André MAURICE demeurant à Sainte-Maure de Touraine eut notamment un fils Louis Etienne MAURICE qui épousa le 25 Novembre 1837, Caroline FERME, fille d'Urbain Auguste FERME et de Suzanne PARE.

Les époux MAURICE-FERME eurent 5 enfants dont Albertine Suzanne qui épousa Célestin Charles MEUNIER et Marie Stéphane MAURICE, notaire à Lerné époux de Marie DUMOUSTIER descendants des familles BRUNEAU et DEMEZIL.

 

Les époux MEUNIER-MAURICE eurent deux enfants :

- Gabriel Charles MEUNIER, bénédictin à Solemmes.

- Marie Suzanne MEUNIER qui épousa Eugène Joseph Marcellin MESCHIN, dont est issue leur fille unique, Madame LEMAIGNEN.

 

 

 

13 septembre 2013

Familles Bezard et Lemaignen à Périgny (41)

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Histoire des familles Bezard Lemaignen et Aubert
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